ES-TU AUSSI CON QUE POUTOU ? (LE TEST) (mardi, 25 avril 2017)

Un rêve vient de me tirer de mon lit.

J’étais assis par terre. J’allais expliquer quelque chose à Mélenchon. Celui-ci me dit. « Attends, je t’envoie Poutou. » Et Poutou arrive et s’assied en face de moi.

Dans quelques années, lui dis-je, nous n’utiliserons plus que des cartes de crédit. C’est l’évolution inéluctable et irréversible des choses. Hé bien ! la technologie des cartes peut servir à autre chose qu’à manipuler des crédits. Elle peut servir à attester la citoyenneté, c’est-à-dire le fait d’avoir participé à la vie de la cité selon ce qu’elle considère comme une participation, laquelle citoyenneté serait LA condition pour accéder librement au marché dans la mesure du possible et des lois. Aujourd’hui, LA condition pour avoir le droit d’accéder au marché et jouir en même temps de tous les droits qui passent par celui-là, c’est-à-dire presque tous, dont les plus vitaux, est de disposer de monnaie, gagnée on ne sait comment. Et on n’y accède d’ailleurs qu’en proportion des unités dont on dispose à l’instant « T ». Nous n’avons pas le même droit par rapport aux autres et nous ne sommes même pas constamment égaux à nous-mêmes. Les propriétés de la monnaie génèrent à elles seules l’inégalité. Mais si le droit d’accéder au marché, qui plus est librement, était conféré par la citoyenneté, elle-même attestée par une carte à puce, si ce droit était le pendant logique d’avoir participé à la vie de la cité, si ce droit était indéfini ou illimité, puisque la citoyenneté ne se mesure pas (On est citoyen ou on ne l’est pas), alors ce droit ne serait plus incarné et conféré par de la monnaie : il n’y aurait pas de monnaie, pas de prix, pas de salaires (au sens monétaire du terme), pas d’impôts, pas de taxes, en un mot plus de valeur marchande (Largent), plus de capitalisme, plus de moyen d’exploitation et d’oppression, plus de riches, plus de pauvres. Égaux dans le droit d’accéder au marché, et tenus de participer à la vie de la cité pour jouir de ce droit, les citoyens seraient égaux en devoirs et en droits.

Poutou : Mais.. Mais….

Je continue. Faire de la citoyenneté, dûment attestée, LA condition pour accéder librement au marché, de la même manière, d’un point de vue technique, dont on le fait aujourd’hui avec les cartes de crédit, n’a non seulement rien d’impossible — puisque cette technologie a déjà bien d’autres applications —, mais est à la fois la proposition la plus réaliste au vu de l’évolution des choses et la seule cohérente d’un point de vue social.

L’usage bientôt exclusif de cartes de crédit fera atteindre à la monnaie le terme de son évolution : elle n’existera plus que de manière virtuelle, dans nos têtes. Son existence ne tiendra plus qu’à notre croyance en la nécessité de la notion de valeur marchande pour échanger (Largent). Elle aura disparue du réel et ne survivra que par nos préjugés. Mais cet état de choses ne pourra durer longtemps. Seules les cartes ou du moins leur technologie sont appelées à rester. La monnaie virtuelle, elle, et donc le concept même de monnaie, est appelée à disparaître. Mais pour qu’elle disparaisse vraiment, il faut que ce par quoi elle survit encore serve une autre cause que la sienne. Mais quelle cause, sinon celle des Principes de l’ordre social et de l’Égalité ? La monnaie confère un pouvoir d’achat limité et inégal. Tout système qui perpétuerait des limites artificielles et inégales ne serait, en fait, qu’une déclinaison du système monétaire et n’aurait rien de révolutionnaire. Rompre avec la monnaie, c’est évidemment rompre avec la logique monétaire, avec l’individualisme et l’inégalité ; c’est renouer avec le civisme, le patriotisme, et l’Égalité bien comprise.

Poutou : Mais… Mais…

Moi : Il n’y a pas de mémé ! L’Égalité n’est pas universelle ! Il n’y a pas d’autre Égalité que l’égalité en droits, et il n’y a pas de droits sans devoirs. Or c’est dans le cadre d’une société, d’une nation, que les individus, les citoyens, ont des devoirs et des droits. Les droits ne tombent pas du ciel ! Il faut que quelqu’un les génère, et seuls ceux qui contribuent à les générer méritent d’en jouir. L’Égalité universelle, donc sans devoirs, sans cité, sans nation, comme l’Égalité formelle, sur le papier, c’est-à-dire sans que les droits, dont celui d’accéder au marché, ne soient attachés à la citoyenneté, sont des sophismes et débouchent sur une oppression des citoyens dans l’un et l’autre cas. Mieux ! ces deux conceptions sont typiquement capitalistes. L’Égalité universelle et sans-frontiériste n’est qu’une extension de l’individualisme inhérent à Largent et va d’ailleurs dans le même sens que le capitalo-mondialisme. L’Égalité formelle, elle, proclame le Principe sans l’appliquer au seul champ qui compte, c’est-à-dire en acceptant toutes les égalités sauf sur le plan du pouvoir d’achat ; elle ne conteste pas le système monétaire ; elle accepte la logique de la monnaie malgré ses évidentes contradictions avec la logique sociale ; elle fait Largent roi et s’empresse de se soumettre à lui.

Bref, « l’Égalité » est un mot usé, galvaudé, dénaturé tant par ceux qui l’ont invoqué sans savoir comment sortir du système monétaire que par ceux qui cherchent précisément à le perpétuer, et avec lui l’inégalité, mais n’en est pas moins le Principe fondamental de l’ordre social, le Principe à défendre : il s’agit donc moins de renoncer au mot que de lui redonner tout son sens. Mais pour que l’Égalité ait un nouveau sens, pour qu’elle renoue, plus exactement, avec son sens originel, encore faut-il qu’il soit possible de le lui donner concrètement. Et c’est le cas aujourd’hui. La technologie moderne est en train de tuer, sans le savoir, la monnaie et le système monétaire, et permet, en même temps, d’appliquer de manière inédite le Principe d’Égalité, en offrant un moyen simple et efficace d’attester la citoyenneté.

Le capitalisme s’axe autour de Largent (croyance que la notion de valeur marchande est nécessaire pour échanger), de la monnaie et d’un mode d’échange ; la Révolution s’axera, elle aussi, autour d’un nouveau moyen d’échange (ou moyen d’accès au marché), véhiculant de nouveaux concepts, de nouveaux Principes. Ceci est à la fois dialectique et pratique. La dialectique pure qui n’entrevoit aucun moyen pratique est sans doute bien jolie mais inutile et fausse à la base ; elle projette sur l’avenir les impossibilités du passé qui n’ont pas permis de voir ce qui était depuis toujours en négatif sous les yeux.

Ainsi, je vous le dis, la prochaine révolution ne doit pas focaliser sur la propriété des moyens de production ; elle ne doit pas prôner le collectivisme, toujours désastreux ; elle ne doit pas compter sur un prétendu « génie du prolétariat » ; elle n’aura pas les immigrés pour fer de lance, au contraire ; et il n’y a pas besoin qu’elle arrive pour savoir en quoi elle consistera. Car je vous l’annonce dès aujourd’hui : elle aura pour but d’instaurer la « carte civique » et ainsi d’anéantir Largent (donc l’idée de valeur marchande, la monnaie, le capitalisme et toutes leurs séquelles), au nom de l’Égalité (bien comprise) et de la Patrie.

Poutou : Heu ! … Heu ! … Fasciste !!! ! !



Je fais parfois de ces rêves ! Mais le vrai cauchemar, c’est d’avoir en face de soi des gens qui ne comprennent rien.

Philippe Landeux
25 avril 2017

10:56 Écrit par Philippe Landeux | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook | |  Imprimer |