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dimanche, 30 octobre 2022

PRINCIPAUX ARTICLES du blog

Mes textes sont généralement des réflexions de fond. Mais ils tombent dans les oubliettes des archives à mesure que le temps passe alors que tous sont d’actualité. Il me paraît donc utile d’indiquer les plus importants sur un même document qui sera maintenu en première page, afin que vous puissiez les trouver facilement. Les plus récents sont néanmoins signalés en rouge.

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01:59 Écrit par Philippe Landeux dans 6. MON BLOG | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook | |  Imprimer |

L’EXPRESSION MALADROITE OU MALHEUREUSE : « ABOLITION DE L’ARGENT »

À l’heure où le monde tourne autour de l’argent (Mais n’en est-il pas ainsi depuis fort longtemps ?), vouloir abolir ce dernier pour changer le monde est assurément l’idée la plus pertinente et la plus audacieuse. C’est du moins ce que peuvent penser à bon droit ceux qui ont cette volonté. Pourtant, l’expression « abolir l’argent » ou « abolition de l’argent » est maladroite voire malheureuse. À moins d’être utilisée pour se mettre à portée du grand public, elle est révélatrice des dispositions d’esprit de ceux qui l’emploient et des limites de leur pensée (en dépit d’une bonne intuition) ; elle annonce qu’ils sont tombés dans un piège dans lequel ils cherchent à entraîner et à enfermer les autres.

Il va de soi qu’un véritable et durable changement implique de sortir du système monétaire d’une manière qui empêche d’y revenir par la force des choses et consiste donc à adopter un paradigme radicalement différent, totalement étranger au précédent. Autrement dit, il s’agit, pour les penseurs, d’adopter un nouveau mode de pensée. Or vouloir « abolir l’argent » annonce la volonté de s’opposer à l’argent et, ce faisant, à se placer sur son terrain, c’est-à-dire à partir de la problématique telle que l’argent la pose, à laisser l’argent fixer les termes du débat et le cadre de la question. En clair, s’opposer à l’argent — qui conditionne tout — réduit le problème à la question de l’échange, quand il s’agit d’avoir une vision globale dont le mode d’échange n’est qu’un aspect des choses et, surtout, qu’une conséquence des Principes généraux adoptés. En somme, l’expression « abolition de l’argent » annonce une approche réductrice des choses et révèle que le problème, étant regardé par le petit bout de la lorgnette, ne sera pas résolu convenablement, que la solution consistera à proposer un ensemble de mesures discutables et non à poser, en premier lieu, un corps de Principes irréfragables. Il est certes naturel que des réflexions sur le système monétaire et, par suite, l’idée d’abolir l’argent soient le premier déclic pour chercher enfin dans la bonne direction, mais, pour faire œuvre révolutionnaire, il est nécessaire de s’affranchir de l’argent une fois passé ce premier cap.  

Le but n’est pas d’« abolir l’argent » mais d’instaurer l’Égalité. Il n’est pas seulement de sortir du système monétaire, il est avant tout d’établir la Société — ce qui implique à la fois de savoir ce qu’est une Société, de reconnaître que nous ne sommes pas en Société du fait de l’argent et de comprendre pourquoi. Il ne s’agit pas de s’opposer intuitivement à l’argent mais de condamner la logique monétaire au nom de la logique sociale. Mais, pour pouvoir mettre ces deux modèles en parallèle, encore faut-il découvrir en quoi consiste le second, celui de la Société, celui que l’argent détruit précisément et empêche de penser judicieusement, nous empêchant ainsi de l’établir faute de le concevoir. Inversement, il n’y a qu’en sachant vraiment ce qu’est une Société que, par comparaison, l’on peut savoir ce qu’est réellement l’argent et donc le combattre efficacement. C’est là un cercle vicieux dont il est a priori impossible de sortir puisque, pour en sortir, il faut avoir tous les outils alors que l’on en a aucun. Soit l’on sait ce que sont fondamentalement une Société et « l’argent », soit on ignore à peu près tout de l’un et l’autre.  

Mais pourquoi dis-je que le but est d’instaurer l’Égalité ou d’établir la Société, ce qui revient au même puisque l’Égalité est le principe fondamental de l’ordre social ? Parce que le système monétaire est intrinsèquement inégalitaire, que c’est là son crime, que tout système fondé sur l’inégalité tend vers toujours plus d’inégalité, qu’il ne s’agit donc pas de réduire les inégalités et de perpétuer l’inégalité sous une forme ou une autre — soit en perpétuant le système monétaire lui-même malgré des dispositions illusoires, soit en instaurant un système reposant, plus ou moins subtilement, sur tout ou partie des mêmes ressorts —, mais bien d’instaurer un système « autre », qui ne peut donc être fondé que sur l’Égalité. Seule l’Égalité diffère de l’inégalité et donc du système monétaire. 

