mercredi, 12 décembre 2018
LE COMBAT DES GILETS JAUNES - LE RÉFÉRENDUM D’INITIATIVE POPULAIRE (vidéo)
Pour voir la vidéo, cliquez sur l'image ou ICI
Salut à vous Gilets jaunes,
fierté du peuple français,
Vous entrez dans votre cinquième semaine d’action. Vous n’avez rien obtenu, sinon des miettes. Tel que le combat était engagé, il menait à une impasse. Vous réclamiez la démission du Président, qui n’allait évidemment pas céder sur ce point, et, par ailleurs, les revendications multiples et confuses qui montent de vos rangs lui ont permis de jouer au plus fin, d’amadouer les naïfs, et de laisser les autres en plan. Qu’il fasse encore des concessions illusoires, et vous êtes cuits. Il est urgent que vous sachiez ce qu’il importe que vous obteniez ; que vous vous fixiez un objectif clair, net, précis et décisif ; que vous vous unissiez autour de cet objectif, que vous en fassiez votre seule et unique revendication, afin que vous ramiez tous dans le même sens, que vous recadriez vous-mêmes ceux qui vous entraînent dans d’autres directions pour vous faire courir après des leurres, que ces derniers le fassent de bonne foi et pour vous diviser intentionnellement. C’est en voulant peu, mais en ne voulant que cela, et en le voulant très fort, que nul ne pourra plus ignorer ce que vous voulez, que vous pourrez être intraitables et que vous saurez reconnaître instantanément vos ennemis extérieurs et intérieurs.
Cet objectif suprême ne peut être que le « Référendum d’Initiative Populaire ». Vous êtes dans la rue précisément parce que vous n’avez aucun moyen de vous faire entendre et obéir en tant que Peuple souverain. Et même en descendant massivement dans la rue, le pouvoir peut encore faire la sourde oreille. Vous êtes un Peuple souverain dont la souveraineté a été confisquée par vos soi-disant représentants qui vivent mieux que vous, sur votre dos, et qui servent leurs intérêts, ceux de leur caste et ceux des ultra riches. On vous vole votre argent, parce qu’on vous a volé la Démocratie. Largent donne le pouvoir aux riches, le pouvoir sur les masses divisées. Mais quand les masses s’unissent, toutes les fictions s’évanouissent. Le moment où vous êtes fort est celui durant lequel vous pouvez et devez établir votre puissance. Le système monétaire joue contre vous en temps ordinaires ; dans ce moment extraordinaire, vous avez l’occasion de poser des garde-fous. Saisissez-là. Sans quoi, quoi que vous obteniez, le jeu n’en valait pas la chandelle.
Cette vidéo est la troisième que je réalise depuis le début du mouvement des Gilets jaunes. Dans la première, j’ai développé ce que je viens de dire, à savoir que les Gilets jaunes doivent faire du « Référendum d’Initiative Populaire » leur unique objectif. Dans la seconde, j’ai expliqué pourquoi il est préférable de parler de « Référendum d’Initiative Populaire » (R.I.P.) plutôt que de « Référendum d’Initiative Citoyenne » (R.I.C.) comme on l’entend également et même le plus souvent. Sous ces deux noms, l’idée est la même, mais les mots ont leur importance. Les mots sont des pièges, des pièges parfois grossiers, parfois subtils, et s’il est facile de ne pas tomber dans ceux que l’on voit, on tombe sans le savoir dans ceux que l’on n’a pas vus. « Populaire » ou « Citoyenne », ce n’est pas une question d’humeur ou d’esthétique. Derrière ce choix, se cache un enjeux vital que beaucoup ne réalisent pas mais que je n’aiderai pas à se fourvoyer en me pliant moi-même à un effet de mode.
Dans cette troisième vidéo, je vais vous livrer ma conception du « Référendum d’Initiative Populaire », celle que les Gilets jaune devraient, selon moi, adopter comme exigence et point de ralliement, celle que j’espère les voir faire leur, celle que je vous invite à diffuser si vous partagez ma conception des choses.
Mais avant d’entrer dans le vif du sujet, une petite mise au point pour couper court aux polémiques stériles. Je ne postule pas au rôle de représentant ou de porte-parole ; j’ai dit, on ne peut plus clairement, dans la première vidéo, que les Gilets jaunes ne devaient pas en avoir. Mais la condition, pour qu’ils n’en aient pas, c’est qu’ils sachent clairement ce qu’ils veulent ; c’est qu’ils parlent comme un seul homme ; que n’importe lequel d’entre eux, d’entre vous, d’entre nous, tienne le même discours. Comment parvenir à une telle unité ? Certains croient qu’elle ne peut procéder que de la concertation, de discussions innombrables et interminables. Sous prétexte de nous unir, ils commencent par nous diviser en réduisant le mouvement à chaque individu. Ils veulent lutter contre le capitalisme avec la mentalité individualiste que le capitalisme nous a inculquée. Je crois, moi, que l’unité ne peut être faite (et faite rapidement), que par le ralliement massif à des idées bien ficelées, peu importe par qui elles aient été émises pourvu qu’elles rencontrent l’assentiment général et qu’elles deviennent ainsi celles de chacun. Je n’ai pas le pouvoir d’imposer les miennes. Je ne fais que les proposer pour faire œuvre utile. Il ne s’agit pas de « me suivre », mais de vous permettre de trouver, bien exprimées, et de pouvoir formuler à votre tour les idées qui étaient déjà en vous. C’est à vous de juger.
Voilà donc la plate-forme que je propose, celle qui doit frapper les esprits, être dans tous les discours et sur toutes les banderoles.
Pour rendre au Peuple français la souveraineté qui est sienne d’après la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen et la Constitution même….
Les Gilets jaunes exigent l’instauration
d’un vrai Référendum d’Initiative Populaire
Matière — Des référendums pourront être provoqués sur n’importe quel sujet, dans n’importe quel domaine et dans n’importe quel sens, car le Peuple est souverain.
Pétitions — Ils seront provoqués automatiquement par toute pétition référendaire, en bonne et due forme, réunissant au moins 500.000 signatures de citoyens français, sans qu’aucun intermédiaire ne puisse s’y opposer, car le Peuple est souverain.
Référendums — Les référendums auront lieu dans un délai de 6 mois maximum après le constat de la validité des pétitions, sans que rien ne puisse s’y opposer, car le Peuple est souverain.
La loi — Les résultats des référendums auront aussitôt force de loi, nonobstant toutes dispositions contraires, car le Peuple est souverain.
Lèse nation — Toute entrave mise à ce processus, c’est-à-dire à la liberté de pétitionner (pour les citoyens français), à la provocation et à l’organisation des référendums acquis, à l’application de leurs verdicts, sera considérée comme un crime envers le Peuple souverain.
Voilà ce que doit être, selon moi, un vrai Référendum d’Initiative Populaire, le projet non-négociable que chaque Gilet jaune, chaque Français même, doit faire sien. Il peut donner lieu à des vignettes et des tracts encore plus directs comme dans l’exemple suivant :
Ou encore :
Je vous mets ces textes sous la vidéo pour que vous puissiez les copier-coller.
Je suis d’avis que les Gilets jaunes s’en tiennent, publiquement, à ces quelques points. Il est cependant évident que la mise en œuvre concrète du Référendum d’Initiative Populaire sera plus complexe et exige des précisions à chaque niveau, des précisions qu’il nous appartient d’apporter pour ne pas en laisser l’initiative aux saboteurs. Ce sera l’objet de la prochaine vidéo.
En attendant, j’invite ceux qui le peuvent à confectionner d’immenses banderoles portant les mots « Démocratie - Référendum d’Initiative Populaire » pour les déployer sur toute la largeur des Champs-Élysées, afin qu’il soit impossible de les louper, même pour les médias français, que ces images fassent le tour du monde, et que le gouvernement ne puisse plus ignorer que capituler sur ce point est sa seule porte de sortie.
R.I.P. !
R.I.P. !
R.I.P. !
HOURRA ! ! !
LES GILETS JAUNES
19:09 Écrit par Philippe Landeux dans - ACTUALITE & VIDEOS PERSO, 6. MON BLOG | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer |
jeudi, 06 décembre 2018
APPEL AUX GILETS JAUNES (vidéo)
POUR UNE LEVÉE EN MASSE
EN FAVEUR
DU RÉFÉRENDUM D’INITIATIVE POPULAIRE (R.I.P.)
Salut à toi, Peuple français,
Dans ces heures que l’Histoire de France comptera sans doute parmi les plus lumineuses, je me sens obligé, en tant que Citoyen français, en tant que partie de ce peuple si longtemps méprisé, d’apporter ma pierre à l’entreprise.
Je m’appelle Philippe Landeux.
Je me présente en deux mots. Certains d’entre vous me connaissent peut-être déjà, et savent que je suis à la fois un spécialiste de la Révolution française, en particulier de Robespierre, et l’auteur d’une théorie révolutionnaire, « le Civisme », que je m’échine à répandre depuis 20 ans, sachant d’ailleurs que son heure n’est pas encore venue. Mon but suprême est l’instauration de l’Égalité des citoyens en devoirs et en droits, dont celui d’accéder librement au marché du fait même qu’ils soient citoyens, ou, si vous préférez, d’anéantir Largent, au nom de l’Égalité et de la Patrie. Je prône un système non-monétaire, égalitaire, patriotique et démocratique. Mais ce n’est pas l’objet de cette vidéo et je renvoie, ceux que cela intéresse, à mon blog, mes livres et mes vidéos.
Je fais cette vidéo aujourd’hui pour aider les Gilets jaunes de mes conseils, s’ils veulent bien les entendre. Je ne vous parle pas d’en haut, je suis des vôtres ; mais il est impossible de se faire entendre en étant au milieu de quelques-uns d’entre vous. C’est d’ailleurs le premier point que je voudrais aborder.
Notre force, c’est de n’être personne et tout le monde à la fois, c’est d’être le peuple debout…. enfin. Notre force, c’est d’être une masse insaisissable, indomptable, terrifiante pour le pouvoir ; nous pouvons tout balayer si nous savons ce que nous voulons, si nous marchons au but comme un seul homme.
Mais c’est là que notre force peut devenir une faiblesse. Nous n’avons pas de représentants et il est impératif que nous n’en ayons pas. Le système a besoin de représentants pour négocier ; pas nous. Nous ne sommes pas là pour négocier, mais pour exiger au nom du peuple souverain. Mais exiger quoi ? Si nous ne le savons pas, nous aurons besoin de représentants, le système en désignera même pour nous ; nous perdrons l’avantage et le fruit de nos efforts. Si vous voulons trop, même chose. Si nous multiplions les exigences, dont certaines seront insignifiantes, d’autres contradictoires, si nous nous dispersons nous-même au lieu de concentrer le tir et de viser juste, nous ne pourrons pas être entendus parce que nous serons inaudibles, nous ne serons plus aussi puissants parce que nous serons divisés, nous perdrons la bataille parce que nous aurons donné le bâton pour nous faire battre. Qui trop embrasse mal étreint.
Nos exigences doivent se limiter à UNE SEULE ; une seule exigence, claire, indivisible et non-négociable ; une exigence fondamentale et révolutionnaire qui contienne en elle-même toutes les exigences possibles ; une exigence unique qui doit être portée par tous et sur laquelle nous pourrons être intraitables ; enfin, une exigence unique dont la pleine et entière satisfaction sera la condition pour la cessation de notre mouvement.
Quelle peut être cette exigence ? Certains réclament des baisses de ceci, des augmentations de cela. D’autres parlent de dissoudre l’Assemblée nationale, de former par élection ou tirage au sort une assemblée constituante, de supprimer le sénat, de renverser le gouvernement, de destituer Macron, de l’obliger à démissionner, etc. Les uns veulent des miettes, les autres veulent des mesures illusoires ou secondaires. Je ne dis pas que ces revendications ne sont pas légitimes, mais comptez-vous, pour les satisfaire, sur la bonne volonté de ceux que vous dénoncez à juste titre ? Et obtiendriez-vous le départ de ces derniers, qu’aurez-vous gagné réellement, hormis la satisfaction d’avoir été un moment les plus forts ?
L’exigence qui doit nous rallier est celle qui doit assurer, POUR TOUJOURS, NOTRE POUVOIR, c’est-à-dire la souveraineté du peuple, que le peuple soit enfin souverain sans qu’il ait besoin de descendre dans la rue… pour se voir rétorqué que la rue ne fait pas la loi. Nous sommes dans la rue parce que nous n’avons précisément aucun moyen légal de faire la loi ou de nous opposer à quelque décision que ce soit prise en notre nom, sans nous consulter et à nos dépens. Ce n’est pas cela la Démocratie, c’est-à-dire le régime dans lequel nous sommes supposés être. Nous sommes dans un régime où le peuple est nul, où il ne compte pas, où il ne sert que de marchepied à des élus, à des professionnels de la politique qui vivent grassement sur le dos des contribuables dans lesquels ils ne voient que des bonnes poires et des vaches lait. Nous sommes dans une démocrature, c’est-à-dire une dictature, au service de Largent, maquillée en démocratie. La Démocratie, la vraie, est un système politique dans lequel les lois sont faites directement par le peuple ou, à défaut, ratifiées par lui. Peu importe qui fait les lois dès lors que le peuple a le dernier mot. C’est pour cela que nous devons nous battre ; c’est cela que nous devons obtenir en priorité et même en exclusivité, car c’est parce que nous n’avons jamais pu nous opposer aux trahisons de nos élus qu’ils nous trahissent aussi effrontément.
Cette exigence a un nom ; c’est une disposition qu’il suffit d’inscrire dans la constitution et qui existe déjà dans d’autres pays, notamment en Suisse et aux États Unis ; elle est connue sous le nom de Référendum d’Initiative Populaire (RIP) ou Référendum d’Initiative Citoyenne (RIC). Les deux sont parfaitement synonyme. Pour ma part, je préfère celui de RIP, car il sonnerait effectivement le glas de la démocrature.
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Entendons bien que le RIP n’est pas UN référendum ; il est la possibilité, pour le peuple, de provoquer, sous certaines conditions, des référendums sur tous les sujets qui suscitent son intérêt ou ses craintes, les résultats de ces référendums ayant bien sûr force de loi. Ainsi, au moyen du Référendum d’Initiative Populaire, toutes les revendications que formulent les Gilets jaunes, toutes celles auxquelles ils n’ont pas pensées, et toutes celles que le pouvoir pourrait ignorer, pourraient être mises une à une sur la table, débattues et soumises à la décision du peuple.
J’invite donc les Gilets jaunes à aller à l’essentiel et à faire du RIP leur unique exigence. Pour que les choses soient tout à fait claires, et que le pouvoir, contraint de céder, ne puisse dénaturer cette exigence, je préconise de la préciser comme suit :
1) Les Gilets jaunes exigent, au nom du peuple français, que soit intégrée à la Constitution la disposition connue sous le nom de Référendum d’Initiative Populaire ou Citoyenne, permettant au peuple français de provoquer des référendums sur n’importe quel sujet et dont les résultats auront force de loi.
2) Des référendums seront provoqués automatiquement, dans un délai de 6 mois maximum, par toute pétition réunissant au moins 500.000 signatures de citoyens français, après constat de sa validité par l’organisme créé à cet effet.
3) L’organisme chargé de vérifier la validité des pétitions et d’annoncer l’objet et les dates des référendums sera composé de 100 citoyens français tirés au sort sur les listes destinées à former les jurés. Il siègera à Paris, aux abords de l’Étoile.
4) Toute entrave au droit des citoyens de signer des pétitions, à la provocation des référendums, à leur bon déroulement et à l’application de leurs verdicts sera considérée comme crime de lèse nation et puni de 10 ans de prison.
J’ajoute un point indépendant mais utile :
5) Amnistie totale pour tous les Gilets jaunes arrêtés et condamnés durant la crise ; indemnités généreuses pour tous les blessés graves.
Voilà ce que les Gilets jaunes doivent exiger pour que leur victoire soit totale et mémorable. Voilà, une fois bien comprise, l’exigence que tous les Français soutiendront avec enthousiasme et que le système ne pourra ni calomnier ni éluder. Voilà le coin que le peuple doit brandir pour fendre la démocrature telle une bûche.
Reste la question des moyens.
Je ne reviens pas sur ce qui a été fait et qui, bon gré mal gré, nous a ouvert des perspectives. Cela partait dans tous les sens ; il faut maintenant adapter les moyens au but.
Comment le gouvernement peut-il être contraint de capituler devant cette exigence ? En n’ayant pas le choix, en voyant que la nation tout entière la réclame à grand cri, en ne pouvant plus faire un pas sans la recevoir en pleine figure, en étant gêné dans toutes ses démarches, en n’ayant d’autre moyen de sortir de la crise qu’en satisfaisant la seule exigence qui permet d’en sortir. Que tous les Français qui le peuvent montent à Paris autant de samedis qu’il sera nécessaire, et qu’ils se pressent tout autour de l’Élysée, du palais Bourbon et sur les Champs-Élysées. Qu’un million, deux millions, trois millions de Français en gilet jaune bloquent les rues et le pouvoir par leur seule présence. Que ceux qui restent dans leur ville fassent de même sur la place principale et autour de la préfecture. Que tous, partout, arborent pancartes et banderoles réclamant la Démocratie et le Référendum d’Initiative Populaire, aux conditions énoncées plus haut. Que lors du moindre de leurs déplacements des foules accueillent Macron et ses ministres par ces mêmes slogans. Que personne ne recule devant les injonctions des autorités de se rendre ici ou de se disperser. Que ceux qui peuvent faciliter à leur manière l’action des Gilets jaunes fassent montre de solidarité. Que les forces de l’ordre, dont le premier devoir est de servir le peuple, brillent par leur inaction.
Il ne s’agit pas de transformer l’insurrection en manifestation, mais de rallier tous les Français, par des actions indolores pour eux et auxquelles ils n’hésiteront pas à se joindre, et de presser néanmoins le gouvernement de toutes parts jusqu’à sa capitulation. Assiégé, paralysé, anxieux, donnant au monde le spectacle pathétique d’un gouvernement soi-disant du peuple et donneur de leçons sourd à son propre peuple, donc discrédité sur la scène internationale, le pouvoir n’aura guère le choix que de rendre les armes. S’il restait sourd malgré tout, tel Louis XVI en son palais, alors le temps des ultimatums viendrait. Le peuple français est un lion qui dort… mais qui s’est réveillé.
Vive la Révolution !
Vive la Démocratie !
Vive la France !
Philippe Landeux
6 décembre 1018
LES GILETS JAUNES
22:59 Écrit par Philippe Landeux dans - ACTUALITE & VIDEOS PERSO, 6. MON BLOG | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer |
vendredi, 30 novembre 2018
GILETS JAUNES : RIC ou RIP ? (vidéo)
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Le mouvement extraordinaire des Gilets jaunes ne sera un succès que s’il pérennise sa victoire, donc s’il dote le peuple français d’un moyen légal et constitutionnel non seulement de contenir son gouvernement mais encore d’imposer ses volontés. Que le gouvernement cède sur des miettes ne serait pour eux, les Gilets jaunes, qu’une victoire à la Pyrrhus. Une mobilisation sans pareil doit avoir un but élevé et ambitionner des mesures décisives ; elle doit obtenir de ne plus être elle-même nécessaire à l’avenir ; elle doit assurer au peuple français le moyen d’être entendu et obéi de son gouvernement sans avoir à s’insurger, ce qui n’arrive pas souvent et est vain quand cela arrive.
Bref, si les Gilets jaunes devaient obtenir une chose, une seule, ce devrait être le droit, pour le peuple, de provoquer des référendums à volonté, sur les sujets de son choix, et que les résultats de ces référendums aient force de loi. Toutes les revendications possibles et imaginables, présentes et futures, sont contenues dans celle-là ; l’inverse n’est pas vrai. Dans la mesure où le gouvernement ne démissionnera pas, quelle que soit la pression (à moins d’une véritable insurrection), et où sa démission même, quoique jouissive, n’offrirait aucune satisfaction concrète et aucune garantie face à ses successeurs, le but est moins de le pousser à démissionner qu’à capituler sans condition devant le peuple (dont il est supposé être l’instrument et non le fléau), qu’à céder à ses exigences. Mais, il cèdera d’autant plus facilement que ces exigences seront limitées, claires, indiscutablement légitimes et universellement soutenues.
La présente proposition a le mérite de ramener la démocratie a son véritable principe (le pouvoir du peuple) et, par là même, de révéler l’imposture actuelle et de désarmer les imposteurs. Que pourront opposer au peuple exigeant la souveraineté ceux qui défendent un système dans lequel il est souverain mais seulement sur le papier, c’est-à-dire ceux qui défendent un système qui n’est pas ce qu’ils proclament face à ceux qui demandent juste qu’il soit ce qu’il prétend être ? Les concepteurs du système soi-disant représentatif ont cru duper le peuple ; il est temps que le peuple montre qu’il n’est pas dupe de cette fausse démocratie et qu’il arrache le masque des hypocrites et des despotes, afin que ceux-ci fassent amende honorable ou assument ouvertement d’être des ennemis du peuple.
Pour que la proposition en question soit claire, elle doit pouvoir être nommée. Il s’agit de permettre que des référendums soient provoqués à l’initiative d’un certain nombre de citoyens issus du « peuple », un nombre conséquent (par exemple 500.000) témoignant de l’intérêt suscité par le problème soulevé. Cette disposition est connue sous deux noms : Référendum d’Initiative Citoyenne (R.I.C.) et Référendum d’Initiative Populaire (R.I.P.). Il faut opter pour l’une ou l’autre de ces formules, a priori synonymes.
Un Référendum d’Initiative Citoyenne suppose que les signataires sont citoyens. Ce terme est d’autant plus choquant qu’il ne choque personne. Il est vrai que nous sommes supposés être des « citoyens ». Mais qu’est-ce qu’un « citoyen » ? Un maître et un esclave forment-ils société ? Sont-ils concitoyens ? Non. Et que sont les riches par rapport aux pauvres, les oppresseurs par rapport à ceux qu’ils oppriment, les exploiteurs par rapport à ceux qu’ils exploitent, les voleurs par rapport à ceux qu’ils ont volé, ceux qui ont tous les droits par rapport à ceux qu’ils ont dépouillé ? Forment-ils société ? Sont-ils concitoyens ? Pas davantage. Il n’y a pas de société digne de ce nom, pas de citoyens au vrai sens du terme, dans l’inégalité en droits ; et il n’y a pas d’Égalité possible dans le système monétaire. L’Égalité bien comprise (celles des citoyens, en devoirs et en droits) n’est pas impossible en soi, mais elle implique de sortir du système monétaire, donc de savoir pourquoi et comment. C’est là un autre sujet et un prochain combat. Pour l’heure, il importe de comprendre pourquoi donner du « citoyens » à des gens qui ne le sont pas en réalité est dangereux, pourquoi c’est un piège.
En fait, il s’agit du même type de piège que celui qui consiste à appeler « démocratie » un système politique qui n’en est pas une. De manière générale, ce type de piège est appelé « novlangue ». La novlangue consiste à désigner une chose par le mot qui désigne son contraire ou à associer un mot sensé à un concept vide de sens ou, encore, à désigner une chose grave par un mot ou une expression insipide. Bref, la novlangue, c’est la manipulation des mots avec lesquels on pense afin d’empêcher les gens de penser correctement. Plus un système tyrannique est perfide, plus il y a recours. Plus un système est perfide, plus il y a recours, plus il est tyrannique. La première façon de déjouer une tyrannie est donc de ne pas accepter son vocabulaire, de redonner leur vrai sens aux mots, d’appeler les choses par leur nom. Adopter le langage et les sophismes de l’ennemi, c’est être ligoté dans sa tête et ne pas pouvoir se révolter ou être vaincu d’avance. Nous sommes dans cette situation.
Il est facile d’éviter un piège une fois celui-ci mis en évidence. On ne tombe que dans les pièges que l’on n’a pas vus et, surtout, dans ceux que l’on ne veut pas voir. Le piège du mot « démocratie », tel qu’il est employé par le système, est aujourd’hui éventé dans une certaine mesure. Le système soi-disant représentatif — qui n’est que le gouvernement des ultra riches — s’est affublé du titre de « démocratie » pour se donner un air populaire et que personne ne lutte pour la véritable démocratie, sous prétexte qu’elle existe déjà. Opposer à la démocratie en mot la démocratie en fait est le coup le plus rude qui puisse être porté au système. Toutefois une conception plus populaire de la démocratie n’est toujours pas la démocratie ; c’est encore une illusion. Il n’y a pas de démocratie authentique et absolue possible dans un système monétaire, inégalitaire par nature, donc oligarchique ou ploutocratique. La souveraineté du peuple est une vue de l’esprit dans un système qui génère des riches auxquels il donne le pouvoir ou auxquels il permet de le prendre. Le peuple ne peut qu’espérer avoir voix au chapitre pour les contenir un minimum. Du reste, comment pourrait-il y avoir une vraie démocratie sans vrais citoyens ? L’Égalité fait des citoyens qui font la société et la démocratie. Tout est lié. De même la monnaie fait l’inégalité qui défait la société (sur le fond, pas sur la forme, ce qui maintient l’illusion) sans laquelle il n’y a ni citoyens ni démocratie.
Il ne s’agit pas d’échapper à un piège pour tomber dans un autre. Il est utile de combattre le système au nom de la démocratie, mais il ne faut pas s’illusionner et croire que de ce combat sortira la vraie démocratie. (Celle-ci ne sortira que du combat victorieux contre l’existence même du système monétaire.) Tout ce qui augmente le pouvoir et le contre-pouvoir du peuple va dans le bon sens mais n’est qu’une étape. Même un système techniquement démocratique ne serait pas encore la Démocratie, c’est-à-dire l’ère de l’Égalité bien comprise, des Citoyens dans toute leur dignité, de la Cité fondée sur les Principes de l’ordre social. C’est donc un piège que l’on se prépare nous-mêmes pour demain que de parler à tort et travers de « démocratie » et de « citoyens », comme si nous pouvions vraiment être en démocratie, comme si nous étions vraiment des citoyens, donc sans savoir ce que sont vraiment la Démocratie et la Citoyenneté, sans savoir et en nous interdisant même de penser qu’ils nous reste encore à renverser Largent, au nom de l’Égalité (et de la nation), pour les conquérir.
Pour toutes ces raisons (qu’on les admette ou pas), il est préférable de parler de Référendum d’Initiative Populaire. « Populaire » renvoie à « peuple », comme le principe même de la démocratie : « gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple ». Le simple fait d’évoquer le peuple annonce donc des intentions démocratiques, ce qui, dans le cas présent, est justifié. Ceci étant, le mot « peuple » est relativement flou, ce qui, loin d’être un inconvénient, est précisément ce qui constitue son avantage. Selon une de ses acceptions, le peuple est l’ensemble de que l’on appelle les « citoyens français » ; il désigne donc, tant bien que mal, le corps politique. Ainsi il dit ce qu’il faut et dispense d’employer ouvertement le mot « citoyens » qui, dans le contexte actuel, serait mensonger. Enfin, un peuple reste un peuple quels que soient les rapports entre ses membres ; le concept est toujours pertinent. Inégalité ou Égalité, le R.I.P. resterait le R.I.P. À l’inverse, des « citoyens », au vrai sens du terme, ont entre eux des rapports bien précis (ceux qui découlent de l’acte d’association et que le système monétaire sape), de sorte que, si rien ne peut empêcher d’utiliser ce mot, puisqu’il existe, l’utiliser pour désigner des gens qui n’ont pas ces rapports et ignorent même quels ils doivent être n’est pas fait pour qu’ils s’interrogent et l’apprennent. « R.I.C. » serait un nom judicieux dans l’Égalité, mais il est trompeur dans l’inégalité, et l’erreur sur laquelle il repose (celle qui consiste à croire qu’il y a des citoyens dans l’inégalité) détournerait du combat pour l’Égalité et la Citoyenneté pleine et entière (donc contre Largent), si bien que ce nom, en ouvrant une porte, en fermerait une autre, celle devant conduire au R.I.C. bien nommé.
