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jeudi, 31 mars 2016

THÉORIES A-MONÉTAIRES : MOCICA & AUTRES FUMISTERIES

Avant propos

Ayant élaboré la théorie appelée « Le Civisme », qui explique pourquoi et comment anéantir Largent (c’est-à-dire la croyance, issue du troc, que la notion de valeur marchande est nécessaire pour échanger) au niveau national, dans les pays occidentalisés, j’ai été amené à m’intéresser aux projets ayant en apparence le même but, c’est-à-dire proposant des systèmes sans monnaie, projets dont j’ignorais au départ l’existence. Je rappelle que j’ai mis le doigt sur l’idée clé du Civisme (Un Citoyen a le droit d’accéder au marché de la Cité parce qu’il est Citoyen), à Paris, en décembre 1997, époque à laquelle Internet n’en était qu’à ses balbutiements… Je n’avais d’ailleurs même pas d’ordinateur… C’est pour écrire ma théorie (baptisée alors SDT, Société du Travail) que j’ai acheté mon premier portable en 1998. Je veux dire par-là que, si je me doutais bien que d’autres avaient remis en cause la monnaie, j’étais malgré tout complètement isolé et que j’ai conçu le Civisme sans aucun apport extérieur, sans subir aucune influence.

Ce n’est qu’en mai 2002 que j’ai entendu parler pour la première fois de la théorie de l’Économie distributive (datant des années 1930), qui prône le remplacement de la monnaie par des crédits attribués par l’État, et en octobre de la même année que quelqu’un me signala la théorie antimonétiste, dont l’ouvrage de référence, L’idéal de la prochaine société, prétentieuses et humbles solutions, avait été publié confidentiellement à Lyon, en mai 1997. Cette dernière théorie était la première, à ma connaissance, à remettre non seulement en cause l’existence de la monnaie mais encore à prôner, comme le Civisme, l’usage de cartes à puce pour accéder au marché. C’est cette similitude qui fait parfois dire à certains que le Civisme est inspiré par l’antimonétisme. Mais outre que cela est impossible pour des raisons pratiques, cela n’a aucun sens tant l’esprit de ces deux théories, sans même parler de leurs formes, est radicalement différent. Leurs noms mêmes révèlent des démarches opposées. « Antimonétisme » (nom ridicule s’il en est) est négatif ; il s’agit d’être contre la monnaie (pas besoin d’inventer un autre mot) ; on est moins dans la proposition intelligente que dans l’opposition systématique, dogmatique, sectaire et au final ridicule, exactement comme les « antifas » que les auteurs sont eux-mêmes, sans surprise. Alors que « Civisme » est en soi positif ; il s’agit d’être pour quelque chose, en l’occurrence pour l’Égalité, c’est-à-dire l’égalité des Citoyens en devoirs et en droits, d’où la renaissance du sens civique, autrement dit du patriotisme, l’abolition de la monnaie n’étant que la conséquence de la mise en place d’un mode d’échange fondé sur les Principes de l’ordre social retrouvés et clairement posés.

Le patriotisme — défendre son peuple et vouloir faire la Révolution dans son pays — est, en apparence, ce qui distingue le Civisme de toutes les autres théories, et ce que les autres — qui se voient faire la Révolution dans le monde avant d’avoir fait quoi que ce soit chez eux — lui reprochent en premier lieu comme un crime absolu. Mais cette question, finalement secondaire, n’est que le symptôme d’une divergence idéologique (et méthodologique) beaucoup plus profonde, qui fait du Civisme une théorie à part, effectivement incompatible avec toutes les autres qui, elles, ne diffèrent les unes des autres qu’à la marge.

Comment ai-je pu élaborer une théorie aussi unique que le Civisme — qui peut être aussi considérée comme celle du patriotisme intégral ? Je ne sais pas. Sans doute en raison de mon caractère particulier. Le fait est que je n’ai même plus besoin de connaître les autres théories pour savoir qu’elles sont toutes conçues dans le même esprit et proposent toutes, à quelques détails près, la même chose. Quelques mots suffisent à me le confirmer. Et la dernière que l’on m’a opposé comme une théorie bien supérieure au Civisme a pour nom « Mocica ». C’est ce qui m’a décidé à en faire la critique et, de fil en aiguille, à signaler, comparer et critiquer toutes les théories anti-monétaires que je connais (il doit en exister d’autres).

 

Introduction

Le projet Mocica n’est que la énième version du projet Zeitgeist ou Vénus et autres théories du même tonneau : antimonétisme, désargence, etc. Toutes ces théories, si on peut parler de théorie à propos d’idées aussi brouillonnes, incohérentes et angéliques, sont mondialistes, universalistes, sans-frontiéristes, droits-de-l’hommistes, etc. Elles prétextent le fait que l’argent soit universel pour exiger de le renverser au niveau mondial, alors que c’est parce que Largent nous inculque l’individualisme, sur lequel joue le capitalisme pour abattre les frontières, détruire les nations, constituer un marché mondial sans obstacle, c’est parce que le mondialisme, revers de l’individualisme, est déjà prôné par le capitalisme qu’elles l’ont intégré, qu’elles sont elles-mêmes mondialistes et débitent tous les poncifs capitalo-gauchistes. (« L'argent induit un moteur planétaire qui a précisément les effets opposés : l'individualisme… » Mocica, p. 3. Où comment prendre un effet pour la cause et vice versa !) Autrement dit, elles expriment, avec des arguments plus séduisants et surtout à coup de pathos, l’idéologie capitaliste. (On constate que leurs partisans sont aussi adeptes de toutes les mesures sociétalistes qui ne sont jamais que le capitalisme en suppositoire ; ils dénoncent d’un côté ce qu’ils valident systématiquement de l’autre pour peu que les choses leurs soient présentées dans un emballage convenable à leurs yeux. Ex : « Le statut de vie commune s’ouvrit aussitôt à d’autres compositions de nombre et de genre que le classique couple homme-femme. » Le porte-monnaie (désargence), p. 112) Elles ne renverseront jamais Largent car elles sont une de ses expressions. Voilà ce que l’on peut comprendre par la simple dialectique.

Mais y regarder de plus près ne fait que confirmer ce constat général. Pour commencer, il n’y a ni analyses ni véritable projet ; cette théorie — et celles du même genre — n’est qu’une suite d’observations, de remarques (parfois judicieuses), d’incantations, de protestations de bonnes intentions, d’appels à la vertu, de sophismes, de contradictions, d’inepties. Tout le projet Mocica se résume en une phrase : Abolition de la monnaie ou plutôt renoncement à l’usage de la monnaie dans le monde…. à un instant T, à l’unanimité des êtres humains. « Le Jour J, nous n'utiliserons plus aucun moyen de paiement : carte bleue, virement, prélèvement, monnaie, billets, chèque. » (Mocica, p. 7) (Dans la théorie antimonétiste, tout tient dans la phrase : « Qu’est-ce qu’une société antimonétiste ? C’est une société qui n’utilise pas de monnaie. » L’idéal de la prochaine société, p. 39) Voilà tout le “projet” Mocica et ceux du même genre. Le reste ne sert qu’à étoffer pour cacher la faiblesse conceptuelle de la chose, en imposer à ceux auxquels la niaiserie d’un tel projet échappe. Aucune analyse sérieuse de l’origine de la monnaie, de sa nature, de ses propriétés, de ses conséquences (certaines sont évoquées, mais pas les plus importantes) ; rien non plus de sérieux sur Largent, sur la notion de valeur marchande (en particulier sur sa nature antisociale), sur les propriétés d’un moyen d’échange ; rien non plus sur ce qu’est ou doit être une société, sur les Principes de l’ordre social, sur la Citoyenneté, les devoirs et les droits du Citoyen. La monnaie doit être abolie parce qu’elle est perçue vaguement, quoique à juste titre, comme quelque chose de négatif, pas comme une hérésie d’un point de vue social. Le but n’est pas d’asseoir la société sur ses Principes (qui n’ont pas été définis et qui ne sont pas même sentis) mais de permettre à leurs adeptes, qui prennent leurs désirs pour la réalité, de donner libre cours à leurs penchants : individualisme, universalisme, rejet de toute autorité, de toute contrainte, angélisme, naïveté, sensibilité, bonté et tolérance poussées jusqu’à la bêtise et au sectarisme. La possibilité d’abandonner la monnaie au niveau mondial ne se discute pas, ce n’est qu’une formalité ; et une fois la monnaie abandonnée, tout roulera comme sur des roulettes par l’opération du Saint-Esprit. Les bonnes intentions et les affirmations gratuites suppléent toute réflexion, et quiconque doute que les choses puissent être aussi simples et fait preuve d’un peu plus de rigueur, de réalisme et de pragmatisme en vue de renverser le système monétaire dans son pays et d’en empêcher toute résurrection est, malgré tout, un ignoble fasciste !

Une révolution mondiale

Pour que l’on ne croit pas que j’exagère, je vais citer quelques extraits :

« L'objectif est d'atteindre une majorité suffisante de citoyens à travers le monde et d'assurer par la même occasion tous nos fondamentaux avant de décider le même jour comme un seul homme de ne plus se servir du système monétaire sous toutes ses formes : billets, carte bleue, chéquier, monnaies, virement. […] Même si seule la zone Euro par exemple arrêtait du jour au lendemain d'utiliser sa monnaie, cela suffirait à faire basculer le système tout entier. Mais cette décision doit être plus globale, et représenter celui d'une majorité d'individus. Tous les membres [les humains] voteront ensemble pour décider quand passer à l'étape suivante. Nous pensons que 51% ne devraient pas suffire à adopter ce genre de décision et souhaiterions conclure cet accord pour un choix représentatif de 95% des membres. Chacun donnera donc son accord jusqu'à arriver au moins à cette proportion-là. Nous ne pouvons que le faire de cette manière-là, dans une simultanéité. Et nous devons préalablement nous regrouper. Aucun gouvernement ne prendra cette décision bien évidemment, et commencer par petites touches au niveau du globe en espérant une diffusion progressive sera trop lent ou ne marchera pas, le système monétaire ne le rendra pas viable. » (Mocica, p. 7) — Même tendance et exigence mondialistes dans la théorie antimonétiste : « Le monde, c’est vous multiplié par six milliards. Vous croyez qu’il est impossible d’unifier le monde ? Le réseau Internet, ainsi que tous les autres moyens de communication permettront l’ouverture d’esprit des humains. » (L’idéal de la prochaine société, p. 50) Projet Vénus et Désargence, même combat !

Il s’agit donc bien, pour Mocica, d’abandonner la monnaie au niveau mondial avec l’accord de 95 % des êtres humains, rien que ça ! Seul un débile peut ne pas voir la débilité d’un pareil projet ! L’abandon de la monnaie ne peut intervenir que dans les pays dont l’évolution a rendu son abolition possible techniquement et concevable intellectuellement. Ce n’est pas parce que la monnaie est partout un fléau que tous les hommes dans tous les pays sont prêts à y renoncer. Certains hommes dans certains pays y sont ou y seront fatalement plus disposés que d’autres. Mais non ! Mocica exige une consultation universelle et une majorité de 95 %. Jamais une telle consultation (organisée par qui ?) et une telle unanimité ne seront possibles. Pire ! Comme il serait injuste que 51 % imposent leur volonté aux 49 %, les 49 % et même 6 % seulement peuvent imposer la leur (celle qui est l’objet d’exécration) à l’immense majorité. Étrange conception de la justice, n’est-il pas ? Et s’il advenait qu’un peuple ait le courage et l’occasion d’abolir la monnaie en son sein, il devrait s’abstenir et attendre que les autres y soient prêts à leur tour ! Heureusement les choses ne fonctionnent pas, n’ont jamais fonctionné et ne fonctionneront jamais comme cela. Quand un peuple est prêt pour une révolution, il la fait sans attendre ni consulter les autres… Différer serait risquer de manquer l’occasion… Il n’a d’ailleurs pas le choix ! Il n’y a bien qu’un gauchiste pour croire que les peuples peuvent faire la révolution à volonté et que toute l’humanité vibre au diapason. En fait, exiger l’unanimité pour abolir la monnaie quelque part est une façon d’interdire aux peuples de faire cette révolution chez eux et pour eux, de détourner les hommes de lutter pour le bonheur de leur peuple sous prétexte qu’ils doivent penser d’abord à l’humanité tout entière ! Il n’y a pas plus contre-révolutionnaire comme idée ! Mais, comme je l’ai montré plus haut, un gauchiste est un capitaliste qui s’ignore ; il est révolutionnairement contre-révolutionnaire. Il ne fait aucun doute que, en cas de révolution authentiquement anticapitaliste, il serait le premier à combattre, du moins à s’opposer aux révolutionnaires, aux patriotes, au nom de l’antifascisme, se rangeant ainsi, comme par hasard, dans le camp du capitalisme.

Il est vrai, cependant, que ce type de révolution ne peut se faire à une échelle trop petite. Le Civisme explique que cette révolution consistera à doter les Citoyens de cartes à puce leur permettant d’attester leur citoyenneté (impliquant le devoir de participer à la vie de la Cité, selon ce qu’elle considère comme une participation) et, par suite, d’accéder librement au marché. Autrement dit, la révolution reposera sur l’électricité et l’informatique (fonctionnement des cartes) et exigera une capacité de production de masse, donc une industrie développée (pour répondre à la Demande très forte). Les petites communautés n’ont pas assez de potentiel et de ressources pour se doter par leurs propres moyens de ces infrastructures indispensables ; ce potentiel et ces ressources n’existent souvent qu’au niveau national (au mieux régional). C’est donc au niveau national que la révolution devient possible, étant par ailleurs impossible aux échelles moindres (faute de capacités) ou supérieures (faute de concert).

Le Civisme explique, également, comment une Cité, fonctionnant sans monnaie, pourra entretenir des échanges internationaux avec les pays restés monétaires, ôtant une fois de plus tout prétexte à l’idée absurde d’abolir la monnaie au niveau mondial. La Cité produira, exportera, vendra ses produits (ou les échangera ou les donnera à l’occasion) et constituera un budget national avec lequel elle payera ses importations. Rien de sorcier ! Et comme cette révolution interviendra dans un pays développé et puissant, à un moment où tous les pays seront confrontés à une crise financière insoluble, tous les pays qui pourront suivre son exemple le suivront. Mais Mocica affirme que « commencer par petites touches au niveau du globe en espérant une diffusion progressive sera trop lent ou ne marchera pas, le système monétaire ne le rendra pas viable ». « Au niveau du globe » Parler de peuples, de nations ou de pays leur écorcherait la bouche ! Passons ! « Une diffusion progressive sera trop lent » Trop lent par rapport à quoi ? Qu’un peuple parvienne à abolir la monnaie serait la plus grande révolution de toute l’histoire de l’humanité ! Cela ferait nécessairement des émules. Pas assez vite au goût de Mocica ! « ou ne marchera pas » Comptons sur Mocica et ses brillantes analyses pour indiquer ce qui marchera ou non !

Du mondialisme au localisme

L’Antimonétisme, qui est tout aussi mondialiste et qui ne comprend pas, lui non plus, que c’est l’évolution et la technologie moderne qui permettent d’envisager sérieusement l’abolition de la monnaie, tombe, lui, dans le piège de vouloir expérimenter son système à petite échelle, c’est-à-dire à une échelle incapable de générer par elle-même la technologie moderne nécessaire, à une échelle qui condamne comme elle avait condamné jusque-là à l’artisanat, au troc et au système monétaire, bref à une échelle à laquelle toute expérience anti-monétaire serait inévitablement un échec, échec qui ne prouverait pas en soi que l’antimonétisme ne peut pas fonctionner à grande échelle, mais simplement que ses théoriciens ont scié la branche sur laquelle ils sont assis et sont bien les crétins que je dis.