Mais qu’est-ce que l’Égalité ? Il n’y en a qu’une : l’égalité en droits, donc l’égalité en devoirs, donc l’égalité entre citoyens en devoirs et en droits. L’Égalité n’est pas une notion vague, une égalité en on ne sait quoi. Il n’y a que sur le plan des droits (et des devoirs) que des individus différents par nature peuvent être égaux aux yeux de la Société. Il n’y a que la Société qui soit capable de la garantir. Il n’y a qu’entre citoyens d’une même Société qu’elle peut exister. L’Égalité en rien entre tous les hommes de l’univers est plus qu’une chimère ; c’est une foutaise. Non seulement cette conception absurde de l’Égalité ne peut déboucher sur rien de concret, sinon sur des lubies d’uniformisation tous azimuts, mais encore elle discrédite le Principe que tous les révoltés devraient adopter et prôner et dresse contre lui, au seul profit du système monétaire, toutes les bonnes volontés. Elle est révolutionnairement contre-révolutionnaire. L’expression « L’enfer est pavé de bonnes intentions » n’a pas de meilleure illustration.       

Les droits ne tombent pas du ciel. Il ne suffit pas de les décréter pour qu’ils existent. Ils n’existent pas si personne ne les génère et si aucune Société ne les garantit. C’est précisément pour avoir des droits que des individus forment une Société. C’est d’abord par instinct de conservation qu’ils s’unissent à des congénères pour survivre autant que faire se peut — face aux autres congénères, aux autres espèces et à tous les périls de la nature —, en se protégeant mutuellement. Le Principe d’Égalité (en devoirs et en droits) apparaît dès l’origine de la Société — que j’appelle aussi « association politique ». Font partie de la Société et sont « citoyens » les individus qui contribuent à la protection des autres et bénéficient, en retour, de leur protection, qui tous remplissent donc le même devoir pour jouir du même droit à la Sécurité. Il va de soi que la façon dont les citoyens remplissent leurs devoirs et la forme des droits qu’ils génèrent et dont ils peuvent jouir dépendent des capacités de l’espèce à laquelle ils appartiennent et que, plus une espèce en a, plus les devoirs ont de formes possibles et plus le champ des droits est étendu. Autrement dit, les Principes sont immuables mais leur application est plus ou moins souple selon l’espèce, voire selon la Société. En développant, on trouve que tous les citoyens ont le devoir de participer à la vie de la Société, sous une forme reconnue par elle, pour jouir, en retour, de tous ses bienfaits. Ceci est une constante universelle. On l’observe dans toutes les sociétés animales. Elle doit aussi être la règle des sociétés humaines. Tel n’est pourtant plus le cas, et ce en raison des facultés propres aux hommes qui, si elles n’invalident pas le Principe en théorie, les ont amené à recourir à des pratiques qui l’ont invalidé de fait. 

Les hommes ont la capacité individuelle de fabriquer des choses indivisibles. S’ils peuvent fabriquer pour satisfaire des besoins personnels, ils peuvent aussi fabriquer pour satisfaire les besoins d’autrui, à condition, toutefois, que les uns et les autres échangent leurs produits respectifs. Ainsi naît le troc et, avec lui, la notion de valeur marchande, puisque échanger des objets contre d’autres objets revient à les mettre en équivalence (même valeur). Mais les besoins d’un producteur A ne correspondent pas toujours, et même pas souvent, à ceux du producteur B qui produit ce dont il a besoin, et vice versa. L’échange ne devient possible qu’en recourant à une tierce personne C et en se pratiquant en deux temps. Un premier échange, avec la tierce personne C, permet à A d’obtenir une chose qu’il peut alors échanger avec B contre la chose qu’il désire réellement. Ce type d’échange peut même avoir lieu à contretemps, c’est-à-dire qu’une chose acquise par un premier échange direct n’est échangée que bien plus tard contre autre chose. Mais dans les deux cas, qu’il y ait intention ou non, l’échange indirect met en œuvre des objets qui servent d’intermédiaires, d’autrement dit de moyens d’échange. Sous le troc, tout peut servir à l’occasion de moyen d’échange. Mais, avec l’expérience, il apparaît que certaines choses sont plus désirées et plus pratiques en tant que moyen d’échange. Une sélection s’opère et c’est ainsi que naissent les monnaies dites primitives. Observons que ces monnaies primitives ne sont qu’une amélioration d’un point de vue pratique d’un concept préexistant, lequel est perpétué tel quel. Par la suite, de nouvelles améliorations sur la forme accouchent des monnaies standards, jusqu’à ce que la technologie permette de ne plus conserver des monnaies que la notion d’unité. Tous les éléments du système monétaire (échange entre individus, échange d’objets entre eux, notion de valeur, notion d’unité, notion de moyen d’échange) viennent du troc que les premiers producteurs pratiquent faute de mieux, sans comprendre ce qu’il implique et sans en mesurer les conséquences. Des centaines, des milliers de générations leur ont emboîté le pas sans se poser plus de questions qu’eux, sans comprendre les tenants et les aboutissants du mode d’échange qui était au cœur de leurs vies. Il est temps de comprendre.

