L’IMPOSTURE DES LUMIERES (lundi, 20 août 2012)

D’après une
Conférence de Marion Sigaut
pour Egalité & Réconciliation

Aucun philosophe n’eut sur la grande Révolution française plus d’influence que Jean-Jacques Rousseau. Les grands révolutionnaires, les vrais révolutionnaires (les autres protagonistes n’étant que des contemporains de la Révolution), les Robespierre, les Saint-Just, les Marat, les jacobins pur jus, étaient tous rousseauistes, autrement dit déistes, humanistes au vrai sens du terme, démocrates et accessoirement républicains (1). C’est leur idéal qui nous apparaît comme l’idéal de la Révolution (2). La République française n’a-t-elle pas encore pour devise celle formulée par Robespierre pour orner les drapeaux de la garde nationale ?

Pourtant, ces hommes ont échoué. Les révolutionnaires ont échoué. Il n’y a pas eu de révolution, du moins les bouleversements qui ont eu lieu à cette époque, plus exactement au sortir de cette époque, ne portent pas la marque des révolutionnaires. La Révolution s’acheva par le triomphe des contre-révolutionnaires bourgeois, disciples des Encyclopédistes et des physiocrates ; elle n’instaura pas, au final, la souveraineté du peuple mais l’aristocratie des riches et la suprématie Largent.

Cette étape historique était sinon nécessaire du moins inévitable. Il n’en reste pas moins que le règne de Largent — dont nous assistons à l’apothéose, prélude de son agonie — est, sous bien des rapports, pire que l’Ancien Régime qui, malgré ses imperfections, était plus social qu’on ne croit. Mais cet « ordre nouveau » n’est pas, à proprement parler, le fruit de la Révolution puisque les vrais révolutionnaires ont lutté à mort contre ses partisans et qu’il est impossible, sauf mauvaise foi ou ignorance, de leur imputer l’ouvrage des contre-révolutionnaires. Il faut rendre à César ce qui est à César…

L’idée reçue la plus commune est que la Révolution a eu l’ambition d’apporter la justice, la Liberté, l’Egalité, la Fraternité, la démocratie, l’instruction, etc., qu’elle respirait l’humanisme et qu’elle fut initiée par les philosophes dits « des Lumières » (Diderot, rédacteur en chef de l’Encyclopédie, et Voltaire en tête). La Révolution a eu en effet cette ambition. Mais les révolutionnaires (les Jacobins) étaient rousseauistes. Or Rousseau fut la bête noire des Encyclopédistes ; il professait d’autres idées ; il avait une autre sensibilité ; il n’était pas de leur « secte ». Par voie de conséquence, les révolutionnaires (Robespierre en tête) n’étaient pas dans la lignée des Encyclopédistes (3), et la Révolution ne fut pas une émanation des Lumières qui n’inspirèrent jamais que les contre-révolutionnaires. Est-ce à dire que les révolutionnaires n’étaient pas humanistes ? Non ! C’est l’humanisme des Lumières qui est un mythe.

Marion Sigaut, historienne, auteur de « Mourir à l’ombre des Lumières », a donné, en juin dernier, une conférence édifiante sur le sujet (Les Lumières : un anti-humanisme). Elle rappelle tout d’abord que la notion d’humanisme n’est pas née au XVIIIe siècle avec les Lumières (1749-1770) mais au XVIe avec des prêtres, puis l’Eglise, et ce pour une raison simple : la découverte de l’Amérique (1492). C’est la découverte de ce continent, peuplé d’hommes jusqu’alors inconnus et maltraités par les colons, au grand dam de certains prêtres (Antonio de Montesinos, Bartolomé de Las Casas), qui donna à l’humanité une nouvelle dimension et déboucha sur l’humanisme qui consiste à considérer que tous les hommes, quelles que soient leur couleur et leur culture, sont des hommes. Dès 1517, l’Eglise proclama qu’ « aucun roi ni empereur ni même l’Eglise n’a le droit de faire la guerre aux païens ».

Détail essentiel pour la suite, c’est cette même année que naquit le protestantisme (Luther) dont une notion fondamentale est que Dieu donne la grâce à qui Il veut, que ceux qui l’ont sont sauvés quoi qu’ils fassent et que ceux qui ne l’ont pas ne peuvent rien faire pour l’obtenir ; il y a les élus et les autres. Lors du concile de Trente (1545-1563), l’Eglise adopta une position radicalement inverse : l’homme est libre (de choisir entre le bien et le mal, défini par l’Eglise) ; tous les hommes sont égaux devant la grâce ; il n’y a pas d’élection divine. C’est alors que se constitua l’ordre des jésuites, chargé de répandre l’humanisme et le savoir et qui, pour ce faire, fonda des écoles secondaires gratuites (sauf pour les riches) alors qu’existaient déjà partout des écoles primaires (500 à Paris au XVIIIe siècle). Toujours au XVIe  siècle, l’école de Salamanque, animée par des jésuites (Louis Molina, Juan de Mariana), théorisa qu’il n’y a qu’une seule Humanité, que l’Homme a droit au bonheur, au plaisir, que la souveraineté est dans le peuple qui la délègue au roi, lequel doit rendre compte de ses actions, que le peuple a droit à l’insurrection, que les pouvoirs civils ne doivent pas se mêler de religion, et vice versa. La démocratie et la laïcité avant l’heure !

Un autre courant vit le jour à cette époque : les jansénistes, c’est-à-dire des protestants non-schismatiques (toujours liés à Rome), ennemis jurés des jésuites dont ils viendront à bout après la mort de Louis XIV. Les Encyclopédistes et les Lumières en général furent leurs émules sur le plan politique. Tout ce petit monde, loin d’être humaniste, était au contraire élitiste (= pro-riches, inégalitaire), matérialiste (= athées fanatiques), utilitariste (= calculateurs et cyniques), rigoriste pour les autres (= anti-plaisir) et soi-disant progressistes (= escrocs suffisants). Que le vice prenne le masque de la vertu (l’humanisme), c’est l’astuce ordinaire. Mais comment a-t-on pu considérer comme humanistes des personnages dont toute l’histoire atteste qu’ils ont toujours été les ennemis du peuple et, a fortiori, ceux de l’humanité ? Qui a cautionné cette imposture ? Qui nous en a imposé de la sorte ?

Avant de répondre à ces questions, examinons quelques points. Marion Ségaut cite de nombreux textes sur divers sujets, des articles de Encyclopédie pour la plupart, que je restitue ici en substance quand ils sont trop longs ou que je donne in extenso en note.

Un des premiers points abordés est la question de la peine de mort. Badinter qui a plaidé pour son abolition en 1981 a lui-même cité Beccaria pour son livre « Des délits et des peines ». Or, dans cet ouvrage, ce dernier propose de remplacer la peine de mort, « ni utile ni nécessaire », par un « esclavage perpétuel », « sous les coups et dans une cage de fer » (4). Et Voltaire, fan de Beccaria, de commenter : « Il est évident que vingt voleurs vigoureux, condamnés à travailler aux ouvrages publics toute leur vie servent l’état par leur supplice et que leur mort ne fait de bien qu’au bourreau que l’on paye cher pour tuer des hommes en public. » Il n’est ici question ni d’humanité ni de principes, mais de profit et de sadisme.