La formule « Référendum d’Initiative Populaire » est donc aussi juste que celle de « Référendum d’Initiative Citoyenne » est dangereuse. Bien sûr, ceux qui prennent la « citoyenneté » pour une étiquette vide de sens ou sous laquelle on peut mettre n’importe quoi n’entendront pas ce discours et contribueront à la galvauder un peu plus, comme on savonne pour d’autres la planche que l’on a trouvée savonnée pour soi. Il est cependant à espérer que ceux qui respirent pour la justice et la vérité ne prendront pas cette mise en garde à la légère, et que, à défaut d’être tout à fait convaincus, ils s’abstiendront par précaution.
Et puis R.I.C., comme « rictus », fait doucement rigoler. Tandis que R.I.P, comme « Resquiescat In Pace », sonne le glas pour quelqu’un ; il serait bien la mort de la démocrature si le peuple parvenait à l’imposer. Tout un symbole !
Philippe Landeux
30 novembre 2018
LES GILETS JAUNES
10:40 Écrit par Philippe Landeux dans - ACTUALITE & VIDEOS PERSO, 6. MON BLOG | Lien permanent | Commentaires (3) | Facebook | | Imprimer |
mardi, 27 novembre 2018
LE DILEMME DES GILETS JAUNES
DES REPRÉSENTANTS OU PAS ?
Des représentants servent à négocier et légitiment de facto la partie adverse.
Dans le cas du mouvement des Gilets jaunes se pose un premier problème, celui de la désignation de représentants : ils sont trop hétéroclites pour en avoir qui soient représentatifs, et trop désorganisés pour être capables d’en désigner. Le deuxième problème est que leurs revendications sont actuellement trop confuses pour être entendues par le pouvoir qui, lui, a donc besoin d’interlocuteurs faisant office de catalyseurs. Le troisième problème est que des porte-parole, dont on ne sait comment ils pourraient être désignés, auraient pour mission de négocier (sur quelle base, dans quelles limites ?) avec un pouvoir auquel le mouvement ne reconnaît plus aucune légitimité et dont il souhaite, comme préalable à toute chose, la démission pure et simple.
Il s’ensuit que le principe des porte-parole est à proscrire, mais que le pouvoir cherchera à en imposer d’une manière ou d’une autre pour reprendre la main et nous la faire à l’envers. Si ce dernier arrive à ses fins, c’en est fait des nôtres.
Il s’ensuit également que, pour pouvoir se passer de porte-parole, tout en ayant des chances de succès, les Gilets jaunes doivent d’eux-mêmes renoncer aux réclamations tous azimuts et aux chimères et s’unir autour de revendications simples, claires et non négociables. Or il en est une qui contient toutes les autres et pérenniserait leur victoire ; une seule dont il ne faut démordre à aucun prix.
Puisqu’ils se posent en contre-pouvoir et en souverain, ils doivent obtenir que le peuple soit enfin le véritable contre-pouvoir légal et le souverain qu’il est déjà sensé être d’après la constitution. Ils n’obtiendront pas la démission du gouvernement (il faut de l'honneur pour démissionner), mais ils peuvent obtenir, en maintenant voire en accentuant la pression, qu’il capitule sur le principe du Référendum d’Initiative Citoyenne ou Populaire, dont les résultats auraient force de loi. Arracher une telle mesure serait une victoire non seulement par rapport au gouvernement actuel mais par rapport à tous les gouvernements futurs. Un système qui prétend défendre la démocratie aurait d’ailleurs du mal à éluder cette demande éminemment démocratique, sans passer pour tyrannique ; les médias auraient du mal à la ridiculiser sans se ridiculiser eux-mêmes.
Que tous les Gilets jaunes s’emparent de cette revendication, qu’ils en fassent partout leur unique objectif, qu’ils la martèlent de toutes leurs forces, qu'ils ne lâchent rien sur ce point, et, quoique sans leaders, sans représentants, sans organisation, leur victoire est aussi certaine que le coin finit par fendre la bûche.
Salus populi suprema lex est.
LES GILETS JAUNES
13:50 Écrit par Philippe Landeux dans 6. MON BLOG | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer |
samedi, 27 octobre 2018
PENSÉE DU JOUR : Voltaire et Rousseau
Voltaire était le chantre de Largent roi. Rousseau voulait la souveraineté du Peuple et l’égalité des citoyens.
On peut voir l’un et l’autre comme les deux faces d’une même pièce, dans la mesure où Rousseau ne dénonçait pas Largent et ne proposait pas de sortir du système monétaire (individualiste et inégalitaire), de sorte que ce qu’il voulait se heurtait à la force des choses et était réduit à un vœu pieu. Dans ce sens, Rousseau était l’idiot utile de Largent, d'aucuns diraient du "capitalisme".
Mais lequel des deux, de Voltaire ou de Rousseau, s’opposait-il le plus à Largent ? Voltaire qui allait volontairement dans son sens, ou Rousseau qui, malgré ses principes radicalement opposés, ne savait pas comment lui échapper et en était inconsciemment prisonnier ? Laquelle des deux doctrines est-elle potentiellement la plus subversive, la plus révolutionnaire ? Celle qui accompagne le système ou celle qui est soumise à lui par défaut ?
En fait, on associe Voltaire et Rousseau :
1) quand on ignore que Largent est l’ennemi, l’ennemi du Peuple et de l’Égalité, de sorte que l’on ignore ce qui les opposait fondamentalement et que l’on oscille soi-même entre le fatalisme de l’un et l’impuissance de l’autre ;
2) quand on dénonce Largent mais que l’on ignore soi-même comment l’abattre, de sorte que l’on ignore également que les Principes de Rousseau, à quelque chose près, étaient bien ceux qu’il faut opposer à Largent mais que son temps fixait des limites qui ne permettaient pas alors de s’opposer à lui en pratique, limites avec lesquelles il était obligé de composer, d’où certaines faiblesses conceptuelles.
Mais quand on sait que Largent est l’ennemi, qu’il ne peut être renversé qu’au nom de l’Égalité et de la Patrie (= peuple, société, cité, nation), que l’informatique permet aujourd’hui de dépasser la monnaie qu’elle est elle-même en train d’anéantir, alors on réalise que Rousseau ouvrait une voie bien différente de celle de Voltaire (qui lui nous a conduits là où nous sommes), qu’il n’était pas le verso d’une même pièce, mais seulement un pionnier dont l’audace mérite des louanges, et les erreurs inévitables, l’indulgence.
Du reste, quand on préfère Rousseau à Voltaire sans remettre en cause Largent, sans comprendre que Largent était la limite du premier, et la boussole du second, on se fourvoie dans les mêmes erreurs que lui sans avoir autant d’excuses. Car quelles excuses peut-on avoir quand la lumière est faite et que l’on persiste à fermer les yeux pour suivre en tout point un maître qui, lui, naviguait dans le noir ?
17:16 Écrit par Philippe Landeux dans 6. MON BLOG, 7.1. PENSEES DU JOUR | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer |
vendredi, 12 octobre 2018
PENSÉE DU JOUR : les « dissidents » en peau de lapin
Niveau 0 : Critique tout et son contraire
Niveau 1 : Critique du système politique
Niveau 2 : Critique du système économique
Niveau 3 : Critique du système monétaire, sans alternative sérieuse
Chacun de ces niveaux marque a priori un degré de conscience supérieur par rapport au niveau précédent (conscience de la cause des problèmes et du plan sur lequel on se propose d'agir). Mais, au final, à aucun de ces niveaux le système n’est critiqué dans son essence (Largent bien compris), de sorte qu’aucune de ces critiques n’est en mesure de proposer un système d’une nature différente, capable de résoudre, par une nouvelle force des choses, les maux qui suscitent l’indignation. Même le niveau 3, qui semble le plus près du but, et va en effet dans la bonne direction, n’a pas assez de consistance pour accoucher de quelque chose.
En fait, toutes ces critiques consistent à s’opposer plus qu’à proposer. Ce qu’elles prennent pour des propositions ne sont que des contre-mesures pour essayer d’anéantir en détail les effets d’une logique globale qui, elle, n’est pas remise en cause parce qu’elle est intégrée par le pensée. Sans doute certaines critiques sont-elles plus pertinentes que d’autres. Mais il n’y a pas de milieu. Il n’y a pas de lot de consolation. Soit on sort du système (monétaire, individualiste, inégalitaire), soit on est toujours dedans. Or, si certaines de ces critiques montrent mieux que d’autres les mécanismes du système actuel, aucune ne permet d’en sortir, toutes condamnent à tourner en rond à l’intérieur. Il n’y a donc pas lieu de se féliciter d’avoir atteint tel ou tel niveau. Les canaris aussi chantent dans leur cage.
08:47 Écrit par Philippe Landeux dans 6. MON BLOG, 7.1. PENSEES DU JOUR | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer |
samedi, 22 septembre 2018
ÉQUITÉ vs ÉGALITÉ
Équité : le mot sonne comme un Principe, ce qui lui donne un caractère imposant. Mais, à la vérité, il sonne creux et ne charme que les sourds.
L’Équité évoque la Justice mais se veut plus nuancée que l’Égalité. Autrement dit, elle s’oppose à l’Égalité, au Principe fondamental de l’Ordre social, à laquelle elle prétend substituer une vague notion de justice, fondée sur l’appréciation personnelle. Car si elle rejette l’Égalité qui ne fait pas de distinctions, c’est pour établir, elle, toutes les distinctions possibles et imaginables ; si elle rejette le Principe de l’égalité des Citoyens en Devoirs et en Droits, tout en conservant les notions mêmes de devoirs et de droits, c’est pour distinguer les devoirs en fonction de leurs objets afin de les récompenser chacun par des droits soi-disant à leur hauteur, au nom de Dieu sait quels critères ; c’est pour nier qu’un devoir doit être considéré d’après sa nature, et que les droits doivent être ceux du Citoyen ; c’est pour soutenir que les individus remplissent des devoirs, non pour mériter la Citoyenneté, mais pour obtenir des droits individualisés ; c’est pour nier — ou pour le moins vider de tout sens — la Citoyenneté elle-même, en ne reconnaissant pas les Devoirs qu’elle implique et surtout les Droits qu’elle confère. En somme, l’Équité revient à dénoncer l’injustice, l’inégalité et l’arbitraire pour instaurer l’inégalité soi-disant juste d’après celui qui en décide. Tout ça pour ça ! La qualifier de « fumisterie » est bien la moindre des choses.
Comme « l’humanité », l’Équité consiste à se laisser guider par des penchants personnels, à prendre ces penchants pour des Principes et ainsi à faire de la Politique sans Principes, c’est-à-dire à vouloir régir la Cité tout en méconnaissant et bafouant les Principes de l’Ordre social. Prompte à rejeter, elle n’a rien à proposer. Elle parle de droits, et éventuellement de devoirs, mais elle ne peut pas les théoriser. Elle ne peut pas, comme l’Égalité, dire qu’il n’y a de Devoirs qu’envers d’autres et à condition qu’il y ait réciprocité entre eux ; que les devoirs des uns génèrent les droits des autres ; que des Citoyens astreints aux mêmes Devoirs se génèrent mutuellement les mêmes Droits ; que les notions de Devoirs et de Droits n’ont de sens que dans l’Égalité ; que la Citoyenneté implique les mêmes Devoirs pour tous les Citoyens et confère à tous les Droits du Citoyen, ou ne veut rien dire ; que seuls des Citoyens égaux en Devoirs et en Droits sont réellement Citoyens et forment une Cité ou une Société digne de ce nom. Qu’objecte l’Équité à tout cela ? Rien. Elle ne peut pas argumenter face à cette logique implacable sans révéler sa propre indigence. Elle n’a pour toute réplique que l’esquive et ses sophismes. Elle, elle est plus juste car nuancée…. Très bien… Entrons dans son jeu. A quel endroit du raisonnement prétend-elle introduire de la nuance pour être plus juste que l’Égalité ? Reprenons point par point.
« Il n’y a de Devoirs qu’envers d’autres et à condition qu’il y ait réciprocité entre eux. » Peut-on parler de « devoirs » à propos d’obligations que l’on s’impose à soi-même et dont on retire seul les fruits ? A vrai dire, oui. Mais il s’agit alors au mieux de « devoirs moraux », qui n’intéressent personne hormis l’intéressé. Dans le registre qui est le notre, celui des rapports entre les hommes, un Devoir est nécessairement une obligation librement consentie au profit d’autrui, et cette obligation n’est librement consentie que si toutes les parties y consentent pareillement, s’il y a réciprocité. Sans cette réciprocité, il n’y a pas de « Devoir », sinon par abus de langage de la part du plus fort. Un maître peut bien dire que ses esclaves ont des devoirs envers lui, alors que lui-même ne s’en sent aucun envers eux, le statu quo n’est maintenu que par la terreur. A la première faiblesse, les esclaves s’enfuiront ou lui trancheront la gorge. Ils n’ont aucun devoir envers lui parce qu’il n’y a pas de devoir sans liberté et sans réciprocité. Quelle nuance apportera donc ici l’Équité ? Soutiendra-t-elle, comme conception plus juste, que les devoirs ne soient ni librement consentis ni réciproques, que les uns imposent donc aux autres des obligations envers eux auxquelles ils se refusent eux-mêmes ? Consistera-t-elle à nous vendre l’esclavage et la tyrannie comme des bienfaits ?
« Les devoirs des uns génèrent les droits des autres. » Quand les uns font quelque chose pour d’autres, ce sont ces autres qui en retirent le fruit. Quand ce quelque chose est un Devoir, son fruit est un Droit pour ceux envers lesquels ledit Devoir est rempli. La nuance consiste-t-elle, ici, à prétendre qu’un Devoir rempli envers d’autres ne génère rien pour eux ? ou s’agit-il de déclarer que chacun doit générer pour lui-même ses propres droits, donc n’avoir aucun devoir envers personne ? Une Société dans laquelle les Citoyens n’auraient aucune obligation les uns envers les autres, comme dans l’état de Nature ! Formidable !
« Des Citoyens astreints aux mêmes Devoirs se génèrent mutuellement les mêmes Droits. » Conséquence des deux points précédents : si les Citoyens ont des Devoirs et nécessairement les mêmes Devoirs les uns envers les autres, ils génèrent et se garantissent mutuellement des Droits et fatalement les mêmes Droits. (1) On pourrait imaginer, pour nuancer pareille horreur, trois hypothèses : 1) que les Citoyens aient les mêmes Devoirs mais pas les mêmes droits, 2) qu’ils n’aient pas les mêmes devoirs mais cependant les mêmes Droits, 3) qu’ils aient des devoirs et des droits différents. La première hypothèse (mêmes Devoirs mais pas les mêmes droits) supposerait que des individus ayant les mêmes Devoirs les uns envers les autres et se garantissant de fait les mêmes Droits pourraient malgré tout être inégaux en droits. Comment ? Il faudrait que certains soient spoliés, d’une manière ou d’une autre, d’une partie de leurs Droits. La justice, selon l’Équité, serait donc la spoliation, l’exploitation, l’oppression ? La deuxième hypothèse (devoirs différents mais mêmes Droits) supposerait soit qu’une partie des Droits n’est générée par personne, ce qui est impossible, soit qu’une partie des individus se dispensent ou sont dispensées de tout ou partie des Devoirs et se comportent en parasites, grands ou petits, ce qui est inadmissible. Au vrai, cette hypothèse, la moins détestable de toutes — car l’égalité en Droits tend à susciter l’égalité en Devoirs et, finalement, ne pénalise personne même si certains en font moins que d’autres —, est aussi celle que l’Équité exclue d’emblée, puisque son rejet de l’Égalité est avant tout celui de l’égalité en Droits. Enfin, la troisième hypothèse (devoirs et droits différents) combine toutes les absurdités des deux premières. Mais elle peut être vue de deux manières : soit les individus ont des devoirs différents mais jouissent des droits correspondants qu’ils génèrent, tels le « juste prix », de sorte que, s’ils sont inégaux entre eux, le sort de chacun est juste, ineptie à tous les niveaux que l’Équité présente comme justice absolue ; soit les individus ont des devoirs différents et, cette fois, des droits sans rapport avec les devoirs qu’ils ont remplis, de sorte qu’exploitation et oppression sont officielles, ce qui revient au cas précédent (et à la situation actuelle), les foutaises et les illusions en moins.
(1) « Astreints » ne signifie pas ici que ces Devoirs leurs sont imposés de force ; c’est la Citoyenneté qui, par définition, les imposent à tous ceux qui désirent être Citoyens et qui consentent aux obligations que cela implique. Quand même des individus seraient Citoyens faute de choix, ils ne pourraient se plaindre que de la nature des choses et non de la Cité qui n’exigerait rien d’eux qu’elle n’exige de tous, pour leur donner en retour, à eux comme à tous, autant qu’il est possible.
« Les notions de Devoirs et de Droits n’ont de sens que dans l’Égalité. » C’est la morale des points précédents : il n’y a pas de Devoirs sans réciprocité ; les Devoirs des uns génèrent les Droits des autres ; il n’y a pas de Devoirs hors de l’Égalité ; l’égalité en Devoirs génère l’égalité en Droits ; donc il n’y a de Devoirs et de Droits, au vrai sens du terme, que dans l’Égalité. Ceux qui rejettent le Principe d’Égalité mais parlent quand même de « devoirs » et de « droits » se gardent bien d’expliquer de quoi les uns et les autres procèdent. Pour certains, ils tombent du Ciel ; pour d’autres, ils naissent de leurs états d’âme. Aucun n’établit de liens « mathématiques » entre ces notions sociales, les rapports sociaux, la Société, sa raison d’être et les Lois qui en découlent. Tous prétendent disserter sur un objet sans jamais considérer l’objet lui-même. Ils veulent l’harmonie partout et la cohérence nulle part. En effet, qu’apportent de soi-disant « nuances » à un raisonnement logique si ce n’est de l’incohérence ? L’Équité présente la rigueur intellectuelle comme de la rigidité afin de faire valoir sa bêtise voire sa lâcheté.
« La Citoyenneté implique les mêmes Devoirs pour tous les Citoyens et confère à tous les Droits du Citoyen, ou ne veut rien dire. » La Citoyenneté est le statut des membres de la Cité appelés « Citoyens », et ce statut définit aussi bien les Devoirs, qui permettent de l’obtenir, que les Droits qu’il confère en retour à ceux qui l’ont obtenu, c’est-à-dire les Devoirs et les Droit du Citoyen, donc de tous les Citoyens indistinctement. Comment pourrait-il en être autrement ? Soit des individus ont le même statut, donc les mêmes devoirs et les mêmes droits, soit ils n’ont pas les mêmes et leurs statuts respectifs doivent être appelés différemment. Des « Citoyens » inégaux en devoirs et/ou en droits ne seraient pas Citoyens aux mêmes conditions, la Citoyenneté ne signifierait pas pour tous la même chose et ne serait donc qu’un mot astucieux pour créer l’illusion du même à propos de choses différentes. Mais une Cité digne de ce nom doit bel et bien être composée de Citoyens au vrai sens du terme, c’est-à-dire d’individus ayant réellement le même statut, appelé « Citoyenneté », donc les mêmes Devoirs et les mêmes Droits. « Cité », « Citoyen », « Citoyenneté », « Devoirs », « Droits » ne sont pas seulement des mots ; ce sont des concepts indivisibles, des notions consubstantielles. Les « nuances » en la matière consistent à garder le contenant (les mots) tout en dénaturant le contenu (les concepts).
« Seuls des Citoyens égaux en Devoirs et en Droits sont réellement Citoyens et forment une Cité ou une Société digne de ce nom. » Ceci conclut et récapitule tout ce qui vient d’être dit : il n’y a de Devoirs, de Droits, de Citoyens, de Citoyenneté, de Cité que dans l’Égalité. Or il n’y a pas de milieu : l’Égalité est ou n’est, et quand, elle n’est pas, l’inégalité règne à sa place, l’Ordre social est anéanti. L’Équité et ses « nuances » ne sont pas une alternative à l’Égalité ; elles sont la bonne conscience de l’inégalité. Elles ne proposent pas un autre modèle de Société ; elles prônent, au nom de la Société, un système fondamentalement antisocial. Elles ne sont pas la promesse d’un « monde » plus juste ; elles sont la garantie que le « monde » restera tel qu’il est. Elles ne menacent pas l’ordre des choses actuel ; elles dénoncent d’un côté ce qu’elles justifient autrement d’un autre. Elles ne sont pas l’étendard possible d’une Révolution ; elles sont désespérément conformistes et intrinsèquement — consciemment ou non — contre-révolutionnaires.
Il est naturel que les Principes tiennent le devant de la scène. Mais on ne peut pas vraiment comprendre cette discussion si l’on ne jette un œil en coulisse, si on ignore par quoi l’Équité est inspirée et, dans le même temps, enchaînée.
J’ai dit ici que des Citoyens devaient être égaux en Devoirs et en Droits ; j’ai précisé, plus haut, que des Citoyens avaient le Devoir de participer à la vie de la Cité (selon ce qu’elle considère comme une participation) et le Droit de profiter de tous ses bienfaits, notamment via un droit indirect d’accéder librement au marché. Admettre que tous les Citoyens aient le Devoir de participer à la vie de la Cité ne pose guère de problème (sauf pour des gauchistes). En revanche, que tous les Citoyens — compte tenu de ce qu’implique la Citoyenneté telle que je l’ai définie — aient le droit d’accéder librement au marché, autrement dit que l’accès au marché leur soit conféré par la Citoyenneté elle-même, voilà qui paraît inconcevable et même blasphématoire ! Que des droits soient attachés à la Citoyenneté, d’accord ! Mais que le droit le plus indispensable, celui par lequel passent quasiment tous les autres, y soit de même attaché, non ! non ! et non ! Il est normal que tous les Citoyens participent à la vie de la Cité ; mais que tous puissent profiter pareillement du fruit de leur efforts combinés, n’exagérons pas ! On veut bien avoir un discours « social », mais à condition qu’il ne débouche sur rien ! On veut bien défendre la « dignité » des autres, mais à condition qu’ils ne soient jamais nos « égaux ».
Et je n’ai pas dit le plus beau : si le droit d’accéder au marché est conféré par la Citoyenneté, c’est qu’il ne dépend plus d’une monnaie, c’est qu’il n’y a plus de monnaie, plus de prix, plus de valeur marchande, plus de pauvres, plus de riches… juste des Citoyens, comme il se doit dans une Cité. Là, c’est l’infarctus ! QUOI !!! Oser remettre en cause un système multi-millénaire qui a fait… Qui a fait quoi ? Le bonheur des hommes ? Non ! Le bonheur des « citoyens » ? Non ! Celui des peuples ? Non plus ! Alors disons qu’il a surtout permis à certains de prospérer sur le dos des uns et de piétiner dans le sang des autres ! OUI MAIS !!! Il facilite les échanges… Ha ! parce qu’il n’y aurait plus d’échanges entre des Citoyens accédant librement au marché ? MAIS ENFIN !!! Un balayeur ne peut pas gagner comme un patron ! Parce qu’un patron doit être plus Citoyen que ses employés ? Il est la Cité à lui tout seul ? Les autres sont-ils ses esclaves ou ses Concitoyens ? Mais à quelles conditions seront-ils ses Concitoyens si tous n’ont pas les mêmes Droits ?
Je pourrais égrener encore longtemps, non pas les arguments, mais les réflexions de cet acabit qu’inspirent spontanément et universellement l’Égalité et ses conséquences. On constaterait, d’une part, que l’Égalité — telle que je l’expose en détail — ne fait l’objet d’aucune critique sur le plan des Principes, et que le grand reproche qui lui est fait est de ne pas reproduire le système monétaire ; d’autre part, que jamais il n’est question de défendre en soi le système monétaire, qu’il s’agit toujours d’accepter son existence parce qu’il existe, parce que, de ce fait, il conditionne nos vies, notre monde, nos pensées, parce que, pour le meilleur ou, le plus souvent, pour le pire, chacun n’en est finalement qu’un rouage incapable de concevoir une autre machine. Toute tentative de le justifier tourne elle-même à vide : c’est comme ça, donc c’est comme ça que cela doit être, et inversement.
C’est dans ce contexte et dans ces dispositions que des hommes brandissent l’Équité comme le fin du fin. Mais ils ne l’opposent pas alors à l’Égalité, dont ils ignorent tout ; ils l’opposent aux injustices criantes du système monétaire, dont ils ont cependant intégré les préjugés. Ce n’est qu’une fois confrontés à la véritable Égalité qu’ils lui opposeront l’Équité au nom desdits préjugés, c’est-à-dire au nom de Largent (2) dont ils prétendent par ailleurs combattre les effets extrêmes.
(2) « Largent » est un terme propre à la théorie du Civisme. « Largent, c’est la croyance que la notion de valeur marchande est nécessaire pour échanger. » Cette croyance est née du troc dont elle véhicule les schémas et est inculquée aux hommes actuels par la pratique de l’échange monétaire. Imprégnés de cette croyance, les hommes ne peuvent plus concevoir d’autre mode d’échange que celui qu’ils connaissent, et sont condamnés à le reproduire, puisque lui seul met en œuvre les mécanismes qui sont les siens et qu’ils préjugent nécessaires. « Largent » désigne donc plus que le système monétaire, plus que la monnaie, plus que la notion de valeur marchande. Il est la quintessence du système, la source dont tout découle, la « matrice ». Mais, s’il a un sens très précis, il peut aussi être utilisé pour parler de tout ce qui se rapporte directement ou indirectement à lui et dont il est la cause en dernière analyse.
Ici, il faut nous arrêter sur ce que j’appelle les « préjugés monétaires » (ou « préjugés capitalistes »). (Loin de nous écarter du sujet de l’Équité, cela nous permettra au contraire de mieux comprendre ses propres ressorts, des ressorts qu’elle ignore et dont elle ne veut surtout rien savoir. Cette réflexion vaut également pour à peu près tous les courants de pensée et toutes les idées, y compris celles concernant la Propriété.)