Le troc repose sur une logique fondamentalement antisociale. Pour pouvoir être pratiqué, les producteurs doivent être propriétaires de leur production, car ils ne peuvent échanger que des biens qui leur appartiennent. Si la chose ne nous choque pas, c’est qu’elle est conforme à la logique monétaire que nous avons intégrée et qui nous paraît naturelle. Or, dans cette logique, l’activité n’est plus un devoir envers la Société et les droits ne sont plus garantis par elle. Chacun s’active dans son coin pour se ménager lui-même des droits. Il n’y a plus de devoirs du citoyen, plus de droits du citoyen ; il n’y a plus de citoyens et plus de Société. Ce qui tient lieu de « société » n’est plus alors qu’une concentration d’individus. L’interdépendance de ces derniers est occultée par une illusion d’indépendance.

L’échange direct (troc) ou indirect (via une monnaie) entre individus a ceci de paradoxal qu’il confirme que ceux-ci sont interdépendants, que leurs activités respectives sont complémentaires, alors que chacun, en retirant les droits équivalents à la valeur accordée à sa production, croit que ses droits ne dépendent que de lui et qu’il est donc indépendant des autres. Obligés de jouer à ce jeu, les hommes ne réalisent pas qu’il engage leurs droits, ces droits qui devraient être égaux entre des citoyens. La chose est discutable quand, sous le troc, l’échange ne concerne que du droit de propriété ; elle est indiscutable quand, sous la monnaie, la plupart des droits (manger, se loger, se vêtir, circuler, se divertir, etc.) passent par le droit d’accéder au marché conféré par la monnaie. Dans le système monétaire, qui n’a pas d’argent n’a pas accès aux bienfaits de la « société » et n’a donc aucun de droit. Par ailleurs, comme la monnaie ne peut pas se répartir également, les individus sont inégaux en droits. En outre, un même individu a de moins en moins de droits à mesure qu’il les exerce, c’est-à-dire qu’il paie et dépense son argent. Il n’est donc même pas égal à lui-même dans le temps. Encore une fois, ces aberrations ne nous choquent pas car elles sont dans la logique du système monétaire que nous avons intégrée. Mais, dans la logique sociale, les droits du citoyen ne s’amenuisent pas au fur et à mesure que le citoyen les exerce. C’est l’objet sur lequel il les exerce qui se réduit ou peut se réduire, non son droit. Autrement dit, la Société reconnaît et garantit des droits à ses citoyens, lesquels peuvent les exercer tant que la réalité des choses le permet. Et si la réalité ne le permet plus ou limite les possibilités, ce n’est pas parce que la Société intervient et que les citoyens ont moins de droits.  

Rappelons qu’un citoyen a le devoir de participer à la vie de la Société — ou Cité —, selon ce que celle-ci considère comme une participation, et a, en retour, le droit de profiter, à l’égal de ses concitoyens, de tous ses bienfaits. Dans la mesure où, chez les hommes, une partie de ces bienfaits consiste en produits (et services) mis sur le marché, le droit de profiter des bienfaits de la Société implique celui de pouvoir accéder librement au marché. C’est la citoyenneté, le fait d’être citoyen, qui confère ce droit, c’est-à-dire le droit, pour tout citoyen, d’aller dans tout magasin et de prendre ce que bon lui semble (des lois peuvent néanmoins limiter ou réglementer l’accès à certains produits). Si le droit d’accéder librement au marché est attaché à la citoyenneté et conféré par elle, alors il n’est plus ni incarné ni conféré par une monnaie ; il n’y a tout simplement plus de monnaie, plus de prix, plus de valeur marchande ; les citoyens sont réellement égaux en droits et le système n’est plus monétaire. 

Il y a deux conditions pour que le système découlant de ce Principe soit viable : 1) Il faut que la production soit importante, sans quoi un droit d’accès illimité n’a jamais de réalité et perd tout son sens, 2) Il faut que la Société puisse aisément constater l’activité des individus avant de leur reconnaître la citoyenneté et les droits qui vont avec, et que les citoyens disposent d’un moyen simple et sûr pour attester leur citoyenneté auprès des commerçants avant que ceux-ci ne leur laissent prendre quoi que ce soit, sans quoi la prévarication et l’arnaque à tous les étages paralyseraient le système avant de le faire s’effondrer.  Pendant longtemps, aucune de ces conditions n’exista. L’industrialisation a satisfait la première. Un à deux siècles plus tard, l’informatique a satisfait la seconde. Les deux conditions sont aujourd’hui réunies. Il devient possible de sortir du système monétaire. Mais les hommes n’en ont pas encore l’idée, et ceux qui y pensent ne savent pas comment. 

Les conditions favorables à l’instauration de l’Égalité sont apparues progressivement. Il est logique que l’industrialisation seule n’ait pas provoqué la remise en cause de la monnaie. Il est plus surprenant de constater que l’informatique et les technologies afférentes n’aient pas davantage provoqué de déclic collectif. C’est que cette révolution bouleverse non seulement la façon de faire mais encore la façon de penser et que les habitudes ont une grande force d’inertie et perdurent même quand elle n’ont plus de raison d’être. La monnaie, qui découle d’une certaine conception de l’échange (et de l’absence de considérations sociales), impose des pratiques qui, à leur tour, inculquent des préjugés qui confortent ou ramènent aux dites pratiques et donc à la monnaie. Ces trois éléments (et même quatre) forment une chaîne ou un cercle vicieux. Quiconque est attaché au moins à l’un d’entre eux est prisonnier du système monétaire, qu’il ne veuille pas en sortir ou qu’il ne sache pas comment. Et vouloir « abolir l’argent » trahit, justement, cette incapacité.