Sur la question de la torture, à laquelle les Lumières étaient soi-disant opposées, Marion Sigaut rappelle qu’elle ne se pratiquait pas lors des interrogatoires (la nullité des réponses étant évidente), mais seulement après la condamnation comme avant-goût du supplice. Ceci n’empêcha pas Voltaire d’infester l’Europe de libelles pour protester contre une pratique qui n’avait pas cours, tout en acceptant l’idée de cruautés « pour les scélérats avérés qui auront assassiné un père de famille ou le père de la patrie » (5). Il validait en somme le supplice affreux, d’une description insoutenable, qu’avait enduré Damiens en 1757 pour avoir égratigné Louis XV. Aucun texte d’époque ne dénonça l’horreur de ce supplice — donc pas un mot des Lumières — pour lequel les magistrats (jansénistes) avaient même lancé un concours.

Sur la question de l’esclavage, il y a là encore un malentendu. Les Lumières n’ont jamais réclamé son abolition, mais seulement la fin de la traite des Nègres, car non-rentable, et le remplacement des esclaves par des pauvres. C’est dans cet esprit que Piarron de Chamousset — se réclamant lui-même des Lumières, cité comme référence par Diderot pour son article sur l’hôpital et loué par Voltaire comme attentif au bien public — proposa de peupler les colonies de mendiants (5) et d’enfants tirés des hôpitaux concentrationnaires (où ils ne servaient à rien), renforcés de nègres, négrillons et négrites, le tout contenu par quelques compagnies d'Invalides (qu'ils servent un peu aussi ceux-là !), et de revendre les nègres une fois la machine en route (7).

Toujours selon le même auteur, les enfants pauvres ou orphelins ne devaient recevoir aucune affection pour n’avoir aucun lien avec personne afin de faire d’eux des bêtes et de la chair à canon. Ils devaient être envoyés à la campagne, placés dans des familles type Thénardier, et exposés en priorité au tirage pour la milice (8). Les Lumières l’ont pensé ; Turgot l’a fait.

Il est bon de forcer le peuple à admirer les Lumières sans savoir pourquoi, car il est impossible de les admirer raisonnablement. Que voulaient-elles, en effet, pour les gueux que nous sommes et que, pour beaucoup, nous aurions été alors ? Les « philosophes » prenaient leurs semblables, à l’exception des riches, pour des débiles (9) et, contrairement aux jésuites, travaillaient pour qu’ils demeurent incultes. Dans son Essai d’éducation nationale, Louis-René de Caradeuc de La Chalotais estime que « Le bien de la société demande que les connaissances du peuple ne s’étendent pas plus loin que ses occupations ». Satisfecit de Voltaire : « Je vous remercie de proscrire l’étude chez les laboureurs ». Dans une lettre, ce dernier ajoute : « Je crois que nous ne nous entendons pas sur l’article du peuple que vous croyez digne d’être instruit » (10). Limpide !

Le peuple n’est bon qu’à travailler. Au nom des bonnes mœurs et du manque à gagner, Voltaire prône la suppression des fêtes de village (11). Pour les mêmes raisons et d’autres, l’Encyclopédie conseille de mettre les villageois au travail le dimanche après-midi (12). Il y a tant de routes à réparer ! Pour vous reposer, braves gens, vous casserez des cailloux !

Avec un pareil esprit, on ne s’étonnera pas que les Lumières aient réservé les droits politiques aux propriétaires (13), ce qui, au début de la Révolution (mais contre l’avis des vrais révolutionnaires), se traduisit par l’adoption du suffrage censitaire. Une fois de plus, Voltaire a exprimé magnifiquement tout le mépris des Lumières pour le peuple : « L’esprit d’une nation réside toujours dans le petit nombre qui fait travailler le grand, est nourri par lui et le gouverne ».

Marion Sigaut aborde d’autres points, mais évoque sans entrer dans un des plus importants : le libéralisme économique. On aura compris que les Lumières avaient Largent pour maître et cherchaient à tout y soumettre. En matière économique, elles ne connaissaient qu’une seule règle, celle du marché, la loi des riches. Leur devise : « Laissez faire, laissez passer ». La libre circulation et la sacralisation de la propriété n’étaient en réalité que liberté, pour quelques-uns, de spéculer, d’accaparer, d’affamer, d’exploiter et de prospérer sur la misère publique. Durant la Révolution, ces positions furent celles de la plupart des Constituants (juin 1789-septembre 1791), puis des Girondins (proscrits le 2 juin 1793). Alors que des émeutes de la faim éclataient, Roland, girondin, ministre de l’Intérieur, déclara : « La seule chose peut-être que l’Assemblée puisse se permettre sur les subsistances, c’est de proclamer qu’elle ne doit rien faire »… sauf tirer sur les affamés, bien sûr (19 novembre 1792). (C’est sa femme, Mme Roland, qui prononça sur l’échafaud la fameuse phrase : « Liberté, que de crimes on commet en ton nom » (8 novembre 1793). Elle était bien placée pour connaître l’abus fait de ce mot !) La position des révolutionnaires étaient tout autre. Dès le 21 novembre 1789, dans des circonstances similaires, Robespierre s’opposa à l’adoption de la loi martiale : « C’est comme si l’on vous disait “le peuple s’attroupe, parce que le peuple meurt de faim ; il faut l’égorger” ».

Pour finir, cette perle de Voltaire sur le mensonge : « Le mensonge n’est un vice que quand il fait mal. C’est une très grande vertu quand il fait du bien. Alors, soyez donc plus vertueux que jamais ; il faut mentir comme un diable, non pas timidement, non pas pour un temps, mais hardiment et toujours. Mentez mes amis, mentez, je vous le rendrai un jour. ». Voilà un conseil que toute la classe politique s’empresse manifestement de suivre et qui, pour cette raison, ne peut que haïr celui que l’on appelait l’Incorruptible !


On pourrait qualifier l’idéologie des Lumières « d’humanisme élitiste, matérialiste et utilitaire », mais ce serait un oxymore (association de mots contradictoires). Cette idéologie n’est en rien humaniste tel que le commun des mortels conçoit l’humanisme. Elle eut ses adeptes durant la Révolution, elle triompha au début et après la Révolution, mais elle ne fut pas celle des vrais révolutionnaires qui, eux, avaient le soutien du peuple et ne furent au pouvoir que durant un an (mi-1793-mi-1794), dans les conditions les plus dramatiques.

Bien qu’aucun article de la Constitution aristo-bourgeoise de 1791, érigée dans le pur esprit des Lumières, ne porte la marque de Robespierre, lequel les avait presque tous combattus, c’est lui, Robespierre, qui fut acclamé par les Parisiens à la fin de la session de l’Assemblée constituante (30 septembre 1791). Cette Assemblée avait fait semblant d’abolir les privilèges en les décrétant rachetables (nuit du 4 août), divisé les citoyens en deux classes (actifs et passifs), instauré le suffrage censitaire, exclu les pauvres de la garde soi-disant nationale, adopté la loi martiale, maintenu la peine de mort (Robespierre fut le premier à en réclamer en vain l’abolition), perpétué l’esclavage, dépossédé l’Eglise au profit des bourgeois, restauré un roi parjure, brisé les corporations, interdit les associations d’ouvriers, instauré ce que nous appelons aujourd’hui l’ultra-libéralisme ; bref, elle avait systématiquement favorisé riches et puissants.