« Il faut déjà expérimenter le système antimonétiste, unir des gens volontaires, regrouper au sein d’une ville plus ou moins autosuffisante, et voir si l’antimonétisme est une connerie ou une solution durable. » (p. 50) « Ordre à suivre pour construire la civilisation antimonétiste : construire un village, le plus autosuffisant possible, le transformer progressivement en ville, et, logiquement, si tout fonctionne, la jalousie des membres de l’ancien monde leur fera abandonner leur système (comme l’a été le monde capitaliste pour les régimes communistes). » (p. 127)

Et quand je dis que ces théories, loin d’être l’aboutissement des évolutions en cours, donc de proposer la phase suivante de l’évolution, conduiraient à une régression, à un retour en arrière, à l’économie locale de petite échelle, à l’artisanat, au troc et à la monnaie, à un rejet et un sabordage de la technologie moderne, ceci est déjà implicitement contenu dans l’idée de ne rien imposer à personne (tout s’arrêterait instantanément, contrairement aux illusions, condamnant chacun au système D) et explicitement par l’Antimonétisme qui, par l’exemple des vêtements, tous « faits à la main », révèle le fond de sa pensée.

« Vêtement neufs, faits à la main (pas de chômage possible), non issus d’une chaîne (différents de ceux du voisin), puisque le mot d’ordre est « la qualité du travail ». Vêtements en nombre suffisant puisque le nombre n’est pas fonction du prix de vente. » (L’idéal de la prochaine société (antimonétisme), p. 47)

Ces théories, qui ne marchent même pas sur le papier, condamnent sinon en théorie du moins en pratique toute industrie, alors que, dans le même temps, elles imaginent des robots partout. Elles ne mesurent pas la complexité de la civilisation occidentale moderne, qui exige que chacun soit à sa place et fasse son travail (par plaisir ou par besoin financier), et ne comprennent pas ou ne veulent pas voir que, sans une contrainte sociale (à la place des contraintes monétaires) pour que chacun occupe son poste, plus rien ne tournerait. Ha ! elles remplacent les hommes par des machines autant qu’il est possible et nécessaire… (« Dans un monde antimonétiste, il n’y a plus que le travail intelligent, parce que le travail idiot ou nuisible à la santé est remplacé par le travail des machines… » p. 45) Facile à dire ! Qui fabriquerait ces machines si la chaîne de production était bloquée en mille endroits, comme il adviendrait fatalement ? Même ceux qui voudraient continuer à travailler n’en auraient plus les moyens… Ils n’auraient peut-être même plus les moyens de se rendre sur leur lieu de travail… Au fond, toutes ces théories pressentent cette situation mais préfèrent l’occulter et valoriser soudain la production locale et artisanale… c’est-à-dire l’exact opposé de ce qu’elles claironnent par ailleurs : mondialisme et moindre effort. Il est en effet bien connu que moissonner un champ à la faux, laver le linge à la main ou tricoter des pulls à longueur de journée est plus noble, moins fatiguant, aussi rapide et productif que recourir à des machines ! Vous ne pensez pas ? C’est pourtant ce que ces théories essayent de fourguer en douce ! Et tout, chez elles, est du même acabit. Enfin, tout cela pour dire que la Révolution ne pourra se faire ni au niveau mondial, ni à petite échelle, et devra tourner la technologie moderne contre Largent au lieu d’y renoncer, ce qui est du reste impossible (à moins d’un cataclysme), ce qui prouve en soi que ces théories ne vont pas dans le sens de l’Histoire et ne seront donc jamais appliquées, qu’elles ne bâtissent rien de plus que des châteaux vermoulus en Espagne. Il me faut d’ailleurs signaler clairement que c’est l’industrialisation et la production de masse qui permettent enfin d’envisager un accès libre au marché, donc la suppression de la monnaie… et qu’un retour à l’artisanat et à une production faible, en rendant l’accès libre aussi inutile qu’impraticable, condamneraient à rester ou à revenir au système monétaire. En somme, toutes ces théories qui apparaissent grâce à la technologie moderne — comme l’atteste leur multiplication depuis quelque temps — ne se rendent compte ni de ce qu’elles lui doivent ni qu’en détruisant (volontairement ou non) ses conditions elles anéantiraient leurs propres rêves.

Plus de monnaie, et c’est tout

Une autre erreur fondamentale de Mocica et de toutes les théories du même genre est de vouloir se contenter de renoncer à l’usage de la monnaie et, 1) d’ignorer que la monnaie n’est qu’une conséquence de ce que le Civisme appelle « Largent », 2) de croire que cela anéantirait le système monétaire ou l’empêcherait de renaître. Toutes ces théories, comme l’indique souvent leurs noms (antimonétiste, désargence), focalisent sur la monnaie qui est seulement le moyen d’échange qui découle de Largent. Bien sûr, elles déclarent qu’une fois la monnaie abolie, les hommes ne feront plus non plus de troc, qu’ils n’échangeront plus leur travail ou leurs produits mais les donneront, qu’ils travailleront pour rien, pour le plaisir ou par conscience. Cette conception des choses, d’une naïveté sidérante, est celle de gauchistes allergiques à toute notion de devoir et, plus important encore, confondant la monnaie avec la notion de valeur marchande, c’est-à-dire n’ayant pas identifié Largent comme un élément à part. Bien sûr, ils comprennent que l’échange monétaire et le troc reposent sur la notion de valeur, d’où leur volonté de proscrire l’un et l’autre, d’un coup de baguette magique. Mais ils ne voient que la monnaie que les hommes ont dans les mains, pas Largent qu’ils ont dans la tête. Ils croient qu’en supprimant le moyen d’échange qu’est la monnaie tout sera réglé, alors qu’ils n’auront pas extirpé la racine du mal et qu’ils auront même créé un vide qui poussera les hommes à revenir à la seule solution qu’ils conçoivent, c’est-à-dire à un mode d’échange fondé sur la notion de valeur marchande (troc ou monnaie). C’est là la différence fondamentale avec le Civisme qui prône l’institution de Cartes civiques — servant à attester la Citoyenneté de leur porteur (la Citoyenneté devant se mériter par l’accomplissement de devoirs) — qui remplaceront les cartes de crédit (dont elles seront l’évolution), et qui, du fait que les Citoyens les utiliseront (pour accéder librement au marché), inculqueront à ces derniers tous les Principes, concepts et valeurs qu’elles véhiculent, notamment une conception de l’échange qui éradiquera de facto celle qui découle de Largent. Le Civisme utilise contre Largent les propriétés du moyen d’échange, démontrées par la monnaie. Seul un moyen d’échange, autre que la monnaie, peut opérer la révolution anti-monétaire et égalitaire. Supprimer la monnaie et s’en remettre à la politique, à l’éducation, à la bonne volonté des hommes pour ne pas revenir à un mode d’échange fondé sur la notion de valeur marchande, alors qu’aucun autre modèle ne leur est fourni, est à la fois la marque de ceux qui n’ont pas trouvé de véritable solution au problème de la monnaie et en sont réduits aux incantations, et qui, en même temps, comptent sur leur idéologie pour résoudre un problème qui, justement, implique de sortir de tous les carcans idéologiques ; de ceux, donc, qui n’ont guère réfléchi et, pire, s’en dispensent.  

Pas de devoirs

La preuve, d’ailleurs, qu’il est impossible d’anéantir Largent sans remplacer la monnaie par un autre moyen d’échange, c’est que ceux qui proposent simplement de supprimer la monnaie sont toujours eux-mêmes sous l’influence de Largent. Certes, ils dénoncent la monnaie… mais la monnaie n’est que la partie visible de l’iceberg. Largent (la croyance que la notion de valeur marchande est nécessaire pour échanger) vient du troc, c’est-à-dire de l’échange d’objets entre individus, c’est-à-dire d’un mode d’échange fondamentalement individualiste, matérialistes et asocial (sans dimension sociale et au final antisocial). Or tous ceux qui proposent les théories en question sont, eux aussi, fondamentalement individualistes (mondialistes, sans-frontiéristes, immigrationnistes, anti-nations, anti-peuples) et asociaux, dans le sens où ils n’ont aucune analyse sérieuse de ce qu’est et doit être une Société digne de ce nom, d’où elle vient, quels sont les rapports entre Citoyens qui doivent en découler, quels sont leurs Devoirs, leurs Droits, etc. Pour eux, l’individu et l’humanité priment tout, même si cela n’a absolument aucun sens, aucune portée concrète, et ne sert même qu’à détruire, puisqu’on ne peut rien construire avec. Si l’individu a droit à tout sans devoir rien à personne (un devoir n’est pas le fait de faire quelque chose pour les autres, selon son bon plaisir, mais d’avoir l’obligation de faire pour eux une certaine chose), il n’y a pas de société et, au final, il n’y a pas non plus de droits, dans la mesure où il n’y a personne pour les reconnaître, les générer et les garantir. (« Le fondement d'une société d'avenir est l'ouverture aux autres, l'esprit de solidarité, de communauté, d'équité et d'unité. » Mocica, p. 3. Où comment s’affranchir des réalités à coup de baratin !) On ne s’étonnera pas, après cela, de ne pas trouver une seule fois le mot « Égalité » (Principe fondamental de l’ordre social) dans Mocica, pas plus que ceux de « devoirs » ou de « droits » (sauf dans une citation) ; et si on les y trouvait, ils sonneraient creux, comme dans cet unique usage du mot « devoir » :

« L'interdiction de faire ne serait valable que lorsqu'elle concerne la Liberté de l'Individu et la protection de sa Planète. L'obligation de faire ne serait jamais acceptable, sauf dans le cas d'un devoir fondamental : la protection de l'Individu et de sa Planète. » (Mocica, p. 12)

Vu que chacun fait ce qu’il veut et qu’il n’y a aucune autorité (en théorie), on se demande bien qui, de toute façon, pourrait faire respecter cette interdiction et cette obligation insipides. Cet exemple, parmi tant d’autres possibles, illustre bien à quel point Mocica (et les autres) focalise sur l’individu, lequel est dispensé de toute obligation et ne peut donc faire société avec les individus qui l’entourent. Si la société n’a pas de droit sur l’individu qui n’a lui-même aucun devoir envers elle, il n’y a pas de Société, il n’y a pas de Citoyen, il n’y a pas de Citoyens égaux en devoirs et en droits, il n’y a pas d’Égalité, il n’y a pas de production… il n’y a rien à consommer, échanger, partager ou distribuer. A titre de comparaison, voici les articles 3, 4a et 4b du Contrat social de la Cité proposé par le Civisme :

« Art. 3 — La Cité ne peut admettre en son sein que des individus qui, sans en faire encore partie, ne lui manquent pas de respect et respectent déjà les Droits qu’elle reconnaît aux hommes en général et à ses Citoyens en particulier. Tout individu, pour devenir Citoyen, et tout Citoyen, pour le demeurer, a en outre les Devoirs de se soumettre aux lois de la Cité, de participer à la vie de la Cité, selon ce qu’elle considère comme une participation, d’être solidaire de ses Concitoyens et de défendre la Cité. 

« Art. 4a — Tous les Citoyens remplissant les mêmes Devoirs envers la Cité, la Cité a, elle, les Devoirs de faire profiter chacun d’eux de tous ses bienfaits (fruits de leur participation), de garantir autant que possible la sécurité de leur personne et de leurs biens, d’assurer leur liberté physique et morale, en un mot de répondre de son mieux à leurs aspirations légitimes.

« Art. 4b — Le Droit de profiter des bienfaits de la Cité implique, pour tout Citoyen, le Droit d’accéder au marché du fait même d’être Citoyen. Les biens retirés du marché par l’exercice de ce Droit deviennent les propriétés privées légitimes des Citoyens. Ce Droit d’accès, conféré par la Citoyenneté, théoriquement illimité et donc égal pour tous les Citoyens, est naturellement borné par les envies du Citoyen, par l'exercice de ce même Droit par les autres Citoyens, par la nature des choses et au besoin par la loi. » (Le Civisme, p. 56) — C’est en se basant sur cet article que le Civisme propose que la Cité dote ses Citoyens d’une carte à puce leur permettant d’attester leur Citoyenneté et d’accéder librement au marché. Mais la notion de carte n’apparaît pas ici car d’autres moyens peuvent être imaginés pour appliquer le même Principe.

L’Antimonétisme

Ici, je me dois de signaler l’originalité de l’Antimonétisme qui prône lui aussi l’utilisation de cartes à puce, mais dans un tout autre esprit que le Civisme et toujours dans un charabia pathétique :

« Vous apportez votre travail à la société, et la société, par réciprocité, vous apporte ce dont vous avez besoin (quel que soit votre travail, quelle que soit votre force physique ou quelle que soit votre force mentale). (p. 41) Matin : vous vous levez à l’horaire qui vous sied, puisqu’en accord avec votre contrat de travail, vous avez fixé vos objectifs. (p. 47) Le producteur de biens ou services se fixera lui-même son plan de travail, en prenant en compte les besoins de la société. S’il décide de ne pas travailler, honte pour lui, mais pour pallier ce problème, l’humain doit prendre en compte la responsabilité de son travail. Chaque article produit par lui portera sa signature. S’il veut qu’à son nom soit assimilé un mauvais article, libre à lui, car les demandeurs, s’ils ne sont pas satisfaits, choisiront un autre producteur. (p. 121) Vous vous  rendez (ou un service à domicile lors d’un handicap) chez le boulanger [par exemple. Ndla], vous demandez le pain de votre choix, vous présentez votre carte à puce (chargée de confirmer votre appartenance à la civilisation Anti-Monétiste, ainsi que de “nourrir” des statistiques qui aident à la logistique des besoins) et le boulanger vous donne le pain de votre choix. (p. 48) Quelle est la meilleur mémoire non humaine (donc artificielle) qui pourrait servir de preuve impartiale à l’appartenance au système ? Cette mémoire artificielle existe depuis quelque temps : c’est la carte à puce. (p. 113) » (L’idéal de la prochaine société)

Voilà tout ce que l’Antimonétisme consacre au moyen et mode d’échange du système antimonétiste, c’est-à-dire au point essentiel d’une théorie visant à supprimer la monnaie. Sans doute peut-on juger par-là du manque de sérieux et de rigueur de cette théorie ! Passons ! A quoi sert donc cette carte ? A attester l’appartenance de son porteur à la civilisation antimonétiste, afin de l’autoriser à accéder librement au marché. Sur la question de l’accès au marché, c’est-à-dire du droit d’accéder au marché, elle a la même fonction que la Carte civique. C’est en amont que tout est différent ; c’est la justification de la jouissance de ce droit qui diffère fondamentalement. L’appartenance à la civilisation antimonétiste est un concept vide comme l’est aujourd’hui la citoyenneté. Cela n’implique pas, comme dans le Civisme, le devoir de participer à la vie de la Cité, selon ce qu’elle considère comme une participation, c’est-à-dire d’avoir contribué d’une manière ou d’une autre à la production sur laquelle s’exerce le droit d’accès (libre et donc égal pour tous les Citoyens), mais d’avoir été admis par des « sages », sur des critères moraux (toujours la moraline), à faire partie de ladite civilisation.

« Créer un examen d’entrée qui prouve que la civilisation antimonétiste n’est pas menacée par une nouvelle arrivée ? Qu’est-ce qu’un esprit pur ? La pureté existe-t-elle ? La pureté, c’est l’honnêteté, quoi qu’il arrive. L’honnêteté est basée sur l’honneur. L’honneur est le sentiment positif de la dignité morale. La dignité morale, c’est l’obéissance aux règles de vie qui protègent à la fois l’individu et la société dans laquelle il vit. Mais cette obéissance ne doit pas être forcée. L’éducation de l’humain doit lui mettre en évidence que, hors de ces limites, le danger réside. (p. 124) Le sage [d’une connaissance encyclopédique, élu au suffrage universel] jugera si l’esprit du demandeur est compatible avec le monde antimonétiste. » (p. 125) — Les fameux critères moraux, si importants, ne sont évidemment pas définis.