« Abolir », c’est annuler, interdire ou supprimer légalement quelque chose sur laquelle la loi peut avoir prise. En l’occurrence, l’« abolition de l’argent » ne peut concerner que la monnaie et consiste à supprimer celle-ci ou à interdire d’y recourir lors des échanges. (Remarquons déjà que, en temps normal, seul un État peut prendre et imposer de telles décisions. La monnaie peut aussi disparaître ou perdre toute valeur lors d’un effondrement social, mais on ne peut alors parler d’« abolition ».) Il va de soi que supprimer la monnaie empêche les pratiques impliquant l’usage direct de monnaie, mais pas celles dans lesquelles la monnaie n’est qu’accessoire, le troc étant la plus évidente. Mais il va aussi de soi que supprimer la monnaie ne détruit pas les préjugés que des millénaires de pratique ont inoculé dans les esprits, des préjugés dont on ne soupçonne ni l’existence ni la nature ni l’origine. On n’abolit pas des préjugés ! Enfin, on pourrait croire que vouloir abolir la monnaie résulte d’une profonde analyse de ce qu’est la monnaie et de tout ce qui l’entoure alors que cela exprime une réaction aux conséquences les plus visibles et les plus révoltantes du système monétaire, une réaction légitime, certes, mais superficielle. Observons qu’il ne s’agit pas de proposer un nouveau mode d’échange mais de s’opposer et de faire table rase de celui qui est sans s’attarder sur les concepts qui le soutiennent, sans connaître ces concepts, sans être en mesure d’élaborer une conception qui rompe réellement avec celle de l’argent. C’est réduire la monnaie à des bouts de papier qu’il suffit de brûler. 

Qu’est-ce que la monnaie ? À cette question, tout le monde répond : des pièces, des billets, des unités de valeur, un moyen de paiement, un moyen d’échange, un moyen qui facilite les échanges [par rapport à quoi, si ce n’est au troc, qui est le même mode d’échange ?], du pouvoir, la liberté, le mal, Satan, le reflet des hommes, etc. Tout n’est pas faux. Cependant, personne ne dit, plus judicieusement, que c’est du droit, du droit de s’approprier, du droit d’accéder au marché, donc un peu de tous les droits qui impliquent d’y accéder. Mais même cette réponse passe encore à côté du plus important. La monnaie, c’est avant tout la manifestation d’une certaine conception de l’échange, d’une conception individualiste, matérialiste et asociale. 

Oui, la monnaie consiste en unités de valeur (marchande), dont le support matériel peut varier et même disparaître, preuve que les supports n’ont jamais été qu’un prétexte. Mais un prétexte à quoi ?

Pourquoi recourt-on, dans les échanges, à des unités de valeur ? Parce que notre conception de l’échange implique d’y recourir ; parce que des unités de valeur matérialisent ou symbolisent la notion de valeur marchande et que nous croyons que la notion de valeur marchande est nécessaire pour échanger. Cette croyance est ce que le Civisme appelle « Largent ». Sans cette croyance, sans Largent, la monnaie n’a aucun sens. Largent n’est pas la monnaie ; il est en amont d’elle ; il est plus important qu’elle ; c’est sur lui que repose véritablement le système monétaire. C’est parce que nous croyons que la notion de valeur marchande est nécessaire pour échanger que nous recourons à des unités de valeur nommées « monnaie » et que cela nous semble tellement naturel que nous ne concevons pas l’échange autrement. 

Mais cela n’a rien de naturel. La monnaie ne pousse pas sur les arbres ! Largent lui-même (cette fameuse croyance) ne flotte pas dans l’air ! Il n’existe nulle par ailleurs que dans la tête des hommes. Ceci étant, même s’il n’existe que dans la tête des hommes, de tous les hommes, et même si aucun d’eux n’en a conscience, il y est. (La preuve est que le système est monétaire et que, à de rares exceptions près, nul ne le remet en cause, nul ne voit dans la nature monétaire du système la cause des effets que beaucoup, en revanche, déplorent.) Il faut donc s’intéresser à lui. C’est ce que nous allons faire. Mais remarquons que cela supposait de l’identifier, ce que ne peuvent parvenir à faire ceux qui veulent « abolir la monnaie », croyant qu’elle est si peu de chose qu’elle peut être balayée d’un revers de main ou d’un trait de plume, ne sachant finalement pas plus ce qu’elle est que ceux qui disent d’elle, pour ne pas la remettre en cause, qu’« elle n’est qu’un moyen ».

