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samedi, 19 mai 2012

LA VIE EN ROSE (dessin)

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21:45 Écrit par Philippe Landeux dans 6. MON BLOG | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook | |  Imprimer |

QU’EST-CE QUE LARGENT ?

Origines et conséquences
de Largent, du troc et de la monnaie


Largent, c’est la croyance que la notion de valeur (marchande) est nécessaire pour échanger.

Largent est le cœur de notre monde. Il est au cœur de tous les systèmes monétaires qui, au final, n’en forment qu’un. Mais il n’est pas la monnaie ; il est sa raison d’être. On juge cependant un arbre à ses fruits. 

La monnaie est une convention sans consentement : elle est créée, cautionnée et imposée par l’Etat (1) qui oblige les particuliers à l’accepter et qui l’accepte ou l’exige lui-même en paiement. Une fois en circulation, une fois que chacun en a besoin, elle s’obtient en cédant un bien ou en rendant un service (légal ou illégal) contre une certaine quantité d’unités monétaires à celui qui en détient. (Du moins est-ce là le mode normal d’obtention puisque, étant une chose matérielle, elle peut aussi être volée.) La quantité d’unités monétaires échangée (le prix, la valeur marchande) est soit définie à l’avance par l’un ou l’autre des protagonistes de l’échange, soit d’un commun accord au moment de l’échange. C’est la quantité d’unités monétaires ayant réellement changé de mains qui détermine le prix momentané de la chose obtenue en échange. Tant qu’un prix n’est pas validé par une transaction, il est illusoire. Une chose invendue ou invendable ne rapporte rien ; sa valeur marchande est nulle quelles que soient les prétentions du vendeur.

La monnaie est à la fois une unité de valeur, un étalon de la valeur, une propriété, une représentation de la propriété, un moyen d’échange, de paiement ou d’achat — un moyen d’échange individualiste faudrait-il préciser —, un moyen d’appropriation et de dépossession, un moyen d’accéder au marché et, enfin, une portion de tous les droits dont la jouissance ou l’exercice passe par l’accès audit marché. Mais, pour toutes ces raisons, c’est aussi et surtout un moyen d’oppression, un moyen pour les puissants — qu’ils tiennent leur puissance d’une position sociale élevée ou de leur richesse — de dépouiller les faibles de leurs droits (d’abord de ceux dont la jouissance ou l’exercice passe par la monnaie, puis de tous les autres) et d’asseoir ainsi leur domination.

La valeur marchande d’une chose est sans rapport avec la chose elle-même. Rien n’a en soi de valeur marchande ; rien n’a en soi de valeur tout court. Une chose peut avoir de l’intérêt, de la valeur sentimentale pour celui qui la considère, mais cette valeur — qui ne se mesure pas et est pourtant la seule vraie valeur — n’est déjà ni universelle ni éternelle. En revanche, la valeur marchande d’une chose est imposée à tous par le marché, découle du coût du travail et des marges bénéficiaires que producteurs, transporteurs, commerçants et administration publique se sont successivement accordés et varie selon de multiples critères étrangers à ladite chose  (lieu, temps, circonstances, quantité, appréciation, valeur de la monnaie, etc.). Même fixe à un instant T, elle varie encore selon le pouvoir d’achat des clients puisqu’elle augmente relativement à mesure que celui-ci baisse, et inversement. Bref, la valeur marchande est un leurre ; les prix sont indépendants des choses ; la monnaie ne sert qu’à payer les hommes. C’est le fait de payer les hommes qui confère une valeur marchande aux choses et leur fait croire, d’une part, qu’elles ont une valeur marchande intrinsèque, d’autre part, qu’ils ont besoin de monnaie pour mesurer cette valeur et procéder aux échanges ou accéder au marché, en un mot acheter. Certes, le besoin de monnaie est réel dans un système monétaire, mais les hommes créent eux-mêmes ce besoin moral et matériel ; ils s’enferment tous seuls dans ce cercle vicieux ; il ne dépend que d’eux d’en sortir.

La monnaie semble indispensable parce qu’elle correspond à la conception de l’échange qu’elle véhicule et que son usage inculque aux hommes. Cette conception est héritée du troc, mode d’échange que les hommes pratiquent instinctivement et inévitablement dans un contexte de production artisanale. Ce mode d’échange consiste à ce que les individus échangent entre eux des biens qu’ils ont produits ou dont ils sont du moins propriétaires. En échangeant des biens contre d’autres biens s’établit une équivalence entre eux et apparaît la notion de valeur marchande, laquelle se mesure alors, pour un bien, en quantité d’autres biens. C’est ainsi que s’impose aux hommes et que l’échange repose sur ce que nous appelons Largent, c’est-à-dire la croyance que la notion de valeur (marchande) est nécessaire pour échanger. Il est donc important de noter que 1) Largent n’a pas été imaginé et adopté par les hommes mais s’est imposé à eux par la force des choses, 2) la notion de valeur marchande est inséparable de l’échange individualiste, 3) Largent, la notion de valeur marchande et l’échange individualiste naissent et n’ont de sens que dans un contexte de faible production. 

Cependant l’échange direct entre deux individus est souvent impossible, car il est rare que chacun d’eux désire simultanément un objet que l’autre possède et qu’il est disposé à échanger. Il apparaît que le troc est facilité si l’un d’eux se livre à un premier échange avec un tiers et échange avec l’autre ce qu’il a ainsi obtenu et qui n’a servi, à ses yeux, que d’unité de valeur et de moyen d’échange. Le troc porte donc en germe tous les principes qui, avec le temps, accouchent des monnaies primitives (objets ou biens pouvant être désirés soit pour eux-mêmes soit en tant que moyens d’échange usuels) puis des monnaies modernes, standardisées (désirées uniquement en tant que moyens d’échange). Ainsi, tous les fondamentaux du système monétaire proviennent du troc. La nature, la forme et la place de la monnaie ont évolué, mais pas les principes sur lesquels elle repose. En revanche, la monnaie met en évidence le caractère antisocial de l’échange individualiste et de la notion de valeur marchande que le cadre intimiste du troc permet de masquer ; elle développe, en outre, des vices nouveaux.

Avant de produire et de troquer — ce qui remonte seulement à quelques milliers d’années (l’Homme, lui, existe depuis environ 2 millions d’années) —, les hommes vivaient, comme les animaux sociables, en communauté : chacun participait aux activités collectives et recevait en retour une part du produit commun ; tous jouissaient des bienfaits de la cité ; ils étaient égaux en devoirs et dans tous les droits (sécurité, nourriture, abri) que leur communauté garantissait grâce à leur concours. Ils ne possédaient rien ou presque. Ils ne se distinguaient toujours pas par leurs propriétés lorsqu’ils se mirent à utiliser des pierres, des os ou des bouts de bois comme outils ou armes ni même lorsqu’ils se mirent à en fabriquer avec des techniques à portée de tous.