L’appartenance à la civilisation antimonétiste n’est en rien l’équivalent de la Citoyenneté pour le Civisme. L’appartenance à l’antimonétisme doit être octroyée par des sages et se conserve ensuite sans condition (sauf crimes) ; la Citoyenneté, elle, est la destinée des individus nés dans la Cité (pays), quoique, à partir de l’âge de 18 ans, ils doivent s’en montrer dignes, c’est-à-dire respecter les lois et remplir leurs devoirs, sous peine de sanctions automatiques ou par décision de justice pouvant aller jusqu’à la déchéance. (Des étrangers peuvent également intégrer la Cité, s’il lui sied, et être et demeurer Citoyens par leurs actes.) Par suite, les cartes à puce n’ont, dans l’un et l’autre système, ni la même fonction, ni la même utilité, ni la même raison d’être. En fait, dans l’Antimonétisme, cette carte à puce, qui facilite juste la gestion des stocks (produits par personne), pourrait être une simple carte d’identité, un document papier ou plastique. En revanche, dans la Cité, dans une Société de millions d’individus qui ne se connaissent pas et ne savent pas ce qu’ils font les uns les autres, la Carte civique permet aux commerçants de s’assurer de l’identité et de la Citoyenneté de leurs clients, l’identité ne donnant pas en soi le droit d’accéder au marché, contrairement à la Citoyenneté qui, elle, le donne mais n’est jamais acquise définitivement. Seul un système de cartes à puce, permettant d’accéder à une banque de données mises à jours en permanence, peut garantir que la Citoyenneté n’est pas vide de sens, que tout détenteur d’une Carte valide est bien Citoyen, qu’il s’est acquitté de ses devoirs et a le droit d’accéder au marché. La Carte civique permet ainsi d’appliquer à grande échelle les Principes de la communauté que les petites communautés respectent naturellement, chacun agissant sous le regard de tous. Le Civisme explique ainsi pourquoi le système monétaire — qui devient incontournable lorsque la communauté s’agrandit, que la production se diversifie et que les échanges se multiplient — ne pouvait être sérieusement contesté et réellement renversé avant l’avènement de l’informatique. Autant une carte combinée à la technologie informatique n’a pas véritablement de raison d’être dans l’Antimonétisme, autant elle est la condition même de la Cité. Comme quoi, un point commun peut masquer un gouffre ! Au passage, admirez les définitions suivantes :

« Société : ensemble d’humains. Système : ensemble de lois ou de coutumes régissant le mode de vie de la société, afin d’assurer la survie de cette dernière. » (p. 98)

Comparez avec les définitions proposées par le Civisme dans la Déclaration des Devoirs et des Droits de l’Homme, du Citoyen et de la Cité :

« Tout Citoyen est homme ; tout homme n'est pas nécessairement Citoyen. Est Citoyen tout homme reconnu tel par la Cité. (préambule 2) Est une Cité ou une association politique tout ensemble d’individus unis à l’origine pour survivre, donc pour être en sécurité, et qui, de ce fait, ont les uns envers les autres les mêmes Devoirs et se garantissent mutuellement les mêmes Droits. (préambule 3) » (p. 100)

L’Antimonétisme prévoit de constituer une civilisation transnationale avec tous les humains qui y adhèrent et sont admis à en faire partie. Il ne s’agit donc pas d’instaurer ce système dans un pays donné, comme le préconise le Civisme, mais de fédérer les hommes, de quelque pays qu’ils soient, dans un système hors sol, virtuel (quoiqu’il est aussi question de créer des villages), et de laisser les autres perpétuer le système monétaire dans leurs pays respectifs. Il imagine donc faire cohabiter dans chaque pays les deux systèmes, monétaire et antimonétiste. Peut-on concevoir quelque chose de plus absurde ? Un pays ne peut fonctionner selon deux systèmes ; l’un prend nécessairement le pas sur l’autre, écrase l’autre. Et, d’après vous, lequel serait écrasé dans l’œuf ? Outre que personne n’adhèrerait au système visiblement chimérique de l’antimonétisme, l’État du système monétaire — que l’Antimonétisme n’a aucune intention de renverser et de remplacer — aurait tôt fait, lui, d’écraser les antimonétistes, ne serait-ce qu’en les soumettant à des exigences financières. En toute chose, l’antimonétisme mise sur une force dont il refuse de se doter, puisque les antimonétistes, partisans du « chacun fait ce qui lui plait », rejettent toute contrainte, tout État, toute violence. Ils veulent faire une révolution tout en se flattant de ne pas être des révolutionnaires. (« Je [Thierry Séverin] vous rappelle que je ne suis pas un anarchiste dans le sens de « fouteur de merde », de destructeur. Au contraire, je suis un constructeur. J’aime travailler. Que je ne fais pas ça pour avoir le pouvoir, contrairement aux révolutionnaires : “Être calife à la place du calife !”. Le pouvoir je l’ai, puisque je ne manque de rien et que je maîtrise relativement mon avenir. » (p. 53)) Décidément, le Civisme n’a vraiment rien à voir avec l’Antimonétisme !

Individualisme et mondialisme

Poursuivons. Même s’ils s’en défendent, les partisans de Mocica et consorts ont intégré un des aspects essentiels de Largent, sacralisé, sans surprise, par le capitalisme : l’individualisme. Ils dénoncent le système monétaire mais avec les armes que les capitalistes conscients utilisent, eux, pour l’imposer. Les uns et les autres ont le même logiciel. Lesquels l’emportent ? Lesquels dominent ? Lesquels sont les idiots utiles des autres ? Lesquels sont trop bêtes pour comprendre qu’ils disent autrement la même chose en croyant vouloir autre chose ?

« Nous traversons actuellement une phase de transition entre deux ères qui resteront dans l'Histoire radicalement différentes, pour ne pas dire opposées. La première, celle d'aujourd'hui, est orientée vers les biens, l'individualisme, la compétition, l'obligation, l'esclavagisme moderne et le conditionnement. La suivante sera celle de l'autonomie. Elle sera orientée vers l'individu, sa Planète, l'initiative, la coopération, la coordination, la motivation et la Liberté vraie. » (Mocica, p. 13)

Si on élague, que reste-t-il ? Le système actuel pousse à l’individualisme tandis que Mocica ramène tout à l’individu. Nuance !

A quelques remarques judicieuses près (notamment sur certaines conséquences d’un système non-monétaire qu’elles sont par ailleurs incapables d’instaurer et de maintenir), et quand elles n’enfoncent pas des portes ouvertes, ces théories débitent avec un aplomb incroyable et dans un charabia pathétique les pires absurdités, les contrevérités les plus notoires ; elles sont dans le déni le plus total des réalités, tout cela pour imposer leur idéologie mondialo-individualiste qu’impose déjà le capitalisme. Chaque sujet offre une occasion de le démontrer. J’illustrerai mon propos par deux thèmes : la gouvernance et l’humanitaire.

« Qui va gouverner ? Diriger ? Le plus évident est : personne. […] Ne pas être dirigé est la nature même d'une société autonome, et l'autonomie est le trait d'une grande civilisation. » (Mocica, p. 9)

« une société autonome » ! A moins d’être conquise et vassalisée par une autre, une société est une entité collective distincte du reste de l’humanité et autonome par définition. Mais on comprend que l’auteur a voulu dire qu’une vraie société n’a pas de direction interne, n’est dirigée par « personne », que chaque individu qui en fait partie est son propre souverain (puisqu’il ne peut être obligé en rien). Non seulement cela n’a rien d’« évident », mais affirmer qu’une société puisse ne pas être dirigée est une ânerie. (Il n’y a bien sûr aucun exemple de grande civilisation de ce type.) Sans direction une société n’existe pas. C’est la direction qui, en constituant un point de ralliement, personnifie le groupe et fait de ses éléments épars une société. Toutes les sociétés animales ont un chef, une tête (voire deux ou trois). Il n’y a que les gauchistes pour croire qu’une société puisse exister et surtout survivre longtemps sans chef. Le problème, ce n’est pas qu’il y ait un chef (et par extension un gouvernement), mais que celui-ci soit légitime, dans l’accession à sa fonction et dans ses actions. Il doit être désiré ou plébiscité et servir les intérêts de ceux qu’il conduit. Pour s’assurer qu’il remplit correctement sa mission, les citoyens doivent avoir de l’emprise sur lui via une organisation instituant un véritable contre-pouvoir populaire et consacrant la souveraineté du peuple, ce qui ne veut pas dire démocratie directe à tous les niveaux et référendums à la chaîne. Mais imaginer un vrai système politique, équilibré, dégagé par ailleurs des problèmes insurmontables que pose le système monétaire (inégalitaire, donc oligarchique et ploutocratique), demanderait trop d’efforts aux auteurs de Mocica, et surtout les aurait obligé à faire appel à des notions qui les rebutent (peuple, nation, souveraineté, identité, devoirs, droits, etc.), si bien qu’ils se sont contentés de proposer la chose informe que voici, baptisée ODG 5 (Organisation Démocratique Globale) :

« Le 1er niveau d'assemblée est la zone de voisinage. Il correspond à un quartier de village ou de ville. — Le 2ème niveau d'assemblée est la zone d'habitation. Il correspond à un village ou une ville. — Le 3ème niveau d'assemblée est la zone ressources. Il correspond à un territoire comprenant les zones d'habitations dépendantes de celui-ci en ressources alimentaires. — Le 4ème niveau d'assemblée est la zone culturelle. Il correspond à un communauté de même origine culturelle, ce qui correspondrait aujourd'hui aux nations. — Le 5ème niveau d'assemblée est la zone planétaire. »

(Les assemblées de niveau 1 désignent des porte-parole pour les assemblées de niveau 2, lesquelles désignent à leur tour des porte-parole pour le niveau 3, et ainsi de suite jusqu’au niveau 5.) « Les assemblées de niveau 2, 3, 4 ou 5 ne pourront prendre de décision sans l'accord démocratique des habitants qu'elles représentent. Sans dirigeant, l'ODG5 permet à chacun d'entre nous de proposer des initiatives, de prendre part à toutes les décisions le concernant et de voter à niveau égal des autres. L'ODG5 ne se veut pas complet et immuable, mais elle est au contraire souple, perfectible, modulable et adaptable. Elle permet la mise en place de tout type d'organisation démocratique au sein des communautés, selon le choix de leurs membres. Il s'agit essentiellement d'un modèle d'organisation, qui invite tous les modèles démocratiques. Il a pour objectif de mettre en lien et en harmonie une multitude d'assemblées diverses, chacune d'entre elles correspondant à l'image de la communauté qu'elle représente. Cette base que nous proposons, permet à toutes les assemblées et à toutes les cultures d'avoir leur propre mode de fonctionnement, et éviter ainsi des tensions et des lourdeurs évitables. » (Mocica, ODG 5)

Encore de belles idées de gauchistes qui, parce qu’ils font éventuellement comme cela dans leur coin, croient que cela peut fonctionner à l’échelle de la nation et même de la planète ! L’idée que tout passe par des porte-parole de porte-parole de porte-parole soit le système le plus naïf et le moins démocratique que l’on puisse imaginer ne leur vient pas à l’esprit ! Ici encore, ils prennent leurs désirs pour la réalité ! Un tel système n’offrirait aucune stabilité, puisque les porte-parole changeraient en permanence, du moins en théorie. Car, en pratique, aussi bien par nécessité que par la force des choses, les porte-parole seraient toujours les mêmes à quelque chose près (ceux qui disposent du réseau pour se faire désigner et renouveler) et constitueraient une nouvelle classe qui s’arrangerait pour agir indépendamment de la base. L’idée que les décisions à un niveau doivent être ratifiées par les habitants de la zone en question est bonne en soi, mais, dans l’état, elle serait un vœu pieux. Les habitants face à des institutions ne pèsent pas lourd ! Le pouvoir et le contre-pouvoir des citoyens doivent être organisés, institués, constitués. La citoyenneté, le droit de cité, les modes de désignation et de suffrage doivent être pensés et énoncés clairement… On ne fait pas la révolution, surtout celle-là, avec des idées aussi générales et fumeuses ! Le but est de réussir, pas d’échouer à coup sûr avec pour seule consolation d’avoir essayé. Et se donner l’air ouvert ne compense pas les lacunes. Un projet social consiste à poser des Principes solides et à avancer des solutions réalistes (aux problèmes les plus immédiats) pour les mettre en œuvre, non à lancer un sujet et à confier à d’autres le soin de remplir les cases, c’est-à-dire de fournir le véritable travail de réflexion, si tant est que le cadre fixé ne soit pas lui-même inepte, comme c’est le cas ici.

« J’espère ne jamais avoir à détailler plus les propos de ce livre, car pour l’impact effectif de ce dernier, il faut un minimum de “recherche” de la part du lecteur (si le voyageur ne fait pas lui-même le chemin, ce n’est pas un voyageur, mais un être statique, mort !). Aussi, la grande moralité de cette philosophie est la suivante : Vous avez connaissance de l’architecture de l’univers (loi Universelle de la survie), à vous de remplir (par la connaissance et la maîtrise des détails), les cases infinies constituant les multiples combinaisons de l’univers. » (L’idéal de la prochaine société (antimonétisme), p. 132)

Un projet cohérent ne peut pas sortir de discussions et de compromis, contrairement à ce que se plaisent à croire les gauchistes, qui espèrent que des assemblées auront le génie qu’ils n’ont pas eux-mêmes et croient en imposer en faisant montre d’ouverture (en apparence), ce qui, en réalité, n’en impose qu’à leurs pareils. Mocica anticipe ainsi les objections : « L'ODG5 ne se veut pas complet ». C’est le moins que l’on puisse dire ! Ça ou rien, c’est pareil ! « Il s'agit essentiellement d'un modèle d'organisation, qui invite tous les modèles démocratiques. » Un modèle, où ça ? Rien n’a été défini ! Cela dit, on pourrait croire que, dès lors, tout reste en effet à faire et que tout est envisageable. Mais non ! Mocica a fixé comme règle d’or que l’individu est à la fois roi et citoyen du monde… Allez donc fonder une Société sur l’individualisme et le mondialisme ! En fait, pour Mocica (et les autres théories), un citoyen est un humain, ce qui ne veut rien dire. (Les antimonétistes touchent le fond en parlant d’« humain sociétaire » (p. 118).) Avec de tels présupposés « citoyenneté » est non seulement un mot vide de sens, mais il est encore impossible, car interdit (moralement et légalement, ce qui est presque déjà le cas aujourd’hui), de lui donner un contenu (peuple, nation, pays, identité, appartenance, devoirs, droits spécifiques, etc.). Ainsi, pas de citoyens et de Société dignes de ce nom… Alors un système politique… démocratique !!!

Du chaos au totalitarisme

Mais il est une autre raison pour laquelle ces théories invoquent en vain la démocratie, c’est leur carence fondamentale. Toutes ces théories envisagent le renoncement au système monétaire (suppression ou abandon de la monnaie) mais sans proposer de système de substitution, c’est-à-dire un autre mode d’échange fondé sur de nouveaux principes. Personne n’a a priori le devoir de produire ; par contre, tout le monde a le droit de se servir à volonté, sans condition. Que chacun fasse ce qu’il veut peut à la rigueur être regardé comme un Principe social, aussi absurde soit-il, mais pas comme un mode d’échange. Ces théories qui ont compris que la monnaie est au cœur du problème ne font aucun cas du mode et du moyen d’échange en ce qui concerne la solution qu’elles préconisent et qui consiste toujours à laisser en la matière un vide béant. Pas la moindre réflexion à ce sujet ! Dans un premier temps, elles font mine de croire qu’elles ont trouvé la solution, que tout est réglé et que tout fonctionne. Dans un second temps, sans apercevoir et remettre en cause l’inanité de leur solution, elles réalisent qu’à tout laisser partir à vau l’eau rien ne fonctionnera. Elles entrent alors, sans le dire et sans se l’avouer, dans une deuxième phase, totalement contraire à leur principe sacré de Liberté individuelle, celle de l’ingérence et du dirigisme tous azimuts. Et ce sont les mesures et propositions dans une infinité de domaines périphériques qui constituent l’essentiel de ces théories. Bien sûr, sur le papier, elles mettent en avant le chou pour faire oublier la chèvre en embuscade… Elles font toujours étalage de leurs bonnes intentions gauchistes pour tout justifier : leurs délires autant que la catastrophe à venir.