La réalité est que la monnaie n’est pas le cœur du problème, car elle n’est elle-même qu’une conséquence de Largent. De par sa nature et ses principes de fonctionnement, la monnaie est bien sûr source de problèmes, mais, pour qu’elle crée ces problèmes, il faut d’abord qu’elle existe. Or elle n’existe qu’à la suite de Largent qui, lui, peut exister sans elle. Elle doit disparaître, mais elle ne peut disparaître définitivement qu’avec la disparition de Largent lui-même.

Nous savons déjà que Largent est une croyance, la croyance que la notion de valeur marchande est nécessaire pour échanger. Mais comment les hommes ont-ils pu concevoir une chose aussi abstraite et absurde que la notion de valeur marchande, inconcevable pour qui ne la conçoit pas déjà, alors que ceux qui la conçoivent n’en ont même pas conscience ? En fait, ils ne l’ont pas conçue. Ils n’ont pas décidé, un beau jour, de faire reposer leurs échanges sur la notion de valeur marchande. C’est par la pratique du troc que cette conception est née et s’est imposée à eux en tant que croyance. (En admettant que le troc ne soit pas la véritable origine de la monnaie, comme certains l’affirment sans avoir eux-mêmes identifié Largent, donc sans expliquer l’origine de ce dernier, cela ne change rien à ce que nous allons dire sur lui ni sur Largent.)

Le troc — c’est-à-dire l’échange direct d’objets entre entités (individus ou groupes) — est la façon la plus naturelle d’échanger entre des individus qui établissent entre eux une relation et le seul mode d’échange possible entre des producteurs artisanaux voire occasionnels. Il est sans doute arrivé que des hommes s’échangeassent un fruit ou un bout de viande contre une peau, un bâton ou un caillou. Mais, lorsqu’ils maîtrisèrent des techniques de fabrication et, surtout, lorsqu’ils se spécialisèrent dans la fabrication d’objets uniques et indivisibles, ils n’eurent d’autre possibilité, pour vivre de leur art, que d’échanger leurs produits contre ceux d’autres producteurs. La pratique du troc — direct ou indirect, entre individus ou entre communautés — s’est ainsi instaurée par la force des choses, sans réflexion. Les hommes avaient alors d’autant moins de raisons de se défier de cette pratique que, dans leurs conditions, elle ne prêtait guère à conséquence. Du moins en apparence ! Car, aussi anodine qu’ait pu être cette pratique dans les premiers temps, elle portait déjà en elle tous les malheurs du monde, du point de vue des Principes.

C’est en échangeant des objets les uns contre les autres, en établissant des équivalences entre telle chose et tant d’une autre, qu’est née la notion de valeur marchande et, avec elle, la croyance qu’elle est nécessaire pour échanger. Le piège était à peine ouvert qu’il s’était déjà refermé sur eux. Les hommes tombèrent dedans sans s’en apercevoir, et la plupart d’entre eux ne le voient toujours pas.

Comme on le voit, la notion de valeur marchande implique une mise en équivalence d’objets, donc un échange entre individus producteurs et propriétaires desdits objets. Autrement dit, la notion de valeur marchande est liée à un certain mode d’échange, au troc en l’occurrence, de sorte que la concevoir condamne à pratiquer ce mode d’échange, comme pratiquer l’échange sur ce mode condamne à y recourir. Largent met des œillères. Il interdit de voir autre chose que ce à quoi il condamne ; il oblige à nier et à rejeter, en dépit du bon sens, tout ce qui contrevient à sa logique.

Avant même d’amener à recourir à des unités de valeur usuelles (monnaies primitives), puis standard (monnaies modernes, métalliques ou papier), Largent (ou la notion de valeur marchande ou le troc, c’est la même chose) impose aux individus de posséder ce qu’ils échangent, donc, généralement, d’être propriétaires de leur production et reconnus comme tels. Tout ceci est dans la logique monétaire et n’a donc rien de choquant pour un capitaliste. Mais cela signifie : 1) que les individus doivent désormais s’activer dans leur coin pour se ménager eux-mêmes des droits via l’échange de leur production (plus tard, en obtenant de la monnaie en échange) et donc que leur activité ne relève plus du devoir de participer à la vie de la cité et ne génère pas le droit de profiter de ses bienfaits (et d’avoir accès librement ou via un partage équitable à la production des autres), 2) que, puisque les individus n’ont plus ni les devoirs ni les droits d’un citoyen, ils ne sont pas citoyens et que la Société n’existe plus. Cela signifie aussi 3) que le « chacun pour soi » généralisé n’est viable que dans le cadre d’un commun accord d’après lequel le fantôme de Société reconnaît et garantit à chacun un droit de propriété à la fois sur ses productions et sur les biens obtenus par échange alors même que tout ceci ne concerne la Société sous aucun rapport, ce droit n’étant donc pas reconnu pour se conformer aux Principes mais pour permettre ce mode d’échange malgré ses aberrations.

Cette forme d’échange qui focalise sur les objets et leur soi-disant valeur fait fi de toute considération sociale. Quoique l’échange soit, par nature, au cœur des rapports sociaux, comment un mode d’échange individualiste et matérialiste, qui méconnaît la Société, pourrait-il être garant de l’harmonie sociale ?