Mais arriva un moment où la fabrication de certains objets exigea un certain talent, et l’envie que suscita ces objets incita à leur fabrication et détourna les fabricants des activités collectives sur le produit desquelles ils n’eurent donc plus aucun droit. La nécessité pour les fabricants de vivre de leur production et l’envie des autres de posséder personnellement ces objets obligèrent les uns et les autres à échanger. Mais comment les fabricants purent-il accorder la priorité de l’échange à un plutôt qu’aux autres alors que tous désiraient l’objet rare et qu’aucun, dans le cadre d’une communauté, n’avait rien de spécial à offrir ? Pour pouvoir être départagés, ces derniers durent se distinguer et donc s’activer de leur côté pour disposer de biens propres susceptibles d’intéresser les fabricants dont l’intérêt était évidemment d’échanger avec le plus offrant. C’est ainsi que, pour pouvoir pratiquer le troc, alors seul mode d’échange possible, les membres de la communauté délaissèrent de plus en plus les activités collectives pour finir par se consacrer exclusivement à des activités individuelles. Autrement dit, le devoir de participer à la vie de la cité en contrepartie de ses bienfaits tomba en désuétude, les individus se ménageant eux-mêmes leurs principaux « droits ». Le rôle de la cité était désormais nul au quotidien. Il n’y a avait déjà plus de communauté, mais seulement une collection d’individus.

Mais l’Homme est un être sociable. Il a besoin de vivre en société et croit que tel est le cas dès lors qu’il a des liens avec ses semblables. Or il ne suffit pas que des individus aient des points communs (géographiques, ethniques, historiques, culturels, familiaux) pour qu’ils forment une société. L’état de société est défini par des rapports intangibles et universels entre ses membres ; l’appartenance à une société est plus une question d’actes que d’origine. Des individus n’ayant pas de devoirs les uns envers les autres — comme il advient sous le troc — ne forment pas une communauté, même si tout concourt par ailleurs à leur donner cette illusion. Néanmoins, des individus qui croient former une communauté pensent avoir le devoir de la défendre quand elle est menacée, de sorte que leur communauté illusoire en temps normal devient une réalité dans les temps extraordinaires. Défendre la cité est en effet le premier devoir du citoyen et le dernier vestige de la citoyenneté après l’implosion de la société.

Le troc plonge les hommes dans un état étrange, inédit : ils ne sont pas tout à fait dans l’état de nature mais ils ne sont plus exactement dans l’état de société. Ce mode d’échange désolidarise les éléments du corps social mais sans les disperser ; il bouleverse les rapports sociaux, pour ne pas dire qu’il instaure des rapports antisociaux, tandis que les hommes aspirent toujours à vivre en société mais ne savent plus ce qu’elle doit être. Dès lors, ce qui tient lieu de société ne sert finalement qu’à cautionner les conséquences de l’échange individualiste.

La première de ces conséquences est l’obligation pour les individus d’être propriétaires de ce qu’ils échangent, donc de ce qu’ils produisent dans leur coin. Ils exigent donc que la « société » leur reconnaisse et leur garantisse la propriété sur leur production, alors que celle-ci ne la concerne plus. Mais, comme cette exigence est universelle, la « société » y consent. Autrement dit, les individus veulent avoir des droits grâce à la protection de la « société » sans que ces droits soient la contrepartie de devoirs envers elle. C’est le divorce entre les devoirs et les droits. Désormais, les droits n’ont aucun lien direct avec les devoirs ; ce ne sont plus que des conventions (arbitraires par définition, même si l’adhésion générale leur confère parfois une légitimité) ; c’est la porte ouverte à toutes les aberrations et à tous les abus. La notion même de devoir n’a plus guère de sens, puisque les obligations qui demeurent ne confèrent pas les droits qu’elles génèrent ou en confèrent qu’elles ne génèrent pas. Dans ce derniers cas, les droits en question sont le fait de l’appartenance à la « société » qui, elle-même, repose moins sur des devoirs que sur des critères.

Une autre conséquence du troc, et non des moindres, est la nécessité pour les paysans et les éleveurs d’être propriétaires de la terre qu’ils utilisent afin d’être propriétaires de ce qu’ils en tirent. La « société » doit, en toute logique, faire cette nouvelle concession. Le territoire commun est donc découpé en propriétés privées. Autrement dit, la « société » garantit à des individus le droit d’occuper et d’utiliser son territoire sans qu’ils soient tenus de l’exploiter correctement et de consacrer aux échanges leur production, du moins leur permet-elle de faire prévaloir leurs intérêts particuliers sur l’intérêt général. Quand tous les individus disposent d’une portion de sol, cela semble anodin. Mais quand tous n’en disposent pas, cela donne à une partie des « citoyens » la possibilité d’affamer et d’asservir l’autre. Il est donc doublement insensé que la « société » se dépossède de tout ou partie de son territoire et octroie à des particuliers le « droit » de nuire à leurs « concitoyens ».

L’échange entre individus (d’abord par troc direct puis via la monnaie) anéantit la société sur le plan des principes. Mais il se développe si lentement que les hommes s’y adaptent sans percevoir le changement et qu’ils ne comprennent pas la cause profonde du malaise social quand enfin ils le constatent. De citoyens égaux œuvrant ensemble, ils sont devenus des individus rivaux s’activant séparément. Cependant, le contexte propice au troc atténue les rivalités (une certaine entraide demeure), d’autant plus que les échanges sont rares, ne concernent que quelques biens ou objets et n’engagent qu’une infime partie de la production de chacun. Les individus (les familles) sont quasi autonomes ; ils pourvoient eux-mêmes à la plupart de leurs besoins. Paradoxalement, l’ère du troc est celle du moindre échange.  

Avec l’évolution des techniques, l’accroissement de la spécialisation, la multiplication des produits et avec eux des besoins, les échanges s’intensifient, le troc direct atteint ses limites et la monnaie apparaît. Le renforcement de l’interdépendance entre les individus suscite leur regroupement géographique. Les spécialistes se concentrent dans les villages qui grossissent parfois jusqu’à devenir des villes exclusivement peuplées de producteurs spécialisés, obligés de pourvoir à leurs besoins élémentaires et autres par la vente quotidienne de leur production ou le paiement de leur travail.

La civilisation entre alors dans la phase monétaire qui dure tant que les conditions de production imposent le même mode d’échange, donc jusqu’à ce qu’une révolution au niveau de la production permette de concevoir et d’adopter un nouveau mode d’échange. Entre temps, la monnaie, hormis ses supports et ses formes variables selon les lieux et les époques, conserve les mêmes principes de fonctionnement et les mêmes propriétés, et a donc toujours les mêmes vices et les mêmes effets.