Les Girondins qui dominèrent l’Assemblée suivante, dite Législative, poursuivirent cette politique. Il firent mieux encore ! Pour remplir les caisses publiques et les coffres privés, il lancèrent la France dans une croisade pour « la Liberté » ! Eux aussi trouvèrent face à eux Robespierre qui n’était plus député et qui, du temps où il l’était, avait proposé à la Constituante, le 15 mai 1790, que la France renonce à jamais aux guerres de conquête, ce qu’elle avait décrété une semaine plus tard, le 22 mai (titre VI de la Constitution de 1791). Comme l’avait prédit ce dernier, la guerre tourna mal (défenses en ruine, troupes mal équipées, armée désorganisée par l’émigration des officiers nobles ou commandée par des nobles suspects aux yeux des soldats) et la Révolution, ou plutôt l’espoir d’une révolution, ne fut sauvée que par le sursaut populaire du 10 août 1792. Mais les Girondins, défenseurs de la haute bourgeoisie et vantés par la presse provinciale (partisane ou désinformée), intégrèrent et dominèrent la nouvelle Assemblée, dite Convention. Ce n’est qu’après qu’ils aient été chassés manu militari (2 juin 1793) que la Révolution prit véritablement un tour populaire, démocratique et humaniste. Il est vrai que la situation dont les Montagnards (Jacobins) héritèrent ne permettait pas d’aller bien loin dans la réalisation (pays au bord de la ruine, guerre extérieure contre toute l’Europe, guerre civile dans la plupart des départements, lutte des factions).

Il n’en demeure pas moins que la Convention montagnarde professa des principes et tenta de mettre en œuvre une politique qui tranchaient, en faveur du peuple, avec tout ce qui avait été fait avant elle et avec tout ce que les divers gouvernements firent depuis. C’est elle qui abolit réellement les droits féodaux (17 juillet 1793), arma le peuple, assura le pain, gela le prix des produits de première nécessité, fit la guerre aux sangsues publiques, projeta l’institution de l’école gratuite et obligatoire, envisagea un système de sécurité sociale, aboli l’esclavage (4 février 1794), etc., sans parler du fait que c’est elle qui sauva la patrie que les Girondins avaient mise en danger. C’est la déclaration des droits de 1793, inspirée de celle de Robespierre (14), plus audacieuse, notamment sur la question de la propriété, qui respire l’humanisme. Quoique suspendue aussitôt en raison des circonstances, c’est la Constitution de 1793 (24 juin), pas celle de 1791, que le peuple fit sienne et réclama jusqu’au milieu du XIXe siècle. Ce ne sont pas les Girondins, mais les Jacobins qui, à défaut d’être imités, inspirèrent le peuple dans les grands moments de résistance nationale (1814, 1871, 1940).

La Révolution fit tant de bruit qu’aucun gouvernement — composé de prolétaires, comme chacun sait — n’a pu en effacer le souvenir. Aussi l’ont-ils étouffée, altérée, vidée de son sens. Qu’en reste-t-il ? Une date, 1789, la Déclaration des droits (1789), le 14 juillet, le 4 août, la devise Liberté, Egalité, Fraternité. Voilà devant quoi chacun est tenu de s’extasier ! Voilà les titres de gloire de la Révolution et les soi-disant racines de la République ! Faut-il rappeler que la République ne fut proclamée que le 22 septembre 1792 puisque la monarchie ne fut renversée que le 10 août de la même année ? Par quel étrange mystère la République oublie-t-elle les dates de ses événements fondateurs et célèbre-t-elle l’œuvre d’une assemblée aristo-bourgeoise ? Faut-il rappeler que le jour officiel de la fête nationale n’est pas le 14 juillet 1789 (prise de la Bastille, non en tant que prison, mais en tant que poudrière), mais le 14 juillet 1790, jour de la fête de la fédération des gardes nationales, corps constitué exclusivement de bourgeois, destiné à tenir les nobles en respect et surtout à réprimer le peuple. L’homme de la rue est dupe, mais cette date ne fut pas choisie au hasard ! Nous avons vu que la nuit du 4 août 1789 fut une supercherie (dénoncée par Marat dès le 7 août). Nous savons enfin que la devise de la République fut formulée par Robespierre, mais qui d’autre le sait ? (La « République » a également conservé la Marseillaise, chant sublime, composée un peu plus tard mais sans portée politique.) Au final, la « République » et ses « élites » autoproclamées réduisent la Révolution à 1789, à des événements insignifiants d’un point de vue révolutionnaire ou subtilement contre-révolutionnaires. Inversement, elles occultent la vraie Révolution (1793) quand elles n’insultent pas les vrais révolutionnaires.

Il n’y a pas de mystère ! Les « élites » d’aujourd’hui sont de la même tempe que celles d’hier ; elles ont la même tournure d’esprit, les mêmes intérêts, le même mépris pour le peuple. Non contentes de se flatter entre elles, il faut que le peuple soit subjugué par ceux qui le trahissent. Aussi s’arrogent-elles des qualificatifs imposants qui entraînent les naïfs à préjuger favorablement en leur faveur et empêtrent leurs détracteurs dans leurs mensonges. Quand un est éculé, elles passent à un autre. Les premières de la lignée se disaient « philosophes », leurs émules « honnêtes gens » ou « modérés », ainsi de suite jusqu’à nos jours où elles se disent « humanistes », « socialistes », « antiracistes », clique que les patriotes appellent les « droits-de-l’hommistes ». Elles ont aussi le front de se dire « de gauche » alors qu’elles se réclament des Lumières qui, comme le prouvèrent les Constituants et les Girondins, étaient et seraient encore « de droite ». Est-ce ignorance et maladresse de leur part ou un nouvel effet de leur perfidie ? Dans un cas comme dans l’autre, une chose est sûre : pendant qu’elles rebattent les oreilles du peuple avec les Lumières, elles ne lui donnent pas les révolutionnaires en exemple (15), elles n’élèvent pas son niveau de conscience politique, elles ne l’incitent pas à la révolte.

Mais la « gaucherie » (16) dont l’« humanisme » consiste essentiellement à promouvoir l’immigration tous azimuts, autrement dit à détruire les nations au nom des droits de l’Homme — comme si les citoyens qui les composent n’étaient pas eux aussi des hommes et n’avaient pas besoin de la protection que seule la nation peut leur apporter, comme si les hommes n’avaient pas chacun un peuple à aimer et à défendre —, est bel et bien dans la lignée des Lumières. Elle en a toute la rouerie ! Elle fait passer pour humaniste et progressiste un facteur de régression sociale aussi bien dans le pays d’accueil que dans les pays d’émigration ; elle prétend enrichissant un phénomène appauvrissant sur tous les plans ; elle présente comme une posture de gauche une politique historiquement et objectivement de droite, voulue par le patronat et les multinationales. Mieux ! dès qu’il apparaît qu’elle ne pourra convaincre avec des poncifs du niveau de « tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil », elle recourt à des  arguments empreints soi-disant de raison : « On a besoin d’immigrés pour payer nos retraites et faire le sale boulot ». Même en admettant la réalité de ces besoins et l’utilité de l’immigration, il y a loin entre l’humanisme et cette conception qui fait des immigrés des variables d’ajustement et implique une nouvelle forme de traite. On retrouve là l’utilitarisme et le cynisme caractéristiques des Lumières.

Du reste, cet argument est bidon en lui-même ! Comment les immigrés payeraient-ils les retraites des Français quand la plupart d’entre eux viennent au titre du regroupement familial et sont une charge pour la France ? Et pourquoi la France aurait-elle besoin d’immigrés pour faire les « sales » boulots si ces boulots étaient mieux payés ou si on remplaçait les bras par des machines ? En vérité, la fonction des immigrés est à la fois d’être exploités et de détruire la France de l’intérieur (comme c’est celle l’Europe de l’extérieur). Car la gaucherie est aussi individualiste et apatride que la droite mondialiste et capitaliste ! Elle n’invoque l’Homme que pour dissimuler à ses propres yeux la noirceur de son âme, vendre aux autres ses sinistres projets et trafiquer sans vergogne. Les hommes, elle s’en fout ! Les pauvres (français) qui sont les premiers à pâtir de l’immigration (emploi, salaire, logement, environnement social), elle s’en fout ! S’ils protestent, elle les fustige. Si la réalité contredit ses affirmations, elle la nie, elle la retourne ! Elle a sa conscience (et le pognon et les médias) pour elle et excommunie par la calomnie, au nom du bien décrété par elle, quiconque dit un mot de travers. De vrais philosophes !