Les hommes actuels n’ont pas inventé le système dans lequel ils vivent ; ils sont nés dedans, ils ne connaissent que le monde façonné par lui et ils croient à la fois qu’il n’y a pas d’autre système possible et que ce qu’ils observent est dans la nature des choses, donc immuable. Ne voyant pas ce qu’ils observent comme des conséquences du système, ils n’en cherchent pas la cause ou ne vont pas jusqu’à en accuser le système lui-même, mais l’imputent à tout autre chose et, faisant ainsi erreur sur la cause, ils en commettent de nouvelles, ajoutant à la confusion. Il est pourtant indéniable que le système est monétaire et que, en dernière analyse, tout tourne autour de l’argent dans ce système. Ce sont donc les mécanismes et les effets du système monétaire qui, étant considérés comme naturels et immuables, vont devenir des postulats inconscients et incontestables, autrement dit des « préjugés ». Pour découvrir la nature et l’origine de ces préjugés, il suffit d’étudier le fonctionnement du système monétaire.
Le système monétaire n’est pas apparu tel quel un beau matin ; il évolue (au moins dans sa forme) et fut lui-même le fruit d’une évolution. L’impulsion initiale fut donnée par des échanges entre individus ou communautés sur le mode du troc. Le troc consiste, pour des individus ou des communautés, à échanger des objets entre eux, donc à mettre, d’abord inconsciemment, puis volontairement, ces objets en équivalence. Que le troc ait été une pratique courante ou marginale, peu importe ; lui seul a pu amener les hommes à penser que les objets pouvaient avoir une valeur marchande, puis à croire qu’ils doivent en avoir une. Cette notion de valeur implique le recours à une unité de mesure, laquelle consista d’abord en objets divers, puis en objets de référence, puis en monnaies primitives ou modernes, enfin en chiffres abstraits, preuve que tout autre support était superflu et n’était donc qu’un prétexte. A partir d’ici, nous pouvons dérouler les diverses facettes du système pour saisir au fur et à mesure les préjugés qu’elles engendrent.
[Cette partie, que j’ai déjà publiée et dans laquelle j’énonce 40 préjugés, est trop longue pour être présentée ici mais j’invite à la lire avant de poursuivre la lecture présente. Les préjugés monétaires ou capitalistes]
Ce système est cohérent par rapport à lui-même. Il a une logique, celle de la monnaie (ou, pour mieux dire, de Largent). Tout s’articule autour de l’idée que les individus doivent réaliser des échanges équitables, que des échanges (en biens, services ou monnaie) sont équitables dès lors qu’ils ont été réalisés, qu’une monnaie est le meilleur moyen — plus exactement le seul moyen — d’y parvenir, et qu’il n’y a donc pas d’autre système possible (on ne dit pas « souhaitable ») que le système monétaire. Peu importe la fiction et les mensonges, les aberrations et les désastres ! Ce système a ses raisons que les hommes, qui ne connaissent que lui, font leurs et qui, ce faisant, ne peuvent rien concevoir d’autre. Mais force est d’admettre que cette logique n’a aucune dimension sociale et n’est pas celle de la Société. Elle n’implique ni la Cité ni les individus en tant que Citoyens qu’ils sont censés être ; elle méconnaît aussi bien les Devoirs que les Droits du Citoyen ; elle sacrifie tout sur l’autel de la soi-disant valeur marchande (Largent). On ne peut pas en dénoncer des aspects sans la rejeter complètement ou la conserver entièrement. Entre la logique monétaire (Largent) et la logique sociale (l’Égalité), il faut choisir. Un assortiment n’est pas possible. En proposer un est, à la fois, la preuve que l’on ne va au bout ni de l’une ni de l’autre, l’aveu que l’on ne maîtrise ni l’une ni l’autre et la démonstration que, au final, on est toujours prisonnier de la première, celle de la monnaie. Car ne pas avoir conscience du rôle et de l’influence de la monnaie n’empêche pas de la subir et d’être influencé par elle, à son avantage, dès lors que l’on vit dans un système monétaire. Dans ces conditions, toute « proposition » autre que l’Égalité bien comprise est inconsciemment inspirée par les préjugés monétaires et reproduit d’une manière ou d’une autre le système monétaire dont les effets intrinsèques sont niés ou ignorés. (3) On pourrait dire que « toute proposition de ce genre est vouée à l’échec », mais ce serait s’abuser doublement : des projets qui ne renferment rien de neuf ne sont pas des « propositions », et on ne peut pas à proprement parler « d’échec » quand, au fond, on n’a rien tenté. (4)
(3) Même les « propositions » de systèmes non-monétaires sont influencées par les préjugés monétaires, dès lors que les systèmes en question — toujours les mêmes à quelque chose près — ne visent pas à instaurer l’Égalité (Citoyens égaux en Devoirs et en Droits, en Devoirs, notamment de participer à la vie de la Cité, en Droits, notamment d’accéder librement au marché). Dans ce cas, une partie seulement des effets négatifs de la monnaie a été identifiée ; l’autre partie reste à l’œuvre et sert d’appui pour échafauder une « solution ». Or, un des premiers effets de la monnaie est l’individualisation des rapports, qui suscite à la fois l’individualisme et le sans-frontiérisme (en passant par l’universalisme et le droit-de-l’hommisme), et l’ignorance de ce que sont un Citoyen et une Société, un Devoir, un Droit et l’Égalité. Ce n’est donc pas un hasard si toutes les « propositions » de ce genre, hormis le Civisme, sont universalistes ou mondialistes, hostiles à toute idée de Devoirs, de Société et d’Égalité ; c’est qu’elles régurgitent, sans en avoir conscience, le catéchisme capitaliste. Elles croient faire table rase, alors que leur vide est comblé par les préjugés monétaires. Leurs solutions bancales ne peuvent que s’effondrer et ramener au capitalisme dont elles ne se sont finalement jamais libérées.
(4) On entend souvent dire que, pour changer le monde, il faut d’abord changer soi-même. Changer à quel niveau ? dans quel sens ? Mais que peut-on réellement changer quand on ignore que le monde est façonné par Largent, que l’on pense nous-mêmes à travers Largent, que nos pensées ne sont, pour la plupart, que l’expression de préjugés monétaires ? L’Égalité qui anéantirait de fait Largent changerait le monde (au sens de « Société »). Quelle victoire sur l’esprit, quel changement intérieur ne serait-ce pas déjà que d’envisager de passer de l’un à l’autre ! Quelle bêtise que d’opposer un tel argument (changer d’abord soi-même) à l’idée de remettre en cause le système monétaire !
L’Équité n’échappe pas à la règle ; elle la confirme même de manière éclatante en se posant comme une alternative à l’Égalité, donc en s’opposant expressément à elle. Mais lequel des préjugés énoncés plus haut l’Équité remet-elle en cause ? Aucun, absolument aucun. Elle garde tout du système monétaire et croit pouvoir accoucher d’autre chose par enchantement. En fait, elle présente comme une nouveauté et une planche de salut un principe qui est déjà une supercherie et la porte ouverte à l’arbitraire dans le système monétaire : l’équité. La base du troc et du système monétaire est que les échanges réalisés sont toujours équitables et satisfont les deux parties. Or, même en supposant que les protagonistes des échanges soient toujours satisfaits, croyant avoir servi au mieux leurs intérêts particuliers, il est évident que l’échange dans de telles conditions n’est pas forcément dans l’intérêt de la Société, qu’il est même impossible qu’il le soit… et il ne faut pas creuser beaucoup pour se rendre compte que, à la vérité, il n’est pas à l’avantage de la plupart des « Citoyens ». En quoi consisterait donc l’Équité en tant que « principe social » ? A substituer l’arbitraire de l’État à l’arbitraire des individus ? A substituer des critères technocratiques aux critères de chacun ? A substituer la tyrannie à l’injustice ; l’artificiel au naturel (du système monétaire) ; le désastre au désordre ; le mécontentement général au malheur commun ? Et si l’idée n’est pas d’aller aussi loin, de combien s’agit-il de s’éloigner du système (monétaire) tel qu’il est ? D’un cheveu ? Moins ? Qu’il s’agisse donc de faire quelque chose d’intenable ou de ne rien faire, sinon en paroles, que l’Équité soit franchement grotesque ou purement déclamatoire, dans tous les cas il s’agit de rester dans le système monétaire, donc de se soumettre bon gré mal gré à Largent, sans le comprendre mais sans faillir.
L’Équité débite des fables pour nourrir des illusions et avaler ses propres sophismes. En quoi l’inégalité « équitable » serait-elle préférable à l’inégalité capitaliste ? en quoi l’inégalité entre Citoyens serait-elle plus juste que l’Égalité, alors qu’il n’y a pas même de Citoyens dans l’inégalité ? L’Équité ignore tout des Principes de l’Ordre social parce qu’elle est pétrie par les préjugés monétaires et qu’elle n’est, en définitive, qu’un prétexte à l’inégalité et un porte-parole de Largent. Qu’elle le soit consciemment ou non ne change rien à l’affaire ; seul le résultat compte ; et le résultat, c’est qu’elle prétend combattre un système avec les armes que le système lui a fournies pour le défendre ; c’est qu’elle tourne contre la Société des hommes qui veulent lui être utiles ; c’est qu’elle fait perdre du temps à un moment où il est urgent d’agir et où nous n’avons pas le droit à l’erreur.
L’Égalité (des Citoyens en Devoirs, dont celui de participer à la vie de la cité selon ce qu’elle considère comme une participation, et en Droits, dont celui d’accéder librement au marché) est le seul et unique Principe capable d’anéantir Largent (la croyance que la notion de valeur marchande est nécessaire pour échanger), de sortir de la logique capitaliste et du système monétaire. Dans l’Égalité, on ne calcule pas, on ne mesure pas, on n’évalue pas, on n’a pas besoin d’unité de valeur pour établir des nuances artificielles et arbitraires au profit du plus fort, aux dépens des Citoyens. Quiconque croit en la nécessité de calculer, de mesurer, d’évaluer, même sous prétexte d’Équité, est un disciple de Largent, un profiteur du capitalisme ou un de ses idiots utiles.
Philippe Landeux
Extrait de "La Propriété", ouvrage à paraître
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vendredi, 20 juillet 2018
LES PRÉJUGÉS MONÉTAIRES
Les hommes actuels n’ont pas inventé le système dans lequel ils vivent ; ils sont nés dedans, ils ne connaissent que le monde façonné par lui et ils croient à la fois qu’il n’y a pas d’autre système possible et que ce qu’ils observent est dans la nature des choses, donc immuable. Ne voyant pas ce qu’ils observent comme des conséquences du système, ils n’en cherchent pas la cause ou ne vont pas jusqu’à en accuser le système lui-même, mais l’imputent à tout autre chose et, faisant ainsi erreur sur la cause, ils en commettent de nouvelles, ajoutant à la confusion. Il est pourtant indéniable que le système est monétaire et que, en dernière analyse, tout tourne autour de l’argent dans ce système. Ce sont donc les mécanismes et les effets du système monétaire qui, étant considérés comme naturels et immuables, vont devenir des postulats inconscients et incontestables, autrement dit des « préjugés ». Pour découvrir la nature et l’origine de ces préjugés, il suffit d’étudier le fonctionnement du système monétaire.
Le système monétaire n’est pas apparu tel quel un beau matin ; il évolue (au moins dans sa forme) et fut lui-même le fruit d’une évolution. L’impulsion initiale fut donnée par des échanges entre individus ou communautés sur le mode du troc. Le troc consiste, pour des individus ou des communautés, à échanger des objets entre eux, donc à mettre, d’abord inconsciemment, puis volontairement, ces objets en équivalence. Que le troc ait été une pratique courante ou marginale, peu importe ; lui seul a pu amener les hommes à penser que les objets pouvaient avoir une valeur marchande, puis à croire qu’ils doivent en avoir une. Cette notion de valeur implique le recours à une unité de mesure, laquelle consista d’abord en objets divers, puis en objets de référence, puis en monnaies primitives ou modernes, enfin en chiffres abstraits, preuve que tout autre support était superflu et n’était donc qu’un prétexte. A partir d’ici, nous pouvons dérouler les diverses facettes du système pour saisir au fur et à mesure les préjugés qu’elles engendrent.
1) Le troc est un échange d’objets.
Le premier préjugé consiste donc à croire qu’il n’y a échange que si des objets sont échangés les uns contre les autres ; le deuxième préjugé, à croire que les objets sont le seul enjeu de l’échange, d’où le matérialisme inhérent à ce mode d’échange.
2) Le troc est un échange entre individus.
Le troisième préjugé consiste donc à croire que l’échange se pratique nécessairement entre individus, lesquels doivent donc s’échanger directement quelque chose. Ce système, intrinsèquement individualiste, insuffle donc l’individualisme et le sans-frontiérisme.
3) Le troc met les objets en équivalence.
Le quatrième préjugé consiste donc à croire que les objets et les choses en général ont une valeur marchande. Ce qui engendre le cinquième préjugé qui consiste à croire qu’une unité de valeur est nécessaire pour mesurer la valeur des objets et permettre l’échange sur le mode du troc indirect ; ce qui engendre le sixième préjugé qui consiste à croire qu’établir la soi-disant valeur des choses prime sur toute autre considération, si bien que les échanges qui sont au cœur des rapports sociaux deviennent une finalité en soi et n’ont, dans cette conception de l’échange, aucune dimension sociale, pas plus que ses protagonistes.
4) Le troc est un échange d’objets.
Il s’ensuit que la monnaie, qui représente des objets, doit elle aussi être échangée ; c’est pourquoi elle circule, pourquoi elle passe de main en main. Mais la monnaie incarne aussi des droits : celui d’accéder au marché et tous ceux qui passent par celui-là. Le septième préjugé consiste donc à croire qu’il n’y a échange que si les individus se dépouillent de quelque chose, et que le droit d’accéder au marché ne s’exerce donc qu’en s’en dépouillant petit à petit, au fil des dépenses. Le huitième préjugé consiste à croire que les droits ne s’obtiennent que d’un tiers, via les échanges que l’on fait avec lui (quoique l’on puisse aussi le voler), qu’ils ne relèvent pas de la Société et qu’il est normal de n’en avoir aucun en tant que Citoyen (au vrai, on ne se pose même pas la question). Le neuvième préjugé consiste à croire que les droits se conquièrent sur les autres et que les hommes, même en Société, sont condamnés à une perpétuelle guerre de tous contre tous. Le dixième préjugé consiste à trouver normal que l’État, dont le rôle devrait être de garantir les droits, dépouille lui aussi les « citoyens » de leur argent, c’est-à-dire de leurs droits, via les impôts, taxes, amendes, etc., pour ses propres besoins.
5) Le troc est un échange d’objets dont les premiers propriétaires sont les producteurs.
Le onzième préjugé consiste donc à croire que produire rend propriétaire de sa production ou, à défaut, que le travail doit être échangé contre de la monnaie. Ce qui entraîne deux autres préjugés : le douzième, qui consiste à croire que le travail n’est pas un Devoir envers la Société mais une obligation envers soi-même, soit pour en consommer directement les fruits, soit pour en retirer de la monnaie (des droits) en les vendant ou en se faisant payer ; le treizième, qui consiste à trouver naturel que la Société garantisse le droit de Propriété sur leur production à des producteurs qui ne produisent pas pour elle, qui devrait donc s’en laver les mains. Personne pour s’étonner que la Société ne joue pas son rôle et qu’on lui en fasse jouer un qui n’est pas le sien ! En fait, personne ne sait plus ce que doit être une Société.
6) La monnaie facilite le troc.
Le quatorzième préjugé consiste donc à croire que la monnaie facilite les échanges et qu’elle est indispensable aux échanges eux-mêmes. Ce préjugé opère ainsi un glissement : de la facilitation du troc, il passe à la facilitation des échanges et, de là, à l’impossibilité d’échanger autrement ; il passe d’une évidence à un sophisme qu’il prend pour un truisme. Il donne l’impression d’avoir comparé le troc ou le système monétaire, qui sont fondamentalement la même chose, à un autre mode d’échange, et rejeté ce dernier après avoir pesé le pour et le contre, sauf qu’il a seulement comparé le troc avec lui-même (troc direct ou troc indirect via la monnaie). Dans une autre version, il dirait que « la monnaie est pratique ». Là encore, « pratique » par rapport à quoi, sinon au troc ? Bien sûr que la monnaie est pratique dans un système fonctionnant selon le schéma du troc ; bien sûr, encore, que ce système ne peut pas fonctionner sans monnaie. Mais une pièce indispensable dans un système n’a plus de raison d’être dans un système fonctionnant selon d’autres principes.
7) La monnaie permet de faire du troc qui est supposé être un échange équitable, quoique la valeur marchande ne soit, en dernière analyse, que l’expression d’un rapport de force.
La monnaie réintroduit dans l’état Social, fondé sur les rapports de droit, les rapports de force qui prévalent dans l’état de Nature. Mais il est interdit de penser que le système monétaire est antisocial.
Le quinzième préjugé consiste donc à croire que les prix consentis sont toujours justes et les échanges équitables, que riches et pauvres méritent chacun leur sort, que les exploités ont le tort de ne pas mieux se défendre, que les crapules ont le mérite d’être malins, etc. Ce qui engendre le seizième préjugé qui, pour justifier le système monétaire, consiste à croire que les riches ont toutes les qualités (talents, beauté, intelligence, gentillesse) et les pauvres tous les défauts (bêtise, paresse, laideur, méchanceté). Ainsi, les riches accaparent toutes les richesses matérielles, et il faut encore leur prêter toutes les vertus morales. C’est du reste ce qui explique l’aura qui, dans ce système, entoure la Propriété : posséder au-delà du nécessaire est signe de « réussite » et de vertus ; d’où le besoin d’avoir pour paraître vertueux et désirable, à défaut de l’être réellement ; d’où l’épate, la jalousie, le mépris, le désespoir, etc.
8) La monnaie repose sur la notion de valeur marchande, qui n’a de sens que s’il y a des différences de valeur.
Vu que la monnaie, qui incarne des droits, ne peut pas se répartir également, de par sa nature et son fonctionnement, un système monétaire est inégalitaire par définition. Le dix-septième préjugé consiste donc à croire qu’il est normal qu’il y ait des riches et des pauvres, des exploiteurs et des exploités, des profiteurs et des affamés, des maîtres et des esclaves, tout cela dans le cadre d’une même Société, entre soi-disant Concitoyens. Le paradoxe est que les pauvres qui n’ont rien à gagner au système monétaire partagent aussi ce préjugé ; eux aussi trouvent normal d’être moins bien payés que d’autres, d’avoir moins de droits que d’autres, donc que l’inégalité règne ; s’ils déplorent les conséquences extrêmes de ce système, dont ils pâtissent, ils n’en cautionnent pas moins le principe de l’inégalité qui les rend possibles et même inévitables, puisqu’un système fondé sur l’inégalité tend vers toujours plus d’inégalités. Le dix-huitième préjugé consiste donc à croire qu’il est normal d’être bridé, de se priver, d’économiser, d’être sans cesse aux abois et soumis au supplice de Tantale pendant que d’autres profitent et dilapident les richesses de la Terre ; autrement dit qu’il est normal que la « société » soit injuste et terrible, comme si la vie ne réservait pas assez d'épreuves et de souffrances.
De la même cause découle le dix-neuvième préjugé qui consiste à croire que le système (monétaire) est inégalitaire parce que l’inégalité est avant tout dans la nature des choses, et que les inégalités (en argent, donc en droits) ne sont jamais que le reflet des différences naturelles entre les individus.
Cette justification de l’inégalité n’est rien d’autre qu’une capitulation devant le système monétaire. Il s’ensuit que ceux qui ont malgré tout l’intuition de l’Égalité, sans voir dans le système monétaire la cause des inégalités, prônent une absurde égalisation tous azimuts et suscitent chez les autres un légitime rejet de leurs conceptions dénaturées et catastrophiques de l’Égalité, ni les uns ni les autres ne sachant ce qu’est la véritable Égalité. Imaginez des gens disant : « Nous, on veut jouer au foot. » Ils proposent alors des règles. D’autres, n’aimant pas ces règles, déclarent : « Nous, on ne veut pas jouer au foot. » Or les règles en question étaient celles du basket. En somme, les premiers n’ont pas plus proposé de jouer au foot que les autres n’ont refusé d’y jouer. Il en est de même de l’Égalité : ceux qui invoquent son nom ne savent généralement pas plus ce qu’elle est que ceux qui, considérant que l’Égalité est ce que les premiers en disent, en rejettent le Principe.
Le vingtième préjugé consiste donc à nier ou à ne tenir aucun compte du fait que le système monétaire soit précisément monétaire, à nier de même qu’il soit intrinsèquement inégalitaire alors que nul n’ignore que l’inégalité règne, ceci afin de pouvoir croire que les conséquences du système (monétaire) sont étrangères à la monnaie, notamment que l’inégalité entre riches et pauvres n’a rien à voir avec l’argent, voire, comble de l’ineptie !, que riches et pauvres sont malgré tout égaux (en quoi ?) alors même qu’il est admis qu’il n’y a pas d’Égalité. De là le vingt-et-unième qui consiste à croire que la monnaie, indispensable pour jouir du moindre droit, n’est pas du droit elle-même, qu’elle n’est rien sinon quelque chose d’insaisissable, et que la cause de l’inégalité est tout aussi mystérieuse.
Les hommes se partagent entre ceux qui justifient l’inégalité et ceux qui la déplorent. Aucun n’ignore que l’inégalité règne dans ce système. Pour autant, aucun n’ose faire le lien avec sa nature monétaire. Mais il ne faut pas gratter beaucoup pour comprendre que ceux qui rejettent l’Égalité le font au nom des préjugés monétaires, et voir que ceux qui veulent aller vers l’Égalité ou moins d’inégalités, en proposant des mesures monétaires, démontrent eux-mêmes ce qu’ils nient par ailleurs.
9) La monnaie sert à établir des prix.
Le vingt-deuxième préjugé consiste donc à croire que les choses ont nécessairement un prix, que la monnaie est nécessaire pour les acquérir (ce qui est vrai dans le cadre de ce système) et que le système monétaire est le seul possible.
10) La monnaie est échangée en contrepartie de biens ou de travail.
Le vingt-troisième préjugé consiste donc à croire que tout travail (non considéré comme un Devoir) mérite salaire (en monnaie) ; que ce salaire doit soi-disant être fixé d’après divers critères (années d’étude, pénibilité, responsabilités, ancienneté, âge du capitaine), le seul n’entrant jamais en ligne de compte étant la Citoyenneté ; qu’un salaire est une bonne chose en soi quand bien même il ne représente jamais que des miettes par rapport aux Droits du Citoyen.
Un autre aspect de ce système ne débouche pas sur ce que l’on peut à proprement parler appeler un préjugé, c’est le fait que, si la monnaie représente tous les objets ou le travail qu’elle permet d’acheter ou de payer, tout ce qui peut être vendu représente de la monnaie. Or, comme il est vital pour tous de se procurer de la monnaie, les limites de ce qui est vendable reculent jusqu’à disparaître, jusqu’à ce que tout devienne marchandise. La « marchandisation » du monde est la conséquence inéluctable de Largent. Dénoncer Largent, c'est donc dénoncer aussi la « marchandisation » du monde ; l'inverse n'est pas nécessairement vrai.
11) La monnaie sert à acheter, donc à s’approprier ce qui est retiré du marché par son biais.
Dans la mesure où la monnaie est un moyen d’appropriation, elle est aussi un moyen de dépossession puisque dépouiller quelqu’un de son argent, par quelque moyen et pour quelque raison que ce soit, revient à le déposséder de tout ce qu’il aurait pu acheter et posséder, donc à le déposséder avant même qu’il ait eu l’occasion d’être propriétaire. C’est donc également être dépossédé via la monnaie que de ne pas être payé davantage ; dans ce cas, il y a dépossession par omission, dépossession de tout ce qu’aurait permis d’acheter l’argent dont on n’a pas même vu la couleur.
La monnaie est le moyen d’appropriation par excellence. Le lien entre la monnaie, la Propriété et les possessions ou propriétés est évident et indiscutable. Les grandes disparités matérielles sont évidemment et indiscutablement le fait des inégalités monétaires, lesquelles sont elles-mêmes le fait, d’une part, de la nature monétaire du système, d’autre part, du caractère intrinsèquement inégalitaire de ce système (voir point 8). Paradoxalement, le vingt-quatrième préjugé consiste à croire que l’appropriation exige de la monnaie ou que la monnaie est la condition de la Propriété, et, en même temps, à nier que les grandes disparités en biens soient une conséquence de la nature monétaire et inégalitaire du système. Ainsi les hommes veulent bien combattre les inégalités à coups de mesures monétaires, mais pas reconnaître que la monnaie est du droit et que le système monétaire est inégalitaire. Le vingt-cinquième préjugé consiste à croire qu’il n’y aurait pas de Propriété dans l’Égalité ou que tous les Citoyens auraient les mêmes biens, deux choses absolument impossibles en pratique, idées absurdes de l’Égalité que l’esprit agite pour se conforter dans ses préjugés monétaires.
Dans la mesure où la monnaie est le moyen d’appropriation, elle est aussi, pour certains, le moyen de s’approprier les moyens de production qui leur servent à exploiter les travailleurs (citoyens). D’autres ont donc l’idée de collectiviser ou nationaliser lesdits moyens. Mais ils sont aussi pour l’« abolition de l’argent ». Il y a donc une contradiction dans leurs aspirations. Ils veulent à la fois abolir l’argent, ce qui devrait en soi résoudre les problèmes qu’ils déplorent (sinon, pourquoi le vouloir ?), et collectiviser les moyens de production pour qu’ils ne soient plus des moyens d’exploitation à des fins privées, comme si ce problème ne devait pas être réglé par l’abolition de l’argent. En fait, ils focalisent sur cette question parce qu’ils ne raisonnent pas en termes de Société, parce qu’ils n’envisagent pas d’abolir l’argent au nom de l’Égalité, parce qu’ils ne voient pas les travailleurs comme des Citoyens ayant le droit d’accéder librement au marché et se souciant bien peu de savoir qui a réuni et à qui appartiennent les moyens de production (en l’occurrence à la Cité).
12) La monnaie sert à être payé et à payer soi-même, ce qui plonge les hommes dans un cercle vicieux.
Le vingt-sixième préjugé consiste donc à croire que la monnaie est vitale, ce qui est absolument vrai dans le cadre du système monétaire mais n’est pas une vérité absolue.
13) La monnaie est la pièce maîtresse du système monétaire ; elle est vitale aussi bien pour le système que pour les individus et toutes les collectivités.
Le vingt-septième préjugé consiste donc à croire qu’il est impossible de se passer de monnaie, qu’il faut la conserver à toute force, ce qui amène à ne pas chercher à savoir ce qu’elle est ni quelles sont ses conséquences, et même à prétendre qu’elle n’est rien, sinon neutre et sans effets. Notons qu’il n’est pas question ici des unités monétaires (qui ne sont d’ailleurs pas aussi neutres que cela), mais de la monnaie dans son principe ou, disons, du système monétaire. C’est d’ailleurs sur cette distinction que s’appuie, en la faisant mal, le vingt-huitième préjugé qui consiste à croire que le système monétaire est neutre, donc qu’il est inutile de prendre en considération la nature monétaire du système, sous prétexte que les unités monétaires seraient neutres aussi.
14) En tant que moyen d’échange, la monnaie est, par définition, au cœur des rapports “sociaux”.
Le vingt-neuvième préjugé consiste donc à croire que la monnaie est compatible avec la Société, sans chercher à savoir ce que sont des rapports sociaux harmonieux et une Société digne de ce nom, en rejetant même les Principes de l’Ordre social au nom de la logique monétaire.