Nous avons déjà dit ce qu’est la monnaie ; nous allons expliquer ici d’où lui viennent ses caractéristiques et ses tares.

Les hommes n’ont pas conçu le troc ; ce mode d’échange s’est imposé à eux. En revanche, ils ont conçu la monnaie selon la logique du troc. Dans leur esprit, l’échange ne pouvait avoir lieu qu’entre deux individus ; il ne pouvait consister qu’à échanger une chose contre une autre, les deux choses étant au final supposées de même valeur. Pour faciliter les échanges, certains ont eu l’idée d’utiliser un bien ou un objet en tant qu’unité de valeur, c’est-à-dire de monnaie d’échange « universelle ». La monnaie pouvant représenter la valeur de toute chose, il s’agissait désormais de vendre ses produits ou son travail contre ladite monnaie afin d’en disposer en quantité suffisante pour pouvoir acheter ou payer à son tour les produits ou le travail des autres. L’échange monétaire n’est jamais qu’un troc en deux temps ou deux trocs consécutifs : c’est toujours du troc. Outre la notion de valeur et le caractère individualiste de l’échange monétaire, c’est aussi au troc que la monnaie doit d’être un moyen d’échange qui s’échange, qui change de mains. Cette propriété de la monnaie, qui aujourd’hui ne trouble personne, est une calamité absolue.   

La monnaie est souvent considérée comme un objet neutre que les hommes utiliseraient mal. « Ce n’est qu’un moyen d’échange », entend-on, comme si la nature d’un moyen d’échange, la logique qu’il véhicule et sa façon de fonctionner étaient sans incidence ! comme si un outil convenait à tout usage parce que c’est un outil ! Il est vrai que les hommes peuvent aggraver les conséquences de la monnaie (alors cette aggravation est elle-même due à la permissivité de ce moyen d’échange, aux besoins qu’il crée et aux mentalités qu’il façonne), mais ils ne peuvent empêcher qu’elle ait des effets inhérents à sa nature et indépendants de leur volonté (essayer de contrarier ces effets est vain et même catastrophique).

Le moyen d’échange qu’est la monnaie fonctionne selon deux principes : 1) celui des vases communicants, 2) celui de l’attraction.

Des unités destinées à changer de mains à chaque échange circulent. Pour qu’il y en ait ici il faut en prendre ailleurs d’une façon ou d’une autre : c’est le principe des vases communicants. Or ces unités incarnent aussi le droit des individus d’accéder au marché, de profiter des bienfaits de leur « société » et de jouir des libertés qu’elle offre. Tout le monde (individus, travailleurs, chômeurs, entreprises, associations, administration, etc.) a besoin des droits que confère la monnaie et doit se les procurer aux dépens d’autrui. A cette fin, tous les moyens sont bons, puisque ces droits ne sont pas nominatifs ; ils appartiennent à celui qui détient la monnaie, quelle que soit la manière dont il se l’est procurée (L’argent n’a pas d’odeur.). Du moins lui appartiennent-ils tant qu’il ne les exerce pas, puisque pour en jouir il faut s’en dépouiller (payer). Il est donc dans la nature du système monétaire que les individus se livrent une guerre permanente dans laquelle tous les coups sont permis, une guerre dont leurs droits sont l’enjeu.

Des unités qui circulent selon le jeu artificiel des valeurs, qui incarnent et confèrent des droits et qui peuvent être accumulées finissent infailliblement par former des caillots, c’est-à-dire par se concentrer entre les mains de quelques individus. Ces derniers ayant plus de monnaie et plus de droits que les autres les tiennent dans leur dépendance et leur pouvoir. Les riches sont en position de force ; ils achètent tout, fixent la valeur des choses à leur avantage, prêtent avec intérêt et empruntent avec facilité. L’argent va à l’argent. C’est le principe de l’attraction. L’Egalité (en devoirs et en droits) est impossible dans le système monétaire ; il est au contraire dans sa nature que les inégalités s’accroissent au fil du temps, que le fossé entre riches et pauvres s’élargissent inexorablement.

Ces deux principes font que la masse monétaire n’est jamais suffisante pour la totalité des individus qui sont dès lors obligés de se déchirer pour en avoir une part ou ne pas perdre celle qu’ils détiennent. C’est un peu comme si, par grand froid, une couverture était mise à disposition de plusieurs individus sans qu’elle puisse tous les couvrir. Ne songeant qu’à sa survie, chacun s’y agripperait, tirerait de son côté : les faibles pour en avoir un bout même ridicule, les forts pour ne pas risquer d’être exposés un tant soit peu au froid. Tous raisonneraient de la même manière quoique étant dans des positions différentes.

La monnaie fait des droits une chose rare. La raison est simple : les droits sont incarnés par la monnaie qui, elle-même, représente des objets en terme de valeur parce qu’elle vient du troc. Or le troc est un mode d’échange primaire, celui auquel ont recours de petits producteurs. Sa logique sous-jacente correspond donc à un contexte particulier, un contexte où les produits sont rares. La monnaie suit la même logique et cela a un sens tant que la production demeure artisanale. Mais, à l’ère industrielle, un moyen d’échange reposant sur cette logique est à la fois anachronique et ubuesque. Dans ce nouveau contexte, la monnaie entretient l’idée que le mode d’échange est toujours individualiste, que les individus pratiquent toujours un troc indirect et qu’ils échangent leurs productions ou leur travail contre des salaires de valeurs équivalentes. En réalité,  il n’y a plus d’échanges entre individus puisque, sauf exception, plus personne ne produit rien seul, chacun n’étant qu’un maillon de la chaîne de production dans le cadre d’une entreprise (il serait donc impossible de revenir au troc proprement dit) ; les travailleurs ne sont plus payés à la pièce mais au mois et souvent selon des barèmes standards pour toutes les professions ; ce n’est plus le travail effectué qui est rémunéré, mais le poste occupé ; le droit d’accéder au marché est désormais une question de statut. Le mode d’échange actuel combine donc deux logiques : celle du troc, périmée, et celle de la Cité, en devenir.