« L'assemblée du village ou de la ville […] assurera la coordination et entente entre les différents quartiers, débattra des différentes initiatives écologiques et sociales proposées par les assemblées de niveau 1, et assurera la coordination entre elles. Les membres de chaque assemblée de niveau 2 désigneront un porte-parole qui rejoindra ceux de la même zone de ressources. Cette assemblée de niveau 3 débattra de l'entretien de leur zone de ressources (comme les paysages, le patrimoine historique et naturel, les axes routiers et ferroviaires). L'assemblée débattra de la répartition des rôles pour l'exploitation, transports et distributions des ressources du territoire aux communautés. Les assemblées des zones de ressources désigneront à leur tour leur porte-parole qui rejoindra ceux de la même zone culture. Les assemblées de niveau 4 devront assurer la coordination entre les zones ressources représentées, assurer le bon fonctionnement, l'optimisation écologique et sociale de l'ensemble de ce territoire. Elles chercheront à développer l'entraide et l'entente avec les différentes zones cultures à travers le monde. Enfin, tous les porte-parole des zones cultures se regrouperont pour l'assemblée de niveau 5, celle qui représente notre civilisation. Celle-ci aura pour objectifs d'assurer l'entente et la communication entre toutes les zones cultures, de faire remonter les initiatives, propositions ou préoccupations des assemblées sous-jacentes, proposer et appliquer des mesures pour assurer la paix dans le monde, nettoyer et protéger notre Planète, assurer la mise en place de vote pour les choix importants, constituer les lois universelles de protection de la liberté des individus, maintenir l'équilibre général et mettre en place les actions humanitaires ou militaires nécessaires. » (Mocica, ODG 5)

Le roulement des tâches

On parle de tout pour ne rien dire… Dans la même ligne, une idée que l’on retrouve dans la plupart de ces théories est celle du roulement des tâches…. idée aussi absurde qu’impraticable.

« Si certaines tâches ingrates ou difficiles ne peuvent être automatisées par la haute technologie (ce qui est peu probable) et que nous ne trouvions pas de volontaires, alors l'équité et la justesse sera de les faire à tour de rôle avec mise en place d'organigrammes. [...] Encore une autre possibilité s'offre à nous : la mise en place d'une année de services civiques que l'on ferait au début de l'âge adulte, dans la force de l'âge, dans le pays de notre choix avec les amis que l'on souhaite. (p. 10) Par organigrammes et par la masse de la population actuelle nous pouvons réduire les horaires des tâches difficiles à une niveau extrêmement bas. (p. 15) » (Mocica)

Si tous les Citoyens, pour mériter la Citoyenneté et le droit d’accéder au marché, étaient obligés d’avoir une activité, quelle qu’elle soit, et d’atteindre des résultats minimums en terme de « vente » sous peine de nullité, tous les postes seraient remplis, quitte à ce que les moins séduisants offrent des avantages (temps de travail plus court, etc.). Mais en n’obligeant personne à travailler pour avoir le droit de consommer, en comptant seulement sur la conscience des gens (encouragés à l’individualisme), ….

« Étape 2 : Maîtrise de la situation. Rien de plus simple : afin de conserver un cadre que l'on connaît et rassurant pour tous, il est important, dans un premier temps, que nous continuions notre vie habituelle sans utiliser le système monétaire. Nous serons reconnaissants envers ceux qui ont des métiers éprouvants de persévérer au moins le temps de l'étape 2. Allez à vos rendez-vous, continuez à suivre vos études, respectez les horaires habituels de votre quotidien. Exercez votre profession, que ce soit artisan, agriculteur, cultivateur, gardien de la paix, chauffeur de bus, dentiste, continuez à être boulanger, ouvrier, charpentier, coiffeur, routier, fleuriste, vendeur, pêcheur, électricien, etc. Pour les personnels de boutique et de grandes surfaces, gérez au mieux pour un partage équitable de l'alimentation et des fournitures en privilégiant d'abord les plus démunis. Vivez aussi normalement que possible. Faites vos courses comme vous l'avez toujours fait, ne consommez pas plus, éventuellement moins, toujours en laissant la priorité aux pauvres et précaires actuels. Mesurez vos besoins et limitez-vous à l'essentiel. Si vous êtes témoins d'abus et de tensions, aider à revenir au calme ou à recadrer si vous le jugez nécessaire, représentez les valeurs morales et la non-violence sans cesse. En résumé, vivez comme d'habitude, mais sans l'intermédiaire de l'argent et tant que c'est d'utilité publique. » (Mocica, p. 8)

« La société apporte des biens et services à l’individu afin d’assurer sa survie. Par respect, et par sagesse, l’individu doit apporter son travail à la société. (p. 114) Nous devons prôner le travail bien fait. (Mais pas question d’accorder des médailles, ou des récompenses. La seule récompense possible est la satisfaction personnelle du travailleur, et la fierté d’un travail bien fait.) Ces notions semblent subtiles [Houlala ! c’est vrai que c’est compliqué !!! Ndla], et paraîtront utopiques, mais c’est la seule façon de supprimer les injustices. (p. 121) [Moi qui croyais que la suppression des injustices reposait sur l’abolition de la monnaie ! Ndla] La seule façon d’éviter l’anarchie est d’avoir des humains dont l’esprit est “pur” (net), et conscient de ses responsabilités. (p. 122) »  (L’idéal de la prochaine société)

« Ce qui apparaissait le plus complexe, comme l’instauration d’un bénévolat absolument sans contrepartie pour assurer une production normale, trouva des réponses immédiates. La plupart se proposaient pour continuer leur travail habituel dans l’unique but de ne pas se trouver sans activité et sans utilité. » (Le porte-monnaie (désargence), p. 37)

… il est évident que certaines tâches (voire quasiment toutes) seraient délaissées. Et pour résoudre ce problème créé par une conception absurde des choses, ces théories ne trouvent rien de mieux que de proposer une solution invraisemblable, avec équité et justice en vaseline. Outre qu’il est arbitraire de décréter que certaines tâches sont ingrates ou difficiles, il est aberrant et inefficient de vouloir que les « citoyens » délaissent l’activité dans laquelle ils sont spécialisés, pour une autre qu’ils ne connaissent pas, pour laquelle ils n’ont ni compétence, ni temps, ni goût. Et qui pourrait bien les y obliger ? Au nom de quoi ? Donc, de deux choses l’une : soit le système s’effondre immédiatement, victime de son absurdité, soit il surmonte ses contradictions (entre ses théories fumeuses à la réalité des choses) en instaurant un régime fort, une dictature politique, bureaucratique et policière qui, au nom du Bien et de l’Intérêt général, va tout régenter, tout comprimer, tout réprimer.

« Après quelques mois de flottement, chaque région établit des listes de produits de base absolument nécessaires à chacun, selon son âge et son sexe : alimentation, vêtements, produits manufacturés, entretien, toilette, transport, culture, etc. Il fut décidé de diviser les communautés humaines en îlots de 800 habitants, chacun ayant un dépôt d’approvisionnement propre et en assurant la gestion, chacun de ces dépôts étant fédéré au sein d’un système global. Des carnets de fournitures furent édités sur lesquels l’acquisition de ces produits était marquée  d’un tampon afin d’éviter l’accumulation par une même personne de produits venant de dépôts différents. Une page spéciale était réservée aux déplacements, ce qui permettait à celui qui devait quitter momentanément son lieu de résidence d’être nourri et logé durant le voyage. » (Le porte-monnaie (désargence), p.51)

« le tout n’est pas géré par le profit monétiste, mais par des humains qui sont conscients de la richesse et de la fragilité de la vie (p. 46) Travail : celui que l’on a choisi (partage selon la masse de travail à effectuer, et le nombre de travailleurs). Aucun risque de se faire mal dans un métier dangereux ou répétitif à l’excès (travail de robots pour les travaux comportant un risque inutile). Les logisticiens sont l’huile qui permet au système de tourner et de répondre aux besoins de chacun. (p. 47) [...] Pour rendre impossible les erreurs en tout genre, une catégorie de personnes doit être l’élite du peuple. Ces personnes appelées “Les sages” devront posséder un esprit pur et une connaissance du monde aussi complète que possible. Cette catégorie de personnes ne peut en aucun cas prendre de décisions autres que celle de l’entrée d’un individu dans la société, ceci dans le respect de l’article 5. Les sages devront émettre leur avis sur tout chose, et être les gardiens de la survie. L’obtention ou la perte de ce statut de sage est décidée, sans limitation de temps, par l’approbation de 90 % des citoyens géographiquement concernés. Le statut de sage ne permet aucun avantage particulier hormis celui décrit ci-dessus. » (L’idéal de la prochaine société (antimonétisme), (p. 117)

Mocica ne voit pas cette dérive funeste inévitable… Mais l’antimonétisme l’ébauche à reculons, et le projet Vénus l’anticipe ouvertement… Comme le positivisme, ce dernier  ne jure que par la science… Pour lui, tout doit être régi par les scientifiques et les spécialistes… Eux savent… Eux font bien… La masse doit suivre et se plier à leurs verdicts, c’est-à-dire leurs dictats. Elle est loin la démocratie ! C’est ainsi que les chantres de l’individualisme, les capitalistes qui s’ignorent, prônent des systèmes totalitaires en puissance. (« Par quartiers, puis villes, régions et pays pour une distribution intelligemment étudiée des besoins et des ressources. » Mocica, p. 9) Inutile de faire l’expérience, c’est couru d’avance. Mocica et autres n’existeront jamais, parce que si leurs systèmes avaient un début de commencement d’application, ils tourneraient aussitôt au fiasco ou prendraient un tout autre visage que celui prévu. Mais que peuvent prévoir des gens qui, pour effectuer certaines tâches ici, veulent instaurer un « service civique » à effectuer n’importe où dans le monde ? Obliger, mais pas trop !

L’humanitarisme

J’en arrive enfin au sujet de l’humanitarisme. Après l’étape 1 (adhérez à Mocica, diffusez l’idée, renoncement à la monnaie), après l’étape 2 (soyez gentils, n’abusez pas), Mocica propose, sans transition, de passer à l’étape 3 : 

« Étape 3 : Les priorités. Tout en s'assurant de garder une base solide dans les pays "développés" afin qu'ils restent rassurants pour eux-mêmes et efficaces pour les autres, nous devrons nous tourner le plus rapidement possible vers les pays pauvres ou dits "sous-développés". Les pays dits "développés" pourront se séparer en 2 types de volontaires : ceux qui maintiendront le déroulement de la vie habituelle dans leur région du globe, mettant à disposition leurs savoir-faire, et ceux qui souhaiteront voyager à des fins humanitaires. Chacun y participera autant qu'il le souhaite, aussi bien trois semaines que trois mois, ou encore, rien. Il nous sera recommandé de partir entre amis et/ou en famille afin de rendre les choses plus agréables et enthousiasmantes pour tous. Rien ne doit être imposé, la base est le volontariat. C'est un des piliers du nouveau paradigme. Par ailleurs, pour la coordination de ceux qui choisiront l'humanitaire, nous disposons déjà d'un excellent réseau expérimenté : les associations humanitaires. Vous trouverez toutes leurs références sur le web. Ils sont partout dans le monde, justement là où il y en a le plus besoin. De la précarité de nos rues jusqu'aux régions les plus difficiles du globe, nous avons déjà un réseau très organisé, qui aura enfin les moyens d'être pleinement efficace. Tout humain qui aura des conditions saines de vie deviendra à son tour un renfort supplémentaire pour la société. Les associations humanitaires ont tout le savoir-faire et l'expérience nécessaires pour nous guider intelligemment. Aujourd'hui, plus que jamais l'Homme souhaite voyager sur tous les continents. L'humanitaire ne serait-elle pas la meilleure façon d'explorer le Monde ? » (Mocica, p. 8)

« Au début de la Révolution mondiale, les pays les plus pauvres furent étonnamment les plus réticents à s’y engager. Les inégalités naturelles entre les différentes parties du monde soulevèrent de houleux débats. Tellement habitués à se faire tondre la laine sur le dos, les habitants des zones arides et sans matières premières exportables n’arrivaient pas à imaginer que, d’un seul coup d’un seul, le mon s’inquièterait de leur sort et pourvoirait à leurs besoins essentiels. » (Le porte-monnaie (désargence), p. 82)

« Les coutumes, les religions, les styles de vie sont nombreux, mais l’humain, quel qu’il soit, et où qu’il soit sur terre, aspire aux mêmes désirs, et a peur des mêmes choses. [Affirmation gratuite on ne peut plus fausse ! Ndla] Ouvrez votre esprit au monde, et observez que derrières toutes nos différences, notre essence est la même, liée directement à l’ordre universel de la survie. [...] Vous croyez qu’il est impossible d’unifier le monde ? Le réseau Internet ainsi que tous les autres moyens de communication permettront l’ouverture d’esprit des humains. » (L’idéal de la prochaine société (antimonétisme), p. 50)

On ne s’étonne pas que des « citoyens du monde » autoproclamés aient pour priorité de s’occuper de tout chez les autres avant d’avoir rien réglé chez eux. En fait, ils ne voient en eux-mêmes que des « humains » ; ils ne croient rien devoir à leur peuple, à leur pays ; s’ils ne détestent pas tous les peuples, ils méprisent au moins le leur (dont ils sont en effet les pires représentants) ; étant dans l’abstraction pure, ils nient toutes les réalités ; pour être gentils avec tout le monde en général, c’est-à-dire personne en particulier, ils se font les fléaux de l’Humanité. Je l’ai déjà dit, cette tendance au mondialisme, qui éclate partout dans Mocica et autres, est liée à l’individualisme inhérent à Largent ; c’est un marqueur capitaliste, et c’est bien le capitalisme qui a lancé le mouvement auquel ces bonnes âmes applaudissent en nous ressortant le même baratin, mais sans en saisir visiblement les tenants et aboutissants. Ce discours est typique des bobos (grands révolutionnaires devant l’Éternel) et des capitalo-gauchistes, idiots utiles du MEDEF. Ils se font les auxiliaires du capitalisme, mais ne veulent voir dans l’humanitaire que l’occasion de faire une B. A., de s’enrichir personnellement (d’un point de vue culturel), voire de faire du tourisme pédagogique (en famille de préférence). Ces grands donneurs de leçons, pourfendeurs de la colonisation, ne s’aperçoivent pas que, sous prétexte de leurs bons sentiments, ils embouchent à leur tour la trompette du colonialisme ; que leur conception des choses est purement occidentale et suprématiste car ce sont toujours des Occidentaux qui, au nom de leur vision des choses (« Aujourd'hui, plus que jamais l'Homme souhaite voyager sur tous les continents. » Mocica, p.8) et de leur pouvoir, s’immiscent dans les affaires des peuples qui ne leurs demandent rien. La vérité, c’est que les autres peuples ne veulent qu’une chose : vivre chez eux comme ils l’entendent et que les Occidentaux leur lâchent la grappe une bonne fois pour toutes. « Chacun chez soi, et les vaches seront bien gardées », c’est-à-dire « droit des peuples à disposer d’eux-mêmes », voilà la véritable maxime des peuples ! Mais comment respecter les peuples quand on se targue de n’appartenir à aucun ? Et comment œuvrer pour leur bien quand on ne cherche que son bon plaisir ?