Les piliers du jacobinisme étaient l’Egalité, la nation, le patriotisme, la souveraineté du peuple, la démocratie, la non-ingérence. Ce n’était là rien moins que les fondamentaux de gauche, de Robespierre jusqu’à Jean Jaurès. Si la Constituante avait fini par adopter le dernier (la non-ingérence), les Girondins, eux, s’assirent dessus. La République actuelle et les élites aussi bien de droite que soi-disant « de gauche » ont elles aussi adopté le principe de l’ingérence tous azimuts. Elles ont tellement fait pour la justice et la démocratie chez elles qu’elles s’autorisent à s’immiscer dans les affaires des autres peuples au nom de l’Humanité, de la civilisation, de la Liberté, de la Démocratie, etc. On leur donnerait le Bon Dieu sans confession ! Outre que cette politique est intrinsèquement de droite, que ce cynisme égale celui des Lumières, il est évident que celui qui intervient chez les autres (qui ne lui ont rien demandé) le fait parce qu’il est en position de force, parce qu’il est puissant et que, par conséquent, quels que soient les prétextes qu’il invoque, il agit dans ses seuls intérêts. Les prétextes, destinés à placer dans le camp du bien ceux qui y recourent et ceux qui les gobent, dépendent des époques, mais toujours ils désignent les Tartuffes et les crétins. Que peuvent d’ailleurs apporter aux autres peuples les traîtres à leur propre peuple ?

On pourrait continuer ainsi longtemps le parallèle entre les Lumières et la gaucherie qui s’en réclame. Rien de ce qu’elle propose ne répond aux critères de gauche et tout ce qu’elle fait s’avère être des cadeaux empoisonnés pour les hommes et les nations.  


Pour conclure, jouir tout de suite et le plus possible, sans entrave pour eux et à quelque prix que ce soit pour les autres, pour les pauvres en particulier, voilà quel était le ressort des Lumières ! Ils chahutaient les « grands », pour prendre leur place, mais méprisaient le peuple destiné, selon eux, à les servir. Ils dénonçaient à l’occasion de réels abus, mais proposaient, à leur avantage, des solutions pire encore. Ces hommes n’ont jamais mérité du peuple et de l’humanité ! Les droits du citoyen, le bien public, la souveraineté du peuple, la paix sociale, l’indépendance nationale, la justice, l’Egalité, la Liberté, la vertu, la patrie, la postérité… des mots dans leur bouche ! des foutaises dans leur esprit ! Les Lumières savaient écrire, mais suffit-il d’élever l’égoïsme, la mesquinerie, la fourberie, la cruauté et la trahison en doctrine pour être philosophe ? Leurs pareils leur décernent ce titre pour s’absoudre eux-mêmes ; les patriotes, les amis du peuple, les démocrates, les véritables humanistes le leur refusent et c’est contre eux qu’ils font la Révolution.

Philippe Landeux
17 août 2012

P.-S. : Le 13 août, est paru dans Riposte Laïque un article de Jean Pavée défendant Voltaire contre la charge bien-pensante lancée dans Le Point par Roger-Pol Droit. Tout tient dans la première phrase : « Que cache le réquisitoire contre Voltaire, si ce n’est la volonté de déconsidérer les Lumières, la République et la France ? » Que l’argumentaire de Roger-Pol Droit soit affligeant, et ses intentions, inavouables, est une chose ; mais que Voltaire mérite d’être défendu par des arguments tout aussi insignifiants en est une autre.

Voltaire et les Lumières n’ont jamais défendu le peuple. Leurs principes n’étaient ni démocratiques ni républicains. Leur chance fut de n’avoir pas vécu la Révolution qui, plus encore que leurs écrits, aurait révélé leur vrai visage. Ils auraient été des contre-révolutionnaires à la façon des Fayettistes ou des Girondins (tel Condorcet, ami de d’Alembert). Pourquoi les Français et la République devraient-ils se sentir concernés et déconsidérés quand leur prestige en prend un coup à mauvais escient et surtout quand la vérité perce enfin à leur sujet ? Au contraire ! Les fausses Lumières font de l’ombre aux vrais révolutionnaires. Démystifier les uns, c’est ressusciter les autres. La France, la République et la démocratie qui ne sont aujourd’hui que des fantômes ont tout à gagner à reconnaître les imposteurs et à redécouvrir les héros de la Révolution.

Entre un Voltaire qui déclare : « Ce monde-ci, il faut que j’en convienne, est composé de fripons, de fanatiques et d’imbéciles parmi lesquels il y a un petit troupeau séparé qu’on appelle la bonne compagnie. Ce petit troupeau est riche, bien élevé, instruit, poli, il est comme la fleur du genre humain » et un Robespierre qui soutient que « Toute institution qui ne suppose pas le peuple bon et le magistrat corruptible est vicieuse », lequel cautionne l’oligarchie ? lequel tend à la démocratie ? Dans toute cette affaire, le plus surprenant n’est pas que le système ait mis les Lumières sur un piédestal mais qu’un de ses thuriféraires renverse ses idoles. Quoique les nobles, en ébranlant le pouvoir royal, ont bien scié la branche sur laquelle ils étaient assis !

Une vraie république est nécessairement égalitaire et démocratique. Mais ce terme permet de mettre tout et n’importe quoi derrière. La République actuelle est, en réalité, monétaire (donc inégalitaire) et oligarchique, le vote populaire sans influence réelle ne servant qu’à légitimer l’oligarchie (riches et notables). Elle peut se réclamer des Lumières puisqu’elle en partage l’esprit. Mais si les Lumières débouchent sur la république oligarchique, ce n’est pas anti-républicain que de les rejeter comme le firent les révolutionnaires. Une république démocratique ne peut avoir les mêmes références que la république oligarchique. Mais comment passer de l’une à l’autre sans redécouvrir les principes de l’une, sans remettre en cause les dogmes de l’autre ?