Dans une Société (ou Cité) digne de ce nom, la Citoyenneté s’acquiert et se conserve en remplissant les Devoirs du Citoyen, dont celui de participer à la vie de la Cité selon ses exigences, et garantit à tous les Citoyens la jouissance de tous ses bienfaits, résultats de leurs efforts collectifs. Parmi ces bienfaits figurent les biens et services mis sur le marché par les entreprises. Tous les Citoyens y ont accès ; c’est la Citoyenneté elle-même qui leur confère le Droit d’accéder au marché. Ce Droit est donc indéfini, égal pour tous et, en théorie, illimité. Bien qu’il n’y ait ni monnaie ni échange entre individus ni notion de valeur marchande, les Citoyens acquièrent des biens produits par d’autres et profitent des services d’autrui : les fruits du travail changent de mains, il y a donc échange. Mais, dans ce mode d’échange, la circulation des biens n’est qu’une conséquence. Le véritable échange a lieu entre le Citoyen et la Cité : il remplit ses Devoirs envers elle, elle lui garantit ses Droits. L’accès au marché est en quelque sorte forfaitaire : les Citoyens ne payent plus au détail les choses qu’ils acquièrent, pas plus qu’ils ne sont eux-mêmes payés individuellement ; en participant à la vie de la Cité, ils s’acquittent du « prix » pour accéder librement au marché, ils règlent globalement et à l’avance tout ce qu’ils en retirent. Comme dans le système monétaire actuel, l’accès au marché est en rapport avec un statut, à la différence qu’il n’y a qu’un seul statut, celui de Citoyen, que c’est ce statut lui-même, non des unités, qui confère le droit d’accéder au marché — ce droit n’a donc pas de limite intrinsèque, il n’est pas extérieur à ceux qui en jouissent, nul ne peut l’exercer à leur place et il ne peut plus leur être ravi — et que les Citoyens sont réellement égaux en Droits. (Tout ceci permet sans doute de comprendre pourquoi et comment la monnaie qui sert à payer le travail est surtout un moyen de voler les travailleurs, de les dépouiller de l’essentiel de leurs Droits en tant que Citoyens. Et que dire des personnes qui participent objectivement à la vie de la « Cité » mais qui, n’étant pas des acteurs économiques, ne reçoivent même pas de salaire ?)

Nous sommes à la croisée des chemins. L’ère industrielle a transformé la nature des producteurs et, partant, celle des protagonistes des échanges. Le salariat repose sur la monnaie mais invalide ses postulats. L’ère industrielle a également porté à son paroxysme l’interdépendance des individus. Seule la monnaie leur inculque encore l’individualisme. Mais l’informatique précipite la fin de cette dernière (particulièrement en France) et offre de nouvelles possibilités. Des mutations fondamentales sont en cours. Un monde meurt ; un autre est en gestation. Comme toujours, les choses ont évolué plus vite que les mentalités, mais les hommes combleront bientôt le retard et accompliront alors la plus grande révolution de tous les temps (Illustration).

Les premières monnaies furent des biens ou des objets rares ou imposants, ayant de la valeur soit par la convoitise des hommes (coquillages, pierres) soit par leur utilité propre (animaux, bijoux, métaux). Elles s’avérèrent incommodes (périssables, abondantes, encombrantes, hétérogènes) et médiocres en tant qu’étalon de valeur. Les hommes y renoncèrent donc pour d’autres toujours plus pratiques, plus rares, plus uniformes et plus constantes, jusqu’à ce qu’ils réalisent que la valeur du support importe moins que celle qu’ils lui accordent, que tout support matériel est inutile, que des unités virtuelles font aussi bien l’affaire, que leur mode d’échange repose intégralement sur la confiance et la croyance que la notion de valeur est nécessaire. Ce qui reste à la fin de la monnaie est l’essence de ce qui était au début, sous le troc : Largent.

Largent, c’est la croyance que la notion de valeur (marchande) est nécessaire pour échanger. Or qui dit valeur marchande dit différences de valeurs entre les choses, entre les produits, entre les travaux, donc différences de revenus et de salaires, donc inégalité en droits. En outre, la notion de valeur marchande n’a de sens que dans le cadre d’échanges entre individus, lesquels doivent être propriétaires de ce qu’ils échangent, donc de leur production, de sorte qu’ils doivent produire et travailler pour eux, par obligation économique, non plus pour la cité, par obligation sociale. Enfin, croire que la notion de valeur est nécessaire pour échanger revient à accorder toute son attention aux choses, à penser qu’elles importent plus que les hommes, à raisonner en terme de valeurs, non en terme de droits, à oublier la dimension sociale des échanges, à ne pas considérer les protagonistes comme des citoyens, donc à vider la citoyenneté de toute substance. Inégalité, individualisme, matérialisme, inhumanité, anéantissement des principes sociaux, destruction de la société (au sens de communauté), dissociation des devoirs des droits et dénaturation de chacune de ces notions, telles sont, parmi d’autres, les conséquences dialectiques de Largent. Avant même qu’il soit question de troc ou de monnaie et par quelque côté que l’on aborde le sujet, Largent se révèle être antisocial par nature. Qu’il régisse les échanges et soit donc au cœur de la « société » laisse songeur !

Largent se manifeste à travers le troc et la monnaie dont les nouvelles conséquences, toujours aussi désastreuses, sont indirectement les siennes. Tout ce qui découle de Largent y renvoie et en fait donc partie dans son acception la plus large. Mais utiliser Largent au sens large est dangereux car cela fait perdre de vue sa définition stricte et ne permet pas à ceux qui l’ignorent de la saisir. Ces derniers croient que Largent désigne ce qu’eux appellent l’argent, c’est-à-dire la monnaie dont ils ont, d’ailleurs, une conception naïve. Cette confusion a cependant du bon : même s’ils ne savent pas ce qu’est exactement Largent, ils comprennent qu’ils ne doivent plus ignorer l’argent, qu’ils doivent s’intéresser à la monnaie, ce qui est l’ultime étape avant la révolution. Certes, s’attaquer à la monnaie ne met pas nécessairement Largent en danger, mais abattre Largent impose d’éradiquer la monnaie, ce qui semble encore une hérésie. En somme, dénoncer Largent fait sauter un verrou mental, condition essentielle pour imaginer d’aller encore plus loin que la modification ou la simple suppression du moyen d’échange qu’est la monnaie.

Remettre en cause la monnaie n’est pas une première dans l’histoire. Dès le XVIe siècle, Thomas More imagina sa suppression dans Utopia. Mais aucun théoricien ni aucun « révolutionnaire » ne conçut jamais Largent. Leurs réflexions sur la monnaie et sur la société restèrent superficielles, de sorte qu’aucun ne put proposer ou mettre en œuvre un système alternatif viable à plus ou moins long terme. Quatre types de solutions furent envisagées : 1) le collectivisme, 2) le don, 3) le rationnement, 4) des crédits artificiels (2). Le collectivisme et le don ont en commun de supprimer toute forme de moyen d’échange par rejet de la monnaie, tandis que le rationnement et des crédits artificiels modifient la monnaie mais conservent un moyen d’échange fondé sur la notion de valeur puisqu’il recourt à des unités. Toutes ont en commun de ne pas avoir tiré les bonnes leçons du système monétaire, de reproduire certaines façons de penser et de se fourvoyer, par réaction, dans de nouvelles erreurs. La palme de la paresse intellectuelle revient cependant au don, solution qui consiste en tout et pour tout à abolir la monnaie et, pour le reste, à compter sur la providence et l’humanité. On supprime tout, on ne pense rien. Plus de moyen d’échange, donc plus besoin de société, plus de devoirs, plus de contraintes, plus de réalités, plus de pays, plus de frontières : tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil ; on est tous citoyens du monde sans même savoir ce qu’est la citoyenneté.