Immigration, antiracisme et révolution

Je voudrais terminer cette étude pénible et laborieuse par un sujet d’actualité qui n’est jamais abordé explicitement dans toutes ces théories mais sur lequel la position de leurs partisans ne fait aucun doute, je veux parler de la question de l’immigration. Mais, tout d’abord, quelques extraits :

« En avançant ainsi, nous nous apercevrons un jour ou l’autre que les frontières n’ont pas d’importance et qu’elles n’existent que dans nos têtes. La Planète qui nous permet de vivre mérite mieux que cette représentation morcelée d’elle, dessinée par la main de l’Homme, montrée de tous et maintenue par notre propre volonté. » (Mocica, p. 12)

« Tous les êtres humains, quel que soit leur âge, leur sexe, leur Ethnie, naissent libres et égaux en droits. [Principe creux sinon absurde, démenti justement page suivante sans que la contradiction ne soit relevée : « Si l’individu ne veut rien apporter à la société : par son choix, la société ne lui apportera rien. » (p. 115)] Le seul but de l’humanité est la survie de l’espèce humaine, sans distinction d’Ethnie. La survie de l’humanité passe par la survie de chaque être humain, présent et futur, quel que soit son système physique (apparences) et quel que soit son mode de raisonnement (religion ou autre). » « La solution résumée en quelques mots : Une Race, Humaine ; Une Terre, la Planète ; Un But, Survivre. » (L’idéal de la prochaine société (antimonétisme), p. 114, 131)

On voit une fois de plus comment l’individualisme inspiré par Largent conduit au sans-fontiérisme, au nomadisme et finalement à l’immigrationnisme. Le sans-frontiérisme n’est jamais que la négation de l’histoire et de la géographie. Les premières frontières, n’en déplaisent à ces décérébrés, sont géographiques et ne doivent rien aux hommes, encore moins à « l’Homme » qui n’est qu’un concept : océans, mers, montagnes, fleuves, déserts. Ces obstacles suffisent à séparer les hommes entre ceux qui sont d’un côté et ceux qui sont de l’autre, sans parler des insulaires qui, eux, sont complètement à part. Mais même à l’intérieur des terres, les frontières ne sont pas artificielles (sauf le cas particulier de l’Afrique où elles ont été tracées à la règle par les Occidentaux) : elles marquent les limites des territoires occupés par les différents peuples, lesquels sont caractérisés par des langues, des coutumes et des types ethniques ou raciaux différents. Ce n’est pas parce que ces limites ont bougé au fil de l’histoire qu’elles n’existent pas à l’instant « T » et qu’elles pourraient ne plus exister un jour. Il était dans la nature des choses que les hommes vivant à proximité sur un coin de la planète forment entre eux une société (rapports de devoirs et de droits) et se développent d’une manière propre (à tous les niveaux), d’où leurs différences avec les autres sociétés (d’où la diversité et la richesse de l’Humanité), d’où les frontières entre les divers territoires et pays occupés par les diverses sociétés. Les frontières sont un fait anthropologique incontournable ; les nier, c’est nier les hommes eux-mêmes, c’est l’exact contraire de l’humanisme… et le faire au nom de l’Homme ou de l’Humanité est le summum de l’indécence ou de la bêtise. Et c’est bien ce que font toutes ces théories qui, n’ayant rien compris à l’Égalité, croient la trouver dans une uniformité universelle qui n’existe pas, et emboîtent le pas au capitalisme dans son entreprise de la créer, pour des raisons à lui. Or produire une telle uniformité, à l’opposé de la réalité des choses, passe par la destruction de tout ce qui est et de tout ce qui résiste.

L’immigration, initiée par le grand patronat, participe de cette destruction. Elle avait d’abord pour but de procurer une main d’œuvre bon marché, de faire baisser le coût du travail et de briser les luttes sociales (chantage au chômage). Puis il ne s’est plus seulement agi de faire venir des travailleurs, mais des familles entières, à flux tendu et continu. Et les immigrés n’étaient plus des Européens, mais en grande majorité des « Arabes » et des Africains. En quelques années, des quartiers, des villes, des départements ont vu leur population changer, la population d’origine remplacée par ces importés, leur progéniture et leurs descendants. Cela ne pouvait aller sans susciter une réaction contre cette politique migratoire (en apparence insensée) et les immigrés eux-mêmes. C’est alors que, pour couvrir cette politique (voulue et organisée par les riches, puisque ce sont les riches qui ont toujours le pouvoir dans un système monétaire) voire l’intensifier, a été institué « l’antiracisme », c’est-à-dire l’interdiction pour les autochtones de refuser l’invasion de leur pays, le piétinement de leur peuple et l’anéantissement de leur race, sous peine d’être taxés de racistes. L’antiracisme institutionnel, c’est le monde à l’envers, c’est les traîtres et les envahisseurs faisant la morale et la loi aux autochtones lucides, aux patriotes ; c’est le renversement de tous les Principes, de toutes les valeurs, de tous les mots.

Massue de l’immigrationnisme, l’antiracisme est toujours allé de pair avec le sans-frontiérisme (tiers-mondisme, européisme, première marche du mondialisme) — dont les Mocica et autres sont visiblement des inconditionnels. S’agissant en outre d’imposer des étrangers, de race et de culture, l’antiracisme a inventé le droit à la différence (justifiant le renoncement à la politique d’assimilation, au moment où elle était plus que jamais nécessaire) et érigé la diversité (raciale et culturelle) en culte obligatoire. En effet, vu que les immigrés étaient différents et le resteraient (puisqu’ils n’étaient pas contraints de s’assimiler), qu’ils se fondraient d’ailleurs d’autant moins dans la masse que leur nombre était sans cesse grandissant, il a fallu interdire de voir la réalité toujours plus prégnante, et lui substituer des sophismes toujours plus audacieux. D’un côté, l’antiracisme a poussé pour que chacun fasse ce qu’il veut, cultive et s’enorgueillisse de ses différences, d’un autre, il a exigé de considérer que ce qui est différent est pareil, en l’occurrence que ce qui est d’ailleurs et d’ici, que ce qui n’a rien de français est français quand même. Dans le même temps, il empoisonnait l’opinion publique avec des slogans tels que « La France a toujours été une terre d’immigration », « Nous sommes tous des enfants d’immigrés », « ll n’y a pas plus d’immigrés qu’avant », « L’immigration est une chance pour la France », etc. Mais rien n’y fit. Les conséquences inévitables et évidentes de l’immigration massive et continue se firent de plus en plus visibles. Alors, l’antiracisme a magnifié ce qu’il était jusque-là « fasciste » de constater, à savoir que la présence de plus en plus importante d’étrangers, de races et de cultures différentes, était en train de défigurer et de dénaturer la France à l’insu des Français. Il a fallu soudain admettre et se réjouir que la France soit devenue multiraciale et multiculturelle par l’opération du Saint-Esprit (établir un rapport avec l’immigration étant d’un fou ou d’un fasciste). Toujours cette idée de fond que ce qui n’a rien de français est français quand même ! Dans le même temps, les chantres de l’immigrationnisme et de l’antiracisme firent l’apologie du métissage et du « vivre-ensemble » (vivre avec l'Autre dont il faut accepter la présence). Autrement dit, des gens qui considèrent comme un crime de penser et surtout de dire que les races existent, qui veulent même effacer le mot du vocabulaire, ont systématiquement avancé des notions qui en supposent elles aussi l’existence, que ce soit l’antiracisme, le multiculturalisme (euphémisme pour dire multiracialisme), le « vivre-ensemble » et le métissage, cette dernières notion, tendant à l’uniformité, étant absolument contraire aux autres célébrant la diversité (artificielle et imposée). Peu leur importe ! Ils ont le pouvoir ; ils peuvent tout faire et tout dire, même se contredire. Qui s’oppose à eux et à leur entreprise de destruction est voué aux gémonies. Et l’opposition s’intensifie à mesure que leur politique délirante, dont rien ne les détourne, produit dégâts et tragédies. Mais, maintenant, ils ne prennent plus de gants, ils ne s’embarrassent plus de subtilités. Quiconque constate l’effondrement physique et moral du pays et établit le lien avec l’immigration, quiconque voit que l’on nous mène soit au génocide soit à la guerre civile, en un mot, quiconque dénonce les traîtres à la nation, leur politique criminelle et les instruments de cette politique est accusé d’« incitation à la Haine »...  par ceux-là mêmes qui se sont autoproclamés les gardiens la liberté d’expression ! (Dernière campagne politico-médiatique en date : « # Tous Unis Contre la Haine ». Vu aujourd’hui, 31 mars 2016 : « [Après les attentats islamistes de Bruxelles] Anne Hidalgo s’est engagée à organiser, comme à Bruxelles, une « Zinneke Parade », c’est-à-dire un défilé célébrant la diversité, le métissage et la tolérance. » Le JDD) Au final, les Français, qui sont chez eux, doivent tout accepter de tout le monde, tout subir en silence sous peine d’être persécutés de la manière la plus perverse qui soit ; eux seuls peuvent tomber sous le coup des lois dites antiracistes, qui sont donc une arme offerte par les traîtres aux étrangers ; aucune loi ne les protège eux, en tant que peuple, dans leur propre pays. L’antiracisme n’a jamais eu pour but de lutter contre le racisme, mais de terroriser et de désarmer le peuple français (et les autres peuples occidentaux) face à l’immigration orchestrée par le capital.

Comprenons bien. Au début, l’immigrationnisme visait des profits immédiats. C’est toujours un de ses mobiles, et ce n’est pas un hasard si le MEDEF est toujours la proue du mouvement. Mais l’immigration est aujourd’hui incompréhensible sous ce seul rapport. Les pays occidentaux sont en crise : plus d’emploi, des millions de chômeurs, des milliards de dettes. Pourquoi donc continuer à faire entrer des centaines de milliers d’étrangers et, au final, des millions, qui, quoi qu’en dise la propagande, sont plus une charge qu’une aubaine ? L’intérêt n’est pas économique, mais politique, idéologique et plus encore. L’immigration participe au projet capitaliste de destruction des peuples et des pays, à l’abattement des frontières, afin de créer un marché mondial et un consommateur standard. L’immigration, en tant que concept, est le prétexte pour inculquer aux peuples un humanisme frelaté et les idées sans-frontiéristes afin qu’ils consentent eux-mêmes aux projets supranationaux visant à les détruire. L’immigration appliquée, elle, a de multiple fonctions (au-delà de ses fonctions économiques et sociales dont j’ai parlé plus haut) : habituer les autochtones à l’invasion à force de voir et de fréquenter des envahisseurs, pouvoir ainsi accentuer la propagande immigrationniste et intensifier l’immigration ; créer milles problèmes artificiels qui accaparent toute l’attention ; susciter un mécontentement légitime taxé de « raciste » qui, au nom de « l’antifascisme », permettra au gouvernement (à la solde des puissances financière) d’adopter des lois de plus en plus liberticides et d’étendre son pouvoir jusqu’à ce qu’il puisse agir indépendamment du peuple et contre lui ; au terme du processus, dissoudre voire anéantir le peuple lui-même. Mais pourquoi vouloir en arriver là, dans la mesure où il est évident qu’une immigration massive et continue ne peut avoir d’autre résultat ? Ce qui semble a priori dément a une explication tout à fait rationnelle.

Ce que les Mocica et autres n’ont pas l’air de comprendre, c’est que ce sont des Occidentaux, que leurs idées sont occidentales, que la volonté de s’en prendre à la monnaie leur est insufflée par l’évolution technologique de l’Occident, elle-même liée à tout une histoire, dont ils sont eux-mêmes le produit, alors que les étrangers sont, eux, les fruits d’autres pays, d'autres histoires et n’ont ni la même vision des choses qu’eux, ni les mêmes croyances, ni les mêmes intérêts, ni les mêmes préoccupations, même s’ils émigrent en Occident. En clair, c’est parce que la Révolution radicalement anticapitaliste, égalitaire et anti-monétaire, devient possible en Occident — quoique dans certains pays plus que dans d’autres, notamment en France — et sera, par la force des choses, la prochaine étape que ces idées émergent ; et c’est parce que le capitalisme se sait aux abois que, pour empêcher les Occidentaux de faire une révolution qui semble inéluctable, il inonde l’Occident d’immigrés qui, eux, rêvent de jouir et non de faire la révolution. Les immigrés ne sont pas le nouveau prolétariat révolutionnaire… Ils ont précisément pour fonction suprême de paralyser ou, mieux, d’éradiquer les Occidentaux et, avec eux, leur mentalité, leurs aspirations, leur potentiel révolutionnaire. Les immigrés sont, pour les Occidentaux, comme un boulet ou un poison mortel ; ce sont, malgré eux, des jaunes économiquement et des noirs (contre-révolutionnaires) politiquement. Vouloir faire la Révolution en reprenant à son compte le discours sans-frontiériste et immigrationniste capitaliste, fut-ce à la sauce universaliste et humaniste, est le comble de la l’incompétence en la matière ; c’est donner dans tous les pièges tendus par l’ennemi et, évidemment, Mocica et autres y plongent la tête la première. Se battre pour l’Humanité, contre toute réalité, est même leur priorité, bien avant la monnaie qu’ils ne terrasseront jamais.

 

CONCLUSION

Malgré des nuances, toutes ces théories semblent avoir été pondues par des enfants de 10 ans nourris au Front de Gauche (« L’humain d’abord ! »)… De bonnes intentions, mais aucun réalisme, des contradictions à la pelle et de la moraline, en guise de bon sens, pour emballer le tout. On sent tout de suite la patte du gauchiste prétentieux (pléonasme) pas peu fier de son caca ! Tel est bien le niveau et la nature de ces théories cucul la praline, informes et écœurantes de mièvrerie !

Le plus tragique, dans cette affaire, est que, pour une fois que le bon ennemi est identifié (du moins en partie, la monnaie n’étant qu’une conséquence parmi d’autres de Largent), il est dénoncé pour de mauvaises raisons et attaqué maladroitement, si bien que ces théories discréditent la cause qui devrait rallier tout le monde. En fait, elles n’ont d’autre mérite qu’une bonne intuition. Au fond, elles sont bien moins marginales et révolutionnaires que ne pensent leurs partisans. Elles ont beau remettre en cause la monnaie, elles n’en sont pas moins dans la droite ligne de l’idéologie capitaliste (individualiste, sans-frontiériste, néo-colonialiste, antinationales, immigrationnistes, sociétaliste, etc.) ; elles tiennent sur toute chose le discours bien pensant que surinent politiques et médias, et même leur façon de dénoncer la monnaie n’est pas faite pour déplaire au système. Et la preuve qu’elles sont dans le sens du vent et non à contre-courant, contrairement au Civisme, c’est que, outre le fait qu’elles se ressemblent toutes, ce qui est un signe en soi, elles drainent la plupart des gens qui ont la même intuition… Je veux dire que si les gens adhèrent aussi facilement à ces théories, c’est précisément qu’elles ne demandent guère d’efforts intellectuels, car elles leur présentent ce qu’ils pensent déjà — et ce que la plupart des gens pensent est précisément ce que le système leur inculque. Elles sont séduisantes pour beaucoup parce qu’elles n’ont rien de véritablement nouveau ou d’audacieux, mais procurent néanmoins le frisson révolutionnaire sans avoir à se départir des préjugés monétaires (les réflexes inculqués par Largent) et de l’idéologie capitaliste... et cette étude montre bien que, malgré les apparences et leurs prétentions, tous ces gens ont des positions qui font d’eux les auxiliaires du capitalisme… et des contre-révolutionnaires.

Toutes ces théories ont le même travers fondamental : elles sont individualistes et, de ce fait, universalistes ou mondialistes. (Comme je l’ai déjà dit, l’individualisme est inhérent à Largent qui lui-même vient du troc, de l’échange entre individus ; il est décuplé par la monnaie et atteint son paroxysme sous le capitalisme.) Ramenant tout à l’individu, que rien ne doit brimer, elles rejettent toute contrainte, autorité, toute loi, toute société, toute frontière ; elles nient les peuples, les nations, les pays, les races, ne jurent que par l’« humain » et « l’Humanité » — concepts sans consistance, faux philosophiquement, inutiles et dangereux politiquement —, et en viennent à dénoncer en priorité et à se battre en exclusivité — soit au nom de leur absolu, soit au nom d’étrangers qui eux-mêmes ne sont pas de simples « humains » mais ont une réalité en tant qu’immigrés — contre leurs compatriotes, c’est-à-dire contre des hommes de leur entourage (forcément !), qui ont le tort à leurs yeux de borner leur ambition à améliorer la situation de leur peuple et de leur pays. Sous prétexte d’une révolution universelle absurde et à jamais irréalisable, elles conspuent les patriotes qui travaillent à ce qu’il est nécessaire et possible de réaliser chez eux, pour eux. C’est ainsi que, comme tous les gauchistes, elles aident le capitalisme à se perpétuer — en ne faisant rien d’efficace contre lui, tout en poursuivant de leur haine ses ennemis. Elles l’aident aussi en captant, en phagocytant, avec des idées capitalistes présentées comme le summum de « gauche », et en détournant des idées véritablement révolutionnaires ceux qui songent à supprimer la monnaie. Elles l’aident enfin en discréditant tous les Principes de l’ordre social, qui sont à la fois les mots d’ordre et le but de la Révolution.