15) Chaque unité monétaire incarne du droit de participer aux échanges et d’accéder au marché.
Le trentième préjugé consiste donc à croire que le droit d’accéder au marché doit être extérieur à soi, matérialisé et divisible ; partant, qu’il est cumulable, perdable, volable, jouable, gagnable, transmissible, héritable, etc. (L’idée qu’il soit constant et inaliénablement attaché à la Citoyenneté est inconcevable.) Cette propriété, combinée à d’autres, engendre des préjugés déjà énoncés.
16) Chaque individu a le droit d’accéder au marché en proportion des unités monétaires dont il dispose à l’instant “T”, par quelque moyen qu’il les ait gagnées.
Un individu n’est donc jamais égal à lui-même d’un instant à l’autre ; les individus peuvent d’autant moins être égaux entre eux. Le trente-et-unième préjugé consiste donc à croire que le droit vital d’accéder au marché est nécessairement mesurable et limité ; qu’il faut en repousser les limites autant que faire se peut ; que cela est possible ; que tous les moyens sont bons (vu que l’argent n’a pas d’odeur) ; qu’à défaut de gagner de l’argent, il faut en dépenser le moins possible ou faire payer les autres. Tout ceci façonne la mentalité des hommes, et fait d’eux des êtres vicieux, voleurs, menteurs, calculateurs, mesquins, flambeurs, etc. D’où le trente-deuxième préjugé qui, devant ce spectacle, consiste à considérer l’Homme comme mauvais de nature, ce qui dispense de s’interroger sur le système monétaire et condamne soit au renoncement soit à la démagogie.
17) La monnaie est indispensable pour toute chose dans un système monétaire, en particulier dans un contexte de haute technologie et de spécialisation extrême.
Le trente-troisième préjugé consiste donc à croire que, pour faire quoi que ce soit, il faut de « l’argent » et qu’un système non-monétaire, au demeurant impensable, n’est ni possible ni souhaitable ; ce qui empêche de s’interroger sur ce que ce dernier pourrait être ou amène à en rejeter d’emblée l’idée quand on y est confronté. Le trente-quatrième préjugé consiste à croire que nous devons tout à Largent, que c’est lui seul qui fait tout, que tout existe grâce lui, que rien n’existerait sans lui, que les hommes ne seraient rien sans lui. Le trente-cinquième préjugé consiste à croire que Largent apporte la Liberté, alors qu’il en est le facteur limitant (et des droits individuels et de l’action collective), car s’il accorde ses faveurs à quelques riches, il les refuse aux masses. On voit toujours ce que l’argent « permet de faire » ou, plus exactement, ce qu’il « n’empêche pas de faire » ; on oublie que, dans un système monétaire, le fait de ne pas avoir d’argent affecte bien plus de gens et a des conséquences plus nombreuses et plus graves.
18) Le système monétaire est individualiste, inégalitaire et oligarchique.
Le trente-sixième préjugé consiste donc à croire que l’Égalité, le civisme (patriotisme) et la Démocratie sont des utopies, ce qui est en effet le cas dans le cadre du système monétaire et dans la bouche de quiconque les prône sans envisager de sortir de celui-ci.
19) La monnaie, qui n’est plus aujourd’hui qu’une abstraction, a longtemps été matérielle.
Le trente-septième préjugé, hérité de longue date, consiste donc à croire non seulement que la monnaie a une réalité, qu’elle existe ailleurs que dans nos têtes, mais encore qu’elle est neutre au même titre que n’importe quel objet, comme si elle ne faisait pas courir les hommes obligés de lui courir après, comme si les hommes fixaient les règles du jeu auquel elle les condamne à jouer. Sous prétexte qu’elle ne serait soi-disant qu’un objet neutre, les hommes, pour lui épargner toute remise en cause, prétendent « qu’elle n’est qu’un outil », comme si n’importe quel outils pouvait remplir correctement n’importe quelle fonction.
20) Le système est monétaire.
Le trente-huitième préjugé consiste donc à croire que, puisque l’on vit dedans, on sait évidemment ce qu’est la monnaie et comment elle fonctionne, un peu comme si un poisson rouge savait évidemment ce qu’est un aquarium. De là le trente-neuvième préjugé qui consiste à croire que, puisque l’on sait tout du système et qu’on ne le remet pas en cause (préjugés obligent), il n’y a rien à comprendre d’autre et rien à chercher en dehors ; que, quoique tout tourne autour de l’argent, il n’y a pas lieu de se poser la moindre question à son sujet. De là le quarantième préjugé qui consiste à croire que, hors de Largent, point de salut. En somme, les hommes sont tellement impliqués dans le système qu’ils en deviennent un rouage malgré eux. Ils n’ont pas assez de recul pour saisir leur monde et encore moins pour en apercevoir un autre.
Je m’arrête ici, mais je pourrais en trouver d’autres. De manière générale, les préjugés monétaires consistent à considérer comme des vérités absolues toutes les données relatives au système monétaire et au troc.
07:31 Écrit par Philippe Landeux dans 6. MON BLOG | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer |
mercredi, 06 juin 2018
REVENU DE BASE OU UNIVERSEL : L’ANTICAPITALISME CAPITALISTE
Quand les hommes se mirent à fabriquer, bientôt ils échangèrent. Ils firent d’abord du troc (réflexe naturel), puis du troc indirect. Autrement dit, ils recoururent en premier lieu à un mode d’échange qui, en échangeant des objets entre eux et en les mettant ainsi en équivalence, fit naître en eux la croyance que la notion de valeur marchande est nécessaire pour échanger (= Largent). Mais le troc direct étant difficilement praticable, ils le pratiquèrent surtout de manière indirecte, c’est-à-dire en procédant en deux temps : afin d’acquérir auprès de B un bien que C voudra bien échanger avec A contre ce que ce dernier lui propose. Le système monétaire moderne n’a rien inventé ; tout est contenu en germe dans le troc : 1) l’échange entre individus (d’où l’individualisme), 2) le recours à la notion de valeur marchande (Largent), 3) le recours à des objets de référence en tant qu’unités de valeur (monnaie d’échange et monnaie tout court). La forme de la monnaie a évolué, elle a été standardisée pour être toujours plus pratique, elle est aujourd’hui virtualisée. En fait, la monnaie n’est qu’un vecteur facultatif et visiblement inutile de la croyance que la notion de valeur marchande est nécessaire pour échanger. Des hommes pénétrés par Largent, pensant par Largent, pensant fatalement à travers lui — puisque c’est une croyance qu’ils ont en eux —, n’ont pas besoin d’avoir de monnaie matérielle dans les mains pour croire que les choses ont un prix et qu’ils doivent disposer d’unités pour y accéder. Largent est né du troc (fut-il pratiqué de manière occasionnelle) ; c’est la pratique de l’échange monétaire, le fait de vivre dans un monde monétaire, qui aujourd’hui nous l’inculque ; c’est parce que Largent est en nous, dans nos têtes, que nous ne concevons pas d’autre mode d’échange que le sien : échange entre individus, recours à la notion de valeur marchande, besoin d’unités de valeur. Nous sommes mentalement prisonniers de ce schéma et nous le reproduisons même quand nous cherchons à conjurer ses conséquences désastreuses (je n’aborde pas ici le sujet des conséquences). Nous jouons au Monopoly grandeur nature et nous sommes incapables d’imaginer un jeu fondamentalement différent.
(Je défie ceux qui contestent l’historicité du troc de démontrer que la notion de valeur marchande, et tout ce qui va avec, a pu naître d’une autre pratique. Quand même ils prouveraient que Largent a une autre origine, il reste que cette croyance véhicule le schéma du troc, puisque l’idée d’abolir la monnaie et le troc indirect qu’elle permet de faire donne aussitôt à penser qu’il s’agit de « revenir » au troc direct.)
Toutes les propositions de revenu de base, d’existence, ou quelque soit leur nom et leurs modalités, sont révélatrices de cette incapacité. Elles se veulent sociales alors qu’elles sont monétaires. Elles consistent à essayer de faire entrer des ronds dans des carrés, en tordant les ronds pour leur donner une forme carrée, donc en trichant, en se mentant à elles-mêmes. Le résultat est à des années lumière des intentions initiales. Au vrai, les intentions initiales, bridées d’emblée par Largent, sont elles-mêmes très loin d’être à la hauteur des enjeux. Un capitaliste ignore la logique sociale, et un « socialiste » n’est qu’un capitaliste qui s’ignore. Mais si ceci explique pourquoi leurs propositions sont vaines (on ne fait pas la nique au capitalisme avec des mesures capitalistes ; on ne fait pas la révolution avec un idéal contre-révolutionnaire), cela n’explique pas en soi le « pourquoi » des propositions de cette nature.
Pour comprendre pourquoi ces propositions, qui sont comme de mauvais épilogues de l’histoire, sont faites aujourd’hui, il nous faut reprendre le fil conducteur à son début.
La monnaie repose sur la notion de valeur marchande, laquelle est apparue il y a fort longtemps, dans un temps où les hommes produisaient de manière artisanale. Autrement dit, la monnaie correspond tant bien que mal au mode de production artisanal. Or nous l’avons conservée alors que nous sommes passés progressivement, quoique rapidement aux yeux de l’histoire, à la production industrielle. Ces moyen et mode d’échange ne sont absolument plus adaptés au nouveau mode de production. Nous faisons avec parce que nos esprits sont prisonniers de Largent et qu’il ne nous est donc pas venu à l'idée qu’il est nécessaire et encore moins possible de faire autrement. Nous allons de crise en crise parce que nous ne nous attaquons jamais à la racine du mal. Nous recourons à des palliatifs qui sont bénéfiques à court terme mais désastreux à long terme. Et toutes ces conséquences désastreuses s’accumulent. Nous nous masquons à nous-mêmes que nous ne faisons que reculer pour mieux sauter.
Le problème fondamental est l’inadaptation de la monnaie au mode de production industriel. La monnaie bride le pouvoir d’achat et se répartit inégalement, de par le simple jeu des valeurs. Elle permet l’existence de quelques riches au milieu d’un océan de pauvres. Si les premiers ont un pouvoir d’achat très élevé, le pouvoir d’achat global, lui, tiré vers le bas par la masse des pauvres, est faible. C’est en cela que la monnaie est adaptée au mode de production artisanal et à ses faibles rendements. Mais la règle d’un pouvoir d’achat global faible, liée à la nature et au fonctionnement de la monnaie, reste vraie même lorsque la production s’industrialise et que les rendements sont désormais colossaux. Le problème est alors qu’il n’y a pas assez de clients (individus disposant de monnaie), dans une société donnée, pour absorber sa propre production. Tout le défi est d’en trouver ou d’en fabriquer, sous peine de blocage et d’effondrement. C’est ici que les entreprises et les états recourent aux palliatifs en question, lesquels sont ou ont été : les exportations, la colonisation, l’augmentation des salaires, le crédit à la consommation, les délocalisations et l’immigration (pour faire baisser les coûts de production), la planche à billets, le renoncement à l’étalon or, la création artificielle de monnaie. Rien n’y fait. La plupart des gens continue de se serrer la ceinture, le chômage ne cesse d’augmenter, le tissu économique se délite. Il n’y a pas de solution monétaire a des problèmes créés par la nature monétaire du système.
Or le problème du « manque de clients » va en s’aggravant avec la robotisation, l’informatisation et bientôt la production autonome. Plus nous sommes capables de produire, moins il y a de travail pour les hommes et, alors que les revenus que le travail procure sont déjà insuffisants, ils sont en passe de se tarir… à moins de fausser le jeu sans en sortir. C’est ici qu’interviennent toutes les propositions de revenus minimum, universel, de base, d’existence, etc. Dans un premier temps, ces propositions ont pu viser — par charité ou pour acheter la passivité sociale — à assurer un minimum vital aux exclus du système. Aujourd’hui, sous couvert d’un discours soi-disant social, elles visent surtout à conserver artificiellement la clientèle. Avant, les gens étaient payés pour travailler ; demain, il faudra les payer pour qu’ils puissent toujours consommer. Avant ils étaient dans la dépendance de leur entreprise ; demain, ils seront complètement assujettis à l’État, moyen sûr de les empêcher de s’agiter. Pour autant, cela résoudra-t-il le problème de fond ? Peut-on croire que l’État va assurer à tous des revenus mirobolants et que la Demande globale sera enfin équivalente à l’Offre ? Certainement pas. Une fois de plus, il s’agit donc d’adopter un palliatif qui ne résoudra rien et dont le bon effet — si tant est qu’il en ait un — durera le temps qu’il durera… et après nous le déluge. Il s’agit surtout de traiter un problème monétaire sans sortir du cadre monétaire, tout en présentant comme « sociale » une mesure purement capitaliste. En dernière analyse, il s’agit de préserver le système monétaire, donc le capitalisme.
Qu’ils en soient conscients ou non, qu’ils se donnent tel air ou tel autre, les gens qui font des propositions de ce genre sont bornés ; leur esprit ne voit pas au-delà de Largent. Entre les préjugés capitalistes qu’ils ont intégrés et les principes sociaux qu’ils ignorent ou qu’ils défigurent pour qu’ils soient compatibles avec lesdits préjugés, leur discours est biaisé et contre-productif pour ne pas dire contre-révolutionnaire. En galvaudant tous les mots du répertoire social et en discréditant tout discours anticapitaliste, loin d’avoir formulé une alternative, ils en ont étouffé — autant qu’il est en eux — la possibilité ; loin d’avoir éclairé leurs contemporains, ils les ont plongés un peu plus dans le noir. Ils chercheraient à œuvrer dans l’intérêt du capitalisme, ils ne s’y prendraient pas autrement. Le capitalisme accueillera d’ailleurs de plus en plus favorablement leurs propositions… jusqu’à les faire lui-même.
Philippe Landeux
Mercredi 06 juin 2018
PS : Je ne reviens pas ici sur l’alternative que je préconise ni sur les critiques plus précises que cette alternative permet de faire des différentes propositions de revenus. J’ai traité ce sujet dans l’article « Revenu de base : une idée révolutionnairement contre-révolutionnaire »
10:33 Écrit par Philippe Landeux dans 6. MON BLOG | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer |
vendredi, 25 mai 2018
LE BUREAU DE POLICE GÉNÉRALE (livre)
Le Bureau de la surveillance administrative et de la police générale, appelé communément « Bureau de police générale », créé à la suite du décret des 26-27 germinal an II (15-16 avril 1794) sur les mesures de police générale, et opérationnel dès le 1er floréal (20 avril 1794), était un organe interne au Comité de salut public, mais fut l’objet de critiques particulières comme instrument du soi-disant Triumvirat Robespierre, Saint-Just, Couthon. Il mérite donc une étude particulière pour savoir quelle fut au juste son activité et son bilan.
Dans leur travaux respectifs et complémentaires sur le Comité de salut public, Alphonse Aulard et Marc Bouloiseau ont déjà présenté la presque totalité des arrêtés du Bureau de police générale, mais sans jamais les distinguer de ceux du Comité. Il est vrai que, par leur forme, ces arrêtés se confondent avec ceux du Comité de salut public. Il existe pourtant un registre des arrêtés du Bureau de police générale (AF II* 221), indiquant qu’il y a malgré tout une distinction à faire.
Le présent ouvrage est le recueil des arrêtés du Bureau de police proprement dits, basé sur le registre officiel, corrigé et complété.
Cet ouvrage contient notamment :
- le décret des 26-27 germinal an II sur les mesures de police générale
- les exceptions arrêtées par le CSP
- un tableau des arrêtés du BPG en substance (et des arrêtés incertains)
- le recueil des arrêtés du BPG in extenso (nombreuses reproductions)
- un tableau des minutes et arrêtés ou copies signés
- un tableau des arrêtés signés
- les tableaux des arrêtés signés par chaque membre
- un tableau des objets des arrêtés
- un tableau des objets des arrêtés signés
- les tableaux des objets des arrêtés signés par chaque membre
- les comptes détaillés pour chaque thème (arrestations, transferts, libérations, etc.)
- un bilan simplifié sous forme de tableau
- Les index des agents du BPG, des autorités, des personnes mentionnées, des lieux et des thèmes
660 pages
Disponible sur TheBookEdition
en version papier : 24 € (+ frais de port)
en version PDF : 8 €
09:46 Écrit par Philippe Landeux dans - MES LIVRES, - REVOLUTION 1789-1794 | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer |
mardi, 16 janvier 2018
PATRIOTISME ET RÉVOLUTION
La Patrie n’est autre chose que la Société, une réunion d’individus sur la base des Principes de l’ordre social, faisant d’eux des citoyens. Le patriotisme n’est autre chose que la défense du pacte social et de ses concitoyens contre tout ce qui viole le premier et opprime les seconds sous quelque prétexte que ce soit. Et comme les citoyens sont liés par des devoirs, comme il n’y a pas de devoirs sans réciprocité, comme les devoirs des uns génèrent et garantissent les droits des autres, en un mot, comme il n’y a ni devoirs ni droits sans Égalité, le premier fléau de la patrie est l’inégalité, son premier ennemi : Largent.
Quiconque médite là-dessus en toute honnêteté ne peut ignorer que tous les maux puisent leur source dans Largent. Car qu’est-ce que Largent ? C’est la croyance que la notion de valeur marchande est nécessaire pour échanger ; c’est la croyance universellement partagée qui donne vie et soutient l’existence du système monétaire. Et qu’est-ce la monnaie sinon une matérialisation des droits que les individus — non pas les citoyens — doivent se disputer sans jamais pouvoir en jouir également ; qu’est-ce sinon une négation de la citoyenneté, une négation des droits et partant des devoirs du citoyen, une négation de la Société elle-même.
Le système monétaire est intrinsèquement individualiste, matérialiste, inégalitaire, oppressif, oligarchique ; il est l’antithèse de la Société dont il est cependant le socle. Largent commande, au seul profit de quelques-uns, le contraire de ce que commandent les Principes dans l’intérêt de tous (les citoyens). Il autorise toutes les trahisons au nom de la logique monétaire, d’une logique si profondément enfouie en nous qu’elle nous fait agir inconsciemment. Même les hommes qui n’ont pas vendu leur âme sont obnubilés par ce qui est et en oublient ce qui devrait être.
Un citoyen a des droits, dont celui d’accéder librement au marché, parce qu’il est citoyen, parce qu’il a rempli ses devoirs de citoyen, parce qu’il a participé à la vie de la cité selon ce que celle-ci considère comme une participation. Méconnaissez le caractère de « citoyen » ; niez la Société et la Patrie ; faites des droits l’enjeu d’une lutte dans laquelle ne peuvent gagner que les plus pervers et les plus cruels ; réduisez les hommes au chacun pour soi ; cautionnez le système monétaire, bancaire, capitaliste… et vous avez le monde actuel. Défendez Largent, et vous êtes complice de tout, même de ce que vous déplorez. Prônez l’Égalité sans la Nation, ou la Nation sans l’Égalité, vous ne valez pas mieux. Dénoncez Largent au nom de l’Égalité et de la Patrie, et vous êtes un vrai résistant au capitalisme, un vrai patriote.
09:24 Écrit par Philippe Landeux dans 6. MON BLOG | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer |
lundi, 25 décembre 2017
LA PARABOLE DES ÉCHASSES
Il était une fois un plat pays verdoyant où les hommes vivaient heureux. Mais, Dieu sait pourquoi, un jour le ciel s’ouvrit et d’une plaine fit un marais. Les hommes, pour garder les pieds au sec et se mouvoir sans peine, se hissèrent sur des échasses. Et cet état des choses dura si longtemps que les échasses devinrent comme un prolongement naturel de leurs jambes. Ils ne se concevaient plus sans ces prothèses. Tant et si bien qu’ils finirent par se juger entre eux à l’aune de leurs échasses. C’était à qui aurait les plus solides, les plus longues, les plus belles, le plus de paires, etc. Un vrai besoin avait fait naître et donné un support à l’orgueil. Et plus le temps passait, plus les distinctions sociales s’appuyaient sur les échasses ; plus les échasses devenaient nécessaires, non pour marcher, mais pour penser.
Un jour, les eaux commencèrent à baisser. Pourtant, loin d’y voir l’occasion de raccourcir les échasses, pour qu’elles soient plus adaptées et donc plus pratiques, les hommes, entraînés par l’habitude, ou crainte du qu’en-dira-t-on, poursuivirent leur course aux échasses les plus longues. Elles s’allongeaient à mesure qu’elles avaient moins d’utilité, et elles ne furent jamais aussi longues que lorsque, une fois les eaux complètement retirées, elles ne constituèrent plus qu’un handicap. Impossible, cependant, de faire entendre raison aux hommes. Modifier la taille, la forme, la longueur, la matière des échasses, d’accord ! Mais renoncer à ces superbes faire-valoir, jamais ! « Tout le monde sait que des échasses sont nécessaires pour marcher ! » L’idée de fouler à nouveau le sol avec les pieds était la plus saugrenue aux yeux de quiconque se revendiquait terre-à-terre. Tous les arguments étaient bons pour justifier l’indéfendable et discréditer l’évidence.
Ainsi un contexte avait suscité un besoin ; la réponse d’alors avait forgé des préjugés ; et ces préjugés enfermaient dans cette réponse, quel que soit le contexte.
Moralité :
On a aux pieds les échasses que l’on a dans la tête.
Ne riez pas ; vous en avez ! Elles s’appellent « monnaie ». Vous croyez que la notion de valeur marchande est nécessaire pour échanger.
Philippe Landeux
24 décembre 2017
08:15 Écrit par Philippe Landeux dans 6. MON BLOG | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer |
samedi, 23 décembre 2017
LA PARABOLE DU FLEUVE
Cinq explorateurs, chacun dans une barque, descendaient le fleuve Largent. Quelques remous les avaient obligés à ramer, mais, dans l’ensemble, ils se laissaient plus emporter par le courant qu’ils n’avançaient à force de bras. Une promenade. Ils avaient tout leur temps pour admirer les paysages. Ils en oubliaient qu’ils voguaient tels des bouchons.
Soudain le paysage se mit à défiler plus vite, de plus en plus vite. Le courant prenait une vitesse annonciatrice d’un danger. Et, de fait, à un kilomètre de là, le fleuve s’abîmait dans une chute vertigineuse.
Surpris, chaque explorateur réagit à sa manière et fixa son sort.
Le premier, soit qu’il ait été curieux de percer le mystère, soit qu’il ait voulu comme toujours arriver avant les autres, soit qu’il ait juste voulu s’amuser après des jours de routine, rama de toutes ses forces dans le sens du courant, vers la chute mortelle.
Le second, d’un caractère opposé, prit la résolution inverse ; il rama de toutes ses forces à contre-courant, si bien que, malgré l’impétuosité du fleuve, il reculait, il s’éloignait du péril. Mais il tomba bientôt d’épuisement. Il n’avait gagné qu’un répit. Sa barque fut emportée jusqu’au terminus.
Le troisième, ni casse-cou ni foudre de guerre, se voulut plus malin que les deux premiers. Il se mit à ramer à contre-courant, sans enthousiasme, comme on fuit à contrecœur. Il fit longtemps du sur-place. Mais le peu d’effort que cela nécessitait n’en fut pas moins épuisant sur la durée.
Le quatrième, plus intelligent, trop intelligent, croyant que les autres avaient tout tenté et qu’il n’y avait rien à faire, se convainquit que la seule action valable était de baisser les bras. « Après la pluie, le beau temps », se dit-il. Dès lors il ne vit plus dans la chute fatale qu’un mauvais cap à passer.
Le cinquième, enfin, aussi peu enclin au mimétisme qu’à la philosophie, rama vers la rive, accosta la première berge venue et continua son chemin à pied… seul. Il ne devait jamais plus revoir les autres. Le fleuve avait eu raison des matamores et des illuminés.
Moralité :
Largent est irrésistible si on reste dans son sillage ; il n’est plus rien si on prend un autre chemin. Il suit son cours ; suivons le nôtre.
Philippe Landeux
22 décembre 2017
09:40 Écrit par Philippe Landeux dans 6. MON BLOG | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer |
dimanche, 03 décembre 2017
LA RELIGION MARXISTE
Le marxisme est une religion, plus exactement, un spiritualisme. Il n’a chassé Dieu que de son vocabulaire. Il n’abhorre les religions que parce qu’il en est une lui-même… une plus parfaite, plus complète, plus conséquente, plus opérante… de son point de vue.
Il postule que « tout est lié » et, par suite, que « l’harmonie est dans le tout ». C’est là sa quintessence, le fondement de son caractère transcendantal. Sous ce rapport, il rejoint, sans le dire, et sans se l’avouer, toutes les religions, toutes les formes de spiritualité, quel que soit le nom que chacune d’elles donne à l’origine ou au créateur de ce « tout ».
Mais si l’on peut admettre ce postulat, comme c’est mon cas, c’est grande erreur, de sa part, de croire que l’harmonie ici-bas procèdera directement de cette vérité absolue. Il y a loin entre le réel et l’abstraction. On n’administre pas les hommes comme on raisonne hors de toute contingence. Les hommes ne sont pas et ne seront jamais des êtres désincarnés, des esprits à l’état pur, des âmes connectées consciemment à l’Internet cosmique. La Terre n’est pas le séjour des dieux. L’harmonie parmi les hommes découlera de règles faites pour eux, faites pour des êtres de chair et de sang, limités, mortels.
Voilà le pêché originel du marxisme ! Lui qui se veut matérialiste et réaliste est échafaudé sur un dogme surréaliste. Branlant à la base, il sauve — croit sauver — les meubles à coups de bricolage et de baratin. Comme tous les prétendus détenteurs de « la Vérité » (dont les marxistes, en tout humilité, se disent seulement « dépositaires »), il s’est construit une mystique qui répond à tout sans rien dire. C’est ainsi qu’il évacue ses contradictions et occulte ses aberrations. Ses adeptes ânonnent en boucle des mantras, à l’instar de tous les fanatiques. Aucune expérience, aucun fiasco ne peut les détourner du piège dans lequel ils sont tombés. Puisqu’ils ont raison, toute déconvenue est le fait des autres, et tout autre est un hérétique. Prompts à voir une poussière dans l’œil du voisin, ils sont incapables de voir la poutre qui est dans le leur !
Le marxisme repose sur deux piliers : le mondialisme et le collectivisme, c’est-à-dire le pire du capitalisme, ou capitalo-libéralisme, et le pire du communisme, ou capitalisme d’état. Il se veut radicalement anticapitaliste parce qu’il propose une analyse pertinente des mécanismes capitalistes et scande « A bas l’argent ! » Mais il ne voit pas au-delà du capitalisme parce qu’il n’est pas sorti lui-même de la matrice et n’a aucune idée précise du comment en sortir. Il s’est construit contre le capitalisme mais a été nourri par lui. Il attend, certes, son effondrement mais ne conçoit pas l’après. Le prolétariat, dans son génie, y pourvoira. Du moins le prolétariat ne sera-t-il génial, selon lui, que s’il est mondialiste et collectiviste. En somme, il ne sait pas ce qu’il faudra faire précisément ; il décrète que nul ne peut le savoir ; au nom de sa propre ignorance, il interdit à quiconque d’y réfléchir et d’avoir un avis (forcément hérétique) ; et, dans le même temps, il pose des rails dont nul ne doit s’écarter, aujourd’hui ou demain, sous peine d’excommunication. Dire à la fois tout et son contraire… Méthode infaillible pour avoir le dernier mot et finir par discuter entre soi.
