NATIONALITE : cas de dénaturalisation (mercredi, 17 août 2011)

Un lecteur a eu l’amabilité et la patience de commenter ou critiquer de nombreuses propositions de mon essai de programme présidentiel pour 2012. Comme chaque point mérite des développements et que le tout serait très long, je publie séparément ma réponse à chacun des objets, en rappelant la proposition en question et la position dudit lecteur.

17. Dénaturalisation des auteurs d’outrage à la France et au peuple français et expulsion des étrangers


Brath-z :

Le seul motif de déchéance de nationalité est la trahison, seule catégorie de contravention à la loi pouvant être sanctionnée doublement (par la perte de la nationalité et la sanction pénale elle-même). Tout autre acte délictueux ne doit recevoir d'autre sanction que celle prévue par la loi. C'est là l'une des plus ancienne tradition de notre droit, qui date de bien avant la systématisation du système législatif sous la Révolution. Si vous considérez que les « outrages à la France » (notion éminemment floue et dans laquelle n'importe qui peut mettre n'importe quoi) sont des trahisons, alors vous devriez vous contenter de le mentionner, au lieu de proposer une mesure assimilable à la sanction multiple d'un acte délictueux. Pour ma part, je ne considère pas les « outrages » comme des trahisons mais comme de simples délits, entraînant une sanction juste et adaptée (amende, éventuellement plus en cas de récidive), et d'abord afin d'éviter que l'on puisse interdire toute critique de la politique gouvernementale sous prétexte « d'outrage à la France » ou autre dérive douteuse. Et pour un patriote revendiqué, vous me semblez attacher assez peu d'importance à l'honneur d'être citoyen de la République française, puisque vous considérez la perte de cette éminente condition comme un « avertissement ». Et bien non, quand bien même un individu ne considérerait pas le fait d'être citoyen de la République française comme un honneur et une gloire, le rôle du législateur comme du magistrat n'est pas de s'adapter à ses vues et lubies mais d'agir en fonction de ce que les principes commandent. Ainsi, la déchéance de nationalité, loin d'être un « avertissement » est au contraire une sanction, et même une sanction particulièrement dure.

Réponse :

Vous comprenez bien que, dans cet essai de programme, je n’ai pas pu développer tous les points que j’aborde. Il va de soi que les actes que j’appelle « outrages à la France et au peuple français » ne concerne pas les critiques du gouvernement ou du système mais bien les actes et les paroles qui rendent leur auteur indigne de demeurer Français voire de demeurer en France. On peut débattre des formes que prennent ces outrages, mais il me semble que le principe, lui, est irrécusable. Je ne considère pas, comme M. Attali, que la France est une auberge espagnole.

Vous dites que la dénaturalisation est « assimilable à la sanction multiple d'un acte délictueux ». Cela n’a pas de sens, puisque je précise, d’une part, que des Français autochtones coupables de tels actes sont simplement dénaturalisés : ils ne sont plus citoyens français mais seulement citoyens de France, d’autre part, que des citoyens de France (autochtones ou immigrés) ne peuvent être que bannis. La sanction n’est pas double. Elle constitue bien un avertissement pour les citoyens français qui, devenus simples citoyens de France, n’ont plus droit à « l’erreur ». J’écris d’ailleurs, dans le point 31, « Les insultes envers la France et le peuple français, passibles de dénaturalisation et de bannissement, ne méritent pas d’autre sanction, mais les coupables n’ont pas leur place en France et constituent même un danger potentiel ». Le terme « sanction » est du reste exagéré ! En quoi est-ce une sanction pour celui qui ne se considère pas comme français de ne plus l’être ?

Vous ne considérez « pas les « outrages » comme des trahisons mais comme de simples délits, entraînant une sanction juste et adaptée ». Vous avez raison sur le principe mais vous en tirez d’étranges conclusions. Pour moi, qui insulte la nation, qui s’en sépare, est indigne d’en faire partie et doit être déchu de la nationalité voire chassé du territoire. Pour vous, cela mérite une amende voire plus en cas de récidive (quoi ? une peine de prison ?), autrement dit une sanction économique sans rapport avec la nature politique de l’acte. En outre, vous oubliez qu’être Français confère des droits politiques. Mais comment et en faveur de qui les exercera un individu qui crache sur la France ? Conserver de tels droits à un tel individu est de la bêtise et, si ces individus sont des milliers, des millions, c’est de la folie, c’est constituer une cinquième colonne. Si de tels actes ne méritent pas la dénaturalisation voire le bannissement, quels actes les méritent selon vous ? Vous dites « la trahison ». Mais en quoi consiste une trahison envers la nation ?

Enfin, vous dites : « quand bien même un individu ne considérerait pas le fait d'être citoyen de la République française comme un honneur et une gloire, le rôle du législateur comme du magistrat n'est pas de s'adapter à ses vues et lubies mais d'agir en fonction de ce que les principes commandent. » Une fois de plus, vous oubliez que je distingue la citoyenneté de la nationalité. La déchéance de la nationalité n’entraîne pas la suppression de la citoyenneté. Dans ces conditions, cette sanction n’est pas « particulièrement dure », elle est au contraire particulièrement douce quoique hautement symbolique. Quant aux citoyens de France (Français déchus, autochtones ou immigrés non-naturalisés), ils ne sont pas français, ils sont seulement citoyens et leurs outrages envers la nation (la cité au sens strict) révèlent qu’ils sont des ennemis et qu’ils n’ont pas leur place dans la cité France. Le rôle du législateur et du magistrat n’est pas de faire partager la gloire et l’honneur de la France à des individus qui n’en ont cure. Votre « principe » reviendrait à accorder un salaire à un individu qui ne veut pas travailler. Des droits sans devoirs. J’ai bien peur que la plupart des lois actuelles soient fondées sur de pareils sophismes. Comme disait de Gaulle : il n’y a pas de politique qui vaille en dehors des réalités. Il n’y a aucune raison que ceux qui ne veulent pas être français le soient malgré eux ni que ceux qui insultent la France le demeurent. Que chaque chose soit à sa place. Qu’un chat soit appelé un chat. Permettre à des Français d’insulter la nation impunément, c’est insulter doublement les Français dignes de l’être, c’est le meilleur moyen de dissoudre la France, c’est s’inscrire dans le processus en cours.

06:31 Écrit par Philippe Landeux | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook | |  Imprimer |