Philippe Landeux

NOTES

(1) Le 17 mai 1792, alors que les Girondins — défenseurs de la haute bourgeoisie, républicains sous la monarchie et royalistes sous la République — poussaient à la guerre que désirait également la Cour et que Louis XVI déclara en effet, à l’Empereur d’Autriche, le 20 avril suivant, Robespierre qui s’était opposé de toutes ses forces à ce projet bien qu’il ne soit plus député, publia le premier numéro de son journal Le défenseur de la Constitution, dans lequel un article disait : « Est-ce dans les mots de république ou de monarchie que réside la solution du grand problème social ? Sont-ce les définitions inventées par les diplomates pour classer les diverses formes de gouvernement qui font le bonheur et le malheur des nations, ou la combinaison des lois et des institutions qui en constituent la véritable nature ? Toutes les constitutions politiques sont faites pour le peuple ; toutes celles où il est compté pour rien, ne sont que des attentats contre l’humanité ! Eh ! que m’importe que de prétendus patriotes me présentent la perspective prochaine d’ensanglanter la France, pour nous défaire de la royauté, si ce n’est pas la souveraineté nationale et l’égalité civile et politique qu’ils veulent établir sur ses débris ? Que m’importe qu’on s’élève contre les fautes de la cour, si loin de les réprimer, on ne cesse de les tolérer et de les encourager, pour en profiter ? Que m’importe que l’on reconnaisse, avec tout le monde, les vices de la constitution qui concernent l’étendue du pouvoir royal, si on anéantit le droit de pétition ; si on attente à la liberté individuelle, à celle même des opinions ; si on laisse déployer contre le peuple alarmé une barbarie qui contraste avec l’éternelle impunité des grands conspirateurs ;  si on ne cesse de poursuivre et de calomnier tous ceux qui, dans tous les tems, on défendu la cause de la nation contre les entreprises de la cour et de tous les partis ? » Deux mois plutôt, Robespierre avait déclaré aux Jacobins, qui avaient universellement applaudi : « Oui, messieurs, j’aime le caractère républicain ; je sais que c’est dans les républiques que se sont élevés toutes les grandes âmes, tous les sentiments nobles et généreux ; mais je crois qu’il nous convient dans ce moment de déclarer tout haut que nous sommes les amis de la constitution, jusqu’à ce que la volonté générale, éclairée par une plus mûre expérience, déclare qu’elle aspire à un bonheur plus grand. Je déclare moi, et je le fais au nom de la société qui ne se démentira pas, que je préfère l’individu que le hasard, la naissance, les circonstances nous ont donné pour roi, à tous les rois qu’on voudrait nous donner. »

Lisons encore cet autre article publié le 7 juin 1792, et l’on comprendra mieux pourquoi les ennemis du peuple se sont acharnés, depuis 200 ans, à ternir la mémoire de Robespierre, et pourquoi les communistes se fourvoient quand ils se revendiquent de lui : « Est-ce pour changer de joug qu’un grand peuple s’agite et brave tous les périls attachés à ces violentes secousses qui agitent les empires ? Quand il ébranle ou qu’il renverse le trône du despotisme, est-ce pour élever sur ses ruines la fortune et la puissance de quelques ambitieux ou d’une classe privilégiée ? Si les noms sont changés, et non les abus, si la forme du gouvernement est autre, mais non meilleure, si la servitude et l’oppression doivent être son éternel apanage, que lui importe un dictateur, un roi, un parlement, un sénat, des tribuns, des consuls ? […] Quiconque veut conserver des privilèges injustes, des distinctions incompatibles avec le bien général, quiconque veut attirer à lui une puissance nouvelle, aux dépens de la liberté publique, est également l’ennemi de la nation et de l’humanité. […] Depuis le boutiquier aisé jusqu’au superbe patricien, depuis l’avocat jusqu’à l’ancien duc et pair, presque tous semblent vouloir conserver le privilège de mépriser l’humanité sous le nom de peuple. Ils aiment mieux avoir des maîtres que de voir multiplier leurs égaux ; servir, pour opprimer en sous-ordre, leur paraît une plus belle destinée que la liberté partagée avec leurs concitoyens. Que leur importent et la dignité de l’homme, et la gloire de la patrie, et le bonheur des races futures ; que l’univers périsse, ou que le genre humain soit avili ou malheureux pendant la durée des siècles, pourvu qu’ils puissent être honorés sans vertus, illustres sans talents, et que chaque jour leurs richesses puissent croître avec leur corruption et avec la misère publique ! Qu’il [ le peuple ] juge entre nous et nos ennemis, qu’il juge entre l’humanité et ses oppresseurs. Tantôt ils feignent de croire que nous n’agitons que des questions abstraites, que de vains systèmes politiques ; comme si les premiers principes de la morale, et les plus chers intérêts des peuples n’étaient que des chimères absurdes et de frivoles sujets de dispute ; tantôt ils veulent persuader que la liberté est le bouleversement de la société entière ; ne les a-t-on pas vus, dès le commencement de cette révolution, chercher à effrayer tous les riches, par l’idée d’une loi agraire, absurde épouvantail, présenté à des hommes stupides par des hommes pervers ? Plus l’expérience a démenti cette extravagante imposture, plus ils se sont obstinés à la reproduire, comme si les défenseurs de la liberté étaient des insensés capables de concevoir un projet également dangereux, injuste et impraticable ; comme s’ils ignoraient que l’égalité des biens est essentiellement impossible dans la société civile ; qu’elle suppose nécessairement la communauté qui est encore plus visiblement chimérique parmi nous, comme s’il était un seul homme doué de quelque industrie dont l’intérêt personnel ne fût pas contrarié par ce projet extravagant. Nous voulons l’égalité des droits parce que sans elle, il n’est ni liberté, ni bonheur social. »

(2) Le but de la Révolution : « Quel est le but où nous tendons ? La jouissance paisible de la liberté et de l’égalité ; le règne de cette justice éternelle, dont les lois ont été gravées, non sur le marbre ou sur la pierre, mais dans les cœurs de tous les hommes, même dans celui de l’esclave qui les oublie, et du tyran qui les nie. Nous voulons substituer, dans notre pays, la morale à l’égoïsme, la probité à l’honneur, les principes aux usages, les devoirs aux bienséances, l’empire de la raison à la tyrannie de la mode, le mépris du vice au mépris du malheur, la fierté à l’insolence, la grandeur d’âme à la vanité, l’amour de la gloire à l’amour de l’argent, les bonnes gens à la bonne compagnie, le mérite à l’intrigue, le génie au bel esprit, la vérité à l’éclat, le charme du bonheur aux ennuis de la volupté, la grandeur de l’homme à la petitesse des grands, un peuple magnanime, puissant, heureux, à un peuple aimable, frivole et misérable, c’est-à-dire, toutes les vertus et tous les miracles de la République, à tous les vices et à tous les ridicules de la monarchie. Nous voulons, en un mot, remplir les vœux de la nature, accomplir les destins de l’humanité, tenir les promesses de la philosophie, absoudre la providence du long règne du crime et de la tyrannie. Que la France, jadis illustre parmi les pays esclaves, éclipsant la gloire de tous les peuples libres qui ont existé, devienne le modèle des nations, l’effroi des oppresseurs, la consolation des opprimés, l’ornement de l’univers, et qu’en scellant notre ouvrage de notre sang, nous puissions voir briller au moins l’aurore de la félicité universelle… Voilà notre ambition, voilà notre but. » Discours de Robespierre sur les principes de morale politique qui doivent guider la Convention dans l’administration intérieure de la République, prononcé à la Convention le 5 février 1794 (17 pluviôse an II).