Mondialisme et collectivisme ne sont pas des lubies par hasard. Ils procèdent de la croyance première que tout est lié et que l’harmonie est dans le tout ; ils sont l’application littérale et angélique du principe. Tout est lié, donc les hommes, en particulier, sont de la même essence ; ils sont frères : ce qui les distingue et les sépare est artificiel, contre-nature et à proscrire : A bas les nations ! Vive l’Humanité ! Prolétaires de tous les pays unissez-vous ! C’est tellement beau que même le capitalisme applaudit. Le problème est que ce raisonnement nie le réel ; il fait passer pour artificielles et atroces des distinctions naturelles et inévitables. Comme je l’ai dit plus haut, les hommes ne sont pas des êtres abstraits ; ils ont un corps physique ; ils sont ancrés, qu’ils le veuillent ou non, dans un monde matériel ; ils ont des besoins à satisfaire et des capacités limitées ; ils ne sont pas de génération spontanée : ils ont des parents, des enfants, des ancêtres, des voisins, des concitoyens, un peuple, une culture, une histoire ; ils ne sont pas omnipotents ; ils vivent sur Terre mais à tel endroit et pas ailleurs, de tel côté de la montagne, de la rivière, du fleuve, de la mer ; ils ne forment pas une communauté avec tous les hommes mais seulement avec une partie d’entre eux, avec les plus proches physiquement. Les hommes n’ont pas été divisés artificiellement en peuples ; ils le sont par la nature des choses.
Sans doute les nations modernes ont-elles, de par leur étendue, un caractère plus artificiel que les communautés primitives — d’autant plus que le capitalisme qui les a fondées cherche aujourd’hui à les détruire —, mais leurs membres, à défaut de liens du sang, ont un long passé commun, une race commune, une culture commune, une langue commune ; il y a moins de distance entre eux qu’entre eux et les membres de quelque autre nation. Aussi artificielle que soit la nation, elle l’est toujours infiniment moins que la communauté universelle qui ne sera jamais qu’une idée ! une idée qui, sous prétexte d’unir l’Humanité, la divise jusqu’à la plus petite unité, jusqu’à l’individu, coupé des siens réels au nom d’autres imaginaires et au seul profit du capital.
Sans doute, encore, les communautés primitives offraient-elles un cadre plus propice, que les nations modernes, à la communion avec la nature, au ressenti des énergies vitales et cosmiques, c’est-à-dire ce à quoi le marxisme destine l’Homme. Ce n’est donc pas le moindre des paradoxes, de la part du marxisme, que de se féliciter que l’argent (ou la logique marchande) ait détruit ces communautés et même de voir dans ce côté destructeur de l’argent sa grande et seule vertu. Si l’Homme se coupe de ses racines à mesure que le groupe dans lequel il vit s’élargit, n’en serait-il pas plus éloigné que jamais en tant que soi-disant « citoyen du monde » ? Que la nation ne soit pas une panacée sous ce rapport est une chose ; mais qu’il faille aider le capitalisme à la détruire pour aller vers la « nation fois mille » et renouer avec la nature comme au bon vieux de temps des communautés primitives est l’idée la plus absurde qui soit, tant d’un point de vue « spirituel » que d’un point de vue anticapitaliste… et que du simple bon sens.
Le temps des communautés primitives est terminé ; on n’y reviendra pas. « L’Histoire ne repasse pas les plats. » Mais celui de la communauté universelle ne viendra jamais, car elle n’est qu’une vue de l’esprit. Il n’y a rien en deçà ou au-delà de la nation, rien sur quoi s’appuyer pour bâtir l’avenir. Sans trop entrer dans les détails ici, puisque ce n’est pas le sujet, disons que l’anticapitalisme réaliste consiste à vouloir faire de la nation capitaliste, qui n’est qu’une illusion, qu’une concentration d’individus exploités ou exploiteurs, une véritable nation, une Cité de Citoyens libres et égaux, égaux notamment dans le devoir de participer à la vie de la Cité, selon ce qu’elle considère comme une participation, et dans le droit d’accéder librement au marché, du fait même qu’ils soient Citoyens (la technologie moderne permettant d’attester sans difficulté et de manière infaillible la citoyenneté). Cela, me semble-t-il, sonne autrement plus juste et plus sérieux que l’aspiration à un collectivisme mondial qui permettrait, on ne sait comment, aux hommes de jouir d’on ne sait quoi !
J’entends bien, cependant, l’idée marxiste selon laquelle le monde est en proie à une force dont l’argent est le moteur, que toutes les révolutions antérieures étaient vouées à l’échec et que rien n’est révolutionnaire dans le cadre du système monétaire. Mais je ne peux plus le suivre quand il préconise d’attendre que l’argent soit allé au bout de sa logique et des destructions qu’il a entreprises, comme s’il agissait dans l’intérêt de l’Humanité et qu’il suffirait de tirer les marrons du feu ! Je souscrits encore moins à sa condamnation systématique et pontifiante de quiconque préconise d’agir, sous prétexte qu’il faut, selon lui, attendre que le capitalisme s’invalide lui-même, ligne qui fait de lui (du marxisme) le meilleur allié de celui dont il se prétend l’ennemi radical. Assurément, la plupart des actions prônées par les uns et les autres ne sont que gesticulations stériles. Mais est-ce à dire qu’il n’y a rien d’autre à faire que s’asseoir et lire Marx en attendant qu’advienne la Révolution, par l’opération du Saint-Esprit ? Certainement pas ! Si on le laisse faire, Largent détruira tout, en effet (sauf lui-même), et il n’y aura plus rien à sauver et pour rebondir. C’est donc avant d’atteindre le point de non-retour qu’il faut agir. Encore faut-il savoir quoi faire et pour aller où !
Or le marxisme, malgré ses rodomontades, ignore l’un et l’autre et ne peut pas le savoir. Il s’est ôté lui-même tous les moyens de penser l’avenir et le présent.
Nous avons vu pourquoi le marxisme est mondialiste et emboîte le pas du capitalisme sous prétexte d’attendre sa chute. Son « spiritualisme » lui interdit, a priori, de distinguer peuples et nations et, par suite, l’oblige à en rejeter le concept. Il est de facto mondialiste à l’instar du capitalisme qui, lui, puise cette « philosophie » dans l’individualisme inhérent à Largent (à la notion de valeur marchande qui provient du troc et en véhicule le schéma). Il ne conçoit donc pas la nation, cadre naturel et seul levier possible de la Révolution. Certes, les nations érigées par le capitalisme ne sont qu’illusion, de par l’inégalité et l’absence de cohésion sociale qui y règnent. Mais le marxisme, au lieu de donner du sens au concept de nation en a purement et simplement rejeté la notion. En fait, il ne sépare jamais le bon grain de l’ivraie ; il fait toujours table rase — en pensée, car, en pratique, la chose est impossible. Il rejette de même tout ce qui a existé sous le capitalisme comme intrinsèquement capitaliste. J’allais dire qu’à ce compte-là il devrait gommer les hommes eux-mêmes, mais c’est bien ce qu’il fait aussi. Ainsi, il rejette autant les mots que les notions de « société », de « citoyens » (d’où le recours à celui de « camarades », vide de toute signification sociale), de « devoirs », de « droits », d’« Égalité », de « démocratie », concepts en effet factices sous Largent… Mais le plus beau, le plus fort, c’est qu’il les rejette comme produits de Largent ayant détruit la communauté primitive, qu’il condamne également comme localisme. La boucle est bouclée. Hors du « tout », c’est-à-dire du néant, point de salut !
Le marxisme est tellement dupe du capitalisme qu’il le prend au mot, alors que les mots ne sont pour ce dernier que des attrape-nigaud. Le capitalisme utilise des mots qui ont un sens pour désigner des choses qui en ont un différent voire opposé. Il met, pour ainsi dire, des étiquettes sur des pots qui ont un tout autre contenu que celui indiqué. Mais supprimer les étiquettes permet-il de mieux s’y retrouver ? Le réflexe judicieux n’est-il pas, au contraire, de signaler les impostures, de rendre aux mots leur véritable signification, quitte à approfondir cette signification, et d’appeler toute chose par son vrai nom ? Au lieu de cela, le marxisme condamne, à juste titre (quoique sans que l’on sache trop au nom de quoi de sa part), les concepts capitalistes, mais rejette, en même temps, comme on jette le bébé avec l’eau du bain, les mots frauduleux dont celui-ci les couvre et qui seuls, une fois redéfinis, permettent de formuler un projet social. Il arguera, certes, que son but n’est pas l’harmonie sociale mais l’harmonie tout court… D’accord ! C’est-à-dire ???
Enfumage que tout cela ! Le marxisme prône le collectivisme… et il ne serait pas un projet social, à quelque échelle que ce soit !? Il ne concernait pas des citoyens présents ou futurs !? Il n’établirait aucune règle commune, aucune loi, aucun devoir, aucun droit, aucun rapport !? De deux choses l’une : soit l’harmonie sera le fruit d’une construction collective, autrement dit sociale, soit elle résultera de l’absence de toute forme de « société », chose inconcevable pour des hommes qui sont des êtres sociables par nature. Le marxisme n’est pas absurde au point d’imaginer que l’avenir de l’Homme soit de « retourner » vivre dans les bois et de passer son temps à caresser des fleurs… mais il n’est pas assez honnête pour reconnaître qu’il est allé trop loin en rejetant le répertoire social et s’est réduit lui-même à recourir à des périphrases obscures, sinon creuses, pour donner le change. Ne voulant pas penser « société », il a éradiqué les mots. Ne voulant pas penser « la société », il a éradiqué les concepts au lieu de les révolutionner. N’ayant ni les mots ni les concepts, il ne peut plus penser « la société » (de demain) et se flatte de ne pas s’y essayer. Dès lors, il doit la bannir verbalement pour rester cohérent avec lui-même, mais sans la bannir ouvertement pour ne pas passer pour insensé. C’est ici, notamment, que le marxisme doit exceller en baratin pour noyer ses détracteurs dans un charabia qui, en définitive, ne peut en imposer qu’à ses adeptes ; toute personne avisée comprend bien qu’au bout du compte il n’y a rien à comprendre, que cette débauche de verbiage masque une absence de projet, que ses jongleries ne servent qu’à occulter ses incohérences.
Le reste est à l’avenant, pour les mêmes raisons. Ainsi sa grande et fumeuse idée d’un collectivisme mondial devient, au fil des discussions, une fédération de collectivismes locaux (ne disons pas nationaux !), concernant, par la force des choses, des gens existant au même endroit et ayant la même culture (ne disons pas peuple !). Ainsi la grande famille humaine, qui ne doit plus être compartimentée en peuples, en nations, présente néanmoins des variétés que le capitalisme s’empresse d’ailleurs d’exploiter en jouant les unes contre les autres. Le marxisme conçoit, avec raison, les immigrés comme l’armée de réserve du capital ; il sait que le capitalisme les utilise pour paralyser économiquement et politiquement les autochtones ; il admet donc implicitement qu’il y a les uns et les autres, qu’il y a divers peuples, diverses nations, mais la doctrine interdit de le reconnaître et de raisonner d’après cette réalité, c’est-à-dire d’aller au bout de la logique. Ainsi le marxisme exècre le capitalisme et l’argent, dont les conséquences directes sont le matérialisme, l’individualisme et l’inégalité, tout en focalisant lui-même sur l’aspect matériel des choses (besoins, moyens de production), en prônant le mondialisme qui n’est que le revers de l’individualisme, et sans jamais parler d’Égalité, de la seule Égalité possible et souhaitable, l’égalité des citoyens en devoirs et en droits, car cela impliquerait de recourir aux notions équivalentes de « société », de « peuple », de « nation », ce qui lui écorcherait la bouche.
Résultat des courses : le vide. Plus on creuse, moins on trouve. Des fioritures impressionnantes ; un contenu qui laisse sur sa faim. Sa radicalité n’a d’égale que sa vacuité. Mélange de vrai et de faux, de pertinent et d’absurde, de tout et son inverse, il peut ratisser large mais n’attrape au final que les convaincus, ceux qui partagent ses délires et ceux qui prennent pour argent comptant les lieux communs à son sujet (bonheur du peuple, Égalité, justice). Il ne répond pas aux objections ; il oppose des discours bien rodés qui se contredisent entre eux d’une objection à l’autre, contradictions qui ne l’interpellent pas mais l’obligent à recourir à sa botte secrète, à son « argument » suprême, face à quiconque les relève : « Tu n’as pas compris le marxisme », « Tu n’as pas lu Marx ». En d’autres termes : « Tu es un mécréant ! »
La religion marxiste exige la foi du charbonnier, celle qui soulève les montagnes pour accoucher d’une souris.
Philippe Landeux
3 décembre 2017
A peine avais-je écris ce texte que je recevais, sous ma vidéo « Marchandise vs Largent - Francis Cousin vs Philippe Landeux », comme pour mieux démontrer tout ce que je dis, le commentaire suivant :
« Production ? mais non, c'est la nature qui produit ! Et oui on partage ce que la nature nous donne, tout le temps ! Et non pas besoin d'autorité du tout, seule la logique de la survie fonctionne : tu ne peux vivre seul donc tu partage. C'est pas compliqué pourtant... Le communisme n'a JAMAIS été pratiqué à grande échelle depuis l'apparition du capitalisme. Prendre l'urss ou la chine comme l'exemple du communisme est faire une erreur monumentale ! Les vrais communistes existent pourtant, il faut aller les chercher en amazonie, en papouasie, etc. mais ils sont la démonstration vivante de notre régression totale. Je m'en tape qu'on soit des milliards sur cette planète, si il faut n'être qu'un million pour vivre heureux cela me va très bien ! »
Que peut-on répondre à ceux qui tiennent des discours d’une telle absurdité ? Pourquoi même s’en donner la peine ?
Ce commentaire était une réponse à un de mes commentaires :
« La notion de partage implique des individus qui produisent quelque chose... Cela implique par ailleurs de réunir les productions et de les partager, selon des critères arbitraires et sous une autorité potentiellement tyrannique. A grand échelle, l'idée basique "du partage" débouche sur le communisme tel qu'il a été pratiqué. L'échange sans monnaie à grande échelle, alors que plus personne ne produit rien seul, doit être autre chose. Les producteurs (et de manière générale les citoyens, c'est-à-dire les individus qui, aux yeux de la cité, ont rempli leurs devoirs et fait oeuvre utile) doivent simplement pouvoir accéder librement au marché, puiser pour ainsi dire dans le pot commun. Chacun met dans le pot commun ; chacun puise dedans (sans autre borne que la réalité des choses et, au besoin, la loi égale pour tous). La production est partagée de facto, mais je ne pense pas que ce soit là la conception à laquelle renvoie généralement le mot "partage". S'en tenir à ce mot donne l'impression de faire un pas en avant, alors qu'il conduit à faire deux pas en arrière. »
Ainsi, la réponse n’aura tenu aucun compte de mes arguments et aura consisté à tout balayer d’un revers de main, à nier toutes les évidences, à soutenir les pires contradictions, les pires inepties, à compter sur la nature et les petits oiseaux et à ne voir de salut pour l’avenir que dans le retour à une situation à jamais révolue, nécessitant l’éradication ou tout du moins la disparition de la quasi totalité de l’Humanité. Bien vu camarade !
16:20 Écrit par Philippe Landeux dans 6. MON BLOG | Lien permanent | Commentaires (1) | Facebook | | Imprimer |
dimanche, 08 octobre 2017
ENTRETIEN AVEC PH. LANDEUX - JUILLET 2017 (vidéo)
Exotriks interroge Philippe Landeux sur le Civisme, sa théorie de la Cité, et ses postulats.
Pour voir la vidéo, CLIQUEZ ICI ou sur l'image
MENU :
0 h 00 mn 30 s – Les choses n’ont pas de prix
0 h 03 mn 02 s – La monnaie représente du droit
0 h 05 mn 37 s – Principes de fonctionnement de la monnaie
0 h 08 mn 52 s – Différence entre Largent et la monnaie
0 h 10 mn 34 s – Comment est née la croyance que la notion de valeur marchande est nécessaire pour échanger (Largent)
0 h 13 mn 20 s – Le système monétaire est intrinsèquement oligarchique
0 h 16 mn 30 s – Le revenu universel peut-il résoudre l’inégalité ?
0 h 21 mn 21 s – Comment échanger sans monnaie, sans valeur marchande ?
0 h 30 mn 28 s – L’Égalité est-elle incompatible avec la hiérarchie ?
0 h 38 mn 53 s – Que se passe-t-il si un producteur ne vend pas assez ?
0 h 46 mn 46 s – Que se passe-t-il si un producteur produit de la mauvaise qualité ?
0 h 50 mn 00 s – Un ingénieur doit-il avoir plus de droits qu’un agriculteur ?
0 h 54 mn 11 s – L’accès libre au marché ne présente-t-il pas risque de pollution ?
0 h 59 mn 32 s – Quelles formes peut pendre le devoir de participer à la vie de la Cité ?
1 h 04 mn 05 s – Qu’en est-il des métiers pénibles ?
1 h 08 mn 14 s – Je produis un seul légume… Que se passe-t-il ?
1 h 15 mn 06 s – Accès libre impossible dans les petites communautés
1 h 18 mn 50 s – Le Civisme est-il un projet mondial ?
1 h 25 mn 33 s – Nous payons avec notre travail
1 h 31 mn 57 s – Un droit est généré par un devoir
1 h 36 mn 23 s – Les contradictions du système monétaire
1 h 47 mn 08 s – Le Civisme en 3 mots
1 h 49 mn 23 s – Comment en savoir plus ?
20:54 Écrit par Philippe Landeux dans - ACTUALITE & VIDEOS PERSO, 6. MON BLOG | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer |
jeudi, 28 septembre 2017
LE TRIBUNAL RÉVOLUTIONNAIRE DE PARIS (livre)
Depuis plus de 200 ans maintenant, le Tribunal révolutionnaire (de Paris), instrument de la « Terreur, » a été l’objet de nombreux travaux. La plupart ont porté exclusivement sur les condamnés à mort, voire seulement sur les plus célèbres, et les rares études plus générales, même sérieuses, ne sont pas fiables. En outre, aucune ne présente de chiffres (sinon faux) et encore moins de graphiques permettant de saisir d’un coup d’œil tant l’activité de ce tribunal que l’influence sur elle des événements.
C’est pour pallier à ce manque que Philippe Landeux a consulté les Archives Nationales où se trouvent tous les dossiers et a réalisé un travail exhaustif et définitif sur le sujet. Il en a profité pour accomplir un travail tout aussi précis sur les Commissions populaires, chargées, le 23 ventôse an II (13 mars 1794), de juger les détenus. Et pour que le présent ouvrage soit complet, il s’est penché, avec sa méticulosité ordinaire, sur le Tribunal du 17 août 1792 et les conspirations des prisons (juin-juillet 1794).
Cet ouvrage de 900 pages s'adresse à un public averti : historiens, étudiants, passionnés par la Révolution française. Il ne s'agit pas d'un récit, mais d'un condensé de données indispensables, et pourtant introuvables, pour étudier cette période de l'histoire.
Cet ouvrage contient :
- Les discutions et décrets qui aboutirent à l'instauration du Tribunal du 17 août 1792
- La liste et le nombre des personnes jugées par le Tribunal du 17 août 1792
- Les discutions et décrets qui aboutirent à l'instauration du Tribunal révolutionnaire de Paris
- Les listes chronologique et alphabétique des 5350 personnes jugées par le Tribunal révolutionnaire de Paris
- Les tableaux des jugements au jour le jour
- Le bilan chiffré
- La liste des cartons concernant le Tribunal révolutionnaire de Paris (série W) et un aperçu de leur contenu
- Les graphiques résumant l'activité du Tribunal révolutionnaire de Paris
- Les décrets et arrêtés relatifs à l'instauration et à l'activité des Commissions populaires
- Les listes de détenus connues établies par les Commissions populaires et ratifiées par les Comités
- Les graphiques résumant l'activité (connue) des Commissions populaires
- Les documents (arrêtés, listes de détenus, etc.) relatifs aux conspirations des prisons
- Les relevés du nombre de détenus dans les prisons parisiennes
- Les listes des conventionnels décédés, assassinés, exécutés, proscrits, rappelés et réhabilités
Cet ouvrage est imprimé sur commande par TheBookEdition et livré à domicile. CLIQUEZ ICI
Je le propose également en version PDF GRATUIT.
APERÇU
18:22 Écrit par Philippe Landeux dans - MES LIVRES, - REVOLUTION 1789-1794 | Lien permanent | Commentaires (3) | Facebook | | Imprimer |
dimanche, 27 août 2017
NATION CAPITALISTE VS NATION TOUT COURT
Le capitalisme n'a jamais créé que des nations illusoires, qu'il cherche aujourd'hui à détruire pour aller vers le mondialisme. Ces deux projets ont le même ressort : Largent (croyance que la notion de valeur marchande est nécessaire pour échanger), plus exactement, l'individualisme inhérent à Largent. Le capitalisme a détruit les frontières ancestrales pour étendre le champ de l'individualisme (et surtout la zone d'influence des riches), et de cette première phase sont nées ce que nous appelons abusivement "les nations". Le mondialisme n'est que le prolongement de ce processus tendant à réduire les hommes à des individus pour faire du monde entier le terrain de jeu des riches.
Il ne s'agit donc pas aujourd'hui de défendre la nation qui n'a jamais existé réellement, mais de la bâtir, c'est-à-dire de construire un projet social à une échelle réaliste et viable que le capitalisme (Largent) nous a bon gré mal gré imposée... le capitalisme et la technologie moderne. Ce projet devra nécessairement avoir des bases (philosophiques) et un but radicalement différents. La "nation" capitaliste est monétaire, individualiste et inégalitaire (donc oligarchique) ; ce n'est en rien une société. La véritable nation, la Cité, devra être non-monétaire, civique ou patriotique et égalitaire (donc démocratique). Lutter pour ce projet, c'est s'opposer radicalement au capitalisme. S'y opposer ou n'en prendre qu'une partie (patrie sans égalité, ou égalité sans patrie), c'est soit être un capitaliste revendiqué, soit se réduire soi-même à l'impuissance face à Largent et en être de facto le complice.
Ce n'est pas combattre le capitalisme que de rejeter comme lui, fut-ce pour d'autres raisons en apparence, l'échelle nationale ; c'est lui emboîter le pas et le servir en dernière analyse. Il n'y a rien au-delà de la nation, sinon l'empire de Largent ; il n'y a rien non plus en-deçà, sinon des utopies (des niaiseries) vouées à l'échec dont le seul succès sera d'avoir sapé la Révolution. Seule la nation est révolutionnaire.
18:09 Écrit par Philippe Landeux dans 6. MON BLOG | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer |
jeudi, 13 juillet 2017
LES DEUX MYTHES DE LA MÉRITOCRATIE COMME FACTEUR D’ÉGALITÉ
Je viens d’avoir une discussion tendue sur facebook, si toutefois on peut parler de discussion avec des sourds. Un ami avait posté l’extrait d’article suivant :
« Je vise l'égalité. Or on ne lutte pas contre l'inégalité en imposant un système égalitaire, mais en imposant une inégalité inverse. Etant admis que les "fils et filles de" ont plus de chance de réussir que ceux qui n'héritent pas d'un carnet d'adresses ou d'un patrimoine, l'école doit opposer à cette inégalité patente une inégalité totalement indépendante : en l'occurrence, celle de l'intelligence et du savoir. L'école est en crise parce que tout a été fait pour que l'intelligence et le savoir ne puissent pas introduire une inégalité qui corrige l'inégalité héritée. L'école a renoncé à tout mécanisme de mobilité sociale fondé sur l'intelligence et le savoir. »
Jean-Claude Milner, interviewé dans le dernier numéro de Causeur
J’ai posté le commentaire suivant : « Il n'y a qu'une Egalité : l'égalité en droits (et en devoirs, entre citoyens). Or l'inégalité en droits passe par la monnaie. C'est la monnaie qui incarne les droits et qui, de par sa nature et son fonctionnement, ne peut pas se répartir également. Mais il est évidemment plus facile, quoique vain, de prétendre atteindre l'Egalité en réformant l'éducation que de s'attaquer à Largent pour y parvenir réellement. Cela fait 200 ans que les soi-disant défenseurs de l'Egalité débitent ce genre de foutaises ! Ils ne veulent pas l'Egalité, dont ils ne savent absolument pas en quoi elle consiste. Ils prônent moins d'inégalités dans un système intrinsèquement inégalitaire qu'ils se gardent bien de remettre en cause. Résultat ? Zéro. Ha ! ils peuvent bien se faire passer pour des philosophes ; en tant que révolutionnaires, ils ne valent pas un kopeck. »
J’ai dès lors été pris sous le feu croisé de gens qui, quoique ne niant pas l’importance de l’argent, ne voyaient pas le rapport avec le sujet, m’accusaient de monomanie, m’agressaient en me reprochant d’être agressif, me reprochaient de fermer la discussion faute de pouvoir me répondre sur le fond et au lieu de développer leurs propres arguments (dont je n’aurais fait qu’une bouchée), déploraient de ne pouvoir discuter en bonne compagnie, bref multipliaient les tentatives de déstabilisation pour bâillonner l’empêcheur de tourner en paix autour du pot que je suis. Le système est monétaire, Largent en est le moteur, tout en porte fatalement la marque, mais il est interdit de le voir et encore plus de le dénoncer. On peut parler de tout à condition de ne jamais rien dire d’essentiel. Bien sûr, personne ne niera que Largent est roi, mais tout le monde se liguera pour l’évacuer des discussions particulières et en faire, au final, le plus grand des tabous. Comme si Largent pouvait exister sans avoir aucune incidence ! Il n’est pire aveugle que celui qui ne veut pas voir. Margaritas ante porcos !
Quoi qu’il en soit, le sujet est intéressant et je voudrais le traiter ici à fond. J’ai déjà annoncé ma position de principe, sur la nullité de la méritocratie comme moyen d’atteindre l’Égalité. Je vais néanmoins approfondir et développer trois points : 1) Qu’est-ce que l’Égalité. Pourquoi Largent l’empêche. Comment l’instaurer. 2) Qu’est-ce que la méritocratie. Pourquoi elle est nulle, par principe, comme moyen d’atteindre l’Égalité. 3) Pourquoi la méritocratie est en soi un concept nul en pratique. Fort de ces explications, je commenterai ensuite l’article.
Tout d’abord, donc, qu’est-ce que l’Égalité ?