Le Principe fondamental de l’ordre social, et le but de la Révolution, c’est l’Égalité, l’égalité des Citoyens en devoirs envers la Cité et en droits dans la Cité. Mais, de par leur individualisme, ces théories rejettent la notion de devoir ; et, de par leur universalisme, elles rejettent les notions de peuple, de pays, de nation, de société (Cité). Or il n’y a pas de droits sans devoirs qui les génèrent et les garantissent, pas de devoirs sans réciprocité, donc hors de l’Égalité, et pas d’autre Égalité qu’en devoirs et en droits entre Citoyens, dans en Société déterminée. Par suite, soit elles ne parlent pas d’Égalité (ni d’aucun autre Principe d’ailleurs !),  soit, ce qui est pire, elles parlent vaguement d’une Égalité universelle, une égalité des humains, une égalité en rien entre tous les hommes (en rien, puisque pas de devoirs, donc pas de droits autres que déclaratifs), ce qui n’a aucun sens. Dans tous les cas, une certaine idée d’égalité est malgré tout sous-jacente dans leur discours du fait que, pour elles, les hommes sont avant tout et seulement des humains, qu’ils sont donc pareils, identiques, qu’ils sont donc égaux (en quoi ?). C’est donc par un glissement sémantique, à partir d’une affirmation absurde, qu’elles en arrivent à une notion creuse de l’Égalité qui repose sur une négation des différences et signifie plutôt « uniformité », uniformité spéculative vers laquelle il s’agit de tendre à toute force à tous les niveaux. Cette conception des choses est libertaire et égalitaire en apparence, mais égalitariste en fait, tyrannique et totalitaire en puissance ; elle a surtout l’inconvénient de galvauder et de discréditer l’Égalité dont elle se revendique quelque part. Mais c’est ce que font les gauchistes : ils dégradent tout ce qu’ils touchent.

Et bien sûr, l’idée qu’ils discréditent le plus, en l’associant aux tocards qu’ils sont, est celle d’abolir la monnaie. En se contentant de supprimer la monnaie sur le papier et en comptant, pour le reste, sur la gentillesse des hommes et les petits oiseaux, en ne produisant aucune analyse sérieuse sur les mode et moyen d’échange actuels et futurs, en ne tenant aucun compte, dans leur manière de traiter ces questions, du lieu et de la technologie qui leur permettent de se les poser et doivent évidemment entrer dans l’équation pour les résoudre, en donnant ainsi l’impression que remettre en cause la monnaie est naïf, farfelu et grotesque, à leur image, ils détournent de ce combat pourtant essentiel les gens ordinaires auxquels, quoi qu’ils en pensent, ils n’ont donné aucune piste à suivre. A la différence des pionniers qui ouvrent des voies pour la foule, ils ferment aux autres les chemins qu’ils empruntent, qu’ils saccagent et sur lesquels ils se perdent eux-mêmes. Je résumerais tous ces projets par ces mots qui sont comme leurs devises :

Égalité sans devoirs,
Révolution sans nation,
Pensée sans intelligence.

 

Vous voulez vraiment combattre le capitalisme, faire la Révolution,
renverser Largent au nom de l’Égalité et de la Patrie ?
Intéressez-vous au Civisme, rejoignez les Patriciens.

Philippe Landeux

31 mars 2016

ADDENDUM

Je venais d’achever cet article quand j’ai découvert une autre théorie (elles poussent comme des champignons) : « le Paradisme », qui allie à toutes les tares que je viens de signaler celle de conserver la monnaie et de proposer un revenu de base (en attendant soi-disant de pouvoir supprimer la monnaie). Je ne vais pas me livrer à une critique détaillée de toutes les inepties qu’elle contient, puisqu’elle ne contient à peu près que cela. Quand je dis que toutes ces théories affligeantes se ressemblent, qu’elles sont portées par le même esprit individualiste et mondialiste, un esprit qui puise sa source dans Largent… que, si elles ne sont pas lancées par des capitalistes diaboliques, elles sont au moins le fait d’idiots utiles du capitalisme et de Pieds nickelés… Admirez la « synthèse », comme dit l’autre !


MOUVEMENT POUR LE
PARADISME
Amour – Progrès – Partage – Guidance – Bonheur

« Bâtir ensemble un monde plus humain où chaque individu est souverain de sa propre personne.

« Remplacer les gouvernements du monde et des états par un collège de guidance mondial, continental et provincial. Etablir que le seul pouvoir donné aux élus est celui de manager les institutions qui leur ont été confiées en apportant leurs compétences pour servir, guider et assurer le partage équitable des ressources afin que nul ne manque de rien.

« Le paradisme c'est :

  • remplacer les principes de la gouvernance de l'État par ceux de la "guidance" des projets citoyens en retirant les pouvoirs attachés aux fonctions des élus actuels,
  • abolir la Politique politicienne en démissionnant tout d’abord l’ensemble des classes dirigeantes,
  • retirer le pouvoir économique à la haute finance et le redonner aux états,
  • confier les rôles de gérants et de gestionnaires de l'État à des candidats pouvant prouver leurs compétences, leur intelligence et un sens profond de l'humanitarisme ainsi que des grandes qualités de guidance et non de pouvoir,
  • reconnaître et enseigner la souveraineté individuelle des citoyens et son corollaire la responsabilisation autant individuelle que collective,
  • encourager la science à développer les technologies libérant au plus vite l'homme du travail nourricier,
  • pratiquer la redistribution des richesses par l'octroi à chacun d'un revenu minimum d'existence,
  • favoriser la pratique des Arts,
  • former la jeunesse à entreprendre et à réussir,
  • créer un climat de confiance dans l'avenir de l'humanité avec une diplomatie humanitariste,
  • proposer aux citoyens des projets de société et encourager le développement avec des moyens scientifiques, technologiques et financiers appropriés,
  • militer à l'international pour la liberté de circulation à travers le monde,
  • frapper une monnaie commune, prélude à la disparition de l'argent,
  • dissoudre l'armée nationale et institutionnaliser une armée internationale de gardiens de la paix,
  • apporter des réponses urgentes pour réguler la démographie galopante, cause de drame et de misère. » (http://www.mouvement-pour-le-paradisme.fr/)

Un lien, sur fond de drapeau français, renvoie à un ouvrage de référence téléchargeable en PDF qui commence par ces mots :

CONSTITUTION
POUR UNE NOUVELLE SOCIÉTÉ
d’abondance, de bien-être, sans travail, ni argent
où les robots remplacent les travailleurs

Un projet de société planétaire pour qu’un jour proche
on ne puisse plus dire partout dans le monde que    :
«    l’espèce humaine est la seule à payer
pour vivre sur la terre »

Le premier texte est une « lettre ouverte de Raël, fondateur du Paradisme, aux citoyens du monde ». Je crois que tout est dit.

 

18 avril 2019. Je viens de découvrir « Un monde sans argent », de Thierry Long, qui ne se présente pas comme une théorie mais qui présente toutes les tares de celles qui prétendent en être, qui, bien sûr, ne livre aucune réflexion sur l'argent ni sur les Principes de l'ordre social, qui masque son indigence derrière de nombreuses références, et dans lequel on lit  :

« Le cadre de notre utopie nécessite également un autre corollaire : c’est celui d’être mis en place sur le plan mondial. Il ne peut bien sûr pas s’établir dans un seul pays si les autres pays restent sur un mode d’échange différent (basé sur l’économie par exemple). Aussi, dans une telle perspective, les frontières n’existent plus. Les personnes sont libres de circuler géographiquement comme elles l’entendent, quelles que soient leurs origines. » (p. 40)

18:57 Écrit par Philippe Landeux dans 6. MON BLOG | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook | |  Imprimer |

mercredi, 30 mars 2016

MÉLENCHON ET ROBESPIERRE

Robespierre était un homme du XVIIIe siècle. Aussi révolutionnaire qu’ait été sa pensée, elle avait les limites de son temps. L’adopter aujourd’hui, sans rien y changer, serait avoir deux siècles de retard. Mais alors, la question se pose : que serait devenu le robespierrisme, quelles seraient les positions de Robespierre face aux problèmes actuels ? Au vrai, il est impossible de le savoir avec certitude. Et ce pour deux raisons : 1) Ses idées auraient sans doute évolué sur certains points (lesquels et dans quel sens ?) ; 2) Certains problèmes sont apparus depuis sur lesquels il ne s’est donc jamais exprimé. Ceci étant, Robespierre était un homme de principes et il n’aurait pas changé du tout au tout. Il était et serait encore le champion de l’Égalité (ou de moins d’inégalités), de la Liberté, de la nation, de la souveraineté du peuple et de la non-ingérence ; il était et serait encore le pourfendeur des tartuffes, des traîtres et des tyrans sous quelque masque qu’ils se couvrent.

Et parmi ces tartuffes figure assurément Mélenchon. La principale raison qui me fait dire cela est que Mélenchon est un immigrationniste sous prétexte d’universalisme, donc un idiot utile du capitalisme et de l’euro-mondialisme dont il prétend être l’adversaire. Quoi qu’il dise par ailleurs, ce seul point ruine tout. On n’est pas, comme l’était Robespierre, le champion du peuple et du progrès social quand on cautionne la destruction du peuple et de la société par l’immigration.

L’immigration

A Nadine Morano qui rappelle que la France est un pays de race blanche, Mélenchon répond que ceci est une « énormité », que la « La France est une nation universaliste ». Oui, la France n’est pas une nation racialiste ; elle est contractuelle. N’importe qui, quelles que soient ses origines, peut devenir français sous certaines conditions. Ceci n’enlève rien au fait que les Français sont en premier lieu des Européens, des blancs, que la présence de gens de couleur en France est très récente et due à l’immigration extra-européenne imposée d’abord par le patronat et justifiée et encouragée ensuite par l’antiracisme. Jamais Robespierre n’aurait nié des telles évidences. Jamais Robespierre n’aurait, comme Mélenchon, cautionné la fabrique à Français de papier (pour lui, Mélenchon, être français, c’est avoir une carte d’identité française, donc sans conditions).

Il est vrai que, dans son discours de mars 1791 contre le marc d’argent (exigé pour être électeur), Robespierre déclarait : « Tous les hommes nés et domiciliés en France sont membres de la société politique qu’on appelle la nation française, c’est-à-dire citoyens français ». Cette conception était commune à tous les révolutionnaires. Mais ces hommes du XVIIIe siècle raisonnaient d’après la France qu’ils avaient sous les yeux, dans laquelle la plupart des hommes naissaient, vivaient, travaillaient et mourraient quasiment à l’endroit qui les avait vus naître. L’immigration était infinitésimale et les immigrés ne recevaient aucune aide, ils pourvoyaient eux-mêmes à leurs besoins, soit par leur travail, soit par leur fortune personnelle. De manière générale, ils ne posaient pas de problèmes et ne constituaient pas un sujet de débat. Jamais Robespierre n’aurait imaginé l’immigration qui, sous sa forme actuelle, est une véritable invasion ; jamais il n’aurait considéré de la même manière un phénomène marginal et une déferlante continue. Pour cet adepte de Rousseau, l’immigration massive et imposée serait évidemment une violation, et par ses promoteurs et par ses acteurs, du Contrat social d’après lequel la société est une association libre et volontaire entre citoyens et implique entre eux un consentement mutuel. Les Français ne sont en rien associés aux immigrés quand l’immigration est organisée non seulement sans leur avis mais contre leur gré (d’où l’institutionnalisation de l’antiracisme pour les matraquer, les culpabiliser et les faire taire à défaut d’accepter). Et que dire de l’immigration clandestine dont le premier acte consiste à bafouer la souveraineté nationale, en pénétrant illégalement sur le territoire ? Robespierre, le légaliste, aurait sans doute fait montre de compréhension vis-à-vis des immigrés, il aurait sans doute conseillé de les éconduire avec humanité, mais il n’aurait eu aucune indulgence pour les immigrationnistes qui instrumentalisent les immigrés, tantôt pour le profit, tantôt pour se prévaloir de leur humanité.

« L’humanité consiste surtout à aimer la patrie et à faire le bien des hommes, et non à sacrifier l’intérêt de la société entière à celui d’un particulier. » (23 août 1790) Celui qui a théorisé la Terreur pour sauver la patrie en danger et écraser « le parti de l’Étranger » n’aurait sans doute pas était de ceux qui mettent aujourd’hui la patrie en danger au nom de l’Étranger. Il n’était pas de ceux qui se pâment devant les étrangers, pour qui être étranger, donc immigré, est en soit une qualité et une vertu révolutionnaire. On peut en juger d’après son discours du 12 décembre 1793, aux Jacobins, au terme duquel il obtint l’expulsion d’Anacharsis Clootz, autoproclamé Orateur du genre humain :

« Pouvons-nous regarder comme patriote un baron allemand ? Pouvons-nous regarder comme sans-culotte un homme qui a plus de cent mille livres de rente ? Pouvons-nous croire républicain l’homme qui ne vit qu’avec les banquiers, les contre-révolutionnaires ennemis de la France ? non, Citoyens, mettons-nous en garde contre les étrangers qui veulent paraître plus patriotes que les Français eux-mêmes. […] Et comment Cloots pouvait-il s’intéresser à l’unité de la République, aux intérêts de la France ; dédaignant le titre de citoyen français, il ne voulait que celui de citoyen du monde. […] Citoyens, regarderez-vous comme patriote un étranger qui veut être plus démocrate que les Français et qu’on voit tantôt au Marais, tantôt au-dessus de la Montagne ? car jamais Cloots ne fut à la Montagne ; il fut toujours au-dessous ou au-dessus. Jamais il ne fut le défenseur du peuple français mais celui du genre humain. »

Et Marc-Antoine Jullien, l’agent du Comité en mission à Bordeaux, ne disait pas autre chose : « Bordeaux est un foyer de négociantisme et d'égoisme. Là où il y avait beaucoup de gros commerçans, il y avait beaucoup de fripons, et la liberté n'y pouvait guère établir son empire dont la vertu est la base ; là où il y avait beaucoup de riches, le pauvre était pressuré par eux, et l'égalité ne pouvait de long-tems être connue ; là où n'était que la soif de l'or, on ne pouvait guère affermir dans les cœurs l'amour de la patrie. Le mot, humain, absorbait tout, et les différens intérêts privés étouffaient l'intérêt public. » (Lettre à Saint-Just, 11 juin 1794/)

Le slogan du parti de Mélenchon, le Front soi-disant de Gauche, n’est-il pas « L’Humain d’abord ! » ? Ce slogan aurait été pour Robespierre celui d’un traître au peuple français, au moins d’un tartuffe. Que les principes (sociaux) soient universels est une chose ; que l’universalisme serve à nier la patrie et à détruire la société elle-même (au profit de qui ? de quoi ?) en est une autre. Robespierre n’avait pas ce travers. C’est sur son rapport du 25 décembre 1793 sur les principes du gouvernement révolutionnaire que la Convention chassa de son sein tous les députés d’origine étrangère et qu’elle exclut, le lendemain, tous les étrangers des fonctions publiques. Robespierre ne reconnaissait pas aux étrangers de droits politiques. Mélenchon est favorable au droit de vote des étrangers…

Mélenchon ne peut pas « survivre quand il n’y a que des blonds ». Il déclare que « la France n’a pas d’avenir sans les Arabes ». Saint-Just, lui, écrivait à Robespierre : « Ne croyons pas les charlatans cosmopolites, et ne nous fions qu’à nous-mêmes » (14 décembre 1793).