Toutes ces solutions créent des vides dont la nature a horreur et envisagent des mesures contre-nature que la force des choses torpillera. Elles oublient l’adage : Chassez le naturel, il revient au galop. Quand elles suppriment tout moyen d’échange, elles éradiquent la monnaie mais n’extirpent pas Largent des esprits, car rien ne véhicule ni n’inculque une autre conception de l’échange et de la société, de sorte que les hommes, inconsciemment, en sont toujours au même point ; quand elles proposent un autre moyen d’échange, il repose toujours sur Largent et n’est qu’une monnaie bâtarde vouée au fiasco, car il est aberrant et désastreux de modifier le fonctionnement de la monnaie, puisque la monnaie telle qu’elle est et telle qu’elle fonctionne est la conséquence naturelle de Largent. Ces faiblesses conceptuelles viennent de l’absence de distinction entre la monnaie et le principe de moyen d’échange, de l’ignorance que toute forme d’unité est une monnaie et résulte de Largent. (3)

Largent a ses lois. La monnaie a ses lois. Toutes ces lois s’imposent aux hommes. Elles ne peuvent être étouffées. Au mieux peuvent-elles être contenues un certain temps par la force, car seule la force permet d’imposer des dispositions contraires à la nature profonde du système monétaire. Mais la volonté des hommes ne peut rien, à long terme, devant la force des choses et, tôt ou tard, Largent né pour régner reprend ses droits. Dominer Largent et dompter la monnaie sont des illusions et même des non-sens. Comment Largent, en tant que croyance, peut-il être dominé par les hommes qui croient en lui sans même le savoir ? Comment la monnaie peut-elle être utilisée autrement, « correctement », alors que c’est elle qui, de par ses origines et ses propriétés, commande la façon de l’utiliser et autorise aussi les utilisations perverses et criminelles ? Les hommes ne maîtrisent pas la monnaie, encore moins Largent dont ils ignorent l’existence ; ce sont eux qui sont en leur pouvoir et qui le seront tant qu’ils ne le reconnaîtront pas et n’en comprendront pas les raisons.
 

Philippe Landeux
 

Notes :

(1) La monnaie, moyen d’échange standard, peut aussi être émise par de puissants particuliers à la fois capables d’imposer ce standard et d’en assurer la valeur (dans l’optique d’asseoir leur pouvoir et de faire du profit). C’est ainsi d’ailleurs qu’apparurent les premières monnaies modernes en Chine. C’est également ainsi que les assignats émis par l’Assemblée constituante sous la Révolution, gagés sur les biens du clergé, devinrent des billets à force d’être eux-mêmes utilisés pour gager des « billets de confiance » émis par de riches particuliers. Mais c’est aussi ce que font les banques indépendantes (cartels de riches) depuis qu’elles ont dépouillé sournoisement les Etats du droit de battre monnaie et qu’elles les asservissent par le prêt à intérêt (ainsi aux USA en 1913, en France en 1973, au niveau de l’Union Européenne en 1992). 

(2) Il existe une autre solution, appelée S.E.L. (Système d’Echange Local), qui combine troc et crédits virtuels. Ce mode d’échange, à cheval entre deux systèmes fondés sur Largent, n’est en rien révolutionnaire. Son nom seul indique qu’il est inapplicable à grande échelle (c’est tout le problème du troc) et ne répond donc pas aux impératifs contemporains. 

(3) Toutes les théories alternatives au système monétaire tel qu’il est focalisent sur la monnaie mais ne distinguent pas la monnaie du principe de moyen d’échange, et semblent ignorer que toute forme d’unité est une monnaie et résulte de Largent. Il s’ensuit que les unes rejettent le principe de moyen d’échange et ses vertus par rejet de la monnaie et de ses vices, tandis que les autres, conscientes de la nécessité d’un moyen d’échange et pétries de préjugés monétaires, imaginent une autre forme de monnaie. Mais, comme toutes suivent plus leur inspiration qu’elles n’ont mené une réflexion approfondie sur la monnaie, aucune ne s’attaque à Largent, aucune n’attaque le mal à la racine. Dans le cas des systèmes monétaires soi-disant alternatifs, il est évident qu’ils sont toujours sous l’influence de Largent et qu’ils ne pourront surmonter leurs incohérences qu’en revenant à la monnaie ordinaire (unité de valeur qui s’échange). Quant aux systèmes de don et de répartition (collectivisme), ils n’ont pas compris qu’un moyen d’échange est le paramètre social le plus stable qu, à lui seul, il inculque aux hommes les principes qu’il véhicule. En supprimant la monnaie sans adopter un nouveau moyen d’échange, ils imposent un mode d’échange qui, d’une part, repose sur des concepts socio-économiques boiteux, qui, d’autre part, ne suffit à inculquer aux hommes ces concepts, de sorte que les esprits sont toujours sous l’emprise de Largent et se tourneront vers la monnaie, voire vers le troc, à la première difficulté.

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07:43 Écrit par Philippe Landeux dans 6. MON BLOG | Lien permanent | Commentaires (14) | Tags : largent, argent, monnaie, troc, valeur, abolition |  Facebook | |  Imprimer |

vendredi, 18 mai 2012

FONDEMENTS PHILOSOPHIQUES DE LA DEMOCRATIE

Les Citoyens sont des individus qui s’associent pour être en Sécurité. Or il n’y a pas plus de Sécurité sans Liberté que de Liberté sans Egalité. L’association est nécessairement libre, c’est-à-dire consentie. Il faut être consentant pour faire partie de l’association dont les membres doivent eux aussi consentir à chaque nouvelle adhésion. Les conditions d’adhésion et d’appartenance, pour être dans l’intérêt de tous, sont égales pour tous et acceptées par chacun. Il s’ensuit que les lois ultérieurement adoptées ne peuvent remettre en cause le pacte fondamental (Contrat social) et doivent elles aussi être approuvées par les Citoyens, à l’unanimité en théorie, à la majorité absolue (des suffrages exprimés) en pratique, car l’unanimité ne peut jamais être atteinte. A défaut d’être tous favorables à une loi particulière, tous les Citoyens doivent être consultés à son sujet pour avoir l’opportunité de la faire rejeter. Le consentement individuel à chaque loi est dans l’acceptation par tous du principe de la majorité, lequel suppose la consultation. Peu importe de qui émane une proposition de loi (peuple, parlement, président, etc.) : elle n’en devient une que si elle est effectivement soumise à l’approbation de tous les Citoyens et entérinée librement par la majorité d’entre eux. Dans le cas contraire, une « loi » n’a aucune légitimité, elle n’a d’une loi que le nom : ce n’est qu’un diktat et un abus de langage.

Ceci étant, s’il importe peu de savoir qui est à l’origine d’une loi adoptée en bonne et due forme, il est important que tous les Citoyens aient le droit d’en proposer et puissent donc provoquer des référendums selon des modalités fixées par la loi (en l’occurrence par la Constitution), lesquelles doivent être suffisamment souples pour ne pas empêcher de fait les référendums « d’initiative populaire » et annihiler par des dispositions astucieuses un principe reconnu. Le droit de proposer des lois (donc des référendums) ne peut être la prérogative exclusive d’une portion de Citoyens qui, pour servir ses intérêts particuliers ou satisfaire des idées propres, pourrait ne jamais soumettre à l’ensemble des Citoyens les propositions que ces derniers attendent et leur interdirait de renverser ce qu’elle a fait, avec leur accord, mais par surprise ou tromperie. Un peuple ne saurait être vraiment libre sans être entièrement maître de ses lois.

Mais l’égalité des Citoyens dans le droit de concourir à la formation des lois (droit de cité) est impossible ou illusoire si l’inégalité règne par ailleurs, comme c’est fatalement le cas dans un système monétaire dans lequel la plupart des droits, dont les plus vitaux, dépendent de la monnaie. Or il y a nécessairement des riches et des pauvres sous Largent, du simple fait que la monnaie circule selon le jeu arbitraire des valeurs et ne peut se répartir également. Par suite, les riches qui ont le pouvoir économique exercent le pouvoir politique ou le confisquent sans peine. Les droits économiques (pouvoir d’achat) donnent du poids politique. L’égalité politique est donc impossible ou illusoire dans un système monétaire. Si un peuple arrive par miracle à l’établir, c’est-à-dire à annuler l’influence de la richesse dans les décisions politiques, il pourra détruire certains abus, mais ne corrigera pas le principal : les riches demeureront riches, et les pauvres, pauvres. La belle affaire ! A moins de renverser Largent, ce à quoi la focalisation sur l’humain ne prédispose pas, ce système (parfait sur le papier) ne changera fondamentalement rien et sera en permanence sous la menace des riches qui ont les moyens de tout corrompre et se ressaisiront tôt ou tard du pouvoir politique s’ils ne se contentent pas de tirer les ficelles.

Des lois ratifiées par le peuple souverain, composé de Citoyens égaux en devoirs et en droits, tant sur le plan politique qu’économique, c’est cela, tout cela et rien que cela la Démocratie.

Publié sur Riposte Laïque

Pour approfondir les questions de Peuple, Citoyenneté et Nationalité, voir : Réflexion sur la Citoyenneté

19:01 Écrit par Philippe Landeux dans 6. MON BLOG | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook | |  Imprimer |

jeudi, 17 mai 2012

PENSEE DU JOUR : le côté obscur de la force

Il y a une force plus puissante que la philanthropie, le patriotisme, le progrès et la justice réunis, c'est l'appât du gain. Les intérêts financiers sont le véritable moteur des entreprises grandioses que seuls les peuples peuvent soutenir et dont ils ne sont jamais les bénéficiaires. Mais les peuples ne se mobilisent pas pour des motifs sordides. Il faut les duper, et, malheureusement, ils marchent presque à tous les coups.

mercredi, 16 mai 2012

PENSEE DU JOUR : la trahison

« Nos ennemis sont trop habiles pour nous trahir ouvertement ; l'espèce de trahison que nous avons à redouter, celle-là n'avertit point la vigilance publique ; elle prolonge le sommeil du peuple jusqu'au moment où on l'enchaîne ; celle-là ne laisse aucune ressource. »

Robespierre
2 janvier 1792
Discours contre la guerre

08:47 Écrit par Philippe Landeux dans 6. MON BLOG, 7.1. PENSEES DU JOUR | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook | |  Imprimer |

mardi, 15 mai 2012

IL ETAIT UNE FOIS…

UN MECHANT MECHANT ET UN GENTIL GENTIL

Il était une fois deux bons voisins, François et Jacques. Ils aimaient recevoir et avaient beaucoup d’amis, surtout Jacques. Ils mangeaient tantôt chez l’un, tantôt chez l’autre, surtout chez François qui avait une maison plus agréable. En somme, Jacques invitait et François recevait.

Un jour, Jacques proposa à des amis en difficulté de s’installer chez François. Il frappèrent donc à sa porte, dirent qu’ils venaient de la part de Jacques et, sans attendre de réponse, entrèrent. François releva leurs mauvaises manières, mais, serviable et aimable, leur fit bon accueil. Ils s’installèrent dans le salon et s’invitèrent à sa table. François, d’un naturel prévenant, leur cuisina un bon repas. Mais sa cuisine ne fut pas à leur goût. A la fin du deuxième repas, ils manifestèrent leur mécontentement et fixèrent le menu suivant. François releva à nouveau leur toupet mais, par égard pour leur malheur et par respect pour son ami, garda pour lui son opinion, s’excusa et promis de faire mieux à l’avenir.

A vrai dire, François, qui ne savait pas pour combien de temps ils étaient là, se demandait quand ils allaient partir. Il posa la question à Jacques qui lui répondit que « les amis des amis sont des amis » et que, par amitié pour lui, il devait tout accepter de ces malotrus, d’autant plus qu’il lui envoyait de nouveaux « potes », avec consigne de faire comme chez eux. Ce sens aigu de la solidarité et du partage fit honte à François qui avait failli sombré dans l’égoïsme.

Les nouveaux venus plantèrent une tente dans le jardin et, comme les premiers, prirent place à table. La cuisine, conforme aux exigences des premiers, était à leur goût mais la présence de François les indisposa, ce que tous les potes lui signifièrent. François, stupéfait et outré, ne dit mot, continua à leur préparer les repas mais mangea désormais seul à la cuisine. Il ne vivait d’ailleurs plus qu’entre la cuisine et sa chambre vu que ses hôtes forcés se réunissaient dans le salon pour discuter, jouer et regarder leurs émissions de télévision.

François se plaignit à Jacques de leur manque de savoir vivre et lui demanda d’inviter « ses potes », sinon à partir, du moins à le respecter. Mais Jacques peignit si bien les joies et la beauté de la convivialité et conspua si violemment l’esprit petit-bourgeois que François n’osa insister, tout en comprenant qu’il n’avait rien à attendre de lui. D’autant plus que ce dernier, pour montrer sa générosité et éprouver la sienne, lui confiait encore de nouveaux potes.

François n’avait plus le droit de s’occuper de la porte, de sorte que les nouveaux potes furent accueillis par les plus anciens, à bras ouverts. Mais comme il n’y avait plus d’espace pour eux, autre que la chambre de François, ils la réquisitionnèrent sur les conseils de l’assistance. François protesta, et tous le frappèrent. Et c’est ainsi que François fut réduit à dormir parterre dans le couloir. Il était chez lui, mais il travaillait pour nourrir des intrus dont il était devenu l’esclave. Jacques, son soi-disant ami, avait abusé de sa bonté, de sa bêtise et de sa lâcheté.

EPILOGUE 1

Un beau matin, François, mesurant sa déchéance et persuadé de son impuissance, se pendit dans les toilettes, au barreau de la fenêtre. Les intrus qui se sentaient déjà maîtres chez eux ne versèrent pas une larme et ce seraient même plutôt réjouis de la disparition de cette méprisable lopette. Mais sans lui, le frigo fut bientôt vide. Alors les potes se disputèrent, puis comptèrent sur Jacques pour le remplacer ou leur trouver une nouvelle poule aux œufs d’or, mais celui-ci fut introuvable. Tous finirent par quitter les lieux dévastés.

EPILOGUE 2

Un soir, dans un sursaut de suprême lâcheté, François fit discrètement ses valises et s’éclipsa dans la nuit, résolu à oublier ce cauchemar et à recommencer sa vie ailleurs. C’est en voyant que le petit-déjeuner n’était pas servi que les potes réalisèrent qu’il s’était enfui et qu’ils étaient enfin totalement chez eux. Mais sans François, le frigo fut bientôt vide. Alors les potes se disputèrent, puis comptèrent sur Jacques pour le remplacer ou leur trouver une nouvelle poule aux œufs d’or, mais celui-ci fut introuvable. Tous finirent par quitter les lieux dévastés.

EPILOGUE 3

La coupe était pleine. L’humiliation avait réveillé en François le sentiment de dignité. Le chantage à l’amitié ne marchait plus. Il était chez lui et rien ne justifiait qu’il soit ainsi envahi, dépossédé, outragé par ceux-là même qu’il aurait aidé de bon cœur s’ils avaient été corrects et moins nombreux. Il hésitait à savoir si Jacques, qui jouait les généreux à ses dépens et l’avait condamné à vivre un enfer, était un idiot ou un manipulateur. Cela n’avait plus importance : ce faux ami était le plus coupable de tous et subirait lui aussi sa vengeance. Poings, poison, poignard ou pistolet ? Pistolet. Seul contre tous, François ne pourrait rien aux poings. Le poison et le poignard, quant à eux, sont silencieux et François voulait du bruit, non seulement pour illustrer sa rage mais aussi pour que tous le regardent soudain avec effroi et que certains puissent fuir le carnage qu’il n’avait pas voulu. Le pistolet, donc. Cette résolution prise, François attendit encore quelques jours. L’arrogance des potes le faisait jubiler. Ayant retrouvé sa fierté, il pouvait tout encaisser de ces morts en sursis. Et, un matin, il ouvrit le feu. D’abord, sur ceux qui occupaient sa chambre, qu’il fit sortir au préalable de son lit. Puis sur un de ceux qui occupaient le salon et qui croyait encore pouvoir en imposer. Deux balles. Les autres se sauvèrent sous ses yeux sans demander leur reste (François n’entendit plus jamais parler d’eux). Il se rendit alors chez Jacques, éberlué ou feignant de l’être, et vida son chargeur. Enfin, il retrouva sa maison désertée et délabrée, mais le pire était derrière lui.

09:04 Écrit par Philippe Landeux dans 6. MON BLOG | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook | |  Imprimer |

lundi, 14 mai 2012

PENSEE DU JOUR : un jour en France

Quand les Français ne pourront plus ni travailler ni vivre dans leur propre pays, à force d'être marginalisés pour ne pas "stigmatiser" les étranqers, que leur restera-t-il à faire sinon fuir la tête basse ou se battre jusqu'à la mort pour reconquérir leur terre et leurs droits ?

17:39 Écrit par Philippe Landeux dans 6. MON BLOG, 7.1. PENSEES DU JOUR | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook | |  Imprimer |

samedi, 12 mai 2012

L'INCONNU (dessin)

2012 05 12 - Wecholand.JPG

18:56 Écrit par Philippe Landeux dans 6. MON BLOG | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook | |  Imprimer |

jeudi, 10 mai 2012

PENSEE DU JOUR : le nez au milieu de la figure

Le voile islamique est l'étendard de la guerre civile.

12:44 Écrit par Philippe Landeux dans 6. MON BLOG, 7.1. PENSEES DU JOUR | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook | |  Imprimer |

DENI DE REALITE PATHOLOGIQUE

2012 05 10 - Ils sont bien français.JPG

VARIANTE :

2012 05 10 - Les bons Français.JPG

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mercredi, 09 mai 2012

PENSEE DU JOUR : la deux chevaux

Quand une voiture ressemble à une Deux chevaux, quand elle fait le bruit d'une Deux chevaux, quand elle a la vitesse d'une Deux chevaux, quand elle s'appelle Deux chevaux, c'est une Deux chevaux. Pour les hommes, c'est pareil.

UNE NOUVELLE DROITE OU UNE NOUVELLE GAUCHE ?

Article écrit le 24 avril 2012, entre les deux tours de la présidentielle pour Riposte Laïque qui a oublié de le publier.

Je viens de lire l’article de Gérard Brazon qui s’achève par ces mots : « Ce matin sur RMC, c’est prés de 60% de Français qui souhaitent une alliance entre l’UMP et le FN. Ce qui prouve s’il le fallait, oh combien les responsables de la droite sont totalement déconnectés des français. Les Français de droite, patriotes, veulent une nouvelle droite plus proche, plus humaine, plus tournée vers la France et les français. Ils ont raison et j’approuve. »

Cher Gérard, le patriotisme n’est pas de droite, il est de gauche par essence, car l’idée d’Egalité lui est consubstantielle. En effet, un patriote qui ne regarderait pas ses compatriotes comme ses égaux, mais comme des marchepieds ou de la chair à canon n’aurait d’un patriote que le nom. L’Egalité (des citoyens en devoirs et en droits) est — avec les notions de nation, de patriotisme et de démocratie — un des fondamentaux de Gauche, de la Gauche historique et authentique (disons jacobine). C’est parce que je suis fondamentalement de Gauche que je soutiens le Front National de Marine Le Pen qui seul a ce positionnement, tous les autres partis étant de facto de Droite, inégalitaires, mondialistes, individualistes, universalistes, immigrationnistes, anti-nation, anti-populaire, anti-démocratique, en un mot traîtres à la patrie.

FN - la vraie gauche.jpg

Bien peu, sans doute, ont des idées aussi claires que moi sur ce que sont la Gauche et la Droite. C’est ce manque de précision qui a permis de galvauder ces termes au point d’en renverser complètement le sens. Nous en sommes au point où la vague idée que se font les uns et les autres de ce que sont la Gauche et la Droite ne correspond plus à l’offre réelle des partis qui adoptent l’une ou l’autre de ces étiquettes. Tout le monde est complètement perdu. Certains, de par leur milieu d’origine ou leurs fréquentations, sacralisent l’idée de gauche et soutiennent inconditionnellement les partis qui se revendiquent de ce bord ; d’autres, pour les mêmes raisons, ont ce genre de relation avec la droite. Mais, si on creuse, on se rend compte que des gens de bords officiellement opposés recherchent en vain la même chose de leur côté, preuve que tous les repères sont brouillés. Il en est ainsi du patriotisme. Les trahisons de la gaucherie (PS, PC, FG, etc.) et les beaux discours de la droite officielle (UMP) ont convaincu certains que le patriotisme était de droite voire d’extrême droite, ce qui est le pire des contresens, puisque j’ai montré qu’il est intrinsèquement de Gauche.

Quoi qu’il en soit, les préjugés ont la vie dure. Qui s’est toujours dit de Gauche, comme moi, ou de Droite, comme Gérard, aura du mal à être étiqueté autrement. C’est d’ailleurs pour cela que je ne supporte pas que le Front National accepte d’être taxé d’extrême droite alors qu’il n’a rien de commun avec la droite (Sarkoziste) et ne peut donc être son extrême. Il ne faut pas oublier que la masse des électeurs du Front National ne vient pas de l’UMP mais de la gaucherie, ayant enfin ouvert les yeux sur sa haute trahison. Le langage de vérité serait que le Front National s’affirme de Gauche et s’explique là-dessus, pour que l’imposture de la gaucherie soit révélée. C’est peut-être beaucoup demander. Du moins me paraît-il très impolitique qu’une nouvelle formation patriotique se dise « nouvelle droite ». Cette appellation flatterait sans doute ceux qui sont traditionnellement de droite ou qui, du moins, croient l’être, mais elle rebuterait à coup sûr nombre de patriotes viscéralement de gauche. Le mieux, s’il était possible, serait de ne rien dire, de ne pas se positionner. Mais les médias se chargeraient vite de stigmatiser ce mouvement en le qualifiant « d’extrême droite » (droite = mal, extrême droite = horreur absolue). La mise au point que je propose sur les concepts de Droite et de Gauche permettrait au Front National de déjouer cette manœuvre. Une autre façon d’échapper au piège serait de se déclarer au-dessus des partis, ni droite ni gauche, ce qui serait même l’option la plus judicieuse d’un point de vue conceptuel (voir l’Echelle politique). 

Quant à une union entre le FN et l’UMP, certains la souhaitent sans doute, mais elle ne se fera jamais car elle serait contre-nature. Même si l'on n’admet pas que le FN incarne la vraie Gauche (patriotisme), c’est à cela que tient l’impossibilité d’une alliance avec l’UMP (individualisme, mondialisme) qui, elle, est une des deux faces de la Droite, l’autre étant la gaucherie. Il n’y a aucune union possible entre les patriotes et les mondialistes. Que le FN accueille les patriotes égarés est une chose ; mais que des formations que tout oppose s’unissent est une vue de l’esprit ou un piège politique.

Philippe Landeux

FN - parce que.jpg

04:13 Écrit par Philippe Landeux dans 6. MON BLOG | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook | |  Imprimer |

mardi, 08 mai 2012

PARTI... SOCIALISTE ?

Hollande-drapeaux-algeriens.jpg

23:55 Écrit par Philippe Landeux dans 6. MON BLOG | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook | |  Imprimer |

PENSEE DU JOUR : Les mamelles de la Révolution

ART. 86 — Sous Largent, la seule alternative au capitalo-libéralisme est le capitalisme d’Etat. Il n’y a d’EGALITE ou de LIBERTE ni dans l’un ni dans l’autre.

ART. 87 — L’EGALITE condamne le capitalisme ; la LIBERTE réclame le libéralisme. Du libéralisme sans capitalisme, là est la Révolution.

Source : Manifeste des Patriciens

lundi, 07 mai 2012

PENSEE DU JOUR : les collabos

Il y a deux types de collabos : ceux qui se couchent devant les envahisseurs et ceux qui courent après des sauveurs.

Les premiers ne défendent pas leur pays ; les seconds comptent sur d’autres pour le défendre. Les uns et les autres pensent petit ; ils sont mesquins, lâches et serviles ; ils ne croient ni en eux-mêmes ni en leur peuple ; ils n’ont aucune fierté, aucun sens de l’honneur, de la grandeur, de l’indépendance et de la liberté. On les rencontre à toutes les époques. Antiracistes et euro-mondialistes en sont les versions modernes.

dimanche, 06 mai 2012

PENSEE DU JOUR : vrai antiracisme

L’assimilationnisme est le véritable antiracisme, un antiracialisme sans démagogie, compromis, condescendance ou haine de soi.

samedi, 05 mai 2012

PENSEE DU JOUR : comme à Rome

En France, fais comme les Français ou assumer d'être étranger.

vendredi, 04 mai 2012

PENSEE DU JOUR : des bornes d'un droit

L'exercice d'un droit est borné par les droits légitimes d'autrui et par l'intérêt commun.

Il n'y a pas de droits sans Société, et aucune Société saine de corps et d'esprit ne peut reconnaître et garantir des droits contraires à ses intérêts bien compris. 

jeudi, 03 mai 2012

PENSEE DU JOUR : du souverain

« En considérant la marche et le système de ceux qui gouvernent, en fixant mon opinion sur les fonctionnaires publics, élus par le peuple, j’ai été tenté de dire : la liberté est perdue. J’ai ensuite jeté mes yeux sur le peuple, sur l’armée et j’ai dit : la liberté est sauvée. »

Robespierre
Aux Jacobins, 9 juillet 1792

12:00 Écrit par Philippe Landeux dans 6. MON BLOG, 7.1. PENSEES DU JOUR | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook | |  Imprimer |

mercredi, 02 mai 2012

DEMOCRATIE SUISSE (dessin)

2012 03 17 - Démocratie suisse.JPG

Salut Public - bulletin-abonnement-sp.jpg

19:03 Écrit par Philippe Landeux dans 6. MON BLOG | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook | |  Imprimer |