L’égalité est un rapport, une comparaison entre objets qui se révèlent finalement être de la même dimension ou de la même étendue. Sur le plan social, l’Égalité ne peut concerner que des individus qui ont des rapports entre eux, à savoir les citoyens, et avoir pour objet ce qui précisément les relie, à savoir les devoirs qu’ils ont les uns envers les autres et, par suite, les droits que, par lesdits devoirs, ils génèrent les uns pour les autres et se garantissent mutuellement. Les citoyens sont différents par nature, en tant qu’être humains, mais ils sont plus que des êtres humains : ils sont des êtres sociables, ils appartiennent à une société donnée qui fixe de manière générale, et non selon les individus, des conditions d’appartenance et impose donc à tous les mêmes devoirs et reconnaît et garantit à tous les mêmes droits. (La société n’est jamais que l’ensemble des citoyens. Des devoirs envers elle, sont des devoirs envers ses concitoyens. Des droits garantis par elle sont générés et garantis par les citoyens.) Il n’y a pas de droits sans devoirs, et pas de devoirs sans réciprocité, sans égalité. Nul ne peut avoir de devoirs envers un autre qui n’a pas les mêmes devoirs envers lui. Ainsi des citoyens, au vrai sens du terme, sont égaux en devoirs et en droits. Hors de cette Égalité, point de devoirs, de droits, de citoyens, de cité ; seulement des mots vides de sens. Il n’y a qu’une Égalité en tant que principe social, qu’une Égalité souhaitable, possible et nécessaire : celle des citoyens en devoirs et en droits.
Après « défendre ses concitoyens », le principal devoir du citoyen est de « participer à la vie de la cité selon ce qu’elle considère comme une participation ». C’est le fait de prendre part qui fait de lui une partie. Les citoyens ne sont pas égaux en devoirs parce qu’ils font la même chose, mais parce qu’ils font tous, dans le domaine qui est le leur, ce que la cité exige au minimum d’eux. (Notons bien que les devoirs envers la cité consiste en des activités au profit de la cité et de ses concitoyens. Un individu qui conserverait le fruit de son activité ou en serait le seul bénéficiaire n’aurait rempli aucun devoir envers la cité et ses concitoyens, ne serait pas citoyen, et nul ne lui devrait rien en retour.) Et c’est grâce à ce dévouement envers elle que la cité peut et doit offrir des bienfaits à ses citoyens, des bienfaits auxquels chaque citoyen, qui a contribué à leur existence, a droit également. Parmi tous ces bienfaits issus de la combinaison des devoirs figurent les biens (éphémères, tels la nourriture, ou relativement durables) et les services destinés à satisfaire des besoins et désirs individuels. Pour ce qui est des services, chacun peut en jouir quand il veut ou à son tour, si la Demande excède l’Offre à l’instant « T ». Pour ce qui est des biens auxquels tous les citoyens ont droit du fait même qu’ils soient citoyens, plusieurs cas se présentent.
1) Si la production de tel bien est faible en comparaison de la Demande, alors la cité, qui doit en assurer une part à chacun, peut, selon la nature des biens en question, soit diviser la production en parts relativement égales, soit limiter, d’une manière ou d’une autre, la quantité à laquelle chacun peut prétendre durant une certaine période, libre à lui d’user de ce droit en tout ou partie. Quoique la cité ne puisse mieux faire dans de telles conditions, aucune de ces deux méthodes égalitaristes n’est pleinement satisfaisante.
2) Si la production est massive et les biens disponibles en abondance, alors la cité peut laisser ses citoyens y accéder librement. La seule condition pour que cette méthode fonctionne est que la citoyenneté puisse être dûment attestée. Et si cette méthode n’est pas a priori sans inconvénients, elle a, outre l’avantage de la simplicité, celui d’assurer à tous une liberté aussi étendue que possible et de susciter un dynamisme économique incomparable.
Or les « sociétés » occidentales sont dans cette deuxième situation, à la différence près que l’accès au marché n’est pas libre ; il n’est pas conféré par la citoyenneté mais par le fait de détenir de la monnaie et en proportion des unités détenues. Ce système, monétaire, qui n’a plus de raison d’être est l’héritage de l’époque révolue de la production artisanale, et même des productions primitives. La monnaie est soi-disant un étalon de la valeur marchande qui permet de faire du troc indirect ou en deux temps. (C’est d’ailleurs pourquoi elle passe elle aussi de main en main.) Elle repose fondamentalement sur la même logique et la même croyance que le troc, puisque c’est du troc même qu’elles sont nées. Le troc consiste en un échange d’objets entre individus et en une mise en équivalence (égalité de valeur) des objets en question. La croyance qui sous-tend ce mode d’échange est que « la notion de valeur marchande est nécessaire pour échanger ». Vu que la notion de valeur marchande n’a de sens que si des objets sont mis en équivalence, donc échangés entre eux, il suit que la croyance que « la notion de valeur marchande est nécessaire pour échanger » porte en elle le schéma du troc, dont le système monétaire n’est qu’un développement. La monnaie est une unité de valeur parce qu'elle sert à représenter les objets sous forme de valeur dans le cadre d'un mode d'échange reposant sur la croyance que « la notion de valeur marchande est nécessaire pour échanger » ; elle est la manifestation visible (quoique de moins en mois) de cette croyance parce qu'elle représente les objets et sert elle-même d'objet d'échange. Élémentaire ! Pourtant, que ne faut-il pas faire et subir pour faire entendre cette évidence !!!!
Cela dit, il faut maintenant comprendre les conséquences, d’un point de vue social, de tout mode d’échange fondé sur cette croyance que le Civisme appelle « Largent ». La notion de valeur marchande implique nécessairement un mode d’échange matérialiste, individualiste et inégalitaire. Matérialiste, parce que focalisé sur les objets et leur soi-disant valeur. Individualiste, parce que les individus ne s’activent que pour eux-mêmes, qu’il s’agisse pour eux de disposer de produits à échanger ou de se procurer de la monnaie. Inégalitaire, parce que la notion de valeur n’existe que dans les différences de valeurs, de prix des produits, de prix du travail et, au final, de droits. Au surplus, les valeurs ne sont jamais que l’expression d’un rapport de force. C’est le plus fort qui dicte les prix, selon ses intérêts. Déjà, nous voyons que pareil mode d’échange n’a aucune dimension sociale, ni dans ses buts ni dans ses acteurs. Mais c’est sous sa forme monétaire que les aberrations sont le plus frappantes.
La monnaie est, en théorie, le moyen que les travailleurs reçoivent en contrepartie de leur travail pour accéder au marché qu’ils ont contribué à alimenter en biens et services. C’est un juste retour des choses en apparence. Sauf que leur droit d’accès au marché est proportionnel aux unités dont ils disposent, et que ceux qui les payent, et dans la dépendance desquels ils sont, ont non seulement l’intérêt mais encore le pouvoir de les payer le moins possible, pour garder plus de monnaie pour eux et avoir eux-mêmes plus d’accès. Sauf, encore, que l’accès au marché est la porte de la plupart des droits et que la monnaie, en matérialisant ainsi les droits, en imposant le besoin d’en avoir, en obligeant les individus à s’en dépouiller (c’est-à-dire à payer) pour en jouir, en les habituant à la voir circuler et à perdre ainsi de vue sa véritable nature, en passant de main en main, en se gagnant toujours aux dépens d’autrui, en permettant de s’en procurer autrement qu’en travaillant, en légalisant le vol lui-même, en donnant à ceux qui en ont le plus du pouvoir sur tous les autres, la monnaie, dis-je, est dans l’impossibilité de se répartir également, de sorte que les individus sont fatalement inégaux en droits, les mieux lotis n’étant pas même ceux qui méritent le plus. Et pourquoi la monnaie garantirait-elle ou permettrait-elle seulement l’Égalité ? Ce n’est pas plus sa fonction que cela n’est dans sa logique. La logique monétaire n’est pas la logique sociale. Le système monétaire est intrinsèquement inégalitaire parce que « Société » et « Égalité » sont des concepts qui lui sont totalement étrangers. Les hommes, qui eux ont une sensibilité sociale, ne peuvent rien faire pour compenser, n’ayant eux-mêmes de ces concepts que des conceptions dénaturées et ne pouvant contrebalancer les mécanismes monétaires auxquels ils souscrivent de fait en ne remettant pas en cause la monnaie, et encore moins Largent.
L’inégalité est absolument indépendante des hommes (même si ceux-ci peuvent l’aggraver) ; elle est due à l’origine, à la nature et au fonctionnement de la monnaie. Celle-ci fonctionne selon deux principes : celui des vases communicants, et celui de l’attraction. Les vases communicants, parce qu’elle se gagne aux dépens d’autrui, de sorte qu’elle circule et que, pour qu’il y en ait ici, il fait en prendre là. L’attraction, parce que, comme elle circule et qu’elle incarne des droits, donc du pouvoir, des pôles d’attraction se créent qui font que l’argent va à l’argent. Ainsi, non seulement le système monétaire est inégalitaire mais il est dans sa nature que les inégalités s’accroissent. Il y aura donc toujours des riches et des pauvres dans un système monétaire, des riches de plus en plus riches, des pauvres de plus en plus pauvres. Quelques secousses peuvent ébranler les fortunes, mais le temps fera qu’elles se reconstitueront. Et peu importe finalement qui est riche, qui est pauvre. Dans ce Monopoly grandeur nature, les hommes ne sont que des pions. Les têtes peuvent changer ; la règle ne change pas.
Pour que la société renoue avec l’harmonie, elle doit suivre les Principes de l’ordre social. La seule chose qui justifie qu’un individu ait accès au marché, et accès librement, c’est qu’il ait contribué à l’alimenter, c’est qu’il ait rempli ses devoirs, en un mot, c’est qu’il soit citoyen. Quand tous les citoyens peuvent accéder librement au marché (dans les limites de la nature des choses et éventuellement des lois), quand ce droit est conféré par la citoyenneté elle-même, il n’y a plus de monnaie, plus de prix, plus de salaires, plus de riches, plus de pauvres, mais l’égalité en droits et une liberté aussi étendue que possible pour tous. Alors les hommes ne sont plus défigurés par ce qu’ils possèdent et qui est à la portée de tous ; ils ne peuvent plus briller que par leur Être. Mais, ne nous leurrons pas : les hommes resteront des hommes. Même parmi de vrais citoyens réellement égaux, le génie aura encore du mal à percer. Un génie ne sera plus misérable ; il aura plus de moyens qu’il n’en a aujourd’hui pour accomplir son œuvre et se faire entendre ; mais il heurtera toujours les préjugés, les habitudes, les idées reçues, les traditions, les coutumes, les règles de l’art, l’ordre établi, les réputations, etc. ; il ne sera pas entendu avant longtemps, ou peut-être jamais, par des hommes qui ne veulent pas écouter, qui préfèrent se tromper avec la masse plutôt qu’avoir raison tout seuls.
Ce qui m’amène enfin à la question de la méritocratie.
Un système qui garantirait la reconnaissance du mérite, qui permettrait aux meilleurs de réussir, anéantirait-il l’inégalité ? établirait-il l’Égalité ? Déjà, d’après tout ce que j’ai dit précédemment, il est évident qu’il ne ferait disparaître ni la richesse ni la pauvreté, puisqu’en ne remettant pas en cause la nature monétaire du système général, il conserverait le principe de l’inégalité. Alors quelle « Égalité » pourrait-il bien favoriser ? Au vrai sens du terme, aucune.
Imaginons un système qui permettrait au mérite de se faire reconnaître. Qu’entendrait-on par « reconnaissance » ? Serait-ce une reconnaissance de pure forme, honorifique, décorative, une reconnaissance sans récompense sonnante et trébuchante ? Dans ce cas, le méritant pauvre resterait pauvre, avec peut-être une médaille ou un beau diplôme. Où serait le progrès ? A moins qu’il reste pauvre mais avec un emploi à la hauteur de son mérite. Dans ce cas, il serait exploité, il y aurait injustice vis-à-vis de ses collègues ou confrères plus favorisés que lui par la fortune au départ. On peut discuter si cette situation serait moralement pire ou meilleure que la première, force est d’admettre que l’on voit mal quelle inégalité elle entamerait.
Au vrai, ces deux hypothèses sont absurdes. Une méritocratie, permettant aux meilleurs d’être reconnus, aurait aussi pour but qu’ils soient payés selon leur rang. Alors, il n’y aurait plus beaucoup de différences entre eux et leurs pairs, à défaut d’être absolument égaux, et on ne pourrait que s'en réjouir pour eux ; mais en quoi cela détruirait-il l’inégalité au niveau de la société en général ? en quoi cela introduirait-il une once d’Égalité entre ceux d’en haut et ceux d’en bas ? Qu’il y ait de nouveaux riches, comme il y en a d’ailleurs en permanence, cela fait une belle jambe aux toujours pauvres !
En somme, la « méritocratie » dans un système monétaire aurait, du point de vue de l’Égalité, autant d’effet qu’un pet dans l’eau. Il est vrai que l’on pourrait me rétorquer que je ne vois que l’argent, que le mérite peut être récompensé autrement, qu’il trouve même sa récompense dans la satisfaction personnelle. Déjà, il serait extraordinaire que, dans un système où tout le monde court après l’argent, où tout passe par lui, où tout se mesure à son aune, l’aspect monétaire devienne soudain indifférent. Que cela ne soit pas mis en avant, par hypocrisie plus que par pudeur, n’interdit pas de deviner les arrières pensées évidentes et d’aller direct au vrai point de la question. On ne me fera pas croire que des hommes peuvent avoir Largent (croyance) dans la tête sans avoir l’argent à l’esprit, et plus encore des hommes qui lui sont tellement soumis qu’ils le défendent sans même en avoir conscience. Du reste, moi qui prône un système non-monétaire, j’entends bien que la récompense du mérite peut et doit être ailleurs que dans l’argent. Mais un tel discours est absurde dans la bouche de ceux qui veulent conserver le système monétaire et savent, quoi qu’ils en disent, que tout se ramène à la question du pouvoir d’achat.
Alors je veux bien que le sujet ne soit pas l’égalité en droits, mais ce n’est pas moi qui mêle les sujets de la méritocratie et de l’Égalité sans préciser laquelle, comme s’il y en avait une autre. Pour ma part, si ce n’est pas celle-là, je ne vois pas à quelle Égalité, à une égalité de quelle nature, à quoi digne du nom d’« Égalité », la méritocratie contribuerait. Le coup de « l’égalité des chances », par exemple, on nous l’a déjà fait, et rien n’a changé. Évidemment ! Nous le refaire sous un autre nom ne donnera pas davantage de consistance à l’Égalité. Il faut plutôt démasquer les beaux parleurs, charlatans ou hypocrites, qui discréditent la cause qu’ils prétendent défendre. D’autant plus que le concept de « méritocratie » est en lui-même une vue de l’esprit.
La « méritocratie » n’est rien d’autre que l’« aristocratie » sous un autre nom. Le gouvernement des meilleurs (aristocratie) est évidemment le but de la méritocratie qui, en prétendant déceler et honorer le mérite de manière systématique, ne vise rien moins qu’à reconnaître les meilleurs pour leur accorder les places. Cela semble idéal aux yeux de ceux qui, d’une part, ne se soucient pas d’Égalité (à laquelle un tel système ne contribuerait en rien) et qui, d’autre part, ne voient ni que cela n’a pas de sens ni que cela est impossible, comme je l’ai déjà expliqué dans mon texte « L’impossible aristocratie ».
Le problème revêt en effet deux aspects : celui de la définition des meilleurs, du mérite et des méritants, et celui du système de sélection des meilleurs.
Les « meilleurs » ne veut rien dire en soi. Il y a des meilleurs dans quelque chose et par rapport à d’autres. Et le meilleur dans une spécialité précise n’est pas le meilleur en toute chose. Pire ! Le meilleur dans sa spécialité est rarement le meilleur pour administrer son propre domaine d’activité. Or aristocratie et méritocratie ont pour but de sélectionner les meilleurs dans l’idée de leur confier des responsabilités, c’est-à-dire administration, gestion, direction. Mais administrer, gérer, diriger exige des qualités et des compétences autres que le seul talent dans le domaine en question. Et quand bien même un « meilleur » réunirait aussi les qualités et compétences nécessaires, encore faudrait-il qu’il ait envie de délaisser son art pour se consacrer à une activité d’une tout autre nature. Il s’ensuit que « les meilleurs » en tant que dirigeants ne sont quasiment jamais « les meilleurs » dans le domaine qu’ils dirigent. Ce simple aspect pratique des choses ruine déjà ces belles théories.
Faisons abstraction de ce détail importun, et imaginons qu’un système vise malgré tout à rechercher, favoriser et sélectionner les meilleurs ? Ce ne sera jamais que les meilleurs selon lui, pour ce à quoi il les destine. Or il est bien évident qu’un système, quel qu’il soit, ne recherche ce qu’il considère comme les meilleurs, d’après ses critères à lui, que dans le but qu’ils le servent en retour et perpétuent ainsi le système. Autrement dit, on parle « des meilleurs » à entrer dans les cases déterminées par le système. Mais est-ce à dire que « ces meilleurs » sont les meilleurs dans l’absolu ? Le génie n’entre jamais dans les cases ! Il bouscule les normes ! Il fait mentir les certitudes ! Le premier réflexe de tout système, face au génie qui ne se marginalise pas lui-même, est de le chasser, de l’exclure, de le brocarder, de le persécuter, de le tuer parfois. Tout système a sa logique et voit une menace dans tout ce qui en dévie. C’est dans la nature des choses. Un système soi-disant « méritocratique » n’échapperait pas à la règle.
La caste « des meilleurs » se résumerait donc 1) aux héritiers (« les fils de »), 2) aux favoris de la fortune, 3) aux pistonnés, 4) aux arrivistes et, dans une faible proportion, 5) aux bons élèves (bien dociles) et 6) aux sortis du rang. Les « élus » des trois premières catégories ont peut-être quelques qualités, ce sont peut-être même les meilleurs de leur microcosme, mais sans doute pas les meilleurs de la nation dans l’absolu. Ceux de la quatrième catégorie ne sont peut-être pas incompétents mais sont surtout les meilleurs pour écraser les autres. Enfin, ceux des deux dernières catégories sont sans doute ceux qui ont le plus de compétences, du moins celles sur lesquelles le système compte (sans quoi il leur fermerait la porte au nez). Dans tous les cas, les lauréats sont toujours issus d’un petit cercle, ce qui interdit de dire et encore moins de penser qu’ils sont assurément « les meilleurs ».
Mais il ne s’agissait-là que des catégories d’individus pouvant être potentiellement sélectionnés pour faire partie de ce que le système considère comme les meilleurs. Reste la question des moyens de sélection eux-mêmes. Et ils ne sont pas nombreux : 1) nomination, désignation, cooptation, etc., 2) concours, 3) ancienneté, 4) élections, 5) tirage au sort. Les autres méthodes possibles ne sont jamais que des combinaisons de celles-ci. Il serait trop long d’entrer ici dans les faiblesses de chacune de ces méthodes. Disons que si certaines permettent de désigner « des bons », parfois même par hasard, aucune n’assure de sélectionner de manière systématique « les meilleurs ».
Il faut d’ailleurs bien comprendre qu’il est question ici de « système ». Des génies peuvent réussir à se faire leur place dans tout système ; je ne dis pas qu’ils réussissent à coup sûr mais que, par un heureux concours de circonstances et du travail, cela peut arriver malgré le système plus que grâce à lui. Or la méritocratie serait un système et aurait donc les limites de tout système : elles favoriseraient moins les meilleurs que les profils recherchés.
Je terminerai en citant deux passages du texte susmentionné, auquel je n’ai rien à ajouter ou à retrancher :
« Au final, aucun système ne permet de sélectionner, en tant que dirigeants, « les meilleurs » sur quelque plan que ce soit, professionnel ou humain. Un système qui prétend accomplir un tel miracle parle en réalité par la bouche des « élus » qui se flattent d’être les meilleurs d’après des critères établis par et pour eux. Or qui est en mesure de fixer les critères de sélection d’un système si ce n’est les puissants du système présent ou précédent dont l’intérêt est d’assurer ou de conserver leur puissance, donc de justifier leurs abus et leurs impostures en les taisant voire en les transformant en mérites ? Qui les empêchera de se dire « les meilleurs » et de favoriser leurs pareils par des sophismes et un système astucieux ? »
« Il n’y a pas plus de classe que de gouvernement « des meilleurs » possible. L’« aristocratie » est un concept du domaine des rêves et un mot que seuls des prétentieux peuvent employer sérieusement pour désigner le groupe auquel ils appartiennent. Il est vrai que tout groupe a la faiblesse de se croire le meilleur, à plus forte raison quand il est réellement puissant. Car les puissants ont également le pouvoir de faire prévaloir leur discours et de passer outre les critiques. Mais à vivre entre eux, entourés de muets, d’envieux et de flagorneurs, leurs chevilles enflent autant que leur tête. Ils perdent de vue que le rapport de force qui est à leur avantage atteste moins leurs qualités personnelles qu’il ne révèle les mécanismes inégalitaires du système dont ils profitent et qu’ils acceptent. Cette inégalité systémique peut être le fait d’une législation distribuant les hommes en classes hiérarchisées ; elle est, dans tous les cas, une fatalité sous la monnaie. Autrement dit, les attributs des classes dominantes et prétentieuses sont soit le pouvoir (noblesse), soit l’argent (bourgeoisie), soit les deux, comme aujourd’hui. Or, dans la mesure où il est tout aussi rare qu’un enfant de pauvre accède à la richesse qu’un enfant de riche tombe dans la pauvreté, un système monétaire est de fait sclérosé, non par les lois humaines mais par celles de Largent. Sauf exception, les « élites » politiques, économiques et médiatiques sont issues de la haute bourgeoisie. Quel que soit le mode de sélection, elles proviennent du même milieu restreint. Les dès sont pipés. La classe dominante se perpétue de génération en génération, ce qui est la marque, non pas d’une aristocratie, mais d’une oligarchie. »
Il n’est pas trop exagéré de dire que le discours méritocratique est une foutaise, par quelque bout qu’on le prenne ; et une double foutaise si la méritocratie est présentée comme un remède à l’inégalité. Il n’y a qu’une Égalité, celle des citoyens en devoirs et en droits, laquelle Égalité implique le droit pour tout citoyen d’accéder librement au marché. L’Égalité condamne Largent et le système monétaire, intrinsèquement inégalitaires. Déplorer l’inégalité sans dénoncer la monnaie et Largent, c’est tourner autour du pot et se livrer à des gesticulations aussi stériles que ridicules. Le texte de M. Milner nous en donne un bel exemple. Admirons :
« Je vise l'égalité. Or on ne lutte pas contre l'inégalité en imposant un système égalitaire, mais en imposant une inégalité inverse. Etant admis que les "fils et filles de" ont plus de chance de réussir que ceux qui n'héritent pas d'un carnet d'adresses ou d'un patrimoine, l'école doit opposer à cette inégalité patente une inégalité totalement indépendante : en l'occurrence, celle de l'intelligence et du savoir. L'école est en crise parce que tout a été fait pour que l'intelligence et le savoir ne puissent pas introduire une inégalité qui corrige l'inégalité héritée. L'école a renoncé à tout mécanisme de mobilité sociale fondé sur l'intelligence et le savoir. »
Reprenons phrase par phrase.
« Je vise l'égalité. »
C’est M. Milner qui le dit. Haut et fort. Ca pose ! Bon, il a juste oublié de préciser l’égalité en quoi et entre qui ! Avec une notion de l’égalité aussi insipide, on peut s’attendre à tout ; on doit surtout s’attendre à n’importe quoi. Nous ne serons pas déçu du voyage.
« Or on ne lutte pas contre l'inégalité en imposant un système égalitaire, mais en imposant une inégalité inverse. »
Observez comment M. Milner passe sans transition d’une vague idée d’égalité à l’idée de lutter contre l’inégalité, donc pour moins d’inégalité. C’est toujours la même chose. Quand on ignore en quoi consiste l’Égalité et comment l’atteindre, donc quand on ne s’attaque pas à Largent, on ne peut que constater les inégalités qui découlent directement ou indirectement du système monétaire et proposer des mesures compensatoires, autrement dit des jongleries, qui auront autant d’effet qu’un emplâtre sur une jambe de bois. Et question jonglage, M. Milner est un champion du monde ! Il vise l’égalité en imposant une inégalité inverse à l’inégalité. En clair, il veut marquer des buts en tirant à côté de la cage. Qui en veut dans son équipe ?
« Etant admis que les "fils et filles de" ont plus de chance de réussir que ceux qui n'héritent pas d'un carnet d'adresses ou d'un patrimoine, l'école doit opposer à cette inégalité patente une inégalité totalement indépendante : en l'occurrence, celle de l'intelligence et du savoir. »
Pour ceux qui n’auraient pas compris, ceux qui ont un carnet d’adresses ou un patrimoine, ce sont les riches, dont l’existence est le fait du système monétaire, autrement dit de Largent. Ainsi donc, M. Milner veut combattre Largent en stimulant l’inégalité de l’intelligence et du savoir. Admettons que, grâce à l’école, des pauvres se découvrent intelligents et accèdent au savoir : soit ils resteront pauvres (comme s’il n’y avait pas déjà beaucoup de pauvres intelligents), soit ils deviendront riches, laissant derrière eux les « pauvres cons ». Alors que l’on dise qu’un meilleur système pourrait offrir plus de chance à tous est une chose ; que l’on prétende qu’il apporterait l’Égalité est précisément une insulte à l’intelligence.
« L'école est en crise parce que tout a été fait pour que l'intelligence et le savoir ne puissent pas introduire une inégalité qui corrige l'inégalité héritée. L'école a renoncé à tout mécanisme de mobilité sociale fondé sur l'intelligence et le savoir. »
Si « tout à été fait » pour que l’école ne rende pas intelligent ou que l’intelligence demeure nulle socialement (ne rapporte pas un radis), c’est faire un vœu pieu que de dénoncer cette situation en espérant susciter l’effet inverse d’un coup de baguette magique, sans se préoccuper de sa cause. Oui, « tout a été fait ». Mais par qui ? pour quoi ? Ceux qui l’ont fait n’avaient-ils pas les moyens de le faire ? N'ont-ils pas aussi les moyens d’empêcher de défaire ce qu’ils ont fait ? Et ces hommes ne sont-ils pas eux-mêmes de simples rouages d’un système ? Mais de quel système les riches peuvent-ils bien être les rouages ? Par quelle force mystérieuse peuvent-ils bien être entraîné s? ? ? Ne voient pas que ceux qui ne veulent pas voir.
Philippe Landeux
13 juillet 2017
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lundi, 22 mai 2017
NOUVEAU PLAN D’ATTAQUE POUR LE CAMP NATIONAL
Aussi légitimes que soient les dénonciations de l’ « Europe » et de l’immigration, force est de constater qu’elles ne portent pas suffisamment dans l’opinion publique et qu’elles exposent aux accusations de « xénophobie » et de « racisme » qui, pour être ridicules, n’en sont pas moins redoutables.
Le camp national doit trouver autre chose, une autre approche qui, tout en conduisant au salut de la France, ne l’expose plus à ces anathèmes ; une approche porteuse d’un projet qui suscite la mobilisation générale et fasse tomber le masque des traîtres.
INDÉPENDANCE ÉNERGÉTIQUE TOTALE DANS LES 10 ANS
Voilà un projet qui, tout en étant politiquement correct, remplirait tous les objectifs du camp national.
Il ne s’agirait pas de proposer des solutions pour parvenir à ladite indépendance, mais, une fois au pouvoir, de faire de cette indépendance la priorité absolue, de favoriser toutes les recherches en faveur des énergies renouvelables ou de substitution, d’en appeler au génie du peuple français pour trouver des solutions, de soutenir les inventeurs, de constituer un centre de recherche et d’essai où toutes les bonnes volontés seraient les bienvenues. Le but : plus de pétrole, plus de nucléaire, en France, dans 10 ans.