(3) Le 5 décembre 1792, aux Jacobins, Robespierre demanda le retrait du buste d’Helvétius qui ornait la salle, arguant qu’il « eut augmenté la foule des intrigants beaux esprits qui désolent aujourd’hui la patrie ». Mais c’est le 7 mai 1794 (18 floréal an II), dans son rapport sur les idées religieuses et morales, au terme duquel fut adopté le calendrier des fêtes décadaires et reconnue l’existence de l’Etre suprême, décret qui établissait une laïcité à l’américaine, que Robespierre dénonça ouvertement les Encyclopédistes, les Lumières et leurs émules : « Dès longtemps les observateurs éclairés pouvaient apercevoir quelques symptômes de la Révolution actuelle. Tous les événements importants y tendaient ; les causes mêmes des particuliers susceptibles de quelque éclat s'attachaient à une intrigue politique. Les hommes de lettres renommés, en vertu de leur influence sur l'opinion, commençaient à en obtenir quelqu'une dans les affaires. Les plus ambitieux avaient formé dès lors une espèce de coalition qui augmentait leur importance ; ils semblaient s'être partagés en deux sectes, dont l'une défendait bêtement le clergé et le despotisme. La plus puissante et la plus illustre était celle qui fut connue sous le nom d'encyclopédistes. Elle renfermait quelques hommes estimables et un plus grand nombre de charlatans ambitieux. Plusieurs de ces chefs étaient devenus des personnages considérables dans l'Etat : quiconque ignorerait son influence et sa politique, n'aurait pas une idée complète de la préface de notre Révolution. Cette secte, en matière politique, resta toujours au-dessous des droits du peuple : en matière de morale, elle alla beaucoup au-delà de la destruction des préjugés religieux. Ses coryphées déclamaient quelquefois contre le despotisme, et ils étaient pensionnés par les despotes ; ils faisaient tantôt des livres contre la Cour, et tantôt des dédicaces aux rois, des discours pour les courtisans, et des madrigaux pour les courtisanes ; ils étaient fiers dans leurs écrits, et rampants dans les anti-chambres. Cette secte propagea avec beaucoup de zèle l'opinion du matérialisme qui prévalut parmi les grands et parmi les beaux esprits. On lui doit en grande partie cette espèce de philosophie pratique qui, réduisant l'égoïsme en système, regarde la société humaine comme une guerre de ruse, le succès comme la règle du juste et de l'injuste, la probité comme une affaire de goût ou de bienséance, le monde comme le patrimoine des fripons adroits. J'ai dit que ses coryphées étaient ambitieux ; les agitations qui annonçaient un grand changement dans l'ordre politique des choses, avaient pu étendre leurs vues. On a remarqué que plusieurs d'entre eux avaient des liaisons intimes avec la maison d'Orléans, et la constitution anglaise était, suivant eux, le chef-d'œuvre de la politique et le maximum du bonheur social.
Parmi ceux qui, au temps dont je parle, se signalèrent dans la carrière des lettres et de la philosophie, un homme, par l'élévation de son âme et par la grandeur de son caractère, se montra digne du ministère de précepteur du genre humain. Il attaqua la tyrannie avec franchise ; il parla avec enthousiasme de la divinité ; son éloquence mâle et probe peignit en traits de flamme les charmes de la vertu, elle défendit ses dogmes consolateurs que la raison donne pour appui au cœur humain. La pureté de sa doctrine, puisée dans la nature et dans la haine profonde du vice, autant que son mépris invincible pour les sophistes intrigants qui usurpaient le nom de philosophes, lui attira la haine et la persécution de ses rivaux et de ses faux amis. Ah ! s'il avait été témoin de cette révolution dont il fut le précurseur, et qui l'a porté au Panthéon, qui peut douter que son âme généreuse eût embrassé avec transport la cause de la justice et de l'égalité ! Mais qu'ont fait pour elle ses lâches adversaires ? Ils ont combattu la Révolution, dès le moment qu'ils ont craint qu'elle n'élevât le peuple au-dessus de toutes les vanités particulières ; les uns ont employé leur esprit à frelater les principes républicains et à corrompre l'opinion publique ; ils se sont prostitués aux factions, et surtout au parti d'Orléans ; les autres se sont renfermés dans une lâche neutralité. Les hommes de lettre en général se sont déshonorés dans cette Révolution ; et à la honte éternelle de l'esprit, la raison du peuple en a fait seule tous les frais. »

(4) Beccaria : « Si donc je démontre que dans l’état ordinaire de la société, la mort d’un citoyen n’est ni utile ni nécessaire, j’aurais gagné la cause de l’humanité. Ce n’est pas l’intensité de la peine qui fait le plus grand effet sur l’esprit humain, mais sa durée. La mort d’un scélérat sera par cette raison un frein moins puissant du crime que le long et durable exemple d’un homme privé de sa liberté et devenu un animal de service, pour réparer par les travaux de toute sa vie le dommage qu’il a fait à la société. L’intensité de la peine d’un esclavage perpétuel a tout ce qu’il faut pour détourner du crime l’esprit le plus déterminé aussi bien que la peine de mort. Beaucoup d’hommes envisagent la mort d’un œil ferme et tranquille, les uns par fanatisme, les autres par cette vanité qui nous accompagne au-delà du tombeau, mais le fanatisme et la vanité abandonnent le criminel dans les chaînes, sous les coups et dans une cage de fer, et le désespoir ne terminera pas ses maux mais les commence. » (Des délits et des peines, texte original, 1766)

(5) Voltaire et la torture : « Tous les hommes s’élèvent contre les tortures qu’on fait souffrir aux accusés dont on veut arracher l’aveu. La loi ne les a pas encore condamnés et on leur inflige, dans l’incertitude où l’on est de leur crime, un supplice beaucoup plus affreux que la mort qu’on leur donne quand on est certain qu’ils la méritent. “Quoi [Couard ?] ! J’ignore encore si tu es innocent. Il faudra que je te tourmente pour m’éclairer. Et si tu es innocent, je n’expierai point envers toi ces cent mille maux que je t’ai fait souffrir au lieu d’un seul que je te préparais.” Chacun frisonne à son idée. Réservez au moins cette cruauté pour les scélérats avérés qui auront assassiné un père de famille ou le père de la patrie. »

(6) Le mendiant selon l’Encyclopédie : « C’est un gueux ou vagabond de profession qui demande l’aumône par oisiveté et par fainéantise au lieu de gagner sa vie par le travail. Tel est l’effet de l’habitude d’une grande misère que l’état de mendiant et de vagabond attache les hommes qui ont la lâcheté de l’embrasser. C’est par cette raison que ce métier, école du vol, se multiplie et se perpétue de père en fils. Séparons les familles. Le châtiment devient d’autant plus nécessaire à leur égard que leur exemple est contagieux. Quant aux vagabonds de profession, on a des travaux utiles dans les colonies où on peut employer leurs bras à bon marché. »
(6) Piarron de Chamousset et les colonies : « Deux mille nègres, autant de négresses avec leurs négrillons et leurs négrites suffiraient pour les commencements de cette colonie qui serait d’abord composée de tout ce que les hôpitaux de ce royaume peuvent avoir d’enfants à leur charge et de quelques compagnies d’invalides pour contenir les nègres et les mendiants exportés. »

(8) Piarron de Chamousset et les enfants : « Sans parent, sans soutien que celui qu’un sage gouvernement leur procure, ils [les enfants] ne tiennent à rien, ils n’ont rien à perdre. La mort même pourrait-elle paraître redoutable à de pareils hommes que rien ne semble attacher à la vie et que l’on pourrait familiariser de bonne heure avec le danger en les destinant à devenir soldats ? Il ne doit pas être difficile de faire regarder la mort et les dangers avec indifférence à des gens que l’on élèvera dans ces sentiments et qui n’en seront pas distraits par une tendresse réciproque ou par une liaison de parenté. N’ayant point pour eux une tendresse aveugle telle que souvent ils ont pour leurs enfants, ces paysans ne leur inspireront pas le désir de se conserver que chaque homme n’a peut-être que trop et qui ne tend qu’à faire naître la peur quand la raison et les principes ne le règlent pas. »

(9) Le peuple et l’élite selon Voltaire : « Ce monde-ci, il faut que j’en convienne, est composé de fripons, de fanatiques et d’imbéciles parmi lesquels il y a un petit troupeau séparé qu’on appelle la bonne compagnie. Ce petit troupeau est riche, bien élevé, instruit, poli, il est comme la fleur du genre humain. C’est pour lui que les plaisirs honnêtes sont faits ; c’est pour lui que les plus grands hommes ont travaillé. » De son côté, l’article « Philosophe » de l’Encyclopédie portait : « La raison est à l’égard du philosophe ce que la grâce est au chrétien. La grâce détermine le chrétien à agir, et la raison détermine le philosophe. Les autres hommes sont emportés par leurs passions sans que les actions qu’ils font soient précédées de la réflexion. C sont des hommes qui marchent dans les ténèbres au lieu que le philosophe, dans ses passions mêmes, n’agit qu’après réflexion. Il marche la nuit mais il est précédé d’un flambeau. Le philosophe forme ses principes sur une infinité d’observation particulières, alors que le peuple adopte le principe sans penser aux observations qui l’ont produit ; il croit que la maxime existe pour ainsi dire par elle-même, mais le philosophe prend la maxime à sa source ; il en examine l’origine, il en connaît la propre valeur et n’en fait que l’usage qu’il convient. »

(10) Le peuple selon Voltaire : « Je crois que nous ne nous entendons pas sur l’article du peuple que vous croyez digne d’être instruit. J’entends par peuple la populace qui n’a que ses bras pour vivre. Je doute que cet ordre de citoyens ait jamais le temps ni la capacité de s’instruire. Ils mourraient de faim avant de devenir philosophes. Il me paraît essentiel qu’il y ait des gueux ignorants. Si vous aviez comme moi une terre et si vous aviez des charrues, vous seriez de mon avis. Ce n’est pas le manœuvre qu’il faut instruire, c’est le bon bourgeois, c’est l’habitant des villes. On doit prêcher la vertu au plus bas peuple. Quand la populace se mêle de raisonner, tout est perdu. »

(11) Voltaire et les fêtes de village : « Forcez les hommes au travail, vous les rendrez honnêtes gens. On sait assez que ce n’est pas à la campagne que se commettent les grands crimes, excepté, peut-être, quand il y a trop de fêtes qui forcent l’homme à l’oisiveté et le conduisent à la débauche. »
 
(12) Le dimanche selon l’Encyclopédie : « Si on accordait pour tous les dimanches la liberté de travail l’après-midi, ce serait une œuvre de charité bien favorable à tant de familles pauvres. A l’égard de ceux mêmes qui ne sont pas pauvres, ils n’iraient pas au cabaret dépenser, au grand préjudice de leur famille, une partie de ce qu’ils ont gagné dans la semaine ; ils ne s’enivreraient pas, ils ne se querelleraient pas ; ils éviteraient ainsi tous les maux que causent l’oisiveté et la cessation d’un travail innocent, utile pour eux et pour l’état. Ne peut-on pas proposer, dans le même esprit, d’employer quelques heures de ce saint jour pour procurer à tous les villages et hameaux certaines commodités qui leur manquent : un puit, une fontaine, un abreuvoir, une laverie, et surtout pour rendre les chemins beaucoup plus aisés qu’on ne les trouve d’ordinaire dans les campagnes éloignées. En effet, quoique les grandes routes soient en bon état presque partout dans le royaume, il reste encore plusieurs chemins de traverse où il y aurait beaucoup à refaire et dont la réparation serait toujours très utile au peuple. »

(13) Définition de Représentant, selon l’Encyclopédie : « Pour maintenir le concert qui doit toujours subsister entre le souverain et leur peuple, pour mettre les uns et les autres à couvert des attentats des mauvais citoyens, rien ne serait plus avantageux qu’une constitution qui permettrait à chaque ordre de citoyens de se faire représenter, de parler dans les assemblée qui ont le bien général pour objet. Ces assemblées, pour être utiles et justes, devraient être composées de ceux que leurs possessions rendent citoyens, que leur état et leurs lumières mettent à portée de connaître les intérêts de la nation et les besoins des peuples. En un mot, c’est la propriété qui fait le citoyen. Tout homme qui possède dans l’état est intéressé au bien de l’état, et quel que soit le rang que des convention particulières lui assignent, c’est toujours comme propriétaire, c’est en raison de ses propriétés, de ses possessions, qu’il doit parler ou qu’il acquiert le droit de se faire représenter. »

(14) Déclaration des droits, de Robespierre, adoptée par les Jacobins le 21 avril 1793 :
« Les représentants du peuple Français réunis en convention nationale, reconnaissant que les lois humaines qui ne découlent point des lois éternelles de la justice, ne sont que des attentats de l’ignorance et du despotisme contre l’humanité ; convaincus que l’oubli et le mépris des droits naturels de l’homme sont les seules causes des crimes et des malheurs du monde, ont résolu d’exposer, dans une déclaration solennelle, ces droits sacrés et inaliénables, afin que tous les citoyens, pouvant comparer sans cesse les actes du gouvernement avec le but de toute institution sociale, ne se laissent jamais opprimer et avilir par la tyrannie; afin que le peuple ait toujours devant les yeux les bases de sa liberté et de son bonheur, le magistrat la règle de ses devoirs, le législateur l’objet de sa mission. En conséquence, la convention nationale proclame, à la face de l’univers et sous les yeux du législateur immortel, la déclaration suivante des droits de l’homme et du citoyen.

» ARTICLE Premier — Le but de toute association politique est le maintien des droits naturels et imprescriptibles de l’homme, et le développement de toutes ses facultés.
» ART. 2 — Les principaux droits de l’homme sont ceux de pourvoir à la conservation de l’existence et la liberté.
» ART. 3 — Ces droits appartiennent également à tous les hommes, quelle que soit la différence de leurs forces physiques et morales. L’égalité des droits est établie par la nature ; la société, loin d’y porter atteinte, ne fait que la garantir contre l’abus de la force qui la rend illusoire.
» ART. 4 — La liberté est le pouvoir qui appartient à l’homme, d’exercer à son gré toutes ses facultés ; elle a la justice pour règle, les droits d’autrui pour bornes, la nature pour principe, et la loi pour sauvegarde.
» ART. 5 — Le droit de s’assembler paisiblement, le droit de manifester ses opinions, soit par la voie de la presse, soit de toute autre manière, sont des conséquences si nécessaires du principe de la liberté de l’homme, que la nécessité de les énoncer suppose ou la présence, ou le souvenir récent du despotisme.
» ART. 6 — La propriété est le droit qu’a chaque citoyen de jouir et de disposer à son gré de la portion de bien qui lui est garantie par la loi.
» ART. 7 — Le droit de propriété est borné comme tous les autres par l’obligation de respecter les droits d’autrui.
» ART. 8 — Il ne peut préjudicier ni à la sûreté, ni à la liberté, ni à l’existence, ni à la propriété de nos semblables.
» ART. 9 — Tout trafic qui viole ce principe est essentiellement illicite et immoral.
» ART. 10 — La société est obligée de pourvoir à la subsistance de tous ses membres, soit en leur procurant du travail, soit en assurant les moyens d’exister à ceux qui sont hors d’état de travailler.
» ART. 11 — Les secours indispensables à celui qui manque du nécessaire, sont une dette de celui qui possède le superflu. Il appartient à la loi de déterminer la manière dont cette dette doit être acquittée.
» ART. 12 — Les citoyens, dont les revenus n’excèdent point ce qui est nécessaire à leur subsistance, sont dispensés de contribuer aux dépenses publiques ; les autres doivent les supporter progressivement selon l’étendue de leur fortune. [Article supprimé, par crainte que cette disposition ne donne des arguments aux partisans du suffrage censitaire.]
» ART. 13 — La société doit favoriser de tout son pouvoir les progrès de la raison publique, et mettre l’instruction à la portée de tous les citoyens.
» ART. 14 — Le peuple est le souverain ; le gouvernement est son ouvrage et sa propriété ; les fonctionnaires publics sont ses commis. Le peuple peut, quand il lui plaît, changer son gouvernement et révoquer ses mandataires.
» ART. 15 — La loi est l’expression libre et solennelle de la volonté du peuple.
» ART. 16 — La loi doit être égale pour tous.
» ART. 17 — La loi ne peut défendre que ce qui est nuisible à la société ; elle ne peut ordonner que ce qui lui est utile.
» ART. 18 — Toute loi qui viole les droits imprescriptibles de l’homme, est essentiellement injuste et tyrannique ; elle n’est point une loi.
» ART. 19 — Dans tout état libre, la loi doit surtout défendre la liberté publique et individuelle contre l’autorité de ceux qui gouvernent. Toute institution qui ne suppose pas le peuple bon et le magistrat corruptible est vicieuse.
» ART. 20 — Aucune portion du peuple ne peut exercer la puissance du peuple entier ; mais le vœu qu’elle exprime doit être respecté comme le vœu d’une portion du peuple, qui doit concourir à former la volonté générale. Chaque section du souverain assemblé doit jouir du droit d’exprimer sa volonté avec une entière liberté ; elle est essentiellement indépendante de toutes les autorités constituées, et maîtresse de régler sa police et ses délibérations.
» ART. 21 — Tous les citoyens sont admissibles à toutes les fonctions publiques, sans aucune autre distinction que celle des vertus et des talents, sans aucun autre titre que la confiance du peuple.
» ART. 22 — Tous les citoyens ont un droit égal de concourir à la nomination des mandataires du peuple et à la formation de la loi.
» ART. 23 — Pour que ces droits ne soient point illusoires et l’égalité chimérique, la société doit salarier les fonctionnaires publics, et faire en sorte que les citoyens qui vivent de leur travail, puissent assister aux assemblées publiques où la loi les appelle, sans compromettre leur existence ni celle de leur famille.
» ART. 24 — Tout citoyen doit obéir religieusement aux magistrats et aux agents du gouvernement, lorsqu’ils sont les organes ou les exécuteurs de la loi.
» ART. 25 — Mais tout acte contre la liberté, contre la sûreté ou contre la propriété d’un homme, exercé par qui que ce soit, même au nom de la loi, hors des cas déterminés par elle et des formes qu’elle prescrit, est arbitraire et nul ; le respect même de la loi défend de s’y soumettre ; et si on veut l’exécuter par la violence, il est permis de le repousser par la force.
» ART. 26 — Le droit de présenter des pétitions aux dépositaires de l’autorité publique appartient à tout individu. Ceux à qui elles sont adressées, doivent statuer sur les points qui en font l’objet ; mais ils ne peuvent jamais ni en interdire, ni en restreindre, ni en condamner l’exercice.
» ART. 27 — La résistance à l’oppression est la conséquence des autres droits de l’homme et du citoyen.
» ART. 28 — Il y a oppression contre le corps social, lorsqu’un seul de ses membres est opprimé. Il y a oppression contre chaque membre du corps social, lorsque le corps social est opprimé.
» ART. 29 — Lorsque le gouvernement viole les droits du peuple, l’insurrection est pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs.
» ART. 30 — Quand la garantie sociale manque à un citoyen, il rentre dans le droit naturel de défendre lui-même tous ses droits.
» ART. 31 — Dans l’un et l’autre cas, assujettir à des formes légales la résistance à l’oppression, est le dernier raffinement de la tyrannie.
» ART. 32 — Les fonctions publiques ne peuvent être considérées comme des distinctions ni comme des récompenses, mais comme des devoirs publics.
» ART. 33 — Les délits des mandataires du peuple doivent être sévèrement et facilement punis. Nul n’a le droit de se prétendre plus inviolable que les autres citoyens.
» ART. 34 — Le peuple a le droit de connaître toutes les opérations de ses mandataires ; ils doivent lui rendre un compte fidèle de leur gestion, et subir son jugement avec respect.
» ART. 35 — Les hommes de tous les pays sont frères, et les différents peuples doivent s’entraider selon leur pouvoir comme les citoyens du même état.
» ART. 36 — Celui qui opprime une seule nation se déclare l’ennemi de toutes.
» ART. 37 — Ceux qui font la guerre à un peuple pour arrêter les progrès de la liberté et anéantir les droits de l’homme, doivent être poursuivis par tous, non comme des ennemis ordinaires, mais comme des assassins et comme des brigands rebelles.
» ART. 38 — Les rois, les aristocrates, les tyrans, quels qu’ils soient, sont des esclaves révoltés contre le souverain de la terre qui est le genre humain, et contre le législateur de l’univers qui est la nature. »
 
(15) Exemple des mots que nos « élites » se gardent bien de mettre sous les yeux du peuple : « Peuple, souviens-toi que si, dans la République, la justice ne règne pas avec un empire absolu, et si ce mot ne signifie pas l'amour de l'égalité et de la patrie, la liberté n'est qu'un vain nom. Peuple, toi que l'on craint, que l'on flatte et que l'on méprise ; toi, souverain reconnu qu'on traite toujours en esclave, souviens-toi que partout où la justice ne règne pas, ce sont les passions des magistrats, et que le peuple a changé de chaînes et non de destinées. Souviens-toi qu'il existe dans ton sein une ligue de fripons qui lutte contre la vertu publique, qui a plus d'influence que toi-même sur tes propres affaires, et que, loin de sacrifier cette poignée de fripons à ton bonheur, tes ennemis veulent te sacrifier à cette poignée de fripons, auteurs de tous nos maux, et seuls obstacles à la prospérité publique. Sache que tout homme qui s'élèvera pour défendre la cause et la morale publique sera accablé d'avanies et proscrit par les fripons ; sache que tout ami de la liberté sera toujours placé entre un devoir et une calomnie ; que ceux qui ne pourront être accusés d'avoir trahi seront accusés d'ambition ; que l'influence de la probité et des principes sera comparée à la force de la tyrannie et à la violence des factions ; que ta confiance et ton estime seront des titres de proscription pour tous tes amis ; que les cris du patriotisme opprimé seront appelés des cris de sédition, et que, n'osant t'attaquer toi-même en masse, on te proscrira en détail dans la personne de tous les bons citoyens, jusqu'à ce que les ambitieux aient organisé leur tyrannie. Tel est l'empire des tyrans armés contre nous : telle est l'influence de leur ligue avec tous les hommes corrompus, toujours portés à les servir. Ainsi donc, les scélérats nous imposent la loi de trahir le peuple, à peine d'être appelés dictateurs. Souscrirons-nous à cette loi ? Non : défendons le peuple, au risque d'en être estimés ; qu'ils courent à l'échafaud par la route du crime, et nous par celle de la vertu. » Robespierre, dernier discours, 26 juillet 1794 (8 thermidor an II).
 
(16) Le terme « gaucherie » désigne les partis qui se disent actuellement « de gauche » et qui tous, à l’instar du patronat,  sont immigrationnistes, anti-nation, anti-démocratiques, anti-populaires, anti-sociaux (sous le masque du sociétal et de l’ingérence humanitaire), donc de facto « de droite ». Si tous les dupes de la gaucherie sont des gauchistes en pensée ou en action, l’élite de ces partis, qui se revendique des Lumières, est depuis longtemps appelée « gauche caviar ».

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02:07 Écrit par Philippe Landeux | Lien permanent | Commentaires (26) |  Facebook | |  Imprimer |