Dieu et la religion

Faut-il également rappeler à Mélenchon, le « bouffeur de curés », que Robespierre fut toujours le défenseur des prêtres (surtout du bas clergé) au temps de la puissance de l’Église, quand lui tire sur l’ambulance ? que, pour stopper la déchristianisation et les persécutions religieuses, il fit confirmer la liberté de culte (6 décembre 1793) ? que Robespierre, loin d’être athée, avait proclamé qu’il croyait en Dieu, à la face des Girondins qui lui en faisaient le reproche (26 mars 1792), et fit décréter que « le peuple français reconnaît l’existence de l’Être suprême et l’immortalité de l’âme » (18 floréal an II - 7 mai 1794) ? qu’il fit, le soir même, rejeter l’idée, inspirée par Rousseau, que les athées soient bannis de la République ? qu’il s’opposa jusqu’à son dernier souffle à Cambon et à son idée fixe de supprimer les fonds affectés au culte catholique (8 thermidor) ? Robespierre n’était pas franc-maçon et ne serait pas devenu un laïcard !

Trois interventions sont remarquables sur ce sujet : sa réponse à Guadet, le 26 mars 1792, son discours du 18 floréal et un discours du 21 novembre 1793 dont voici quelques extraits :

« On a supposé qu’en accueillant des offrandes civiques, la Convention avait proscrit le culte catholique. Non, la Convention n’a point fait cette démarche téméraire. La Convention ne la fera jamais. Son intention est de maintenir la liberté des cultes qu’elle a proclamée et de réprimer en même temps tous ceux qui en abuseraient pour troubler l’ordre public ; elle ne permettra pas qu’on persécute les ministres paisibles du culte, et elle les punira avec sévérité toutes les fois qu’ils oseront se prévaloir de leurs fonctions pour tromper les citoyens et pour armer les préjugés ou le royalisme contre la République. […] Il est des hommes […] qui, sous le prétexte de détruire la superstition, veulent faire une sorte de religion de l’athéisme lui-même. Tout philosophe, tout individu, peut adopter là-dessus l’opinion qui lui plaira. Quiconque voudrait lui en faire un crime est un insensé ; mais l’homme public, mais le législateur, serait cent fois plus insensé, qui adopterait un pareil système. La Convention nationale l’abhorre. La Convention n’est point un faiseur de livres, un auteur de systèmes métaphysiques ; c’est un corps politique et populaire, chargé de faire respecter, non seulement les droits, mais le caractère du peuple français. Ce n’est point en vain qu’elle a proclamé la Déclaration des droits de l’homme en présence de l’Être suprême. On dira peut-être que je suis un esprit étroit, un homme à préjugés ; que sais-je, un fanatique. J’ai déjà dit que je ne parlais ni comme un individu, ni comme un philosophe systématique, mais comme un représentant du peuple. L’athéisme est aristocratique ; l’idée d’un grand être qui veille sur l’innocence opprimée, et qui punit le crime triomphant, est toute populaire. Le peuple, les malheureux m’applaudissent ; si je trouvais des censeurs, ce serait parmi les riches et parmi les coupables. J’ai été, dès le collège, un assez mauvais catholique ; je n’ai jamais été ni un ami froid, ni un défenseur infidèle de l’humanité. Je n’en suis que plus attaché aux idées morales et politiques que je viens de vous exposer. Si Dieu n’existait pas, il faudrait l’inventer. » (21 novembre 1793)

De même que certains qui se réclament du Christ le crucifieraient de nouveau s’il se présentait, Mélenchon se réclame de Robespierre, alors qu’il abreuverait d’insultes quiconque tiendrait, comme lui, le discours suivant :

« Invoquer le nom de la providence et émettre une idée de l’être éternel qui influe essentiellement sur les destins des nations, qui me paraît à moi veiller d’une manière toute particulière sur la révolution française, n’est point une idée trop hasardée, mais un sentiment de mon cœur, un sentiment qui m’est nécessaire. » (26 mars 1792)

Mais Mélenchon qui ne cesse de dénoncer les religieux, en particulier catholiques, ne voit aucun problème avec le voile islamique… Qu’une tradition étrangère et rétrograde, introduite en France par des immigrés dont la présence est imposée de force au peuple français qui, de surcroît, réprouve notoirement cette coutume, cela ne lui pose aucun problème ! Il ne voit pas en quoi cette coutume est une provocation et un trouble à l’ordre public ! Il ne voit pas en quoi ce prosélytisme politico-religieux est contraire aux valeurs de la République ! Il ne voit pas en quoi cette licence, qui procède du communautarisme ou l’engendre par la force des choses, est contraire à la tradition française (et universelle en réalité) d’assimilation ! Il ne le voit pas, parce que « sous le voile, l’immigré ». L’immigré sacré ! Mélenchon réserve ses foudres pour les Français qui ne consentent pas, comme Robespierre en son temps, à l’invasion et à la destruction de leur pays. Quoi que fassent les immigrés, Mélenchon et ses pareils, qui cautionnent leur venue et leur présence, en tirent le prétexte pour accabler les patriotes et exposer encore plus le pays à l’invasion et au chaos. Mais Robespierre lui répond : « S’il fallait choisir entre un excès de ferveur patriotique et le néant de l’incivisme, ou le marasme du modérantisme, il n’y aurait pas à balancer. Un corps vigoureux, tourmenté par une surabondance de sève, laisse plus de ressource qu’un cadavre. » (25 décembre 1793)  

Des citoyens armés

La raison d’être de la société est d’assurer au mieux la sécurité de ses membres contre tous périls extérieurs ou intérieurs. Elle doit donc mettre en œuvre des moyens à cette fin, mais quand ces moyens sont insuffisants ou défaillants, quand un citoyen qui devait être protégé est exposé à un danger, il a le droit de se défendre par tous les moyens à sa disposition. S’il échoue, la société doit le venger ; s’il réussit, elle doit le féliciter. C’est ce que proclamait Robespierre lui-même dans sa Déclaration des droits :

« Quand la garantie sociale manque à un citoyen, il rentre dans le droit naturel de défendre lui-même tous ses droits. » (21 avril 1793).

Robespierre allait même encore plus loin :

« Être armé pour sa défense personnelle est le droit de tout homme ; être armé pour défendre la liberté et l’existence de la commune patrie est le droit de tout citoyen. Ce droit est aussi sacré que celui de la défense naturelle et individuelle dont il est la conséquence, puisque l’intérêt et l’existence de la société sont composés des intérêts et des existences individuelles de ses membres. Dépouiller une portion quelconque des Citoyens du droit de s’armer pour la patrie et investir exclusivement l’autre, c’est donc violer à la fois et cette sainte égalité qui fait la base du pacte social, et les lois les plus irréfragables et les plus sacrées de la nature. » (décembre 1790)

Ainsi, Robespierre était favorable sinon au port du moins à la détention d’armes ; il aurait voulu en outre que tous les citoyens s’investissent dans la garde nationale qui n’est autre chose « que la nation armée pour défendre, au besoin, ses droits, sa liberté et sa sûreté. » (Ibid) « L’homme armé est le maître de celui qui ne l’est pas ; un grand corps armé, toujours subsistant au milieu d’un peuple qui ne l’est pas est nécessairement l’arbitre de sa destinée ; celui qui commande à ce corps, qui le fait mouvoir à son gré, pourra bientôt tout asservir. » (Ibid)

Les bourgeois ont bien compris qu’une garde nationale est pour eux un contre-pouvoir, qu’ils doivent soient en réserver l’accès à des bourgeois, soit en disposer (via son organisation), soit dissoudre une pareille institution. Le droit d’être armé et la formation d’une garde véritablement nationale et indépendante sont des idées toutes populaires. Robespierre les a défendues. Les gauchistes d’aujourd’hui sont contre. Même se défendre avec succès à main nue est devenu un crime à leurs yeux. Malgré l’insécurité qui pèse de plus en plus sur les personnes et le pays, du fait de l’immigration, Mélenchon taxerait à coup sûr de fasciste quiconque inviterait les Français à s’armer et proposerait de créer une garde nationale.

Les Lumières

Mélenchon se revendique aussi des Lumières, c’est-à-dire des Encyclopédistes et de Voltaire, champions de l’ordre bourgeois et de l’argent roi, alors que Robespierre, qui était rousseauiste, c’est-à-dire tout le contraire, les a fustigées dans son discours du 18 floréal (7 mai 1794) :

« Dès longtemps les observateurs éclairés pouvaient apercevoir quelques symptômes de la Révolution actuelle. Tous les événements importants y tendaient ; les causes mêmes des particuliers susceptibles de quelque éclat s’attachaient à une intrigue politique. Les hommes de lettres renommés, en vertu de leur influence sur l’opinion, commençaient à en obtenir quelqu’une dans les affaires. Les plus ambitieux avaient formé dès lors une espèce de coalition qui augmentait leur importance ; ils semblaient s’être partagés en deux sectes, dont l’une défendait bêtement le clergé et le despotisme. La plus puissante et la plus illustre était celle qui fut connue sous le nom d’encyclopédistes. Elle renfermait quelques hommes estimables et un plus grand nombre de charlatans ambitieux. Plusieurs de ces chefs étaient devenus des personnages considérables dans l’État. Quiconque ignorerait son influence et sa politique, n’aurait pas une idée complète de la préface de notre Révolution. Cette secte, en matière politique, resta toujours au-dessous des droits du peuple : en matière de morale, elle alla beaucoup au-delà de la destruction des préjugés religieux. Ses coryphées déclamaient quelquefois contre le despotisme, et ils étaient pensionnés par les despotes ; ils faisaient tantôt des livres contre la Cour, et tantôt des dédicaces aux rois, des discours pour les courtisans, et des madrigaux pour les courtisanes ; ils étaient fiers dans leurs écrits, et rampants dans les anti-chambres. Cette secte propagea avec beaucoup de zèle l’opinion du matérialisme qui prévalut parmi les grands et parmi les beaux esprits. On lui doit en grande partie cette espèce de philosophie pratique qui, réduisant l’égoïsme en système, regarde la société humaine comme une guerre de ruse, le succès comme la règle du juste et de l’injuste, la probité comme une affaire de goût ou de bienséance, le monde comme le patrimoine des fripons adroits. J’ai dit que ses coryphées étaient ambitieux ; les agitations qui annonçaient un grand changement dans l’ordre politique des choses, avaient pu étendre leurs vues. On a remarqué que plusieurs d’entre eux avaient des liaisons intimes avec la maison d’Orléans, et la constitution anglaise était, suivant eux, le chef-d’œuvre de la politique et le maximum du bonheur social.

» Parmi ceux qui, au temps dont je parle, se signalèrent dans la carrière des lettres et de la philosophie, un homme [Rousseau. Ndla], par l’élévation de son âme et par la grandeur de son caractère, se montra digne du ministère de précepteur du genre humain. Il attaqua la tyrannie avec franchise ; il parla avec enthousiasme de la divinité ; son éloquence mâle et probe peignit en traits de flamme les charmes de la vertu ; elle défendit ses dogmes consolateurs que la raison donne pour appui au cœur humain. La pureté de sa doctrine, puisée dans la nature et dans la haine profonde du vice, autant que son mépris invincible pour les sophistes intrigants qui usurpaient le nom de philosophes, lui attira la haine et la persécution de ses rivaux et de ses faux amis. Ah ! s’il avait été témoin de cette révolution dont il fut le précurseur, et qui l’a porté au Panthéon, qui peut douter que son âme généreuse eût embrassé avec transport la cause de la justice et de l’égalité ! Mais qu’ont fait pour elle ses lâches adversaires ? Ils ont combattu la Révolution, dès le moment qu’ils ont craint qu’elle n’élevât le peuple au-dessus de toutes les vanités particulières ; les uns ont employé leur esprit à frelater les principes républicains et à corrompre l’opinion publique ; ils se sont prostitués aux factions, et surtout au parti d’Orléans ; les autres se sont renfermés dans une lâche neutralité. Les hommes de lettre en général se sont déshonorés dans cette Révolution ; et à la honte éternelle de l’esprit, la raison du peuple en a fait seule tous les frais. »

Le capitalo-libéralisme

Les Lumières, c’était aussi les physiocrates, c’est-à-dire les partisans de ce que nous appelons aujourd’hui l’ultra-libéralisme, que Mélenchon sert en dernière analyse, et qui, sous la Révolution, furent incarnés par la plupart des constituants (ligne Le Chapelier) et, ensuite, par les Girondins que Robespierre n’eut de cesse de combattre. A cette époque, le blé et les subsistances étaient un enjeu majeur. C’est à leur sujet que les physiocrates prônaient la libre circulation, c’est-à-dire la liberté de spéculer, donc d’affamer le peuple. Leur slogan fallacieux : « Laissez-faire, laissez-passer ». Le peuple était donc affamé, mais la ligne de toutes les Assemblées, hormis la période 1793-1794, marquée par Robespierre, peut être résumée par ce mot de Rolland, ministre de l’Intérieur : « La seule chose peut-être que l’Assemblée puisse se permettre sur les subsistances, c’est de proclamer qu’elle ne doit rien faire » (19 novembre 1792). Au siècle suivant, Guizot disait plus clairement : « Enrichissez-vous ! » La libre circulation des subsistances, des marchandises, des capitaux, puis des travailleurs, puis des hommes a toujours été prônée par les capitalistes dans l’intérêt du capital. Les immigrationnistes qui ne voient que l’aspect humain (tout en déshumanisant les hommes qui n’ont a leur yeux aucune caractéristique propre, qui sont interchangeables à l’instar d’objets) sont soit des escrocs soit des idiots ! J’ai montré que Robespierre ne serait sans doute pas tombé dans le piège de l’immigrationnisme, lui qui ne s’était déjà pas laissé séduire par les sirènes de l’ultra-libéralisme. Dans un premier temps, il dénonça l’hypocrisie de la doctrine de la libre circulation qui, au nom de la Propriété, était précisément le prétexte pour retenir et accaparer les grains afin de faire montrer les prix. Il distinguait les subsistances, essentielles à la survie et sur lesquelles la société doit avoir un droit de regard, des marchandises en général qui peuvent être abandonnées au marché. Il proposait deux mesures : « prendre les précautions nécessaires pour constater la quantité de grain qu’a produite chaque contrée, et celle que chaque propriétaire ou cultivateur a récoltée. […] forcer les marchands de grains à les vendre au marché, et à défendre tout transport des achats durant la nuit. » (2 décembre 1792) Il ne s’est plus exprimé par la suite sur le sujet, mais quand, par la force des choses, des mesures furent prises contre l’accaparement et, peu après, pour la taxation (maximum des prix), il ne s’y opposa pas ; il était favorable aux premières et, à titre provisoire seulement, aux secondes. Quoi qu’il en soit, Robespierre n’était donc pas un émule des Lumières, et il est probable que Mélenchon applaudit Robespierre en la matière… Mais alors comment Mélenchon peut-il se revendiquer des Lumières ?

Le communisme

Robespierre n’avait pas de système économique à proposer, et les communistes croient qu’il aurait fini par combler ce vide en se ralliant au leur. Mais il n’était pas, ne pouvait pas être et ne serait sans doute pas devenu communiste, au sens de collectiviste. Je ne sais ce qu’il en est exactement de Mélenchon dans ce domaine, mais si besoin est, voici ce que Robespierre écrivait dans son journal Le Défenseur de la Constitution en juin 1792 :

« Qu’il [le peuple] juge entre nous et nos ennemis, qu’il juge entre l’humanité et ses oppresseurs. Tantôt ils feignent de croire que nous n’agitons que des questions abstraites, que de vains systèmes politiques ; comme si les premiers principes de la morale, et les plus chers intérêts des peuples n’étaient que des chimères absurdes et de frivoles sujets de dispute ; tantôt ils veulent persuader que la liberté est le bouleversement de la société entière ; ne les a-t-on pas vus, dès le commencement de cette révolution, chercher à effrayer tous les riches, par l’idée d’une loi agraire, absurde épouvantail, présenté à des hommes stupides par des hommes pervers ? Plus l’expérience a démenti cette extravagante imposture, plus ils se sont obstinés à la reproduire, comme si les défenseurs de la liberté étaient des insensés capables de concevoir un projet également dangereux, injuste et impraticable ; comme s’ils ignoraient que l’égalité des biens est essentiellement impossible dans la société civile ; qu’elle suppose nécessairement la communauté qui est encore plus visiblement chimérique parmi nous, comme s’il était un seul homme doué de quelque industrie dont l’intérêt personnel ne fût pas contrarié par ce projet extravagant. Nous voulons l’égalité des droits parce que sans elle, il n’est ni liberté, ni bonheur social. » (7 juin 1792)

On ne peut affirmer que ce qui suit exprimait la pensée de Robespierre, c’est néanmoins probable. Pour lui, l’Égalité n’excluait pas la Liberté, même celle d’entreprendre ; elle n’excluait que la possibilité d’abuser, d’exploiter et d’affamer en son nom. Il n’était sans doute pas plus favorable que ses collègues du Comité de salut public aux régies, c’est-à-dire à ce que nous appellerions les entreprises nationalisées. Voici deux arrêtés aussi explicites que pertinents :

Le Comité (Carnot et C.-A. Prieur) écrit aux représentants à l’armée de l’Ouest qui ont remplacé le directeur de la fonderie d’Indret par un citoyen dont le civisme leur est connu. Il approuve cette mesure. « Nous vous observons cependant qu’on ne peut considérer ce mode que comme provisoire. Les régies en général ne conviennent point aux intérêts de la République : 1° parce que les régisseurs n’y apportent pas la même économie que des propriétaires ; 2° parce que l’expérience prouve que les perfectionnements dans les procédés s’y introduisent beaucoup plus tard, ou même ne s’y introduisent pas ; 3° parce que de pareils établissements sont entre les mains d’un ambitieux un moyen de puissance, qui peut être très dangereux pour la liberté de la nation. » (9 novembre 1793)

Le Comité (C.-A. Prieur), « considérant combien les régies nationales sont onéreuses aux intérêts de la République par le défaut d’économie, et combien elles sont défavorables au service, parce qu’elles ne livrent jamais à époques fixes ; considérant que les administrateurs des régies nationales s’occupent plus de leurs propres commodités et de l’embellissement des établissements que de l’activité des travaux et de la réalité des produits ; considérant que, dans les régies, les procédés nouveaux ne s’introduisent jamais, et que la perfection du travail ne fait aucun progrès ; considérant enfin que les régies nationales mettent à la disposition d’agents la nomination aux places, ce qui leur donne une puissance dangereuse dans un Etat démocratique », arrête de rendre à l’entreprise (c’est-à-dire aux soins de particuliers) les régies (fonderies) d’Albi et de Saint-Juéry. (14 avril 1794)

Largent, la limite de Robespierre, de la Révolution et de la Gauche

Je livre ici une analyse personnelle. Robespierre sentait d’instinct que le collectivisme tuerait la Liberté au nom de l’Égalité et déboucherait sur une tyrannie. Ses principes, qui sont ni plus ni moins que ceux de l’ordre social, condamnent donc le communisme. Mais, bien qu’il l’ait pressenti, il ignorait que Largent était la limite à ses idées qu’il réduisait au final à des vœux pieux. Pour aller plus loin, pour prôner autre chose que « moins d’inégalités », il aurait du remettre en cause Largent et donc proposer un système non-monétaire, fondé sur l’Égalité (en devoirs et en droits, dont le droit des citoyens d’accéder librement au marché du fait d’être citoyens) et le patriotisme. Mais les possibilités techniques (industrie, informatique) de mettre en œuvre un pareil système n’existaient pas au XVIIIe siècle et n’existent même que depuis peu. Robespierre était donc coincé et voué à l’échec. Largent devait gagner et c’est bien lui qui gagna. Son grand mérite fut cependant de n’avoir pas cédé à la démagogie et aux illusions, d’avoir porté les principes aussi haut que possible, de les avoir dénaturé le moins possible… permettant ainsi à d’autres d’en faire leur profit et de poursuivre son œuvre.

Dans son grand rapport, fait au nom du Comité de salut public, sur les principes de morale politique (17 pluviose - 5 février 1794), Robespierre a exposé ses conceptions et l’idéal de la Révolution française.

« Quel est le but où nous tendons ? La jouissance paisible de la liberté et de l’égalité ; le règne de cette justice éternelle, dont les lois ont été gravées, non sur le marbre ou sur la pierre, mais dans les cœurs de tous les hommes, même dans celui de l’esclave qui les oublie, et du tyran qui les nie.

» Nous voulons substituer, dans notre pays, la morale à l’égoïsme, la probité à l’honneur, les principes aux usages, les devoirs aux bienséances, l’empire de la raison à la tyrannie de la mode, le mépris du vice au mépris du malheur, la fierté à l’insolence, la grandeur d’âme à la vanité, l’amour de la gloire à l’amour de l’argent, les bonnes gens à la bonne compagnie, le mérite à l’intrigue, le génie au bel esprit, la vérité à l’éclat, le charme du bonheur aux ennuis de la volupté, la grandeur de l’homme à la petitesse des grands, un peuple magnanime, puissant, heureux, à un peuple aimable, frivole et misérable, c’est-à-dire, toutes les vertus et tous les miracles de la République, à tous les vices et à tous les ridicules de la monarchie.

» Nous voulons, en un mot, remplir les vœux de la nature, accomplir les destins de l’humanité, tenir les promesses de la philosophie, absoudre la providence du long règne du crime et de la tyrannie. Que la France, jadis illustre parmi les pays esclaves, éclipsant la gloire de tous les peuples libres qui ont existé, devienne le modèle des nations, l’effroi des oppresseurs, la consolation des opprimés, l’ornement de l’univers, et qu’en scellant notre ouvrage de notre sang, nous puissions voir briller au moins l’aurore de la félicité universelle… Voilà notre ambition, voilà notre but. » (5 février 1794)

Au-delà de la beauté de ce discours et de ses nobles intentions, on voit qu’il n’y a rien de concret, que Robespierre n’a pas de programme économique. Je veux dire que Robespierre ne proposait pas un système en adéquation avec ses principes. Il aspirait à l’Égalité et à la démocratie dans un système monétaire par nature inégalitaire et ploutocratique, pour le moins oligarchique, ce dont il avait conscience quelque part. (« Quand leur intérêt [l’intérêt des riches et du gouvernement] sera-t-il confondu avec celui du peuple ? Jamais. » Note de juin-juillet 1793) Ne remettant pas en cause le système monétaire, il était donc contraint de dénaturer ses propres principes pour les adapter à lui. Il était vaincu d’avance. (Peut-être le sentait-il et était-ce là la cause profonde de son pessimisme.) Ceux qui ne voient pas que Robespierre transigeait sans le savoir et en vain avec Largent, transigent comme lui, capitulent eux aussi devant Largent ; ils n’ont décemment aucun reproche à faire à Robespierre ni aucune leçon à donner ; ils ne peuvent pas faire mieux que lui, et beaucoup ont fait pire. Car si Robespierre ne savait pas comment renverser Largent et lui fit des concessions, au moins ne concéda-t-il rien sur les principes et ne céda-t-il pas à la tentation de proposer des systèmes contre-nature, contre la nature du système monétaire et la nature humaine, des systèmes égalitaristes, liberticides, catastrophiques et in fine tyranniques. Être lucide sur son impuissance (face à Largent) fut moins une faiblesse que sa grandeur.

COMPLÉMENT

Largent, toutefois, n’empêche pas un certain nombre de progrès sociaux, jusqu’à un certain point. Mais une fois ce point atteint, tout nouveau progrès se heurte aux lois de Largent et impose, pour avancer, de le renverser. Quiconque ne va pas jusque-là n’a dès lors que trois options : 1) se rallier purement et simplement à Largent, c’est-à-dire se convertir au capitalo-libéralisme, 2) faire comme si de rien n’était et prôner, face à la régression, le même genre de mesures sociales limitées et vaines que par le passé, 3) déserter le champ social et se faire néanmoins passer pour un progressiste en détruisant tout par ailleurs au nom d’un soi-disant progrès (déclaré, non-démontré et surtout contredit) et en ne servant en dernière analyse que les intérêts du capitalisme. Les socialistes et la « gauche » en général, qui ne méritent plus désormais le nom de gauche, au mieux celui de « gaucherie », ont choisi cette dernière option.

Comme on l’a vu plus haut, ils ont abandonné les travailleurs autochtones au profit des immigrés. De là leur renoncement à la France au nom de la République (et de « l’Europe »), leur baratin sur l’immigration « chance pour la France », sur le droit à la différence, sur l’antiracisme, sur la société multiculturelle, sur le métissage, etc. ; de là, aussi, leur baratin sur la parité, le mariage homosexuel, la théorie du genre (la négation des sexes sous prétexte d’Égalité), autant de thèmes que Robespierre n’a évidemment jamais traités et que Mélenchon qui se prétend robespierriste fait siens. Mais ses principes laissent assez voir qu’il les aurait tenus pour des aberrations, pour le moins.

La théorie du genre

Robespierre ne négligeait pas l’influence de la société sur les individus, mais il était clair, pour lui, que le genre humain est partagé entre les hommes et les femmes, que les hommes ne sont pas des femmes, ni les femmes des hommes, que la nature a créé cette distinction que la société ne saurait nier. Il n’aurait pas été de ceux qui prétendent que le caractère des hommes et celui des femmes n’est que le fruit d’un conditionnement social et qu’un même traitement en ferait des êtres pour ainsi dire neutres. Loin d’ailleurs de favoriser un traitement uniforme et aberrant, il était partisan d’un traitement distinct.

« Quelle est la forme d’habillement complet des enfants de l’un et l’autre sexe, le plus commode et le plus économique ? Il sera présenté deux modèles, l’un pour l’habillement des garçons, l’autre pour celui des filles. » (Plan d’éducation de Michel Le Peletier, lu par Robespierre le 13 juillet 1793)

Sur la Parité dans les élections

Impossible de savoir ce que Robespierre aurait pensé du droit de vote pour les femmes, mais il aurait assurément considéré comme contraire à tous les principes l’exigence de la parité homme-femme dans les élections, non qu’il soit injuste que des femmes puissent se présenter, mais parce qu’il est notoire qu’il y a beaucoup moins de femmes que d’hommes en politique et que, par conséquent, réserver autant de places pour les unes que pour les autres est une distinction fondée sur le sexe en faveur des femmes et une injustice vis-à-vis des hommes de talents écartés de la course sans raison valable. Sans parler des difficultés artificielles créées aux partis comptant peu de femmes dans leurs rangs. Pour Robespierre, les citoyens prétendant à des fonctions publiques ne pouvaient être distingués que par leurs talents et leurs vertus.

« Tous les citoyens sont admissibles à toutes les fonctions publiques, sans aucune autre distinction que celle des vertus et des talents, sans aucun autre titre que la confiance du peuple. » (Art. 21 de sa Déclaration, lue au Jacobins le 21 avril 1793 et adoptée par eux à l’unanimité.)

Sur le mariage homosexuel

Pour Robespierre, la loi ne devait imposer (ou autoriser) que ce qui est utile à la société (citations ci-dessous). Outre que l’idée de mariages entre personnes de même sexe ne lui serait jamais venue à l’esprit, lui qui avait pourtant soutenu le droit des prêtres de se marier (31 mai et 22 juin 1790), il est vraisemblable qu’il l’aurait même trouvée contre-nature, non que l’homosexualité n’existe pas, mais elle n’est pas dans l’ordre naturel des choses, puisqu’elle est naturellement stérile. Le mariage, pour Robespierre, ne se concevait qu’entre un homme et une femme comme une institution sociale servant non seulement à consacrer l’union entre eux mais aussi à assurer un cadre aux enfants éventuels qui sont l’avenir de la société. Or les mariages homosexuels ne produisent pas d’enfants, ils n’ont aucune utilité pour la société. Pire ! en plaçant les couples homosexuels sur un pied d’égalité avec les couples hétérosexuels, la société pour qui la loi doit être la même pour tous, reconnaît aux premiers, à l’instar des seconds, le droit d’adopter des enfants, alors que, dans leur cas, c’est la nature elle-même qui leur a refusé la possibilité d’en avoir. S’ils n’en ont pas, ce n’est point ici un accident, mais la norme. Autrement dit, la société devrait violer les principes de la nature elle-même pour satisfaire, sans aucun intérêt pour elle, aux caprices de quelques individus. (« L’humanité consiste surtout à aimer la patrie et à faire le bien des hommes, et non à sacrifier l’intérêt de la société entière à celui d’un particulier. » 23 août 1790) Jamais Robespierre n’aurait soutenu une pareille hérésie ; nul doute qu’il l’aurait au contraire combattu de toutes ses forces. Mais Mélenchon est pour !

« Toutes les fonctions publiques sont d’institution sociale : elles ont pour but l’ordre et le bonheur de la Société ; il s’ensuit qu’il ne peut exister dans la société aucune fonction qui ne soit utile. » (31 mai 1790)

« L’utilité générale, dites-vous ! Mais est-il rien d’utile que ce qui est juste et honnête ? Et cette maxime éternelle ne s’applique-t-elle pas surtout à l’organisation sociale ? Et si le but de la société est le bonheur de tous, la conservation des droits de l’homme, que faut-il penser de ceux qui veulent l’établir sur la puissance de quelques individus, et sur l’avilissement et la nullité du reste du genre humain ? Quels sont donc ces sublimes politiques qui applaudissent eux-mêmes à leur propre génie, lorsque, à force de laborieuses subtilités, ils sont enfin parvenus à substituer leurs vaines fantaisies aux principes immuables que l’éternel législateur a lui-même gravés dans le cœur de tous les hommes ? » (discours contre le marc d’argent, mars 1791)

« La loi ne peut défendre que ce qui est nuisible à la société ; elle ne peut ordonner que ce qui lui est utile. » (Déclaration, art. 17, 21 avril 1793)

« En fait de politique, rien n’est utile que ce qui est juste et honnête » (16 mai 1791)

« Dans le système de la Révolution française, ce qui est immoral est impolitique ; ce qui est corrupteur est contre-révolutionnaire. » (5 février 1794)

CONCLUSION

En adoptant ces positions, qui toutes, en dernière analyse, visent à détruire les derniers îlots de résistance naturelle au capitalisme et à accélérer la marchandisation du monde, Mélenchon qui sur certains sujets se tient bien, se fait le complice du capitalisme. Il n’est pas de ceux qui veulent ouvertement détruire la nation au nom de Largent (libre concurrence), mais de ceux qui la détruisent en premier lieu au nom de l’humanité (droits de l’homme).

« Les ennemis intérieurs du peuple français se sont divisés en deux factions, comme en deux corps d’armée. Elles marchent sous des bannières de différentes couleurs et par des routes diverses : mais elles marchent au même but. » (5 février 1794 – 17 pluviôse an II)

Mélenchon n’a finalement d’ennemi que le Front National (actuel), c’est-à-dire les patriotes français qui n’acceptent pas l’invasion et la destruction de leur pays, c’est-à-dire ceux qui, aussi bien sur le plan social que sur le plan politique, sont les plus proches des idées de Robespierre.

10:24 Écrit par Philippe Landeux dans 6. MON BLOG | Lien permanent | Commentaires (2) |  Facebook | |  Imprimer |

vendredi, 04 mars 2016

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11:09 Écrit par Philippe Landeux dans - REVOLUTION 1789-1794 | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook | |  Imprimer |