Qui pourrait décemment être contre sans passer immédiatement pour un traître ou un crétin ?
Voyez-vous les avantages d’un tel projet pour le camp national ?
18:11 Écrit par Philippe Landeux dans 6. MON BLOG | Lien permanent | Commentaires (2) | Facebook | | Imprimer |
jeudi, 18 mai 2017
UNE DOCTRINE RÉVOLUTIONNAIRE POUR LE CAMP NATIONAL : LE CIVISME
UNE DOCTRINE RÉVOLUTIONNAIRE
POUR LE CAMP NATIONAL :
LE CIVISME
Sauver la France vaut bien que vous preniez une heure s’il le faut pour lire jusqu’au bout ce qui suit. Vous n’avez rien à perdre, si ce n’est un peu de temps, et tout à gagner, si le salut est bien là.
LE PROBLÈME
La patrie est en danger. Jamais, dans son histoire, le peuple français n’a couru plus grand péril. Il n’est pas menacé d’une défaite militaire ou d’une occupation temporaire ; il est menacé d’une lente dissolution morale et physique. Le mal est déjà fort avancé. Mais il n’est pas trop tard pour réagir. Encore faut-il agir avec efficacité.
Le camp national souffre d’être divisé ; et il est divisé parce qu’il n’y a pas de doctrine globale et puissante capable de rallier tous les patriotes. Jusqu’à présent, chacun y est allé de sa sensibilité, focalisant sur tel ou tel problème, mettant en avant telle ou telle tradition, n’ayant au mieux que des réponses partielles, tenant ainsi un discours bancal incapable de faire l’unanimité. Pire ! Nous allons voir que les patriotes luttent depuis toujours sur le terrain de l’ennemi et avec les armes fournies par lui. Le moyen de l’emporter dans ces conditions ?
Une chose dont les patriotes ou nationalistes doivent avoir conscience et prendre acte sans protester, c’est que, à ce jour, ils n’ont pas la solution, sans quoi ils auraient déjà vaincu et la France ne serait pas à l’agonie. Or, s’ils n’ont pas la solution, c’est qu’elle ne leur est pas venue à l’esprit. La solution, qui ne peut-être que radicale, sera donc une nouveauté pour eux et va les étonner de prime abord. Mais s’il est naturel qu’ils soient surpris, la surprise ne doit pas être en soi un motif de rejet de leur part.
LE MAL
Quels sont donc les maux mortels dont la France est affligée ?
Le premier, le plus frappant pour qui n’est pas aveugle, et le plus urgent, est bien sûr celui de l’immigration massive qui, sans parler des problèmes quotidiens qu’elle draine ou suscite, constitue une invasion, une colonisation de fait, et un génocide à terme. Tous les autres problèmes sont secondaires en regard de celui-là. Le peuple français peut se remettre de toutes les crises morales ; il ne pourra pas se relever de sa disparition physique. Les morts ne reviennent pas.
Le second est celui de l’européisme, étape du mondialisme, qui, pour faire entrer les Français dans un moule supranational, nie leur existence en tant que peuple afin de délégitimer toute résistance, et les dépouille de toute souveraineté afin de les réduire à l’impuissance. L’Union soi-disant européenne encourage bien sûr l’immigration qui favorise son projet.
Le troisième est la mentalité de nos contemporains : universaliste, humaniste, sans-frontiériste, immigrationniste, antiraciste, antifasciste, nihiliste, égalitariste, individualiste, moderniste, conformiste, consuméristes, court-termiste, mentalité de tocards prêts à croire n’importe quoi (pour peu que cela soi politiquement correct), à dire tout et son contraire et à se rebeller au sifflet contre les ennemis désignés par le système qui ne leur veut pas du bien.
Mais tous ces problèmes sont des branches de la même souche : le capitalisme. L’immigration a été mise en œuvre par le patronat ; l’Union économique dite « européenne », par et pour les riches ; et la mentalité en question n’est jamais que le fruit de la propagande qui a servi à couvrir ces deux entreprises. On pourrait développer, soulever d’autres problèmes (délocalisations, ploutocratie, théorie du genre, etc.), on arriverait à la même conclusion. Comment pourrait-il en être autrement ? Le capitalisme est le cadre général qui façonne tout et auquel tout s’adapte par la force des choses.
Rares sont ceux qui arrivent à cette conclusion indéniable, qui n’est pourtant qu’un début de réponse. Le terme « capitalisme » est vague ; il semble ne renvoyer qu’à une certaine organisation économico-financière. L’expression « ultra-libéralisme » est plus précise mais noie tout autant le poisson. On commence à mieux cerner le problème avec « l’argent roi ». Mais que désigne réellement cette expression dans la bouche de ceux qui l’utilisent, alors que tout le monde l’emploie à l’occasion ? En fait, cette expression pointe moins l’argent en lui-même que les riches, les banques, les grandes entreprises, la spéculation, la manie de tout juger à l’aune de la fortune et, de manière générale, tous les vices du système monétaire, autant de choses qui méritent d’être dénoncées, mais qui ne sont elles-mêmes que des conséquences.
Il est temps d’arrêter de tourner autour du pot et d’aller au fond des choses. L’ultra-libéralisme et le capitalisme sont inséparables du système monétaire, dont l’existence repose sur la monnaie. Mais s’il semble audacieux de remonter jusqu’à la monnaie, dans le but évident de la remettre en cause, il ne s’agit, là encore, que d’une étape. Nous n’avons pas recours à la monnaie par hasard, mais parce qu’elle répond à une certaine logique, à une certaine conception de l’échange. Au cœur de cette conception : la croyance que la notion de valeur marchande est nécessaire pour échanger, c’est-à-dire ce que la théorie du Civisme appelle, par commodité, « Largent ». Largent, voilà le plus petit dénominateur commun, la base de tout. Sans la croyance que la notion de valeur marchande est nécessaire pour échanger, pas d’unité de valeur, pas de monnaie comme moyen d’échange, pas de système monétaire, pas de capitalisme et ses conséquences.
Largent, cette croyance, est tellement enracinée en nous, qu’elle nous semble naturelle. Que dis-je ? Nous n’en avons pas même conscience ! Elle véhicule une conception de l’échange, avec des conséquences pour la société, et nous ne l’interrogeons jamais ! Nous ne savons donc ni d’où elle vient ni ce qu’elle induit.
LARGENT
La croyance que la notion de valeur marchande est nécessaire pour échanger vient de la pratique du troc ou, du moins, en véhicule le schéma. Le troc est un échange d’objets entre individus. Des individus échangent les uns contre les autres des objets dont ils sont propriétaires et, ce faisant, les mettent en équivalence, d’où la notion de valeur (marchande). La notion de valeur marchande — qui n’est en réalité que l’expression d’un rapport de force — implique donc un mode d’échange qui place les objets et leur soi-disant valeur au centre des considérations, et dans lequel les individus doivent être propriétaires de ce qu’ils échangent. On notera tout de suite le caractère intrinsèquement matérialiste de ce mode d’échange, caractère qui se trouve décuplé dans le système monétaire et dont il ne faut pas chercher ailleurs l’origine. Par ailleurs, le fait de devoir être propriétaires de ce qu’ils échangent, donc de ce qu’ils produisent, implique que les individus travaillent pour eux-mêmes au lieu que leur activité soit un devoir envers la société. En fait, dans ce mode d’échange, il n’y a pas de citoyens, ayant des devoirs envers la cité et des droits en raison de leur citoyenneté, seulement des individus livrés à eux-mêmes pour se ménager des droits, ce qui est encore plus évident dans le système monétaire où les individus n’ont de droits qu’en proportion de la quantité de monnaie dont ils disposent et qu’ils ont gagnée on ne sait comment. La logique monétaire est totalement étrangère et contraire à la logique sociale. Enfin, la notion de valeur, qui suppose des différences de valeurs, donc de prix, au niveau des produits, donc des productions, donc du travail, donc des salaires, donc des droits des travailleurs, est intrinsèquement porteuse d’inégalités en droits ; et les principes de fonctionnement de la monnaie — vases communicants et attraction — créent eux aussi, mécaniquement, l’inégalité.
Même si tous ces sujets mériteraient des explications approfondies, nul ne peut contester le caractère matérialiste, individualiste et inégalitaire du système monétaire, et le peu que je viens de dire montre que la monnaie, le matérialisme, l’individualisme et l’inégalité sont des conséquences naturelles, logiques, inséparables de Largent. Dès lors, quiconque dénonce des maux qui se rapportent à l’un ou l’autre de ces « principes » ne peut, sans incohérence, s’abstenir de dénoncer Largent lui-même. Or tous les maux s’y rapportent pour peu que l’on y réfléchisse.
Au lieu de prendre des exemples de problèmes et de remonter à leur source pour montrer le rôle premier de Largent, je vais exposer quelques-unes des conséquences de chacun de ces « principes », pris séparément, pour donner un aperçu de leurs ramifications et laisser imaginer ce que peut donner leur combinaison.
Le matérialisme, inhérent à la notion de valeur marchande, puisque elle-même procède du troc qui focalise sur les objets, a pour conséquence de pousser à n’avoir de considération que pour les biens, à n’avoir donc aucun égard pour les hommes ou la nature, d’insuffler le désir de posséder plus que de raison, d’amasser, de sacraliser la propriété, de favoriser l’Avoir sur l’Être, c’est-à-dire le paraître, d’encourager à la superficialité, etc.
L’individualisme, inhérent à la notion de valeur marchande, puisque elle-même procède du troc qui consiste en un échange entre individus, a pour conséquence d’étouffer la nature sociable des hommes, de leur faire oublier qu’ils ne seraient rien sans la « société », sans leurs « concitoyens », de les pousser à ne voir et à ne servir avant tout et surtout que leurs intérêts particuliers, à faire de l’individu la mesure de tout à leurs yeux, à se désintéresser du collectif comme quelque chose d’étranger ou à vouloir détruire la nation comme une chose artificielle ou une entrave à leur jouissance du monde, c’est-à-dire à basculer soit dans un égoïsme étroit, soit dans mondialisme surréaliste.
L’inégalité, inhérente à la notion de valeur marchande, puisqu’il n’y a de valeurs que dans la différence de valeurs, lesquelles sont, en dernière analyse, les droits des gens, a pour conséquence d’instaurer, de manière structurelle, donc incorrigible, la misère, l’exploitation, l’oppression, l’injustice pour le plus grand nombre, et une oligarchie au profit d’une minorité, sachant par ailleurs qu’il est dans la nature des inégalités procédant d’un système intrinsèquement inégalitaire de s’accroître, et non de tendre vers l’Égalité et de se résorber d’elles-mêmes.
La monnaie, qui est en premier lieu un étalon de la valeur, qui passe de main en main à l’instar des objets échangés sous le troc, et qui incarne les droits dont chacun a besoin, a pour conséquence d’obliger les hommes (comme les personnes morales) à en avoir, à s’en procurer en permanence par tous les moyens, et toujours aux dépens d’autrui, à faire des choix dans leurs dépenses, à sacrifier tel poste plutôt que tel autre, à courir après le profit, à essayer d’en tirer de tout et n’importe quoi, à se vendre eux-mêmes, etc.
Et ce ne sont là que quelques-unes des conséquences de Largent ! Cette esquisse à grands traits permet néanmoins de reconnaître le monde qui est le nôtre, et d’admettre que Largent en est bien le ressort. Le ressort à briser.
LA CLÉ
Il n’y a qu’une façon d’anéantir Largent et d’échapper ainsi à toutes ses conséquences (système monétaire, capitalisme, européisme, immigrationnisme, etc.), c’est d’adopter et de mettre en œuvre une conception de l’échange qui ne rappelle en rien celle du troc, qui n’ait pas pour but d’établir de soi-disant valeurs pour les objets, mais de garantir les droits du citoyen, une conception qui, au lieu d’insuffler l’individualisme (et l’universalisme), inspire le civisme, le patriotisme, le sentiment d’appartenir à la communauté que l’on forme avec ses concitoyens, et la volonté de la défendre, et qui, au lieu d’imposer l’inégalité, assure l’Égalité. Et le moyen est simple.
Au lieu que le droit d’accéder au marché, par lequel passe la plupart des droits, soit incarné et conféré par la monnaie, il suffit qu’il soit reconnu comme un droit du citoyen et, de ce fait, conféré par la citoyenneté. Comme la citoyenneté ne se mesure pas (elle est ou n’est pas), le droit d’accéder au marché serait de même indéfini, autrement dit illimité (en théorie) et de facto égal pour tous les citoyens, et non plus différent d’un individu à un autre et d’un moment à l’autre. Entendons bien ! Il s’agirait de reconnaître à tous les citoyens le droit d’accéder librement au marché (dans la mesure du possible et des lois) et non d’attribuer à chacun une part égale du produit commun, mesure aussi arbitraire qu’impraticable et liberticide. L’égalité matérielle n’est ni possible ni souhaitable. La désirer est un réflexe capitaliste conditionné par le matérialisme inhérent à Largent. Des citoyens doivent être égaux en droits mais ne sont pas identiques en tant qu’individus ; ils n’ont ni les mêmes besoins ni les mêmes envies. (Et qui les définirait ? comment ?) L’Égalité n’est pas l’uniformité. Cela dit, le droit pour tous d’accéder librement au marché provoquerait bien, en théorie, de par la loi des grands nombres, un partage « égal » du produit commun, même si, en pratique, il réduirait seulement — mais autant que possible — les différences matérielles, proscrivant, au passage, les grandes iniquités et permettant d’atteindre naturellement les équilibres optimums.
Il va sans dire qu’attacher à la citoyenneté un droit d’accéder librement au marché implique une nouvelle conception de la citoyenneté elle-même. Si ce mot est aujourd’hui vide de sens, dans un système où elle confèrerait un tel droit, elle supposerait nécessairement un devoir qui le justifierait et équilibrerait les choses. Or quel devoir peut justifier d’accéder librement au marché sinon d’avoir contribué soi-même à approvisionner ce marché ? Ceci étant, les produits et services disponibles sur le marché ne sont qu’une partie, certes importante, des bienfaits de la cité. Il ne faut pas faire l’erreur, à laquelle pousse Largent, de ne voir que l’aspect matériel et économique des choses, d’être obnubilé par la production et, son pendant, le travail. Une conception plus large s’impose pour ne pas exclure de la cité tout qui en fait évidemment et légitimement partie. Pour faire court : la citoyenneté consiste à remplir tous les devoirs du citoyen, dont celui de participer à la vie de la cité, selon ce que celle-ci considère comme une participation, et à jouir en retour de tous les bienfaits de la cité, à l’instar de ses concitoyens, notamment en ayant le droit d’accéder librement au marché. Sans ce droit-là pour tous les citoyens, il n’y a aucune égalité.
Ainsi, la citoyenneté, les droits du citoyen, se mérite en s’acquittant des devoirs du citoyen. Ce n’est pas ici le lieu d’entrer dans une infinité de question pratiques. Observons simplement que les enfants, qui sont à la charge de leur parents et, au-delà, de la cité, ne seraient pas encore citoyens, à l’inverse des retraités qui, ayant acquis le droit de cesser de travailler ou de participer, le seraient toujours et sans rien perdre de leurs droits. Remarquons également que si, dans ce système, il n’y a pas de monnaie, pas de prix, rien ne serait pour autant gratuit. Les citoyens ne payeraient pas en détail ce qu’ils retirent du marché mais s’acquitteraient globalement, par leurs devoirs, du droit d’y accéder librement, formule que nous qualifierions aujourd’hui de « forfait ». Il ne s’agirait plus d’un échange d’objets entre individus, mais d’un échange de devoirs et de droits entre le citoyen et la cité.
Cette conception révolutionnaire de l’échange n’est concevable, précisément, qu’à l’époque actuelle, après que la révolution industrielle ait rendu possible la production de masse, et envisageable un droit d’accéder librement au marché, et que la révolution informatique ait rendu possible d’attester sans effort et avec certitude la citoyenneté, à laquelle ledit droit doit logiquement (d’un point de vue social) être attaché. En clair, cette conception avait besoin, pour voir le jour, de la technologie des cartes à puce qui permettra à la cité de doter ses citoyens d’un moyen sûr d’attester leur citoyenneté auprès des commerçants et, par suite, d’accéder librement au marché. Encore une fois, il n’est pas possible d’entrer ici dans toutes les questions pratiques, traitées en détail dans la théorie du Civisme. Mais s’il fallait encore prouver que cette théorie est bien la solution d’avenir, que l’on se demande vers quoi tend un système monétaire au bord de l’implosion, dans lequel la monnaie ne se manipule plus que par des cartes qui lui ôtent toute réalité, sinon vers un système où la monnaie n’existera plus, même de manière virtuelle, parce que les cartes serviront à vérifier une autre information, une information non mesurable, la citoyenneté en l’occurrence. Les cartes civiques et la logique sociale qui va avec seront, sans conteste, l’évolution révolutionnaire des cartes de crédit et de la logique monétaire.
Voilà le projet, dans ses grandes lignes. C’est le projet clair, cohérent, radical et inattaquable que doivent porter et par lequel doivent s’unir tous les défenseurs de la nation. C’est du moins le projet qu’ils doivent ambitionner pour le futur et prendre comme boussole dans le présent. Il implique, évidemment, de réviser voire d’abandonner certains discours, qui, on le devine, sont influencés par Largent ou biaisés par lui. Et le premier discours à rafraîchir est celui qui concerne l’Égalité, Principe fondamental de l’ordre social, sur laquelle l’opinion de ceux qui la prônent est aussi absurde que celle de ceux qui la rejettent. Ce long préambule avait pour objet de mettre tout le monde d’accord en montrant ce qu’elle doit être, et comment il est possible qu’elle soit. Je vais maintenant indiquer, comme je l’ai fait pour Largent, les notions qui en découlent.
L’ÉGALITÉ
Il n’y a qu’une Égalité, l’égalité sociale, l’égalité en devoirs et en droits entre citoyens. Il s’ensuit que l’Égalité bien comprise, outre qu’elle suppose un système non-monétaire (le système monétaire étant inégalitaire par nature), va de pair avec les notions de :
> Cité, peuple, nation, patrie
> Patriotisme
> Souveraineté du peuple (démocratie)
> Souveraineté nationale (indépendance)
> Respect des peuples, non-ingérence
Reprenons point par point.
Cité, peuple, nation, patrie. S’il n’y a d’Égalité qu’entre citoyens, elle ne peut exister que dans le cadre d’une cité, d’une société, formée par lesdits citoyens. On peut dire la même chose et des devoirs, qui n’existent que dans la réciprocité et entre individus étant de facto concitoyens, et des droits, qui n’existent que s’ils sont générés par des devoirs. Il n’y a pas plus de devoirs hors Égalité que de droits hors société. Or qu’est-ce que la société, la cité, sinon un peuple, une nation, une patrie ?
Patriotisme. Si l’Égalité implique l’idée de patrie, elle inspire fatalement le patriotisme, c’est-à-dire l’amour des siens, la volonté de les défendre. Ce sentiment ne peut jamais être aussi fort que parmi des égaux, remplissant les mêmes devoirs les uns envers les autres et jouissant des mêmes droits. Il n’en a d’ailleurs pas encore été question, mais le tout premier devoir du citoyen est de défendre la cité et ses concitoyens, car c’est ainsi que la société procure à ses membres la sécurité qui est sa raison d’être. L’Égalité est donc intrinsèquement patriotique. A l’inverse, le patriotisme inégalitaire est un non-sens. On n’aime pas les siens quand on les voue, par calcul ou par bêtise, à l’exploitation et à l’oppression qui sont le lot de la majorité dans l’inégalité.
Souveraineté du peuple (démocratie). Si l’inégalité induit une forme d’oligarchie, l’Égalité, elle, amène et garantit la démocratie par la force des choses. Des citoyens égaux ne connaissent pas de maîtres et ne reçoivent de lois que d’eux-mêmes. C’est cela la souveraineté du peuple. Non qu’il n’y ait pas de chefs, d’intermédiaires ou de hiérarchie dans les fonctions, mais rien de ce qui engage le peuple ne peut être fait sans qu’il ait d’une manière ou d’une autre le dernier mot.
Souveraineté nationale (indépendance). L’Égalité concerne des citoyens qui, par l’acquittement des devoirs et la jouissance des droits du citoyen — sans même parler du territoire, de l’histoire, des traditions et des lois —, ont conscience de former une cité, distincte du reste de l’humanité, malgré les relations qu’ils ont nécessairement avec des étrangers, dans ou hors de la cité. Les citoyens se conçoivent comme une nation indépendante et souveraine, dont les intérêts ne peuvent et ne doivent être gérés que par eux.
Respect des peuples, non-ingérence. Les raisons qui portent les citoyens à dénier à toute puissance étrangère le droit de s’ingérer dans leurs affaires, donc à proclamer le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et à être seuls maîtres chez eux, les inclinent à reconnaître ces mêmes droits aux autres peuples. Le principe de non-ingérence découle de l’Égalité et n’est jamais violé que par calcul, sous couvert de sophismes.
Toutes ces notions puisent leur source dans l’Égalité. Ceux qui les adoptent sans aller jusqu’à prôner l’Égalité elle-même le font donc par instinct. Mais quel instinct ? Celui d’hommes. Or les hommes sont de nature sociable ; ils savent, au plus profond d’eux-mêmes, que l’Égalité est le principe de l’ordre social. Mais le système monétaire, dans lequel la véritable Égalité est impossible, leur commande de la renier ou de la travestir. En réalité, tous continuent d’y aspirer, mais sans plus savoir ni en quoi elle consiste vraiment, ni a fortiori comment l’atteindre. Chacun espère malgré tout l’approcher en empruntant des chemins différents qui, tous, au final, ramènent à Largent.
LA CITÉ
Ce qui a été dit jusqu’à présent éclaire déjà beaucoup. Mais les hommes sont comme Saint Thomas ; il leur faut toucher du doigt. J’ai développé les Principes dans les grandes lignes et renvoyé, pour les questions pratiques, à la lecture de la théorie du Civisme. Mais peu iront lire et resteraient incrédules si je n’apportais certaines informations importantes, concernant le fonctionnement de la cité, que je n’ai pu glisser dans mon exposé.
L’Égalité n’est pas l’ennemie de la Liberté ; elle en est la mère. On a vu que, d’après le Principe d’Égalité, tous les citoyens doivent jouir du droit d’accéder librement au marché, cette liberté n’étant bornée que par la nature des choses et éventuellement par la loi (formée de manière démocratique). Combien, dans le système monétaire, ont une telle liberté ? Comment la liberté pourrait-elle être plus étendue ? Les citoyens seraient libres de consommer autant qu’il est possible de l’être. La conséquence directe serait une situation permanente de plein emploi, puisque la Demande, en théorie illimitée, serait fatalement supérieure à l’Offre, réelle et limitée. On pourrait objecter qu’une partie importante des produits provient de l’étranger. Cela est vrai aujourd’hui. Mais outre que toutes les productions ne sont pas délocalisables, les entreprises auraient intérêt, si ce n’est le devoir, de relocaliser, puisque le coût du travail serait nul dans la cité, financièrement parlant — ce qui, au passage, rendrait également inutile de recourir à une main d’œuvre immigrée (la question des salaires ne se posant plus) et absurde, ou ouvertement criminel, d’encourager l’immigration. Certains se demanderont encore pourquoi les citoyens, libres d’accéder au marché, travailleraient. C’est oublier que la citoyenneté s’obtiendrait et se conserverait en participant à la vie de la cité. Les citoyens auraient le droit de consommer parce qu’ils seraient aussi les producteurs. Et, comme on le voit, dans la cité, ce n’est pas le travail qui manquerait. Mais pourquoi feraient-ils bien leur travail ? Parce qu’il ne suffirait pas, aux yeux de la cité, de faire quelque chose, il faudait faire « ce qu’elle considère comme une participation », c’est-à-dire ce qu’elle exige ; c’est elle qui fixerait les règles. Autrement dit, les entreprises, individuelles ou collectives, auraient des résultats à atteindre, en terme de clients, pour que leur activité soit reconnue et la citoyenneté de leurs employés validée (je schématise), et s’exposeraient à des sanctions (sanctions collectives, touchant tous les employés) pouvant aller jusqu’à la liquidation si elles ne les atteignent pas. Première raison pour elles de faire ce qu’elles sont censées faire. Par ailleurs, les entreprises serient en concurrence, face à des citoyens libres de consommer et désirant généralement le meilleur. Elles devraient donc offrir en permanence de bons produits, ce qui signifierait produire correctement, avoir un personnel consciencieux, innover sans cesse, ce qui, dans tous les cas, leur interdirait de se reposer sur leurs lauriers. Quoiqu’elles remplissent une mission publique (approvisionner le marché de la cité), la gestion de leur activité et de leur personnel leur appartiendrait, condition pour qu’elles soient responsables devant la cité. Elles seraient libres d’embaucher comme de licencier. La création d’entreprise elle-même serait libre, dans le cadre des lois, bien sûr. Bref… Le Civisme n’est pas du tout du communisme, comme l’invocation de l’Égalité pourrait le faire croire de prime abord ; ce n’est pas du capitalisme d’état, mais du libéralisme sans capitalisme.
Une question qui revient souvent et semble soulever un problème insurmontable est celle des échanges entre une société qui aurait renoncé à la monnaie et les autres pays restés monétaires. La réponse est simple dans son principe. La cité produirait ; la cité exporterait et vendrait ses produits ; la cité aurait un budget avec lequel elle règlerait ses importations. Que les entreprises de la cité exportent de leur propre volonté (pour avoir des clients et non pour faire de l’argent dont elles n’ont pas besoin) ou à sa demande (sans inconvénients pour elles et leurs employés), l’essentiel des bénéfices entrerait dans le trésor national. (La cité aurait aussi la possibilité de faire du troc, matières premières contre produits finis.) La cité serait d’ailleurs redoutable sur le plan international. Une économie solide et dynamique, une production de la meilleure qualité qui soit, des produits quasi gratuits si l’on veut : personne ne pourrait rivaliser, à moins d’adopter son modèle. La cité aurait les moyens d’importer. Il faudrait bien sûr mettre en place des structures et des procédures pour qu’entreprises et particuliers puissent commander des produits étrangers, soit directement, soit en passant par des centrales, mais, si ces détails sont complexes, ils ne présentent aucune impossibilité. Il en est de même pour la circulation des personnes, que ce soit des citoyens à l’étranger ou des étrangers dans la cité, qui serait financée d’une manière ou d’une autre par leurs États respectifs suivant des conventions.