Par ailleurs, l’échange fondé sur la notion de valeur (marchande) est nécessairement inégalitaire. Déjà, il n’y a de valeurs que s’il y a des valeurs différentes, différences qui finissent par se traduire par des inégalités en droits. Cela dit, si dans les premiers temps du troc, les protagonistes des échangent cherchèrent sans doute l’équité en prenant en compte nombre de considérations (temps de production, difficulté, danger, etc.), ce mode d’échange a vite amené les individus à ne rechercher que leur profit en jouant sur les soi-disant valeurs pour fixer un prix à leur avantage (en exagérant la valeur de leur production ou de leur service, en dénigrant les produits et services de l’autre). Ce mode d’échange fondé sur des notions fumeuses donne toujours lieu à des déséquilibres qui permettent à leurs les bénéficiaires d’acquérir une position dominante. (Oubliée la complémentarité des Citoyens !) Au final, les valeurs (les prix) ne sont jamais que l’expression d’un rapport de force. Les prix sont hauts ou bas selon les intérêts du plus fort.

Il est encore plus évident que le système monétaire, qui procède du troc, est inégalitaire. C’est le même mode d’échange. La seule différence réside dans le fait que, alors que sous le troc tout peut servir à l’occasion de moyen d’échange, la monnaie est le moyen d’échange officiel. C’est le même mode d’échange, mais la monnaie, de par ses propriétés propres, en décuple les effets. En matérialisant les droits — des droits limités en proportion des unités dont on dispose, des droits dont tout le monde cherche à jouir, des droits que l’on perd aussitôt qu’on les exerce, des droits qui passent de main en main (à l’instar des objets sous le troc), des droits qui s’acquièrent aux dépens d’autrui, des droits dont on peut être dépouillé par la force  —, elle fait d’eux l’objet d’un jeu, un jeu dont elle a fixé les règles. Ce qu’est la monnaie et la façon dont elle s’utilise tient à ses origines et est indépendant des hommes. Ces derniers peuvent dépenser leur argent comme bon leur semble et croire ainsi que la monnaie est « neutre ». En fait, ils ne peuvent pas utiliser la monnaie autrement que comme il est prévu qu’elle le soit. Se procurer de l’argent auprès d’un tiers (de quelque manière que ce soit) pour ensuite le donner à un autre (acheter, payer) n’est pas un choix des hommes ; c’est une règle de la monnaie, une règle qui vient du troc. Que chacun n’ait que les droits que l’argent qu’il a gagné personnellement lui procure (le temps de le dépenser) et qu’il n’ait d’yeux que pour ses gains, ses économies, ses dépenses, ses factures, son nombril n’est pas dans la logique sociale ; c’est une conséquence de la monnaie. Que la monnaie circule selon le principe des vases communicants, se concentre entre quelques mains selon le principe de l’attraction et génère des inégalités croissantes n’est pas un fait du hasard ; c’est la règle de la monnaie. (Le Monopoly finit toujours de la même manière quels que soient les joueurs.) Aucune loi ne peut contrecarrer (durablement) les effets de la monnaie tant que le système est monétaire. Et on ne peut pas échapper au système monétaire tant que l’on croit en Largent.

Mais il ne suffit pas, non plus, de vouloir « abolir l’argent » pour s’attaquer réellement à Largent et saper radicalement le système monétaire. La monnaie est une conséquence de Largent, et c’est déjà une audace extraordinaire de vouloir l’abolir, mais ce n’est qu’une conséquence parmi beaucoup d’autres, comme un arbre cache la forêt. Remettre en cause la monnaie de manière intuitive sans avoir identifié les autres conséquences pratiques et psychologiques de Largent, et donc en acceptant ces conséquences, en les perpétuant et en les reproduisant, c’est servir Largent lui-même. Mais comment savoir que l’on est dans ce cas quand on ne connaît pas le concept de Largent propre au Civisme ? C’est simple. Nous avons vu les principales caractéristiques du système et des réflexes qui découlent de Largent : échange focalisé sur les objets, échange entre individus, individus propriétaires de leur production, individus devant se ménager des droits au lieu de jouir des droits du Citoyen, système individualiste, système d’unité, des unités qui circulent, des unités qui incarnent, confèrent et limitent le droit d’accéder au marché (et tous les autres), des individus inégaux en droit d’accéder au marché. Tous ces aspects procèdent de la même logique et sont liés les uns aux autres. Quiconque en accepte un seul cautionne le tout, qu’il le veuille ou non. Certains aspects le rebutent plus que d’autres parce qu’ils vont davantage à l’encontre de sa sensibilité personnelle et surtout parce que, n’ayant pas identifié Largent et la véritable racine du système monétaire, il ne va pas au bout de la logique sociale.

Il faut en effet savoir ce qu’est l’Égalité bien comprise pour pouvoir reconnaître ce qui est inhérent à Largent. Pour faire simple, l’Égalité, c’est l’égalité des Citoyens en Devoirs et en Droits, en devoirs notamment de participer à la vie de la Cité selon ce que celle-ci considère comme une participation, et en droit de profiter de tous les bienfaits de la Cité, notamment en ayant le droit d’accéder librement au marché. L’Égalité exclut le recours à une monnaie ; la Cité n’est pas et ne peut pas être un système monétaire. (Le Civisme explique comment une Cité peut continuer à avoir des échanges avec les pays restés monétaires. Ce faux problème n’est qu’un prétexte pour éluder les Principes et rejeter la véritable Égalité au profit du capitalisme ou de chimères contre-révolutionnaires.) L’Égalité n’est pas universelle ; elle n’existe qu’entre les Citoyens qui forment la Cité, donc un peuple, une nation, un pays. Des Citoyens véritablement égaux (en droits) grâce à la Cité sont nécessairement patriotes et attachés autant à l’indépendance de leur pays qu’à la souveraineté du peuple (le leur et tous les autres), c’est-à-dire à la Démocratie au vrai sens du terme, à savoir un système dans lequel les lois sont, sinon faites directement, du moins ratifiées par le peuple.

Et les choses sont bien faites ! Les Citoyens de chaque Société doivent être égaux entre eux, mais il n’y a d’Égalité qu’entre Citoyens d’une même Société. Il en est de même de l’inégalité ; elle n’a de sens qu’entre individus du même peuple, du même pays, appelés à former la Cité. C’est pour lui-même qu’un peuple — ou les individus d’un même peuple conscients que leur Citoyenneté est bafouée et sachant comment établir l’Égalité — peut faire la Révolution. La Révolution ne peut être faite que par lui et pour lui. La nation, future Cité, est le cadre et le levier de la Révolution. Quiconque veut dépasser ce cadre, pour quelque raison que ce soit, et briser ce levier, de quelque manière que ce soit, ne veut pas de l’Égalité ou en a une idée fausse et, interdisant toute révolution réelle, car empêchant de la faire ici sous prétexte de la faire partout, fait le jeu de Largent dont il contribue à perpétuer l’existence et le règne.   

Avec ceci, ajouté à tout ce que nous avons dit précédemment, il devient facile de dégager les principaux axes sur lesquels se retrouvent les défenseurs conscients ou non de Largent, donc du capitalisme et de son cortège de fléaux :

1) LA MONNAIE. Tous ceux qui proposent quelque mesure monétaire que ce soit, pour quelque raison que ce soit, qui ne pensent pas à remettre en cause la monnaie, qui la défendent ou croient pouvoir en modifier le fonctionnement sont des capitalistes qui s’ignorent et des contre-révolutionnaires. 

2) L’INDIVIDUALISME. Tous ceux qui ne voient que des individus ou des êtres humains indistincts ; tous ceux qui proposent des solutions ou des philosophies individualistes ; tous ceux qui nient la nation et travaillent à la dissoudre ; tous ceux qui, au moindre prétexte (humanité, écologie, santé, etc.), passent de l’universalisme, au mondialisme, au sans-frontiérisme, au droit-de-l’hommisme, à l’immmigrationnisme, à l’« antiracisme », à l’« antifascisme » et au « sociétalisme » patentés par le capitalisme, qui étouffent le Citoyen qui pourrait exister au profit d’un Homme qui n’existera jamais, qui exaltent une égalité universelle en rien et rejettent l’Égalité en Droits, tous ceux-là transpirent l’individualisme inhérent à Largent et sont des capitalistes qui parfois ne s’ignorent pas et assurément des contre-révolutionnaires.

3) L’INÉGALITÉ. Tous ceux qui professent l’inégalité entre les citoyens ou entre classes, qui prônent des régimes politiques inégalitaires et tyranniques (monarchies, empires, dictature de ceci ou de cela), anti-démocratiques et anti-républicains (une véritable Démocratie étant par définition une République, et vice versa) reproduisent l’inégalité inhérente à Largent sous prétexte de respecter un ordre naturel, perpétuent le système monétaire sans se poser la question et, quoique souvent hostiles au capitalisme, n’en sont pas moins des capitalistes et des contre-révolutionnaires.

À l’exception du Civisme, toutes les « théories » appelant à l’« abolition de l’argent », consistant simplement à abolir la monnaie et, pour le reste, à compter sur la bonté humaine, sombrent dans le mondialisme, revers de l’individualisme, et se font le relais de toutes les idéologies capitalistes pseudo humanistes (capitalo-gauchistes). Elles ne visent pas à instaurer une Société ; elles méconnaissent les Principes de l’ordre social, elles n’avancent d’ailleurs aucun Principe ; elles sont l’expression des impulsions et des bonnes intentions de leurs auteurs, lesquels n’ont rien analysé correctement, profondément, car, en dépit d’une bonne intuition sur un point, ils s’en sont remis, pour l’essentiel, à leurs préjugés. Or ces préjugés ne sont pas le fruit de leurs réflexions ; ils leur ont été inculqués par leur contexte, par le monde dans lequel ils baignent, en l’occurrence par le système monétaire, le capitalisme, Largent. Au vrai, les préjugés sont la combinaison entre les conséquences directes ou indirectes du système et les penchants individuels qui conduisent soit à accompagner lesdites conséquences, quitte à les enrober de manière à flatter lesdits penchants, soit à les contester, à s’y opposer, c’est-à-dire à réagir par sensibilité et à avoir des idées qui, malgré tout, ne sortent pas du cadre fixé par elles et sont donc comme dictées par lui. Paradoxalement, si vouloir « abolir l’argent » semble être soutenu par des préjugés relevant du second type (réaction), la plupart des préjugés des adeptes de l’« abolition de l’argent » relèvent du premier type (adhésion), raison pour laquelle ces « anticapitalistes » sont toujours d’accord avec le capitalisme, au nom de « l’humain », et marchent avec lui contre les « patriotes » ?

Les mots ont un sens et sont révélateurs de la pensée. On n’utilise pas tel mot par hasard, mais pour dire ou insinuer quelque chose. Pour qui sait lire entre les lignes, un seul mot révèle tout le discours. C’est ainsi que l’expression « abolition de l’argent », qui semble audacieuse et révolutionnaire, révèle surtout que ceux qui l’utilisent ne savent ni ce qu’est Largent, ni ce qu’est vraiment la monnaie, ni comment elle fonctionne, ni pourquoi elle est vraiment condamnable, ni quelles sont les vertus d’un moyen d’échange, ni comment sortir du système monétaire ou, du moins, quel système viable à grande échelle (nationale) instaurer, ni ce qu’est l’Égalité, ni ce qu’est une Société,  ni ce qu’est un Citoyen, ni ce que sont les Devoirs et les Droits du Citoyen, ni en quoi consiste la Révolution, ni comment la faire. Bref, elle dit tout : ils ne savent rien. Pire ! Non seulement elle révèle que les adeptes de cette formule ne feront jamais la Révolution, mais encore elle démasque les plus sournois contre-révolutionnaires. Car leurs idées fumeuses ne font pas que les paralyser eux ; elles discréditent le discours contre la monnaie ou pour l’Égalité ; elles détournent du combat qu’il faut effectivement livrer et remporter.

Le mot révolutionnaire est « Égalité » ou — pour ceux qui ne comprennent pas ce que celle-ci implique — « Égalité et Nation ». Le but de la Révolution est l’Égalité des Citoyens, leur égalité en Devoirs et en Droits, notamment dans le droit d’accéder librement au marché. Cette révolution anéantira de facto Largent et supprimera nécessairement la monnaie. On pourrait aussi dire qu’elle « abolira la monnaie » ou « abolira l’argent ». Mais il y a une différence entre utiliser à l’occasion l’une ou l’autre de ces expressions en sachant ce que sont Largent, l’Égalité, la Révolution, etc., et les utiliser à tout bout de champ sans le savoir. Dans un cas, il s’agit de se mettre à portée du grand public ; dans l’autre, d’afficher le maximum d’une pensée quasi nulle. De manière générale, un Patricien (partisan du Civisme) parlera d’abord d’instaurer l’Égalité et, ensuite, d’anéantir Largent. Il mettra plutôt en avant ce qu’il veut construire dans le futur que ce qu’il veut détruire, par défaut, dans le présent. Il n’est pas réduit à s’opposer, il a les moyens d’être positif, contrairement à ceux qui croient que proclamer en boucle qu’ils veulent « abolir l’argent » fait d’eux des radicaux alors qu’ils sont surtout ridicules. Notons bien qu’il parlera « d’anéantir Largent », et non de « l’abolir », parce qu’il sait que Largent est une croyance, et qu’une croyance ne s’abolit pas mais s’anéantit en en implantant une autre. Il pourra toutefois parler d’« abolir la monnaie », ce qui, alors, sera correct. Et s’il emploie malgré tout l’expression « abolir l’argent », ce sera par facilité ou, comme il a été dit, pour se mettre à portée de son auditoire. Car, si le Civisme utilise des mots qui existent, certains ont chez lui un sens plus précis, plus profond, de sorte que leur signification exacte échappe au commun des mortels. Un Patricien doit donc parfois employer des mots ordinaires qui, s’ils ne permettent pas au Béotien de saisir toute sa pensée, permettent néanmoins à celui-ci de comprendre quelque chose. Mais, quand l’expression « abolir l’argent » n’est pas chargée d’autant de sous-entendus, quand elle ne sert pas à éluder des concepts inédits ou trop ardus, quand elle se réduit en effet à elle-même, c’est que celui qui l’emploie n’a guère plus à dire et n’en sait pas plus, sur Largent, la monnaie, la Société, l’Égalité, la Révolution, etc., que ceux auxquels il parle. Dans la bouche de ce dernier, cette expression n’est pas une maladresse ; c’est un signe.


LARGENT est un TYRAN !

L’ÉGALITÉ ou la MORT !

 Philippe Landeux

29 octobre 2022

01:54 Écrit par Philippe Landeux dans 6. MON BLOG, 7.2. sur LARGENT | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook | |  Imprimer |