Enfin, un point essentiel. Il n’a été question, jusqu’ici, que de « citoyens ». Mais il faut savoir que le Civisme distingue la citoyenneté de la nationalité. La citoyenneté serait le statut général des individus qui feraient partie de la cité au sens large, qui rempliraient des devoirs sur le plan économique ou social, et jouiraient des droits économiques et sociaux. La nationalité serait un statut supplémentaire et facultatif, qui exigerait de satisfaire des critères (notamment identitaires), qui s’obtiendrait en remplissant volontairement des devoirs particuliers, notamment un service national (contribuant à la défense de la nation), et qui confèrerait les droits politiques. Les exigences pour obtenir et conserver la nationalité auraient pour but d’assurer autant que possible la cité de l’attachement et de la fidélité des citoyens à son égard, car les droits politiques seraient bien plus étendus qu’aujourd’hui (démocratie oblige !) et devraient être l’apanage des citoyens ayant à cœur de défendre son existence et ses intérêts. Les citoyens nationaux formeraient le corps politique, la cité au sens strict, la nation. Les droits particuliers dont ils jouiraient pour avoir volontairement consenti à des devoirs particuliers n’entreraient pas dans la balance de l’Égalité. Les citoyens ordinaires ne pourraient prétendre aux droits qui récompensent les devoirs qu’ils auraient déclinés en connaissance de cause ; ils pourraient d’autant moins prétendre au droit de cité que le fait de ne pas avoir la nationalité témoignerait de leur indifférence ou de leur hostilité à égard l’égard de la cité : juste retour des choses. Ainsi, la nationalité, pas plus que la citoyenneté, ne s’hériteraient ; elle se mériteraient.
S’il en est autrement aujourd’hui, si les deux notions sont confondues, c’est parce que, dans un système monétaire, elles sont insipides séparément. La citoyenneté seule ne peut pas exister, sauf à n’avoir ouvertement aucun sens, puisque les droits qu’elle devrait conférer ne sont pas garantis par la société mais passent par la monnaie qu’il appartient à chacun de gagner. La nationalité, elle, confère bien les droits politiques, mais des droits si dérisoires qu’il n’a jamais paru utile de les assujettir à des devoirs, de sorte qu’elle peut être accordée sur de vagues critères d’appartenance communautaire signifiant à peine plus que la présence sur le territoire. Ainsi, le mot creux de « citoyenneté » a pu aisément être confondu avec celui de « nationalité » qui ne veut rien dire ou presque. Toutefois le peu de droits politiques que cette « nationalité-citoyenneté » confère justifie de ne pas accorder ce statut bâtard aux immigrés (du moins tant qu’ils ne sont pas naturalisés), auxquels est donc également refusé le statut de citoyen qu’ils méritent peut-être (et qu’ils mériteraient dans la cité qui maîtriserait l’immigration et ne regarderait comme immigrés que des travailleurs.) Les suppôts du capital cherchent à rectifier cette incohérence, non pas en redonnant du sens à la nationalité, mais en essayant d’étendre le droit de cité à tout le monde au nom des « droits de l’homme ». Et que peuvent leur opposer les patriotes s’ils pataugent eux-mêmes dans le système monétaire qui les condamne à composer avec la monnaie et à dénaturer les Principes ?
LES ATOUTS
Largent (qui est une croyance) nous plonge dans un marasme intellectuel et nous prive autant des mots pour le mesurer que des concepts pour nous en arracher, puisque les uns et les autres intègrent ses contraintes. Ce sont tous ces verrous que le Civisme fait sauter. En envisageant un système non-monétaire réaliste, axé autour de l’Égalité bien comprise, totalement affranchi de Largent, il découvre un « monde » nouveau et de nouveaux concepts que les anciens mots ne peuvent exprimer à moins d’être dépoussiérés et redéfinis. Ce faisant, il révèle, par contraste, toutes les absurdités du monde actuel, toutes les faiblesses conceptuelles, toutes les soumissions à Largent. Il rencontre donc deux difficultés : la première qui est de se faire comprendre, la deuxième qui est d’être compris. Une fois levée la première difficulté, qui consiste à faire comprendre le sens des mots dans le cadre de la cité, ce qui exige d’exposer longuement le système pour en montrer la cohérence, reste la seconde qui réside dans l’attachement des hommes à leurs préjugés, dans leur incapacité à admettre leur ignorance ou leurs erreurs, et dans leur peur de l’inconnu. Le Civisme, qui brise le plus grand tabou, qui demande la plus grande audace, ne se heurte pas à la raison mais à des réactions irrationnelles. Qui pestait contre Largent roi vole à son secours quand il est question de le renverser ! Qui prônait l’Égalité lui tourne le dos quand il s’agit de l’instaurer ! O vanas hominum mentes, o pectora cæca !
Je connais les différentes réactions que suscite le Civisme chez ceux qui le découvrent. Qu’ils soient intéressés, narquois ou sourds, de nombreuses explications sont nécessaires dans tous les cas, que ce soit pour devancer les questions ou y répondre. Il est impossible de se contenter de trois mots avec des gens qui n’en connaissent pas le sens et ne peuvent pas le deviner, même s’ils le croient. Et c’est l’exercice auquel je viens de me livrer pour pouvoir en arriver enfin à mon véritable propos.
Je propose à tous ceux qui se disent patriotes, nationalistes, souverainistes, populistes, identitaires, etc., à tous ceux qui composent le camp national, face aux capitalo-mondialistes, d’adopter le Civisme comme projet et grille de lecture, et ainsi de s’unir autour de cette théorie révolutionnaire, synthèse de toutes les aspirations légitimes, ayant le sens des priorités, le sens du devoir et, tout simplement, du bon sens. J’en ai posé les principes ; je vais maintenant en montrer les avantages et l’absolue nécessité pour le camp national.
Unité. Le Civisme ne procède pas d’une culture, d’une tradition, d’une sensibilité, mais d’un Principe, l’Égalité, dont toutes les conséquences sont tirées avec une logique implacable. Il ne varie pas au gré du temps et des humeurs ; il est un absolu invariable, attaquable mais invincible ; c’est un roc. Comme on a pu le constater, et comme la lecture de la théorie le confirmerait, il va plus loin que tous les courants politiques, dans les domaines que ceux-ci considèrent comme leurs monopoles respectifs et dont ils se croient les champions ; il est plus radical qu’eux tous réunis, que ce soit sur le terrain de l’anticapitalisme, du libéralisme, du patriotisme, de la démocratie, de la souveraineté, de l’identité, de la subsidiarité, de l’immigration, de la justice sociale, de l’innovation technologique, du pouvoir d’achat, des conditions de travail, du respect des femmes, de la paix des familles, de la préservation du patrimoine, de la défense de l’environnement, de l’épanouissement personnelle, de la fraternité entre les peuples, etc. C’est sans fin. La raison est simple : il est affranchi Largent ; il vogue vers des horizons nouveaux quand les autres n’ont pas rompu les amarres et sont coincés au port. Tout ce qu’il propose serait en effet insensé, utopique et démagogique dans le cadre du système monétaire, mais devient naturel, souhaitable et faisable dans un système non-monétaire. A l’inverse, aussi mesurées que soient les ambitions des autres, elles n’en sont pas moins réduites à des vœux pieux par Largent. A quoi tous leurs efforts, tous leurs beaux discours nous ont-ils conduit ? Au triomphe de Largent. Précisément. Ha ! ils dénoncent « l’argent roi » ! Mais quand envisageront-ils de l’exécuter ? Quand comprendront-ils que Largent existe grâce à nous et que son existence atteste notre soumission ; que Largent ne peut exister sans régner ; qu’il doit donc régner ou mourir ; que nous devons donc le tuer de nos propres mains ? Ils n’échouent pas depuis toujours en raison d’erreurs de stratégie, de communication ou autre peccadille ; ils ont toujours échoué parce qu’ils n’ont jamais fait la guerre au véritable ennemi. Pire ! En ne s’attaquant pas à Largent lui-même, ils en sont les victimes mais aussi les complices. Cela peut continuer encore longtemps ou s’arrêter aujourd’hui, là, maintenant. Plus personne n’a l’excuse d’ignorer ce qu’est Largent, pourquoi il règne et comment l’abattre. Plus personne n’a même l’excuse d’être impuissant et d’entretenir des divisions stériles, suicidaires et criminelles. Le Civisme permet à tous de réaliser leur vœux le plus cher ; il peut unir tous les patriotes, tous les Français, pour peu que ceux-ci mettent de côté leur ego, qu’ils aient plus à cœur de sauver la France que ménager leurs préjugés et protéger leurs « boutiques » — jusqu’à ce que tout soit perdu et eux avec.
« Celui dont les troupes sont unies autour d’un objectif commun sera victorieux. » (Sun Tzu, L’art de la guerre, III. 27)
Cohérence et clarté. Le Civisme a l’avantage de reposer sur des Principes justes et irréfragables, de fixer une ligne claire, de proposer des solutions inédites, mais simples et réalisables, d’ouvrir des perspectives incroyables, de fournir une grille de lecture du passé et du présent pertinente, bref de « tenir la route » de bout en bout. C’est un vrai projet de société, appuyé sur une philosophie, pas une accumulation de mesures. C’est une doctrine implacable, une idéologie de combat, la seule redoutable pour le capitalisme, la seule capable de le vaincre, la seule qui le défie. En ralliant les patriotes sans concession, en formant le camp de l’Égalité et de la nation, elle forme du même coup, et malgré lui, celui de Largent et du mondialisme qui, jusque-là, s’enveloppait de brouillard. Ainsi, qui s’y oppose, pour quelque raison que ce soit, se déclare lui-même et est aussitôt identifié, à juste tire et malgré ses protestations, comme un défenseur du système monétaire et de Largent, donc comme un partisan ou un agent du capitalisme et du mondialisme.
« Dans les temps anciens les guerriers habiles commençaient par se rendre invincibles, puis ils attendaient que l’ennemi soit vulnérable. » (Sun Tzu, L’art de la guerre, IV. 1)
Mieux encore ! Égalité et Liberté sont le logiciel français. Le Civisme est en adéquation avec la France ; il répond à ses aspirations profondes. Il est la théorie, la doctrine française par excellence, l’idéologie qui seule pourra ranimer le peuple français et lui insuffler un enthousiasme irrésistible, grâce auquel il accomplira une fois de plus « l’impossible » et redeviendra le plus grand peuple du monde. Oui, Égalité et Liberté sont aujourd’hui tronquées et prônées séparément par des charlatans à coup de sophismes ! Oui, l’une et l’autre ont des défenseurs pathétiques, réduits à se mentir à eux-mêmes pour combattre les mensonges de ceux d’en face. Mais tous ces bas-de-plafond ont le même plafond : Largent. Tous piétinent dans les limites du système monétaire et produisent une bouillie qui laisse chacun sur sa faim et ne donnera jamais à personne l’énergie de vaincre l’ennemi devant lequel ils ont capitulé sans même en avoir conscience. Ils perdent parce qu’ils s’interdisent la victoire.
« Celui qui n’a pas clairement conscience de ses objectifs ne sait pas riposter à l’ennemi. » (Sun Tzu, L’art de la guerre, III, 23)
Le grand inconvénient du Civisme est d’être révolutionnaire. Il révolutionne tous les concepts, renverse toutes les idées reçues, froisse tous les amours-propres, gêne tous les intérêts mesquins. Il devrait tout emporter par la raison, mais il s’adresse à des gens hypnotisés par Largent. Il n’a aucune base dans l’opinion et prend tout le monde à contre-poil. Un jour ses slogans feront mouche ; en attendant, il exige des trésors de pédagogie. Il peut toucher des individus, des lecteurs, mais pas séduire d’emblée les masses, ne serait-ce que parce qu’elles en ignorent l’existence. Les médias du système n’en feront d’ailleurs jamais la promotion. Il faut donc que ceux qui le découvrent le propagent et provoquent un effet boule de neige. Plus il sera répandu, moins il sera marginal, moins il paraîtra chimérique, moins y adhérer exigera de courage intellectuel, plus il se répandra. Mais ce processus est lent. L’idéal serait qu’une impulsion vienne d’en haut et confère au Civisme une autorité morale. Il faut espérer que les leaders, les penseurs, les figures, les porte-voix du camp national, las d’échouer, et vue l’urgence de la situation, lui prêtent l’oreille, en reconnaissent les vertus et l’adoptent personnellement, non pour prôner ouvertement et du jour au lendemain la sortie du système monétaire et l’instauration de la cité, mais pour qu’il y ait entre eux une unité de pensée, que tous visent au même but pour la France et que, par suite, tous aperçoivent et suivent le chemin qui y conduit. Quelles que soient les raisons des uns et des autres d’y adhérer, ils disposeraient de la même boussole, tiendraient le même cap, produiraient les mêmes analyses, parviendraient aux mêmes conclusion et prescriraient les mêmes solutions pour franchir les étapes. Ils pousseraient tous dans le même sens. Leur division n’y résisterait pas.
« La confusion dans l’armée aboutit à la victoire de l’adversaire. » (Sun Tzu, L’art de la guerre, III. 23)
Vérité. Le Civisme défend la nation, la cité, parce que sans elle point de droits, point de démocratie, point d’indépendance. C’est une théorie éminemment patriotique. Selon les pseudo critères politiques actuels, elle est donc d’« extrême droite ». Si on ajoute qu’elle est éminemment sociale et nationale, n’en doutons plus, c’est une doctrine « nazie » ! Mais c’est oublier que l’indépendance, la démocratie et la nation sont des corollaires de la cité, de la citoyenneté et de l’Égalité ; que l’Égalité, dont le Civisme n’est que l’extension, est un principe éminemment « de gauche » ; que le terme même de « gauche » vient de la Révolution française qui s’est faite au cri de « Vive la Nation ! » ; que les pères fondateurs de la gauche d’alors étaient les champions de la Liberté, de l’Égalité et de la patrie (« Peuple, souviens-toi que si, dans la République, la justice ne règne pas avec un empire absolu, et si ce mot ne signifie pas l’amour de l’égalité et de la patrie, la liberté n’est qu’un vain nom. » Robespierre, Convention, 8 thermidor an II, deux jours avant son exécution.) ; qu’ils ont échoué, en dépit de leurs bonnes intentions, parce que leurs concepts avaient les limites techniques de leur temps, parce qu’ils ne pouvaient ni remettre en cause le système monétaire ni empêcher l’avènement de Largent. L’Égalité et le patriotisme sont historiquement et intrinsèquement de « gauche », et le Civisme, qui défend les Principes de l’ordre social à l’état pur, est la « gauche absolue ». Il s’ensuit que tout ce qui s’en éloigne est plus ou moins de « droite » et que ce qui n’a rien de commun avec lui est « d’extrême droite ». Ainsi, quand aucun parti ne remet en cause le système monétaire et ne cherche à instaurer l’Égalité bien comprise, aucun n’est absolument de « gauche ». Le parti le plus à « gauche » est alors celui qui, par défaut, lutte pour moins d’inégalités financières et défend d’instinct les notions consubstantielles à l’Égalité : nation, patriotisme, démocratie, indépendance, non-ingérence, toutes choses présentées par la « gauche actuelle » comme « d’extrême droite ». Le Civisme permet ainsi de saisir la vraie nature des partis au-delà des étiquettes qu’ils se donnent ou qu’ils reçoivent et d’appréhender différemment l’échiquier politique. Il invite même patriotes et nationalistes à se revendiquer de « gauche » et à ne plus se laisser diffamer par la « gaucherie » qui, pour renverser les rôles et se donner le beau, leur colle l’étiquette infamante « d’extrême droite ». Les patriotes ne sont pas plus « d’extrême droite » que les traîtres à leur peuple ne peuvent être de « gauche ». Selon le Civisme, les marqueurs de « droite » sont : le capitalisme décomplexé, le sans-fontiérisme (universalisme, mondialisme), l’individualisme, l’anti-populisme, l’européisme, l’ingérence. Ne peuvent donc se réclamer de « gauche » les « anticapitalistes sans-fontiéristes » qui, non contents de ne pas même dénoncer Largent, marchent main dans la main avec les capitalo-mondialistes ; les « droits de l’hommistes » qui ne donnent un visage humain au capitalisme que pour mieux détruire la cité et l’état de droit ; les « antiracistes » qui couvrent de moraline l’immigration massive voulue par le grand capital pour briser les luttes sociales, fausser le jeu démocratique et détruire la nation ; les « égalitaristes » qui font une fausse application de l’Égalité par vraie soumission au capitalisme ; etc. Le Civisme tantôt défend mieux qu’eux les principes dont ils se réclament pour mieux les souiller, tantôt dévoile leurs impostures. Il appelle donc à ne plus s’en laisser conter, à ne plus laisser aux traîtres à la nation et à son histoire l’initiative du vocabulaire et des étiquettes, à ne plus les laisser déployer leur stratégie, à ne plus être dans une posture défensive mais, au contraire, à passer à l’offensive, en commençant par se réapproprier les mots et à dire à chacun, amis et ennemis, ses quatre vérités.
« Ce qui est de la plus haute importance dans la guerre, c’est de s’attaquer à la stratégie de l’ennemi. » (Sun Tzu, L’art de la guerre, III. 4)
Pour être plus précis sur les sujets pressants, le Civisme est anti-Europe et anti-immigration au nom de l’Égalité bien comprise, qui contient la notion de nation, et de la Révolution, qui se fera pour et par la nation. La prochaine révolution française, pour l’Égalité, contre Largent, ne se fera pas sans France et sans Français. Le Civisme ajoute donc aux motifs ordinaires et légitimes d’hostilité envers l’Europe et l’immigration, des raisons supérieures et imposantes, qui ne sont plus exposées aux accusations grotesques et le plus souvent infondées de « racisme » et de « xénophobie », ou qu’il peut du moins aisément balayer en montrant la bêtise et la mauvaise foi des accusateurs. Ces accusations sont nécessairement proférées soit par des capitalistes convaincus soit par des anticapitalistes de pacotille qui se pensent néanmoins comme des anticapistalistes. Or il est aisé de montrer que les capitalistes, qui sont les satellites de Largent et les ennemis de l’Égalité, n’ont que faire des peuples, tant des autres que du leur, qu’ils ne voient le monde et les hommes que comme des ressources pour leur profit personnel, et n’invoquent la xénophobie et le racisme contre les révolutionnaires que pour faire oublier leur mépris de l’humanité et achever la destruction de la France afin d’empêcher la révolution. Quant aux anticapitalistes, qui se targuent d’être « antifascistes » et « antiracistes », ils sont d’évidence moins anticapitalistes que les partisans du Civisme (appelés « Patriciens »), mais tout aussi immigrationnistes que les capitalistes ; ils se donnent des airs de révolutionnaires alors qu’ils ne maîtrisent visiblement pas le B. A.-Ba de la révolution. Ce sont des malades qui prétendent enseigner la médecine et qui, ce faisant, rejettent le remède pour perpétuer bon gré mal gré le capitalisme. Le Civisme fait tomber sans effort le masque des uns et des autres.
« Notre invincibilité dépend de nous, la vulnérabilité de l’ennemi, de lui. » (Sun Tzu, L’art de la guerre, IV. 2)
Initiative. Enfin, et c’est le point le plus essentiel, le Civisme suit d’un pas ferme sa propre route. Il a un but clair, l’Égalité, parce qu’il a clairement identifié l’ennemi, Largent. Il ne se laisse plus piéger. Il ne lutte pas sur le terrain du capitalisme, mais sur le sien, celui des Principes. Au lieu de se débattre dans les contradictions imposées par le système monétaire et inégalitaire à ceux qui veulent le bien du peuple (l’Égalité en dernière analyse), c’est lui qui mettrait les capitalistes face aux leurs. Quand il soutient la logique sociale, eux soutiendraient la logique monétaire. Quand il invoque les Principes pour défendre le peuple, eux invoqueraient les impératifs financiers pour rester dans le système dont le Civisme indique comment il est possible et pourquoi il est nécessaire de sortir. Quand il dénonce l’immigration comme génocidaire et contre-révolutionnaire, eux la justifieraient au nom des « droits de l’homme » qui sont notoirement le masque du capitalisme et des traîtres congénitaux. Quand il appelle tous les citoyens à l’Égalité et à la Liberté, eux voudraient le maintien des inégalités, au nom de Largent, et voueraient ouvertement la plupart de leurs « concitoyens » au mépris, à l’exploitation et à la misère. Quand il résout tous les problèmes, eux proposeraient de s’y résigner pour ménager une poignée de profiteurs. En fin de compte, il sauterait aux yeux de tous que les capitalistes tournent en rond, qu’ils défendent Largent au nom de Largent et de quelques intérêts privés, et que leur position est indéfendable moralement. Poussés ainsi dans leurs retranchements, ils ne pourraient plus parer les coups avec leurs sophismes éventés ; ils en seraient réduits à recourir au cynisme qui ne fait pas recette auprès du peuple. Et sans le peuple, ils ne seraient plus rien, malgré leurs milliards. Alors, tout deviendrait possible. Le camp national, après avoir repris l’initiative, grâce au Civisme, après avoir usé l’ennemi et conquis le peuple, pourrait passer à l’offensive et vaincre à coup sûr.
Mais aujourd’hui, la configuration est inverse. Nous sommes dans un Monopoly grandeur nature. Personne n’envisage sérieusement de jouer à autre chose. Les capitalistes ont le vent dans le dos ; ils n’ont qu’à se laisser porter par Largent où Largent nous mène : à la destruction. Le camp national — qui n’est ni vraiment un camp, puisqu’il est divisé, ni vraiment national, puisqu’il est composé de capitalistes qui s’ignorent — joue sur le terrain de l’ennemi, avec les cartes distribuées par lui. Chacune de ses composantes potentielles déplore les conséquences d’un système monétaire dont elle accepte la cause première et les lois intrinsèques. Les patriotes ne se battent pas ; ils protestent, ils gesticulent, ils s’enlisent dans leurs incohérences idéologiques générales et particulières, ils se noient dans leurs contradictions, ils étalent leur impuissance, ils tendent le bâton pour se faire battre ; ils résistent dans la maison d’un autre ; ils se barricadent dans leur cellule comme si cela pouvait aider à franchir les murs de la prison. Loin de remettre en question leurs lignes respectives, qui les ont menés de défaite en défaite, ils s’entêtent à tenir le même discours, à proposer pour demain la même chose qu’hier. Mais « on n’attrape pas les mouches avec du vinaigre ». Des idées en partie légitimes mais limitées, qui, de ce fait, n’ont jamais séduit massivement le peuple, ne le séduiront jamais. Pour l’emporter, il faut du neuf et du fulgurant.
« Ceux qui sont experts dans l’art militaire font venir l’ennemi sur le champ de bataille et ne s’y laisse pas emmener par lui. » (Sun Tzu, L’art de la guerre, VI. 2)
Voilà ! Tout est dit.
CONCLUSION
Face à l’anéantissement en cours de leur patrie, les patriotes n’ont pas le droit de baisser les bras. Mais, pour sauver la France, ils auront besoin de bien plus que des incantations. Ils devront faire mieux, beaucoup mieux, que ce qu’ils ont fait jusqu’à présent. Et ils le peuvent. Ils disposent maintenant d’une théorie qui corrige les erreurs des uns et des autres, comble leurs lacunes et surarme leurs bonnes intuitions. Il leur fallait pour le XXIe siècle un projet et une idéologie du XXIe siècle, un projet irréprochable sur le plan des Principes et réaliste d’un point de vue pratique ; ils l’ont. Ils avaient besoin d’un point de ralliement pour concentrer leurs forces ; ils l’ont. Ils espéraient un prodige ; il se nomme « Civisme ».
La Révolution à faire est précisément celle à laquelle on n’a pas encore pensé, sans quoi elle serait déjà faite. Les patriotes ont toujours regardé le capitalisme comme l’ennemi. Chacun le voyait comme une hydre à mille têtes et, ne pouvant faire face à toutes, focalisaient sur telle ou telle. D’où les divisions et l’impuissance. Le Civisme, lui, enseigne que le capitalisme n’est point une hydre, mais une pieuvre ; que s’il a des milliers de tentacules, il n’a qu’une seule tête : Largent. Et c’est à la tête qu’il propose de frapper, en indiquant comment.
Dénoncer Largent sérieusement conduit fatalement à vouloir sortir du système monétaire… Et sortir du système monétaire n'a aucun sens s'il s'agit de reproduire l'inégalité. Il n'y a donc qu'une alternative à Largent : l'Égalité, l'égalité des citoyens en devoirs et en droits, dont celui d’accéder librement au marché, droit qui ne passerait plus alors par la monnaie puisqu’il serait conféré directement par la citoyenneté. Quiconque ne parvient pas à cette conclusion préalable pense en capitaliste ; il ne peut rien contre le capitalisme qu’il dénonce et fera tout contre la révolution qu’il appelle de ses vœux.
Bien sûr que cette idée de s’attaquer à Largent et au système monétaire est sidérante ! Mais notre monde ne tourne-t-il pas autour de Largent ? Comment le changer sans remettre en cause son moteur ? Il ne peut pas y avoir de révolution sans révolution. La véritable utopie n’est pas de s’attaquer à Largent pour changer le "monde", mais de croire que l’on peut changer le "monde" sans s’attaquer à Largent.
C’est dans cette utopie que les hommes se complaisent tout en se lamentant. Largent les entraîne manifestement à leur perte, mais ils s’obstinent à regarder ailleurs. Les uns veulent plus de social, les autres plus de national ; tous feignent d’ignorer que le système monétaire est intrinsèquement inégalitaire et individualiste, donc antisocial et antinational... mais aussi antidémocratique et faussement libéral. En fait, Largent contrarie toutes leurs aspirations légitimes, parce qu’il a sa logique, et eux la leur, combinée à la sienne, prépondérante. Ils ne peuvent pas penser et agir au-delà de ce qu’il permet ; ils sont condamnés à courber l’échine ou à se briser les ailes.
Tous tendent au bien commun mais aucun ne voit que Largent leur barre la route, quelle qu’elle soit. Ils conçoivent l’unité dans le « chacun pour soi », et la communauté sans Égalité ! Les « nationalistes » doivent aller vers l’Égalité pour avoir enfin un discours national et anticapitaliste cohérent ; les « gauchistes » doivent aller vers la nation pour avoir enfin un discours social et anticapitaliste cohérent. Les uns doivent regarder leurs concitoyens comme leurs égaux ; les autres doivent arrêter de voir les étrangers comme leur priorité ; tous doivent comprendre que l’on ne peut faire échec au capitalisme qu’en anéantissant Largent, et que l’on ne peut anéantir ce dernier qu’au nom de l’Égalité bien comprise, c’est-à-dire de l’Égalité et de la Patrie. Il n’y a pas de milieu.
Social et le National, Égalité et Patrie, vont de pair. Négliger l’un ou l’autre, l’une ou l’autre, ce n’est pas marcher sur une seule jambe : c’est n’avoir qu’une jambe de bois. Réussir à combiner les deux, les quatre, est la condition pour bousculer les clivages, apporter un souffle nouveau et soulever l’enthousiasme. C’est la voie du Civisme. Si cette doctrine est incapable de réunir les Français, alors rien ne le peut, la France est perdue et eux avec.
Il y a urgence. L’union des patriotes est désormais une question de vie ou de mort. Je le dis donc avec franchise : tous ceux qui ne se rallient pas au Civisme, qui rechignent à anéantir Largent au nom de l’Égalité et de la Patrie, sont des idiots utiles du capitalisme, de faux amis du peuple et, pour le moins, des traîtres à la nation par lâcheté intellectuelle.
Ceux qui épargnent Largent périront par Largent.
Largent est un Tyran !
L’Égalité ou la Mort !
Vive la Révolution !
Vive la France !
Philippe Landeux
18 mai 2017
16:43 Écrit par Philippe Landeux dans 6. MON BLOG | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer |